(New York, le 19 mars 2012) – Le Sénat des États-Unis devrait proroger la Loi contre les violences faites aux femmes (Violence against Women Act, VAWA) lorsqu'il votera sur ce texte vers la fin du mois de mars 2012, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Cette loi est le principal instrument législatif fédéral garantissant une protection et des services juridiques contre les violences familiales et sexuelles et contre le harcèlement par filature. Sa reconduction permettra de maintenir en état de fonctionnement d'importants programmes sociaux et d'améliorer la protection juridique contre ces violences, a ajouté Human Rights Watch.
« La Loi contre les violences faites aux femmes n'est pas seulement une loi parmi d'autres », a déclaré Meghan Rhoad, chercheuse sur les droits des femmes à Human Rights Watch. « Il s'agit de l'engagement que les parlementaires américains ont pris en 1994 vis-à-vis des femmes de se tenir à leurs côtés pour faire face aux violences sexuelles et familiales qui, dans ce pays, atteignent des niveaux incroyablement élevés. »
Selon des statistiques établies en décembre 2011 par le Centre américain de contrôle et de prévention des maladies (Centers for Disease Control and Prevention, CDC), une femme sur quatre aux États-Unis a été victime de graves violences physiques de la part d'un proche au cours de sa vie, et près d'une sur cinq a été violée. Le CDC a constaté qu'aux États-Unis, à chaque minute, 24 personnes en moyenne étaient victimes de viol, de violence physique ou de harcèlement par filature, de la part d'un proche.
La proposition de loi bipartite visant à reconduire la VAWA (S. 1925) a été déposée par les sénateurs Patrick Leahy, Démocrate du Vermont, et Mike Crapo, Républicain de l'Idaho. Cette proposition a en outre 57 co-parrains. Le Congrès a prorogé la VAWA à deux reprises depuis sa première adoption en 1994.
La VAWA permet de financer des services sociaux tels que des centres de crise pour victimes de viol, des logements temporaires pour femmes ayant subi des violences familiales, et des programmes destinés à lutter contre la violence à l'encontre des personnes handicapées. Alors que les états sont de plus en plus contraints aux restrictions budgétaires, ces financements sont particulièrement essentiels pour la survie de ces programmes, a souligné Human Rights Watch.
L'un des objectifs centraux de cette loi consiste à assurer que les auteurs de violences sexuelles et familiales rendent des comptes dans le cadre du système de justice pénale. La loi prévoit la poursuite du financement de programmes visant à résoudre le problème de l'accumulation des retards dans l'analyse de centaines de milliers de trousses médicolégales, qui contiennent des indices prélevés sur les victimes de violences sexuelles. Selon des études effectuées à l'échelle nationales, les affaires dans lesquelles les trousses médicolégales ont été analysées sont plus susceptibles de progresser au sein du système judiciaire et d'aboutir à des arrestations.
La proposition de loi permettrait également de combler de graves lacunes dans les efforts pour empêcher et répondre aux violences commises contre des femmes immigrées, a indiqué Human Rights Watch. Elle renforcerait le statut des détentrices de visas de type U, visas temporaires autorisant un immigrant victime d'un grave crime à rester aux États-Unis afin d'aider les représentants de la loi à enquêter et à traduire les auteurs en justice. Un maximum de 10.000 visas U seulement peut être accordé chaque année, mais la nouvelle proposition de loi permettrait de récupérer jusqu'à 5.000 visas non utilisés sur les quotas des années précédentes et de les ajouter au quota de chaque année. En outre, le harcèlement d'une femme par la suiveillance et la filature serait ajouté à la liste des graves crimes couverts par le visa U.
« Trop souvent, les auteurs de violences ont joué de la menace d'expulsion pesant sur les femmes immigrées pour les décourager de porter plainte », a déclaré Meghan Rhoad. « Le visa U indique aux femmes qu'elles peuvent sortir de l'anonymat et demander l'aide des autorités, quel que soit leur statut en matière d'immigration, et que le gouvernement ne permettra pas que la loi sur l'immigration serve les intérêts des agresseurs. »
La proposition de loi exigerait d'autre part que le Département de la sécurité du territoire (Homeland Security) adopte des règles pour empêcher que des abus sexuels soit commis dans les centres de détention pour immigrants. Bien que l'intention du Congrès d'inclure ces centres de détention dans les établissements couverts par la Loi sur la lutte contre le viol en milieu carcéral (Prison Rape Elimination Act) était claire, les règlementations qui sont actuellement à l'étude exemptent les centres de détention pour immigrants de toute responsabilité aux termes de cette Loi.
Près de 200 allégations de violences sexuelles dans des centres de détention pour immigrants ont été faites entre 2007 et mi-2011, selon des documents gouvernementaux obtenus par l'American Civil Liberties Union. Il est quasiment certain que le nombre des cas déclarés est loin de refléter la réalité et la dimension du problème, a affirmé Human Rights Watch.
Les victimes de violences en détention sont confrontés à une série d'obstacles et d'éléments de nature à les décourager d'en parler, estime Human Rights Watch. Cela inclut un manque d'information sur les règles de conduite du personnel, la peur de dénoncer une autorité qui est la même que celle qui cherche à obtenir leur expulsion et le traumatisme causé aux victimes par les violences subies en détention et peut-être aussi par celles qu'elles ont endurées précédemment dans leur pays d'origine.
« D’importants progrès ont été réalisés grâce à la Loi contre les violences faites aux femmes », a conclu Meghan Rhoad. « Il reste toutefois encore beaucoup à faire pour remplir la promesse de réduire les violences sexuelles et familiales. »