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Côte d’Ivoire : Les dirigeants des deux camps devraient empêcher leurs forces de commettre des exactions

Les affrontements dans l’ouest du pays suscitent de profondes préoccupations quant à la sécurité de la population civile

(Dakar, le 24 février 2011) - Les dirigeants des deux camps engagés dans la crise politique qui s'aggrave en Côte d'Ivoire devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher leurs forces de commettre des exactions, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Le 24 février, les forces armées et les milices fidèles au président sortant Laurent Gbagbo se sont opposées aux Forces Nouvelles dans l'ouest du pays, région particulièrement instable. Les Forces Nouvelles soutiennent Alassane Ouattara, rival de Gbagbo à la présidence, dont la grande majorité des observateurs internationaux ont certifié qu'il avait remporté de façon crédible l'élection présidentielle de novembre 2010. Ces nouveaux affrontements ont accru les préoccupations relatives à la protection des populations civiles, a indiqué Human Rights Watch.

« La Côte d'Ivoire s'est déjà trouvée dans cette situation, marquée par de graves atteintes aux droits humains et par des crimes de guerre », a rappelé Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. « Laurent Gbagbo tout comme Alassane Ouattara doivent adresser des avertissements clairs à leurs troupes pour protéger les civils et les prisonniers contre toute attaque. »

Les nouveaux affrontements se sont produits aux alentours de villages situés dans une zone de forêts denses entre les villes de Bin-Houyé et de Danané à la frontière avec le Libéria, et des sources dignes de foi appartenant aux deux camps ont indiqué s'attendre à d'autres combats dans cette région dans les prochains jours. Plusieurs de ces personnes ont fait part de leur crainte d'un retour imminent au conflit armé civil qui a ravagé la Côte d'Ivoire en 2002 et 2003.

Human Rights Watch a documenté des recrutements massifs de la part des deux camps au cours des dernières semaines dans la capitale financière du pays, Abidjan, ainsi que dans la région où les récents affrontements se sont produits. Des témoins ont indiqué que les forces de Gbagbo entraînaient des jeunes miliciens à Abidjan et à Duékoué, une ville de l'extrême ouest du pays, tandis que d'autres témoins ont fait état de mouvements de troupes des Forces Nouvelles dans l'ouest et d'une expansion de ce groupe armé dans plusieurs quartiers d'Abidjan.

Human Rights Watch a également documenté le recrutement et le déploiement de mercenaires libériens au cours des dernières semaines. Des sources dignes de foi indiquent que certains de ces mercenaires libériens combattaient aux côtés des forces de Gbagbo lors de l'affrontement du 24 février. L'éventualité d'un recours à d'anciens combattants de la guerre civile du Libéria, au cours de laquelle de nombreuses atrocités ont été commises, soulève de nouvelles préoccupations quant à la sécurité des populations civiles, a déclaré Human Rights Watch.

Des affrontements ont aussi éclaté ces derniers jours dans le quartier d'Abobo, à Abidjan, avec des combats intenses entre les forces de Gbagbo et celles du Mouvement pour la libération des populations d'Abobo-Anyama (MLP-2A), qui serait lié aux Forces Nouvelles. Au moins 17 personnes auraient été tuées depuis le 21 février, mais des sources issues des deux camps indiquent que le bilan pourrait être beaucoup plus lourd. De nombreux habitants d'Abobo, en particulier du quartier dénommé « PK-18 », fuient actuellement cette zone par crainte de nouveaux affrontements. 

Durant la guerre civile et la période qui a suivi, Human Rights Watch, les Nations Unies et d'autres organisations ont documenté de graves violations du droit humanitaire international commises par des forces de sécurité et des milices fidèles à Gbagbo ainsi que par les Forces Nouvelles. Ces violations comprenaient des exécutions sommaires, des actes de torture, des attaques contre l'ONU et le recrutement d'enfants soldats. Il n'y a eu pratiquement aucune obligation pour les auteurs de ces crimes de rendre compte de leurs actes.

Dans l'éventualité d'un conflit armé, les deux camps ont l'obligation de respecter le droit humanitaire international, ou les lois de la guerre. Celles-ci interdisent les attaques délibérées ou indiscriminées contre les civils et les biens civils ; exigent le traitement humain de tous les prisonniers, les blessés et les civils détenus ; et obligent toutes les parties à faciliter l'accès à l'aide humanitaire. Les individus qui commettent délibérément ou par négligence de graves violations des lois de la guerre sont responsables de crimes de guerre.

« La population civile supporte depuis trop longtemps le fardeau du conflit armé en Côte d'Ivoire », a conclu Daniel Bekele. « Les commandants des deux camps doivent veiller à ce que leurs combattants cessent de commettre des exactions, faute de quoi ils encourent des poursuites judiciaires pour crimes de guerre. »

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