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Sahara occidental : Un dissident « libéré » maintenu en isolement quasi-total

Le Front Polisario devrait autoriser Mostapha Selma Sidi Mouloud à contacter librement sa famille

(New York, le 3 novembre 2010) - Le Front Polisario, mouvement pour l'indépendance du Sahara occidental, devrait autoriser un homme qu'il a placé en détention au mois de septembre à voir sa famille sans délai, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Le Polisario a emprisonné Mostapha Selma Sidi Mouloud  le 21 septembre 2010, l'accusant de « trahison » et d' « espionnage » pour le compte de l' « ennemi » [le Maroc], suite à sa déclaration publique de soutien à la proposition du Maroc pour résoudre le conflit au Sahara occidental.

Bien que le Polisario ait annoncé la libération de Selma le 6 octobre, il reste détenu à Mehriz, un avant-poste isolé situé dans la zone du Sahara occidental contrôlée par le Polisario. Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) s'active dans le même temps à organiser son transfert vers un pays de son choix. Si le Polisario a facilité les contacts téléphoniques entre le HCR et Selma, il n'en a pas fait autant pour sa famille.

« Le Front Polisario affirme coopérer pleinement avec le HCR pour régler la situation de Selma », a commenté Sarah Leah Whitson, Directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord chez Human Rights Watch. « Mais ce sont des représentants du Polisario qui ont placé Selma en détention il y a six semaines  dans un avant-poste isolé en plein désert, apparemment à cause de ses opinions politiques, et ils doivent à présent l'autoriser à contacter sa famille.»

Selma vivait avec sa femme et ses cinq enfants à « Camp el-Ayoun », l'un des camps de réfugiés sahraouis situés près de Tindouf et gérés par le Polisario. Il travaillait comme officier de police et n'avait semble-t-il aucun passé politique connu au sein des camps de réfugiés. Le 9 août dernier, il a pourtant donné une conférence de presse à Smara, au Sahara occidental sous contrôle marocain, pour soutenir le projet d'autonomie comme une troisième option viable entre l'indépendance et la totale intégration au Maroc. Le Polisario l'a arrêté dès son retour sur le territoire contrôlé par le Front.


Les proches de Selma - ceux qui vivent dans les camps de réfugiés de Tindouf comme ceux qui résident au Sahara occidental sous contrôle marocain - ont confirmé lors de conversations téléphoniques avec Human Rights Watch (la plus récente date d'aujourd'hui), qu'il n'a eu aucun contact avec sa famille depuis son arrestation, et qu'ils désirent le voir.

À Mehriz, seuls fonctionnent les téléphones satellites. Le Polisario en a fournit un à Selma quand le HCR a voulu s'entretenir avec lui.

Le Polisario, qui administre les camps de réfugiés sahraouis en Algérie avec le soutien du gouvernement algérien, réclame un référendum populaire pour déterminer l'avenir politique du Sahara occidental, en incluant l'indépendance comme une option possible. Un plan soutenu par les Nations Unies pour organiser un référendum a été mis en route conjointement avec un cessez-le-feu entre le Polisario et le Maroc en 1991, mais s'est retrouvé bloqué face à l'opposition du Maroc, qui rejette l'option de l'indépendance pour le Sahara occidental.

Le Maroc administre de facto environ 80 pour cent du Sahara occidental comme s'il faisait partie de son propre territoire, depuis qu'il en a pris le contrôle quand l'Espagne, l'ancienne puissance coloniale, s'est retirée en 1975. La communauté internationale ne reconnaît pas cette annexion par le Maroc. La part restante du territoire est contrôlée par le Polisario, comme partie intégrante de la République arabe sahraoui démocratique autoproclamée, qui est reconnue par des dizaines de pays. 


Dans les camps de réfugiés sahraouis en Algérie, le soutien au projet d'autonomie proposé par le Maroc est rarement exprimé en public. Le Front Polisario et ses partisans considèrent le Maroc comme une force d'occupation sur leur sol natal, et sa proposition d'autonomie comme un refus du droit des Sahraouis à l'autodétermination.

En annonçant la libération de Selma, le Polisario a demandé au HCR de prendre en charge l'organisation du départ de celui-ci. Le HCR, qui a des équipes basées au Sahara occidental sous contrôle marocain ainsi que dans les camps de réfugiés de Tindouf, n'est en revanche pas représenté dans la zone du Sahara occidental contrôlée par le Polisario, dont fait partie Mehriz.

Le HCR s'est mis en contact avec le Polisario et avec les gouvernements de pays voisins et d'autres États concernés pour discuter avec Selma des choix qui s'offrent à lui et de ses préférences, et pour organiser son transfert vers un lieu sûr de son choix. 

Le HCR a déclaré à Human Rights Watch que ses équipes ont rencontré à plusieurs reprises la famille de Selma dans les camps de réfugiés, et ont téléphoné à Selma lui-même, la conversation la plus récente remontant au 1er novembre. Le HCR a affirmé sa certitude que d'après les conversations, il s'agissait bien de Selma à l'autre bout du fil.

« Bien que Mostapha Selma ne soit plus officiellement un prisonnier du Polisario, il n'y a aucun observateur extérieur sur place qui puisse s'assurer qu'il est traité humainement », a conclu Sarah Leah Whitson. «  Le Polisario, qui porte la responsabilité du bien-être de Selma, devrait commencer par lui permettre de communiquer librement avec sa famille. »

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