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Soudan : menaces sur la presse

Le harcèlement contre les media met à mal la mise en application de l’accord de paix

(New York)- Le gouvernement soudanais multiplie les efforts pour museler et intimider la presse indépendante soudanaise, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch.

« Alors que l’attention des media internationaux s’est concentrée sur le Darfour, les autorités soudanaises à Khartoum ont intensifié le harcèlement à l’encontre des journalistes et des journaux soudanais, » a déclaré Peter Takirambudde, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. « Le harcèlement est symptomatique de la peur de Khartoum de voir s’accroître le mécontentement populaire et la frustration vis-à-vis des politiques et actions du gouvernement. »

Au cours des derniers mois, les forces de sécurité du gouvernement ont pris part à de nombreux actes de censure, d’arrestations de journalistes et d’inspections arbitraires des bureaux des journaux et des imprimeries.

Depuis le début de l’année 2006, au moins 15 journalistes soudanais et étrangers ont été arrêtés et détenus. Depuis septembre, les forces de sécurité ont recommencé à venir inspecter les journaux avant impression pour apparemment censurer les informations sensibles. Dans certains cas, plusieurs éditions de journaux ont purement et simplement été interdites.

En septembre, les rédacteurs en chef de journaux ont été avertis qu’ils ne devaient pas couvrir les violentes actions de la police contre les manifestations antigouvernementales. Ces manifestations se sont déroulées à Khartoum le 30 août et le 6 septembre, suite à l’annonce de la hausse des prix du carburant, du sucre et d’autres biens de première nécessité.

Le gouvernement a également interdit tout reportage ou commentaire sur le cas de Mohamed Taha Mohamed Ahmed ; le rédacteur en chef du journal islamiste al-Wifaq dont le corps décapité a été retrouvé le 6 septembre, le lendemain de son enlèvement par un groupe d’hommes armés, chez lui à Khartoum.

De plus, les services de sécurité soudanais ont fréquemment restreint la couverture donnée par les media internationaux et soudanais du conflit et de la crise humanitaire au Darfour. Même lorsqu’ils ont obtenu des visas pour le Soudan, les media internationaux sont confrontés à des restrictions de plus en plus nombreuses sur leurs voyages au Darfour et leur capacité à se déplacer librement pour interroger des personnes dans la région.

« La stratégie du gouvernement consistant à intimider les journalistes à Khartoum a eu certains effets, » a ajouté Peter Takirambudde. « Les media soudanais, en particulier les journaux arabes, suivent la ligne du gouvernement sur les questions clefs comme celle du Darfour. Et les violations des droits humains perpétrées par les forces de sécurité dans la région sont passées sous silence. »

La dernière répression contre la liberté d’expression au Soudan intervient moins de deux ans après la signature de l’Accord de paix global (CPA) en janvier 2005. Cet accord a mis fin à 21 ans de guerre civile dans le Sud Soudan et aconduit à la formation, l’année dernière, d’un gouvernement d’unité nationale. Le CPA a également conduit à la levée de l’état d’urgence en vigueur depuis longtemps, sauf au Darfour et jusqu’à récemment, dans l’Est du Soudan. La Constitution nationale intérimaire établie en 2005 autorise la liberté de la presse et garantit aux citoyens le droit à la liberté d’expression conformément à l’Article 39.

« Le CPA est censé conduire aux élections en 2008 dans tout le Soudan, » a précisé Peter Takirambudde. « Les élections sont une étape cruciale vers une paix durable pour tout le Soudan. Mais les limitations actuelles à la liberté d’expression et le harcèlement dont sont victimes les journalistes montrent le chemin qui reste à parcourir pour créer un environnement politique propice à la tenue d’élections libres et équitables. »

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