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A la lumière des consultations imminentes sur le renouvellement des sanctions du Libéria, Human Right Watch écrit pour informer les membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies des liens entre la détérioration de la situation des droits humains dans la sous-région de l’Afrique Occidentale et le conflit au Liberia. Human Rights Watch a documenté la situation des droits humains dans la sous région pendant dix ans et a récemment conclu une vaste enquête sur les abus commis par toutes les parties impliquées dans le conflit en Côte d’Ivoire.

Le Liberia continue d’être une source d’instabilité pour ses voisins, mais le centre s’est déplacé de sa connexion avec le Front Révolutionnaire Uni (FRU) au Sierra Léone, qui était la source du régime original des sanctions. Human Rights Watch exhorte les membres du Conseil de Sécurité à traiter du problème du Liberia à partir d’une perspective régionale, reconnaissant les dynamiques changées dans la région et le rôle joué par les différents acteurs régionaux en supportant les groupes d’insurrection qui ont commis de graves abus des droits humains d’un bout à l’autre du territoire.

Pendant les derniers mois passés, le Liberia est revenu à un total conflit armé. Le principal groupe rebelle, les Libériens Unis pour la Réconciliation et la Démocratie (LURD), opère depuis ses bases du comté de Lofa au Liberia et depuis la Guinée, où il a le soutien de ce gouvernement. Il a fait d’importantes avancées militaires, lançant des attaques à moins de dix kilomètres de Monrovia. Un deuxième groupe rebelle appelé le Mouvement pour la Démocratie au Liberia (MODEL), qui s’est récemment séparé du LURD et reçoit le soutien du gouvernement ivoirien, a aussi fait des avancées territoriales et s’est emparé de Greenville en avril dernier. Il a été estimé que plus de 60 % du territoire libérien est actuellement entre les mains des deux mouvements rebelles. Aussi bien le gouvernement du Liberia que les forces rebelles libériennes sont responsables de violations du droit international humanitaire équivalant à des crimes de guerre et d’autres graves abus de droits humains. Des dizaines de milliers de libériens ont été déplacés de force et des centaines si ce n’est des milliers de civils ont été tués, soit délibérément soit lors de feux croisés. De récents abus de droits humains commis par les deux parties incluent le recrutement forcé des enfants dans des camps de déplacés ou de réfugiés, le travail forcé, des agressions, et des violences sexuelles contre des civils, ainsi que des attaques sur les travailleurs humanitaires. Le flux des armes dans une brèche de l’embargo des Nations Unies contribue à de tels abus.

La reprise du conflit armé au Liberia a miné les perspectives pour une paix durable au Mano River Union. Alors que les efforts se poursuivent pour renforcer la paix en Sierra Léone, des centaines d’anciens soldats de la guerre civile sierra léonaise, aussi bien d’anciens rebelles que combattants du gouvernement, ont franchi la frontière pour le Liberia afin de se battre comme mercenaires pour le gouvernement libérien ou pour le LURD. Plusieurs anciens du RUF, qui ont reçu un soutien direct de Charles Taylor pendant des années, ont été intégrés dans les forces du gouvernement libérien et ont été impliqués dans des atrocités contre des civils libériens. Les combattants sierra léonais ont été recrutés comme mercenaires et des groupes armés ont rendu instables les frontières du Libéria avec la Sierra Léone, la Guinée et la Côte d’Ivoire.

Le gouvernement guinéen continue de jouer un rôle déstabilisateur en fournissant un soutien logistique et militaire aux rebelles du LURD qui opèrent depuis le territoire guinéen. Il a aussi autorisé le LURD à utiliser des camps de réfugiés au Guinée comme base de recrutement.

De récents évènements en Côte d’Ivoire occidentale démontrent l’orientation dangereuse vers une déstabilisation régionale. Depuis décembre 2002, la Côte d’Ivoire est devenue une zone de non droit où aussi bien le gouvernement de la Côte d’Ivoire que les groupes rebelles ont pris part au recrutement de combattants libériens. Comme décrit dans notre précédente communication du 14 avril 2003 sur le sujet, les combattants libériens et ivoiriens sont responsables de graves abus de droits humains contre des civils. Il y a un nombre de tendances alarmantes :

 L’augmentation du franchissement des frontières, le caractère ethnique du conflit dans l’Ouest, qui fournit des tensions entre la communauté ivoirienneYacouba et la communauté Guere, les deux étant liées aux groupes ethniques libériens impliqués dans le conflit libérien. Ces tensions ont été exacerbées par le recrutement de combattants libériens.

 Le recrutement d’enfants soldats dans la population ivoirienne et parmi les réfugiés libériens en Côte d’Ivoire et en Guinée.

 La présence de milices civiles agissant à côté ou avec la collaboration des forces de sécurité de l’Etat ivoirien dans l’Ouest, y compris dans des villes telles que Duekoué et Guiglo.

 D’importants endroits où la situation sécuritaire a empêché l’assistance humanitaire d’être distribuée aux populations civiles.

En vue pour le Conseil de Sécurité de continuer son engagement pour la protection des civils et des enfants dans les conflits armés ainsi exprimé dans de nombreuses résolutions, Human Rights Watch demande au Conseil de Sécurité de prendre toutes les mesures afin d’examiner la crise dans la région de l’Afrique occidentale en votant une nouvelle résolution avec les éléments suivants :

• Maintenir l’embargo sur les armes contre le gouvernement libérien et les groupes insurgés à la lumière de leur rôle dans la déstabilisation de la région et leur mise en danger de la population civile.

• Promouvoir des mesures pour traiter du flux incontrôlé des armes dans la sous-région et les violations continues de l’embargo, comme par le renforcement du petit moratoire sur les armes de la CEDAO, le développement d'un régime international pour l'authentification et la vérification des certificats d'utilisateur, et la poursuite des violateurs de sanctions.

• Constituer un nouveau Panel d’experts des Nations Unies avec pour mandat de documenter les flux illicites d'armes dans la sous-région, et le financement et le placement des groupes insurgés abusifs, particulièrement par des acteurs d'Etats. Le Panel devrait être chargé de faire des recommandations au Conseil de Sécurité sur des mesures pour réduire l'instabilité dans la sous-région, incluant d'autres prolongements de l'embargo sur les armes.

• Condamner les gouvernements régionaux, notamment de Guinée, de Côte d’Ivoire et du Liberia, pour leur appui aux groupes insurgés abusifs.

• Mandater le placement des observateurs militaires internationaux et des droits de l'homme le long des frontières de la Sierra Léone/Guinée, de la Guinée/Liberia, et de la Côte d’Ivoire/Liberia pour surveiller et étudier les attaques frontalières.

• Inviter toutes les parties à respecter les droits humains et le droit international humanitaire, en particulier le traitement des civils et d'autres non-combattants, et à tenir pour responsables de leurs actes les membres de leurs forces ayant commis ces abus.

Human Rights Watch est prêt à vous aider avec davantage d'information si vous en avez besoin.

Nous vous prions d’agréer l’expression de notre haute considération.

Peter Takirambudde
Directeur Exécutif, Division Afrique

Joanna Weschler
Représentante auprès des Nations Unies

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