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Dans un nouveau rapport publié aujourd'hui, Human Rights Watch affirme que la violence ciblée et les pillages pratiqués par des milices ethniques ont contraint les communautés pachtounes à se déplacer à travers le nord de l'Afghanistan. Ces mouvements de population et cette insécurité pourraient saper les bases du processus de Loya Jirga qui doit commencer au niveau du district, le 13 avril et qui conduira en juin au choix d'un nouveau gouvernement pour une période transitoire de deux ans.

"Si les Pachtounes du nord ne sont pas en mesure de participer aux réunions de district ou aux réunions régionales afin de choisir leurs représentants, alors la validité de l'ensemble du processus de Loya Jirga sera remis en question," a déclaré Peter Bouckaert, chercheur à Human Rights Watch sur les situations d'urgence. " Alors que débute le processus de Loya Jirga, la communauté internationale doit agir maintenant pour garantir la sécurité des Pachtounes du nord et des autres minorités locales à travers tout l'Afghanistan."

Le rapport de 56 pages, Le prix des crimes commis par les Talibans : abus contre les Pachtounes dans le nord de l'Afghanistan (Paying for the Taliban's Crimes: Abuses Against Ethnic Pashtuns in Northern Afghanistan) apporte des informations sur des cas d'exécutions sommaires, de passages à tabac, de violence sexuelle, d'enlèvements et de pillages commis depuis novembre 2001 lorsque les forces non pachtounes de l'Alliance du Nord ont repris le pouvoir, dans le nord. Les faits contenus dans le rapport, rassemblés à l'issue de quatre semaines d'entretiens avec des villageois, des chefs communautaires et des observateurs internationaux dans le nord de l'Afghanistan évoquent notamment les événements suivants :
Des tireurs hazaras ont tué 37 hommes pachtounes dans le village de Bargah-e Afghani, dans le district de Chimtal, situé dans la province de Balkh, début décembre après les avoir pour la plupart, ligotés, battus devant leurs familles et avoir exigé d'eux de l'argent afin d'épargner leurs vies.
Deux hommes pachtounes arrêtés par des soldats ouzbeks au bourg d'Aibak, dans la province de Samangan, fin décembre ont été retenus pendant une semaine dans un sous-sol et battus au moyen de câbles jusqu'à ce qu'ils acceptent de payer de l'argent et
Un fermier pachtoune dans le district de Nahrin, situé dans la province de Baghlan a été battu pendant une demi-heure le 20 février, en présence d'un commandant tadjik qui exigeait de lui de l'argent. Sa femme, qui avait tenté de s'interposer, a reçu de violents coups de pied.
En dépit des barrières culturelles qui empêchent de rapporter les cas de violence sexuelle en Afghanistan, Human Rights Watch a pu rassembler les récits de plusieurs personnes ayant survécu à des viols ainsi que ceux de témoins de tels actes. Dans un cas survenu dans la ville de Balkh, fin décembre, une femme pachtoune a raconté comment elle et sa fille de quatorze ans avaient subi un viol collectif perpétré par des soldats hazaras.

Les trois principales factions armées du nord - Junbish-i Milli-yi Islami, majoritairement ouzbek, Jamiat-e Islami, majoritairement tadjik et Hizb-i Wahdat, hazara - sont impliquées dans des actes de violence contre des Pachtounes. Des villageois armés issus de communautés non pachtounes ont également pillé et attaqué des Pachtounes en toute impunité, dans des zones sous contrôle de l'une ou l'autre de ces parties.

Les attaques sont menées en partie en représailles pour un soi-disant appui des Pachtounes locaux aux Talibans, dans le nord de l'Afghanistan. Les Talibans étaient dominés par des Pachtounes de Kandahar et d'autres provinces du sud et leurs forces ont été impliquées dans des massacres, des destructions de maisons et d'autres graves abus perpétrés contre des communautés non pachtounes, dans le nord entre 1997 et 2001.

Une équipe de trois personnes nommée en février par Hamid Karzai, le Président du gouvernement intérimaire d'Afghanistan, pour enquêter sur les abus commis contre les Pachtounes du nord a rapporté des faits similaires à ceux décrits par Human Rights Watch. Dans son rapport, Human Rights Watch a salué la nomination de cette équipe mais a déclaré que la capacité du Président Karzai à mettre en œuvre les recommandations formulées par cette équipe était limitée. L'essentiel du pouvoir dans le nord reste aux mains de chefs de guerre régionaux et de commandants locaux, dont certains occupent des postes d'importance dans le gouvernement intérimaire et les administrations provinciales.

"Les Etats Unis et leurs partenaires au sein de la coalition contre le terrorisme ne peuvent abandonner l'Afghanistan à des parties qui continuent de commettre des atteintes aux droits humains," a déclaré Bouckaert. "Ce n'est que par la présence d'une force de sécurité internationale étendue que les citoyens afghans auront la possibilité de choisir un gouvernement responsable de ses actes et de donner aux institutions nationales une chance de se reconstruire."

Le rapport de Human Rights Watch a appelé la communauté internationale à prendre les mesures suivantes :

  • Soutenir l'élargissement du mandat de la Force Internationale d'Assistance à la Sécurité (ISAF) pour l'Afghanistan, actuellement limité à Kaboul ;
  • Soutenir la création, actuellement nécessaire, d'une armée nationale afghane diversifiée et formée aux droits humains et en exclure les commandants et les troupes responsables de crimes de guerre ou de graves violations des droits humains ;
  • Soutenir les efforts pour établir les responsabilités des abus passés et actuels commis en Afghanistan ;
  • Augmenter le financement d'actions de surveillance des droits humains, notamment à travers la Commission afghane des droits humains qui doit être établie selon les termes de l'accord de Bonn et
  • S'assurer que l'assistance humanitaire parvient aux Pachtounes du nord et aux autres minorités déplacées suite à des violences ciblant certaines ethnies en particulier.

Le rapport est disponible en anglais à l'adresse suivante : https://www.hrw.org/reports/2002/afghan2/

Les témoignages de victimes d'abus recueillis dans le rapport sont disponibles à l'adresse : https://www.hrw.org/press/2002/03/pashtuntestimony.htm

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