Skip to main content
Faire un don

Le Burkina Faso suspend de nouveau des émissions d’information télévisées

Cette suspension met en péril la liberté des médias et l’accès à l’information

Une télévision montre le signal coupé de la chaîne France 24, quelques heures après que le gouvernement militaire du Burkina Faso ait suspendu la chaîne, le 27 mars 2023. © 2023 Olympia de Maismont/AFP via Getty Images

La décision prise par l’organe de régulation des médias au Burkina Faso de suspendre les émissions de la chaîne de télévision française TV5, est une nouvelle tentative de museler les médias indépendants et l’accès à l’information dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.

Depuis qu’elles se sont emparées du pouvoir en 2022, les autorités militaires du Burkina Faso ont  suspendu des médias et ont harcelé et intimidé des journalistes, y compris en menaçant de les enrôler dans les forces armées.

Le 18 juin, Idrissa Ouédraogo, président du Conseil supérieur de la communication (CSC), a annoncé la suspension de TV5 pour six mois pour avoir diffusé la veille un entretien avec Newton Ahmed Barry, ancien président de la commission électorale burkinabè et critique de la junte militaire, sur la situation sécuritaire actuelle au Burkina Faso. Ouédraogo a accusé TV5 de « propos tendancieux frisant la désinformation » et de « minimiser les efforts consentis » par les forces de sécurité dans « l’élan de reconquête du territoire national ». La suspension de TV5 est assortie d’une amende de 50 millions de francs CFA (environ 77 000 euros).

Depuis le début de l’année, la situation en matière de sécurité au Burkina Faso s’est nettement détériorée, marquée par un regain de violences de la part des groupes islamistes armés et de multiples opérations de contre-insurrection abusives de la part des forces gouvernementales. Le 12 juin, le Groupe pour le soutien de l’islam et des musulmans (Jama’at Nusrat al-Islam wa al-Muslimeen, JNIM), affilié à al-Qaïda, a revendiqué la responsabilité d’une attaque contre une base militaire située à Mansila, dans la région du Sahel, lors de laquelle plus de 100 militaires ont été tués. Les combattants du JNIM ont également tué plusieurs civils et pillé des biens civils, selon des témoins.

En avril, le Conseil supérieur de la communication avait déjà suspendu TV5, ainsi que plusieurs autres médias, pour une durée de deux semaines, après la diffusion d’informations au sujet d’un rapport de Human Rights Watch dénonçant des crimes contre l’humanité commis par l’armée burkinabè contre des civils dans la province du Yatenga. Le Conseil avait aussi bloqué le site internet de Human Rights Watch.

Même si les gouvernements peuvent imposer des restrictions aux médias pour des raisons de sécurité nationale, le droit international en matière des droits humains prévoit que ces restrictions doivent être fondées sur la loi, être strictement nécessaires à un objectif légitime et ne pas avoir de portée excessive. Elles ne peuvent pas être utilisées pour supprimer ou retenir des informations d’intérêt public légitime.

Les autorités burkinabè devraient immédiatement changer de trajectoire en levant l’interdiction de diffuser infligée à TV5 et en mettant fin à toute autre tentative de museler des médias qui diffusent des points de vue critiques. La grave crise sécuritaire que vit le Burkina Faso ne devrait pas servir de prétexte pour restreindre le droit fondamental du peuple burkinabè de rechercher et d’accéder à des informations dans les médias indépendants. 

Your tax deductible gift can help stop human rights violations and save lives around the world.

Région/Pays