Vendredi dernier, un tribunal militaire de Beni, dans la province du Nord-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo, a condamné 12 militants du mouvement citoyen Lucha (Lutte pour le Changement) à un an de prison pour avoir participé à une manifestation pacifique en novembre dernier.
Eddy Mupika, Paluku Vihamba, Jeanpy Muhindo, Dieu-merci Kighoma, Joël Kabunga, Elysé Lwantumba, Eric Sankara, Georges Mumbere, Esaï Liko, Archimède Ependa, Dany Dimanja et Jireh Kabambi, tous âgés de 19 à 34 ans, sont détenus depuis leur arrestation le 11 novembre 2021. Leur condamnation à un an derrière les barreaux, dont cinq mois déjà purgés, pour « provocation et incitation à des manquements envers l'autorité publique » est un rappel amer de la manière dont les autorités militaires utilisent l’état de siège et les tribunaux militaires pour réprimer toute critique pacifique dans l’est du pays.
Lors de la manifestation du 11 novembre, devant la mairie de Beni, les membres de la Lucha tenaient simplement des pancartes pour mettre en avant leurs revendications : une meilleure protection des civils et la fin de l’état de siège.
La réponse de la police et de l'armée a été de briser la petite chaîne formée par les militants, en les rouant de coups de pied et de coups de crosse de fusil. Treize membres de Lucha ont été détenus à l’auditorat militaire pendant deux jours avant d'être transférés à la prison centrale de Beni. Pamela Shabani, 21 ans, a été frappée à la tête si violemment qu'elle est toujours à l'hôpital, souffrant de complications des suites de ses blessures. Bien qu'elle n'ait pas été condamnée la semaine dernière au même titre que les autres, les autorités n'ont pas abandonné les poursuites judiciaires à son encontre.
« Notre condamnation est politique », a déclaré par téléphone à Human Rights Watch l’un des militants de la Lucha emprisonnés. « [Les autorités militaires] nous confondent avec des forces négatives... même en prison, il y a des risques, notre sécurité n'est pas assurée. »
La répression militaire qui a commencé avec l'imposition de l’état de siège en mai dernier se poursuit. Le week-end dernier, un autre militant de Lucha, King Ndungo, a été arrêté et placé en détention à Goma pour ses publications critiques sur les réseaux sociaux.
Human Rights Watch a récemment documenté la régression du gouvernement congolais en matière de droits fondamentaux et libertés sous prétexte d’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri, en violation du Pacte international des Nations Unies relatif aux droits civils et politiques et de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Les partenaires internationaux du pays devraient rompre leur silence et faire publiquement pression sur le gouvernement, pour qu'il mette fin à la répression liée à l’état de siège dans l'est.