Selon l’organisation Russian LGBT Network (Réseau LGBT russe), en mai 2021, des hommes qui parlaient tchétchène ont enlevé Ibragim Selimkhanov à Moscou et l'ont ramené de force à Grozny, la capitale de la Tchétchénie. Là-bas, les autorités l'ont soumis à un interrogatoire au sujet des homosexuels vivant dans cette région. Cet épisode n’était que le dernier chapitre de la longue histoire de l’implacable répression menée par la Tchétchénie contre les minorités sexuelles et de genre.
En 2017 et puis à nouveau en 2019, les autorités tchétchènes ont orchestré des purges parfois meurtrières d'hommes perçus comme homosexuels ou bisexuels. Le documentaire primé « Welcome to Chechnya » (« Bienvenue en Tchétchénie ») décrit en détail ces vagues de purge, ainsi que les expériences de lesbiennes souvent soumises à des calvaires au sein de leurs propres familles.
En 2017, lors de la première vague de purge, des hommes homosexuels et bisexuels ont commencé à fuir la Tchétchénie où ils étaient confrontés à de graves dangers. Réfugié dans un lieu non divulgué, « Magomed » a déclaré à Human Rights Watch : « Ma vie est détruite. Je ne peux pas retourner en Tchétchénie. Et même ici, je ne suis pas en sécurité. Ils ont les bras longs et ils peuvent me retrouver, moi et les autres, n'importe où en Russie, en prenant leur temps. »
En février 2021, la police russe a arrêté deux jeunes hommes qui avaient fui la Tchétchénie, Salekh Magamadov et Ismail Isayev. Ils ont ensuite été renvoyés à Grozny, où ils ont été placés en détention. Ils attendent d’être jugés, prétendument pour avoir publié des messages antigouvernementaux sur les réseaux sociaux. En mars, les autorités tchétchènes ont arrêté et menacé des membres de leurs familles qui insistaient sur leur droit à une assistance juridique. Des experts des Nations Unies et de la Cour européenne des droits de l'homme ont aussi exigé que les hommes aient accès à des soins médicaux et à des avocats. Un avocat a finalement pu rencontrer les deux jeunes hommes au début du mois d’août, et a indiqué qu’ils auraient été torturés lors de leur détention.
Quant à Ibragim Selimkhanov, il est plus chanceux pour l’instant. Les autorités l'ont relâché et lui ont imposé une mesure d’assignation à résidence, au domicile de sa mère. Par la suite, il a réussi à fuir la Tchétchénie, pour la deuxième fois. Mais tant que Moscou continuera à tolérer, voire à nier cette campagne impitoyable anti-LGBT menée en toute impunité par la Tchétchénie, Selimkhanov et beaucoup d'autres hommes comme lui ne seront pas vraiment en sécurité.
Texte complet en anglais : en ligne ici.
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