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Toujours pas de justice pour les meurtres des experts de l’ONU en RD Congo

Trois ans plus tard, un leadership plus fort est nécessaire pour dévoiler la vérité

Zaida Catalán et Michael Sharp. © 2017 Instagram/Zaida Catalán ; John Sharp

Le 12 mars 2017, des hommes armés exécutaient sommairement deux enquêteurs des Nations Unies – Zaida Catalán, une Suédoise, et Michael Sharp, un Américain – alors qu’ils documentaient les violations des droits humains dans la région centrale des Kasaï en République démocratique du Congo. Leur interprète congolais et trois chauffeurs de motos sont toujours portés disparus. Trois ans plus tard, leurs familles, collègues et amis attendent toujours que justice soit rendue.

Le gouvernement de l’ancien président Joseph Kabila avait rapidement imputé ces meurtres à la milice Kamuina Nsapu. Mais depuis, l’amoncellement de preuves a fait apparaître la responsabilité du gouvernement, notamment grâce aux enquêtes menées par Human Rights Watch, les reportages de Radio France Internationale (RFI) et de Reuters, ainsi qu’une investigation conduite par un consortium de médias internationaux connue sous le nom de « Congo Files ».

Un procès s’est ouvert en juin 2017, et l’ONU a déployé quelques mois plus tard une équipe pour apporter assistance et conseil. Plus de 50 prévenus ont été inculpés, mais bon nombre restent introuvables, et deux d’entre eux sont décédés en détention dans des circonstances non élucidées. Au moins trois autres ont affirmé avoir été torturés par la police lors de leur arrestation et au siège de l’Agence nationale de renseignements (ANR). Quant à la procédure judiciaire, les retards ne cessent de s’accumuler, notamment en raison du manque de représentation légale des prévenus en violation de leurs droits fondamentaux.

Le rôle joué par les agents de l’État congolais dans les meurtres est capital. Des informations obtenues depuis l’ouverture du procès ont permis d’inculper un officier de l’armée et un agent de l’immigration. Par ailleurs, un suspect mort en détention était connu pour être un informateur de l’ANR. Mais à plusieurs reprises, l’auditorat militaire n’a pas suivi les pistes disponibles ni interrogé de plus hauts-gradés, notamment ceux qui, en fin de compte, pourraient porter la responsabilité d’avoir planifié et ordonné les meurtres. Les services de sécurité congolais se seraient également ingérés dans l’enquête.

L’actuel président de la RD Congo, Félix Tshisekedi, avait déclaré lors de réunions avec Human Rights Watch, avec de hauts fonctionnaires des États-Unis et d’autres, qu’il s’engageait à ce que les personnes les plus responsables des meurtres soient traduites en justice. Toujours est-il qu’il lui reste à faire preuve de la volonté politique nécessaire pour que cela devienne réalité. En effet, toute la lumière doit être faite pour que la vérité soit révélée ; les hauts fonctionnaires impliqués, anciens et actuels, ne doivent pas s’en tirer sans poursuites ; tous les prévenus doivent bénéficier du droit à être représenté par un avocat, et toute personne s’ingérant dans la procédure judiciaire, falsifiant les preuves ou maltraitant les prévenus et témoins devrait être dûment sanctionnée.

Cela est important non seulement pour la mémoire et l’héritage de Michael et Zaida – qui ont perdu la vie alors qu’ils cherchaient la vérité et la justice pour des crimes subis par d’innombrables Congolais dans la région des Kasaï et au-delà – mais aussi pour envoyer le message fort que les auteurs et commanditaires de tels crimes atroces ne resteront pas impunis.

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