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L’Eurovision en Israël : « Osez rêver » sauf si l’on est enfermé à Gaza

Les Palestiniens vivant dans la bande de Gaza aspirent pourtant aussi à la liberté et à l'égalité

Une affiche créée par l’ONG israélienne Breaking the Silence à l’occasion du concours Eurovision de la chanson montre Tel Aviv à gauche, et une barrière de séparation à droite. Le slogan du concours « Osez rêver » devient « Oser rêver de liberté » sur cette affiche. Photo prise le 12 mai 2019. © 2019 AP Photo/Sebastian Scheiner

Ces jours-ci, Israël accueille à Tel Aviv le concours Eurovision de la chanson, sous le slogan « Osez rêver » (« Dare to dream »). De nombreux Européens ont parcouru plusieurs centaines de kilomètres pour se rendre en Israël afin d’assister aux festivités. Mais en tant que résidente de Gaza, je n’ai moi-même pas le droit de faire ce voyage, alors qu’il durerait moins d’une heure en voiture.

En coordination avec l’Égypte, Israël a transformé Gaza en une prison à ciel ouvert, renfermant deux millions de Palestiniens sur une petite superficie. Depuis près de 12 ans, les autorités israéliennes ont sévèrement restreint la possibilité de traverser la frontière, essentiellement réservée à des « cas humanitaires exceptionnels ». Ceci équivaut à une interdiction généralisée de voyager qui est illégale, et ne repose sur aucune évaluation individuelle de risques sécuritaires. En 2018, le nombre de personnes autorisées à traverser le pont d’Erez pour sortir de Gaza ne représentait plus qu’environ 1 % du nombre enregistré en septembre 2000, avant l'imposition du blocus.

Malgré cette dure réalité, j'ai longtemps « osé rêver » de pouvoir voyager et de voir le monde, et même simplement de visiter Jérusalem, non loin de Gaza. L'année dernière, l'armée israélienne m'a enfin permis de quitter Gaza pour la première fois de ma vie, à  l’âge de 31 ans, afin d’assister à des réunions au siège de Human Rights Watch à New York. J'ai par la suite été autorisée à me rendre en Israël et en Cisjordanie pour la première fois. J’ai savouré chaque instant, sachant que ce serait peut-être la dernière fois.

Je sais aussi que j’ai plus de chance que la plupart des habitants de Gaza, dont 80 % dépendent d’aide humanitaire et plus de la moitié sont sans emploi.

Je souhaiterais que des spectateurs de l'Eurovision viennent aussi ici à Gaza et prennent connaissance de notre propre réalité, comme les longues et fréquentes coupures de courant, et le supplice psychologique de se sentir piégé et interdit de voyage.

En tant que Palestiniennes et Palestiniens de Gaza, nous ne sommes pas en mesure d'assister sans entrave à l'Eurovision, mais nous ne cesserons jamais d'oser rêver de liberté.

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