(New York, le 20 août 2014) – Israël devrait permettre sans délai à Human RightsWatch, à Amnesty International ainsi qu’à d’autres organisations internationales de défense des droits humains d'accéder à la bande de Gaza, afin qu’elles puissent enquêter sur les allégations de graves violations au droit international humanitaire commises par toutes les parties au conflit, ont déclaré aujourd’hui Human Rights Watch et Amnesty International.
« Les autorités israéliennes ont manifestement employé à notre égard des stratagèmes bureaucratiques pour ce qui est de l'accès à Gaza, en le faisant dépendre de critères totalement déraisonnables alors même que le décompte des morts ne cesse d'augmenter », a déclaré Anne FitzGerald, directrice de la division Recherche et réaction aux crises chez Amnesty International. « Les victimes et les autres résidents ont le droit de savoir ce qui s’est passé au cours des hostilités, ce qui impose aux autorités israéliennes de conférer à leurs actions une transparence totale et de ne pas entraver les recherches indépendantes et impartiales sur les violations présumées. »
Depuis le 8 juillet 2014, début de l'opération « Bordure protectrice » menée par l’armée israélienne dans la bande de Gaza, les autorités israéliennes ont repoussé les nombreuses démarches faites par Amnesty International et Human Rights Watch pour entrer dans ce territoire par le point de passage d'Erez, contrôlé par Israël. Les deux organisations ont également cherché à obtenir un accès de la part des autorités égyptiennes, qui ne l'ont pas accordé à ce jour.
« Si le gouvernement israélien n’a aucun doute quand il impute au Hamas la responsabilité des morts parmi la population civile de Gaza, pourquoi empêche-t-il les organisations de défense des droits humains de mener des enquêtes sur place ? », a commenté Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Les arguments présentés par l'une des parties au conflit ne peuvent constituer une preuve que des attaques ont enfreint les lois de la guerre, mais des enquêtes sur le terrain permettraient d'établir ce point. »
Depuis le 7 juillet, le Secrétariat international d'Amnesty International a adressé à trois reprises à l'administration civile israélienne (qui dépend du ministère de la Défense) une demande d'autorisation d'entrée à Gaza par le point de passage d'Erez. À chaque fois, l'administration civile a répondu qu'elle ne pouvait pas traiter cette demande et que le point de passage d'Erez était fermé. Des journalistes, des membres du personnel des Nations unies, des travailleurs humanitaires et d'autres personnes munies de permis ont pu franchir ce point de passage dans les deux sens au cours de cette période.
« Un temps précieux a déjà été perdu, et il est indispensable que les organisations de défense des droits humains puissent maintenant entrer dans la bande de Gaza pour entreprendre la tâche vitale qui consiste à vérifier les allégations de crimes de guerre », a souligné AnneFitzGerald.
Amnesty International a sollicité sur cette question l'assistance du ministère israélien des Affaires étrangères, et différents gouvernements tiers ont soulevé la question auprès de leurs homologues israéliens au nom d'Amnesty International, mais aucun de ces efforts n'a été fructueux.
Human Rights Watch a vu l'administration civile répondre de façon similaire à sa demande d'autorisation d'entrée à Gaza depuis l'escalade récente des hostilités. Les autorités israéliennes au point de passage d'Erez ont déclaré par ailleurs que Human Rights Watch ne pouvait bénéficier de permis d'entrée à Gaza car ce n'était pas une organisation enregistrée. Ces autorités ont pourtant reconnu qu'elles avaient la latitude de faire une exception. Le 17 août, Human Rights Watch a demandé qu'une telle exception soit faite dans les plus brefs délais. Avant 2006, les autorités israéliennes ont autorisé à plusieurs reprises Human Rights Watch à entrer dans Gaza, sans exiger que ce groupe se fasse enregistrer ou sollicite une exception.
Au cours des hostilités récentes, les forces armées israéliennes ont soumis la bande de Gaza à des bombardements aériens, maritimes et terrestres intensifs qui ont eu de graves conséquences sur la population civile de ce territoire. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (ONU), 1976 Palestiniens ont été tués, dont 1417 civils parmi lesquels 459 enfants et 239 femmes. Des milliers de restes explosifs de guerre sont dispersés dans toute la bande de Gaza. Les personnes déplacées se comptent par centaines de milliers. Soixante-sept Israéliens ont été tués, dont trois civils.
Les groupes armés palestiniens ont procédé sans aucune discrimination au tir de milliers de roquettes sur des agglomérations israéliennes ; ils auraient entreposé des roquettes dans des bâtiments vides à usage scolaire ; et ils semblent ne pas avoir pris toutes les précautions possibles pour empêcher les dommages causés aux civils, violant ainsi le droit international. Quelques membres du personnel d'Amnesty International et de Human Rights Watch sont présents à Gaza, mais ils n'ont pas pu vérifier un grand nombre des violations signalées parce que les autorités israéliennes ont refusé tout accès aux chercheurs.
Le gouvernement israélien devrait autoriser la vérification indépendante de toutes les allégations de crimes de guerre et d'autres violations, afin que les victimes puissent obtenir justice. Une surveillance active exercée sur le terrain par des défenseurs des droits humains peut également permettre d'éviter que de nouvelles atteintes aux droits soient commises par les différentes forces en présence. Le refus d'accorder l'accès aux organisations internationales de défense des droits humains peut faire croire à une indifférence à l'égard du droit de rechercher, de recevoir et de diffuser les informations.
Les dernières dates auxquelles les autorités israéliennes ont permis à Human Rights Watch et à Amnesty International d’entrer dans la bande de Gaza par le point de passage d'Erez remontent respectivement à 2006 et à l'été 2012.
Depuis lors, Amnesty International et Human Rights Watch ont reçu à plusieurs reprises l'injonction de se faire enregistrer auprès du ministère des Affaires étrangères d'Israël, qui n'enregistre que les diplomates et le personnel de l'ONU, ou auprès du ministère des Affaires sociales. L'enregistrement auprès du ministère des Affaires sociales est une possibilité offerte aux organisations à but humanitaire et de développement ayant des bureaux en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, mais il est pratiquement impossible pour Amnesty International et Human Rights Watch, organisations internationales de défense des droits humains, de remplir les conditions requises pour l'enregistrement.