(Tokyo, le 1er mai 2014) - La pratique répandue au Japon de placer des enfants vulnérables dans des institutions au lieu de foyers familiaux prive des milliers d’entre eux de l’opportunité de se préparer à une vie productive et indépendante au sein de la société japonaise, a déclaré Human Rights Watch dans un nouveau rapport publié aujourd'hui.
Selon les statistiques gouvernementales, plus de 39 000 enfants japonais grandissent dans divers types d'établissements répartis dans tout le pays. Parmi ces institutions « alternatives » figurent des établissements pour bébés, d’autres pour enfants, des centres thérapeutiques pour séjours courts, et d’autres foyers. Les enfants résidant dans ces établissements ont été retirés à leurs familles dans les cas où les autorités ont estimé que leurs parents n’avaient pas la capacité ou la volonté requises pour s'occuper d'eux correctement.
« Il est navrant de voir des enfants regroupés en masse dans des institutions et privés de la chance de grandir dans un cadre familial chaleureux », a déclaré Kanae Doi , directrice du bureau de Tokyo de Human Rights Watch. « Alors que d'autres pays développés cherchent à placer les enfants les plus vulnérables dans des familles d’accueil, au Japon, 90 % des enfants en situation fragilisée finissent par se retrouver dans des institutions. »
Le rapport de 119 pages, intitulé « Without Dreams: Children in Alternative Care in Japan» («Des rêves évaporés : Des enfants placés dans des institutions au Japon ») est le premier rapport détaillé de Human Rights Watch sur le Japon depuis l’inauguration de son bureau de Tokyo en avril 2009. Le rapport examine le processus de placement d’enfants dans des institutions ainsi que les difficultés et exactions constatées dans certains cas, et inclut une partie sur l'expérience des enfants devenus orphelins à la suite du tremblement de terre et du tsunami qui ont dévasté le nord du Japon en 2011.
Le rapport conclut que le gouvernement japonais devrait réformer son système de protection alternative d’enfants, qui nuit au bien-être et au développement sain des enfants et des nourrissons, et n’est pas conforme aux normes internationales relatives aux droits de l'enfant.
Human Rights Watch a interrogé plus de 200 personnes entre décembre 2011 et février 2014, dans quatre régions du Japon. Parmi ces personnes figurent 32 enfants âgés de 7 à 17 ans qui vivaient dans des institutions, 27 adultes ayant grandi dans de tels établissements, ainsi que des membres de familles d'accueil, des administrateurs d’établissements, des travailleurs sociaux, des défenseurs des droits des enfants, et des représentants du gouvernement au niveau national et régional.
Le droit international relatif aux droits humains reconnaît l'importance de milieux familiaux pour les enfants. La Convention relative aux droits de l'enfant (ang fra) stipule que pour l'enfant « pour l'épanouissement harmonieux de sa personnalité, doit grandir dans le milieu familial, dans un climat de bonheur, d'amour et de compréhension ». Selon le Comité des droits de l'enfant, qui supervise la mise en œuvre de la Convention, « l'institutionnalisation d'un enfant est une mesure de dernier recours et ne devrait se produire que lorsque des mesures de type familial sont considérées comme insuffisantes pour un enfant ». Les lignes directrices des Nations Unies pour la prise en charge alternative des enfants recommandent adoption ou la réintégration familiale dans la mesure du possible, ou des conditions d’accueil en toute sécurité dans un autre cadre familial.
Parmi les recommandations émises par Human Rights Watch figurent la modification de la loi japonaise sur la protection des enfants, en vue d’intégrer un mécanisme indépendant comme un tribunal de la famille, qui serait habilité à statuer sur les alternatives proposées aux enfants dans leurs meilleurs intérêts.
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