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Ghana : Il faut réformer d’urgence le système de soins relatif à la santé mentale

La visite d’un expert des Nations Unies a jeté la lumière sur les abus commis à l’encontre de personnes souffrant de déficiences mentales

(Nairobi, le 19 novembre 2013) – La visite récente au Ghana de l’expert des Nations Unies chargé des questions sur la torture souligne la nécessité de mettre fin aux abus perpétrés à l’encontre des personnes atteintes d'un handicap mental, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch. Le gouvernement du Ghana devrait prendre des mesures pour mettre en œuvre la loi de 2012 sur la Santé mentale avant la fin de l’année 2013.

Le rapporteur spécial sur la torture auprès de l'ONU, Juan Mendez, a fait part, à l’occasion de sa visite qui a eu lieu du 8 au 14 novembre, de sa préoccupation profonde quant à l'état du système de soins ghanéen pour la santé mentale et a demandé une réforme urgente des hôpitaux psychiatriques et des camps de prière accueillant les personnes qui souffrent de déficiences mentales.

« L’expert des Nations Unies en charge des questions sur la torture a exprimé de sérieuses inquiétudes à propos du recours au traitement par électrochocs et de l’enchaînement prolongé des personnes atteintes d’un handicap mental », a indiqué Shantha Rau Barriga, responsable de la défense des droits des personnes handicapées chez Human Rights Watch. « Il a envoyé un message clair : le gouvernement ghanéen devra mettre les moyens nécessaires en œuvre pour que cesse ce traitement inhumain et dégradant – et il devra agir rapidement en ce sens. »

Le gouvernement doit, dans un premier temps, appliquer les dispositions de la loi de 2012 sur la Santé mentale, y compris mettre en place le mécanisme de surveillance pour commencer à organiser des visites des établissements psychiatriques et des camps de prière non réglementés à travers le pays, a indiqué Human Rights Watch.

Dans certains des milliers de camps de prière privés au Ghana, des personnes atteintes d’un handicap mental -–dont certaines n’ont pas plus de 5 ans - sont enchaînées par les chevilles à des arbres dans des cours ouvertes où elles dorment, défèquent et se baignent.

Dans ce rapport remis aux Nations Unies en mars de cette année, Mendez a indiqué qu’aucun motif thérapeutique ne justifie le recours à la contrainte prolongée des personnes souffrant de déficiences et que tout recours à des moyens de contrainte, même pendant une courte période de temps, pourra s'apparenter à de la torture ou à des mauvais traitements. Il a demandé au gouvernement ghanéen de mettre en application la loi sur la Santé mentale, y compris la surveillance des camps de prière, d'ici la fin de l'année 2013.

Human Rights Watch a fait état des mauvais traitements infligés aux personnes atteintes d’un handicap mental au Ghana dans son rapport 2012 : 'Like a Death Sentence’: Abuses against Persons with Mental Disabilities in Ghana (« Comme une peine de mort » : Abus contre les personnes atteintes d’un handicap mental au Ghana). Le rapport décrit la façon dont des milliers de personnes souffrant de déficiences mentales comme le trouble bipolaire ou la schizophrénie sont contraintes de vivre dans des hôpitaux psychiatriques, souvent contre leur gré et sans qu’elles ne puissent vraiment contester leur internement.

Human Rights Watch a constaté que des centaines au moins - et des milliers sans doute - de personnes atteintes d’un handicap mental sont détenues dans des camps de prière associés aux églises pentecôtistes et évangéliques. Gérés par des prophètes autoproclamés, ces camps opèrent en dehors de tout contrôle du gouvernement. Les personnes souffrant de déficiences mentales qui vivent dans ces camps n’y reçoivent aucun traitement médical et, au lieu de cela, sont forcées de prendre des concoctions à base d’herbes ou sont privées de nourriture ou d'eau pendant des jours. Certains vivent dans les camps de prière depuis cinq ans.

Le Rapporteur spécial a également fait part de ses préoccupations quant au traitement par électrochocs dans l’hôpital psychiatrique d’Accra qui n'est pas pratiqué en dernier recours et qui est réalisé sans anesthésie et sans le consentement libre et informé du patient. Dans les hôpitaux psychiatriques du Ghana, Human Rights Watch a également constaté un manque de travailleurs formés à la santé mentale ainsi que des conditions de surpeuplement et d’insalubrité, avec des odeurs nauséabondes se dégageant de certains services ou même des excréments jonchés sur le sol à cause de systèmes d’égouts défaillants.

Le gouvernement devrait créer des services de soutien communautaires, y compris des services de logement et de soins de santé, qui puissent permettre aux personnes souffrant de déficiences mentales de vivre dans la communauté, a indiqué Human Rights Watch. Le gouvernement devrait s’assurer que les personnes ne sont pas détenues de force dans des camps de prière ou des hôpitaux psychiatriques et qu’elles ont accès aux mécanismes leur permettant de porter plainte en cas de violation de leurs droits.

« Les personnes souffrant de problèmes de santé mentale ont besoin d’un soutien communautaire, pas d’un traitement par électrochocs », a déclaré Shantha Rau Barriga. « Nous espérons que la visite du Rapporteur spécial va impulser un changement véritable en faveur de la réforme du système de santé mentale au Ghana. Des milliers de personnes comptent sur ce changement. ».

 

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