Hier, un tribunal de Paris a porté un coup terrible à la lutte contre les contrôles d’identité abusifs et discriminatoires. Dans des décisions rendues dans le cadre de treize affaires différentes dans lesquelles des citoyens français noirs et d’origine arabe prétendaient que la police avait eu recours au profilage ethnique pour les contrôler et les fouiller, un panel de trois juges a déclaré que, « non », il n’y a là rien de répréhensible.
En fait, le tribunal a indiqué que les demandeurs avaient omis de prouver la « négligence grave » de la part de la police dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions, critère que les juges ont retenu suite aux arguments du Procureur. La négligence grave est assez difficile à prouver compte tenu des pouvoirs excessivement étendus de la police pour contrôler des personnes sans qu’aucune suspicion raisonnable ne justifie l'arrestation et compte tenu également de l'absence de toute sorte d’enregistrement de l'arrestation. Le gouvernement du Président François Hollande, qui a été élu sur un programme incluant une promesse de mettre fin au profilage ethnique et aux contrôles d’identité abusifs, a brièvement caressé l'idée de mettre en place des réformes, notamment en introduisant des récépissés de contrôle, avant de battre en retraite face à l'opposition des syndicats de police.
En suivant la ligne de conduite du gouvernement, le tribunal a de fait ignoré les règles européennes et internationales qui inversent la charge de la preuve dans les affaires de discrimination une fois qu'il a été montré qu'une personne a été traitée différemment du fait de ses origines. Il ne sert à rien que la loi française exclue les pratiques policières de ses lois anti-discrimination. Les juges ont indiqué que ce n'était pas au tribunal de commenter la responsabilité de l’Etat pour des lois qui font débat.
Pensez-y quelques instants…
La justice française a omis les innombrables personnes noires et arabes que la police contrôle de façon régulière et répétée sans motif valable. Les avocats vont faire appel mais le tribunal a eu raison sur un point : les législateurs français ont encore du pain sur la planche. Cette décision scandaleuse ne peut cacher des lois et des pratiques honteuses. Le parlement devrait limiter les pouvoirs de contrôle de la police en imposant qu’une suspicion raisonnable de délit existe dans tous les cas et devrait introduire des formulaires de contrôle visant à améliorer la responsabilisation et l’efficacité de la police. Il est aussi essentiel de garantir la formation adéquate de la police et d’instaurer un véritable dialogue entre la police et la population pour passer de la culture de la suspicion à la culture de la confiance.
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