Skip to main content

Les Ivoiriens sont allés aux urnes en novembre 2010 dans l’espoir de voir enfin s’achever les graves violations des droits humains et l’impasse politico-militaire qui accablaient le pays depuis une décennie. Mais quand le président sortant, Laurent Gbagbo, a refusé d’accepter les résultats reconnus par la communauté internationale qui proclamaient vainqueur son concurrent Alassane Ouattara, la Côte d’Ivoire a sombré dans une crise de violence politique qui a duré cinq mois et pendant laquelle au moins 3 000 personnes ont été tuées et 150 femmes et filles ont été violées. Les forces fidèles à M. Gbagbo, ainsi que celles de M. Ouattara, ont perpétré des attaques contre des civils sur la base de leur appartenance politique, ethnique et religieuse. Au moment où les forces pro-Ouattara ont arrêté Laurent Gbagbo le 11 avril 2011, une grande partie de l’infrastructure du pays, dont des tribunaux et des prisons, avait été endommagée du fait des combats.

Bien que la crise postélectorale a eu un effet négatif sur la capacité du gouvernement ivoirien à mettre en œuvre les engagements pris lors de l’Examen périodique universel (EPU) du pays en 2009, certains progrès ont été accomplis au cours des deux années et demie ayant suivi l’arrivée au pouvoir du président Ouattara. Le gouvernement ivoirien a ratifié le Statut de Rome et accru le budget du pouvoir judiciaire dans un effort pour améliorer les conditions d’accès à la justice. La situation du pays en matière de sécurité s’est améliorée et bien que des membres des forces de sécurité continuent à commettre des violations des droits humains et des crimes de droit commun, ces problèmes semblent avoir diminué petit à petit, en partie grâce aux efforts du gouvernement. L’autorité de l’État a également été restaurée sur tout le territoire de la Côte d’Ivoire pour la première fois depuis 2002, et le gouvernement, avec l’aide des bailleurs de fonds, a réhabilité des tribunaux, des prisons et d’autres institutions de l’État de droit.

Toutefois, le gouvernement ivoirien a fait très peu de progrès dans le traitement des causes profondes des violences politico-militaires qui ont secoué le pays pendant une décennie – en particulier l’impunité, les conflits fonciers et la prolifération des armes légères. Alors que les autorités ivoiriennes ont soumis à des enquêtes et inculpé de nombreux partisans de Laurent Gbagbo pour leur rôle dans les violences postélectorales, l’absence totale de responsabilité pénale continue de prévaloir pour les graves crimes commis par les forces pro-Ouattara pendant la crise, ce qui perpétue la dangereuse pratique d’impunité. Cette justice à sens unique a également entravé les efforts entrepris pour parvenir à la réconciliation nationale dont le pays a grand besoin. De même, les progrès ont été modestes dans les tentatives de régler les conflits fonciers, de promouvoir le désarmement et de réformer le secteur de la sécurité, et de lutter contre la violence sexuelle. Si le gouvernement ne s’occupe pas sérieusement de ces problèmes, des violences et de graves violations des droits humains pourraient se produire de nouveau dans un proche avenir, notamment dans le contexte des élections de 2015.

I. Questions relatives aux droits humains

A. Justice et responsabilité pour les violences postélectorales
La crise postélectorale de 2010-2011 a été le paroxysme d’une décennie de conflit politico-ethnique lors de laquelle les forces de sécurité, les forces rebelles et les milices qui étaient leurs alliées ont régulièrement commis de graves crimes dans l’impunité la plus totale. Les organisations nationales et internationales, dont Human Rights Watch, ont documenté des crimes de guerre et de probables crimes contre l’humanité perpétrés par les forces pro-Gbagbo et par les forces pro-Ouattara pendant la crise. Le gouvernement ivoirien, y compris le président Ouattara, a promis à plusieurs reprises qu’une justice équitable et impartiale serait rendue pour ces crimes. Le gouvernement a fait un geste encourageant après l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara, en créant trois institutions de justice nationales afin de s’occuper de ces atrocités: une commission nationale d’enquête; une commission dialogue, vérité et réconciliation; et une cellule spéciale d’enquête. Dans un rapport d’août 2012, la commission nationale d’enquête s’est faite l’écho des constatations des organisations de défense des droits humains, documentant des centaines d’exécutions sommaires commises par les forces des deux camps – et soulignant la nécessité d’une justice impartiale.

Mais malgré les promesses du gouvernement et la création de ces institutions de justice nationales, peu de progrès ont été accomplis pour réclamer des comptes de manière équitable et impartiale pour les violations massives des droits humains qui ont été commises. Les autorités ivoiriennes ont inculpé plus de 150 responsables civils et militaires appartenant au camp Gbagbo, dont au moins 55 accusés de graves crimes de sang. Cependant, deux ans et demi après la fin de la crise, les procès n’ont toujours pas commencé. La plupart des prévenus ont passé toute cette période en détention préventive, ce qui constitue une violation de leur droit à être jugés dans des délais raisonnables. Début août 2013, les autorités ivoiriennes ont toutefois remis en liberté provisoire 14 de ces accusés pro-Gbagbo.

Mais le plus préoccupant est le fait que les autorités ivoiriennes n’ont entrepris aucune enquête crédible et aucune procédure judiciaire contre des membres des forces pro-Ouattara qui ont commis de graves crimes lors de la crise postélectorale. Aucun membre des forces pro-Ouattara n’a été inculpé de crimes commis durant la crise et les enquêtes actuellement en cours paraissent être empreintes d’une partialité préoccupante. Le Secrétaire général des Nations Unies a affirmé, dans un rapport en juillet 2013, que seulement 3 des 207 enquêtes ouvertes à la suite du rapport de la commission nationale d’enquête concernent des suspects appartenant aux forces pro-Ouattara. Une justice à sens unique compromet la réconciliation nationale et le retour à l’état de droit, les victimes appartenant au camp Gbagbo affirmant n’avoir aucun moyen d’obtenir justice.

Le 15 février 2013, la Côte d’Ivoire a ratifié le Statut de Rome qui a donné naissance à la Cour pénale internationale (CPI), accomplissant par là un geste positif dans le cadre de sa lutte contre l’impunité et mettant en œuvre une importante recommandation résultant de son EPU de 2009. La CPI a levé les scellés sur deux mandats d’arrêt à l’encontre de personnes liées à la situation en Côte d’Ivoire: l’un contre Laurent Gbagbo, qui a été transféré à La Haye par le gouvernement ivoirien en novembre 2011 et est actuellement en attente d’une décision de la Cour sur la confirmation ou non des charges contre lui pour crimes contre l’humanité; et un autre à l’encontre de Simone Gbagbo, qui demeure en détention en Côte d’Ivoire où elle est accusée par la justice ivoirienne de génocide, entre autres crimes. Les autorités ivoiriennes n’ont toujours pas répondu officiellement au mandat d’arrêt de la CPI contre Simone Gbagbo, en violation de l’obligation du gouvernement qui consiste soit à livrer Simone Gbagbo à la CPI, soit à contester officiellement la recevabilité de son cas par la CPI, au motif que la Côte d’Ivoire a déjà entamé des poursuites à son encontre pour des crimes similaires.

B. Abus commis par les forces de sécurité
Bien que la Côte d’Ivoire a accepté, lors de son EPU de 2009, plusieurs recommandations afin de faire cesser les détentions arbitraires et les exécutions sommaires, les forces de sécurité ont continué de commettre des exactions depuis la fin de la crise postélectorale, en général en toute impunité. En juillet 2012, des membres des Forces républicaines et des milices qui leur sont alliées ont participé à la destruction du camp de personnes déplacées de Nahibly, près de Duékoué, lors de laquelle des résidents du camp ont été tués ou ont fait l’objet de disparitions forcées. Puis, en réponse à une vague d’attaques contre des installations militaires en août 2012, des membres des Forces républicaines ont commis des violations des droits humains à grande échelle à l’encontre de jeunes hommes appartenant à des groupes ethniques traditionnellement pro-Gbagbo, dont des arrestations arbitraires massives, des détentions illégales, des extorsions de fonds, des traitements cruels et inhumains et, dans certains cas, des actes de torture. À ce jour, aucune poursuite judiciaire n’a été engagée pour ces crimes, même si les autorités ont pris quelques mesures préliminaires dans l’enquête sur les incidents du camp de Nahibly. Le procureur militaire a enquêté sur des membres des forces armées et les a poursuivis en justice dans d’autres affaires moins sensibles politiquement, y compris pour meurtre et vol. Même si ces poursuites sont importantes dans le cadre de la lutte contre l’impunité, elles donnent l’impression que l’absence de poursuites dans des cas plus sensibles – notamment liés à la crise postélectorale et aux incidents de Nahibly – est due à un manque de volonté politique, plutôt qu’à un manque de compétence.

Des membres des Forces républicaines ont été impliqués dans des pratiques généralisées d’extorsion de fonds et de vol à des barrages routiers, notamment dans l’ouest de la Côte d’Ivoire; le gouvernement a pris certaines mesures pour réduire ce problème en juillet 2013, démantelant des barrages non autorisés et arrêtant certains militaires qui les supervisaient. En général, les violations des droits humains commises par les forces de sécurité semblent moins sévères et moins fréquentes en 2013 qu’en 2012, tout en demeurant un problème réel.

La Côte d’Ivoire n’a toujours pas signé et ratifié le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (OP-CAT), une recommandation que de nombreux États avaient faite lors de l’EPU de 2009.

C. État de droit
En décembre 2011 et avril 2013, la Côte d’Ivoire a tenu des élections législatives et locales, respectivement, pour la première fois depuis plus de dix ans. Ces scrutins se sont déroulés à peu près sans incident, à l’exception de quelques cas de violence et d’intimidation. La restauration d’autorités législatives, régionales et municipales a contribué à redonner une certaine normalité à la gouvernance, après une phase lors de laquelle tous les pouvoirs étaient concentrés dans les mains de l’exécutif. Le Front populaire ivoirien (FPI), ancien parti de Laurent Gbagbo, a boycotté ces deux élections.

Depuis son arrivée au pouvoir en avril 2011, le gouvernement Ouattara ’a restauré des représentants de l’autorité de l’État – dont des juges, des responsables des douanes et d’autres fonctionnaires – dans tout le pays, y compris dans le Nord, qui a été contrôlé par les forces rebelles de 2002 à 2010. Le gouvernement a également fait d’importants progrès dans la rénovation de tribunaux et de prisons, dont beaucoup avaient été gravement endommagés pendant le conflit. En juin 2013, un tribunal qui était attendu depuis longtemps a ouvert ses portes à Guiglo, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, améliorant potentiellement l’accès à la justice dans l’une des régions les plus sensibles du pays.

Toutefois, la corruption et le manque d’indépendance au sein du système judiciaire demeurent une source de grave préoccupation, la justice partiale administrée pour les événements survenus lors de la crise postélectorale renforçant au sein de la population l’impression que les responsables civils et militaires proches du gouvernement sont au-dessus de la loi. Le gouvernement a également tardé à entreprendre des réformes promises qui auraient pour effet de mieux protéger les droits des accusés.

D. Droits fonciers
La terre, la politique et la violence ont été étroitement liées en Côte d’Ivoire au cours des deux dernières décennies, en particulier dans l’ouest du pays, une région instable. Pendant la crise postélectorale, les violences ont provoqué le déplacement de centaines de milliers de personnes, soit à l’étranger comme réfugiés, soit à l’intérieur de la Côte d’Ivoire. Beaucoup de ces personnes sont revenues sur leurs terres et ont constaté qu’elles en avaient été dépossédées de manière illégale, soit à la suite de ventes illicites, soit dans certains cas dans le cadre d’occupations hostiles. Il s’agit dans les deux cas de violations flagrantes de leur droit de propriété et de leurs droits en tant que réfugiés rentrés au pays. La spoliation de terres a de graves conséquences sur le droit à la nourriture et à un niveau de vie suffisant, et sont un facteur important dans la décision de nombreux réfugiés ivoiriens de rester au Libéria voisin.

Le gouvernement ivoirien n’a pas soutenu de manière adéquate les institutions locales administratives et judiciaires impliquées dans la résolution des litiges fonciers, ce qui a eu pour conséquence que de nombreuses personnes ne sont toujours pas en mesure de récupérer leurs terres plus de deux ans après la fin de la crise postélectorale. Lors de l’EPU de 2009, une des recommandations essentielles, qui avait été acceptée, était de faire rapidement connaître et appliquer la loi du pays sur le domaine foncier rural. Cela reste une nécessité urgente. L’ouest de la Côte d’Ivoire a connu certaines des pires atrocités commises dans le pays au cours de ces dix dernières années et cette région pourrait être le théâtre de nouvelles atrocités si le gouvernement n’assure pas une résolution équitable des litiges fonciers.

E. Désarmement et réforme du secteur de la sécurité
Le gouvernement ivoirien a un bilan mitigé en matière de désarmement et réintégration des anciens combattants, avec pour résultat que le pays regorge d’armes légères. En août 2012, le président Ouattara a créé l’Autorité de désarmement, démobilisation et réintégration, ce qui a permis de centraliser les efforts de désarmement qui étaient auparavant répartis, de manière inefficace, entre plusieurs ministères et agences gouvernementales. Selon les Nations Unies, le gouvernement avait, à la date de juin 2013, désarmé et démobilisé environ 6 000 anciens combattants – mais des dizaines de milliers d’autres restaient à désarmer, dont beaucoup n’étaient même pas encore recensés. Certains anciens combattants se sont livrés à des actes criminels violents à travers le pays, notamment au banditisme routier. D’autres ex- combattants, irrités par la lenteur des programmes de réintégration, ont troublé l’ordre public dans plusieurs villes en 2013. Des efforts importants seront nécessaires pour mettre fin à la prolifération d’armes légères avant les élections de 2015.

Bien que certains progrès aient été effectués dans la réforme du secteur de la sécurité depuis la fin de la crise, d’importants défis restent à relever. Plusieurs commandants militaires impliqués dans de graves violations des droits humains ont été promus à des postes clés. Le Groupe d’Experts de l’ONU, mis en place par le Conseil de sécurité pour observer l’application du régime de sanctions en Côte d’Ivoire, a révélé dans un rapport en avril 2013 que d’anciens chefs de guerre rebelles – aujourd’hui commandants dans l’armée ivoirienne – détournaient à leur profit des millions de dollars de l’économie ivoirienne en se livrant à la contrebande et en imposant un système de taxation parallèle sur le cacao, le bois et d’autres marchandises d’exportation. Une telle corruption est susceptible de saper les efforts visant à améliorer l’accès à la santé et à l’éducation, entre autres droits.

Des progrès notables ont été effectués en 2013 afin de restituer à la police et à la gendarmerie la tâche fondamentale du maintien de la sécurité, mais l’armée a conservé une présence aux barrages routiers et un rôle de premier plan dans la réaction aux menaces sécuritaires intérieures. Bien que le phénomène soit moins visible qu’en 2011 et 2012, certains commandants militaires continuent d’utiliser dans le cadre d’opérations sécuritaires des jeunes supplétifs et des miliciens qui ont combattu aux côtés des forces pro-Ouattara durant la crise, même s’ils ne sont pas membres des forces de sécurité.

F. Violences sexuelles
Lors de la crise postélectorale, des membres des forces armées des deux camps ont commis des actes ciblés de violence sexuelle contre des femmes considérées comme soutenant ’le camp adverse – perpétuant ainsi une pratique choquante qui remontait au conflit armé de 2002-2003. Bien que la commission nationale d’enquête ivoirienne ait documenté 196 cas de violence sexuelle et noté que le viol avait été utilisé comme arme de guerre, personne n’a encore fait l’objet de poursuites judiciaires pour ces crimes.

Même depuis la fin de la crise postélectorale, la violence sexuelle demeure un problème largement répandu, que bien souvent les autorités ne traitent pas efficacement. La mission de l’ONU en Côte d’Ivoire (ONUCI) a fait état d’au moins 100 cas de violence sexuelle au cours de la première moitié de 2013, dont les victimes étaient souvent des enfants. Les autorités ivoiriennes refusent souvent d’ouvrir une enquête sérieuse à moins que la victime fournisse un certificat médical confirmant qu’il y a eu viol, alors que la loi ivoirienne ne l’exige pas. Ces certificats médicaux demeurent coûteux, ce qui limite la capacité de certaines victimes de porter plainte efficacement. Le fait que le gouvernement ivoirien n’a pas réformé le code de procédure pénale a également pour conséquence que, même quand une procédure judiciaire est engagée, les autorités remplacent souvent le chef d’accusation de viol par celui d’attentat à la pudeur, qui est passible de peines beaucoup moins lourdes.

Avec l’aide de l’ONU, le gouvernement ivoirien est en train de mettre au point une stratégie nationale de lutte contre la violence sexuelle, conformément à une recommandation acceptée lors de l’EPU de 2009. Le gouvernement et l’armée ont également pris des mesures visant à réduire l’incidence des violences sexuelles par les forces de sécurité. Bien qu’il s’agisse là d’importants pas en avant, le gouvernement ivoirien doit encore corriger les insuffisances existant dans les institutions chargées du maintien de l'ordre les et dans le système judiciaire qui entravent les enquêtes et les poursuites dans les affaires de violence sexuelle. En outre, les possibilités d’accès des victimes aux services médicaux et psychosociaux restent limitées, en particulier hors d’Abidjan.

II. Recommandations

Concernant la traduction en justice au niveau national des auteurs d’exactions passées:

  • Mettre en œuvre les conclusions et les recommandations de la commission nationale d’enquête, y compris en soumettant rapidement à des enquêtes et en poursuivant en justice les membres des forces pro-Ouattara qui ont commis de graves crimes pendant la crise postélectorale.
  • S’assurer que tous les accusés bénéficient de procès équitables et rapides, y compris ceux qui ont passé plus de deux ans en détention préventive sous des chefs d’accusation liés à la crise postélectorale.

Concernant les enquêtes de la Cour pénale internationale:

  • Coopérer pleinement dans les enquêtes et les affaires traitées par la CPI en Côte d’Ivoire, notamment dans l’affaire Simone Gbagbo, conformément aux obligations qui incombent au gouvernement en vertu du Statut de Rome.

Concernant les exactions encore commises par les forces de sécurité du pays:

  • Mettre fin à l’impunité dont les forces de sécurité ont longtemps bénéficié, en ouvrant des enquêtes sérieuses sur les allégations d’abus et d’activités criminelles de leur part.
  • Signer et ratifier le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (OP-CAT) et mettre en œuvre ce Protocole en créant un organe national indépendant chargé d’effectuer des visites régulières et impromptues dans tous les lieux de détention.
  • Poursuivre les efforts visant à mettre fin aux activités d’extorsion de fonds par les forces de sécurité aux barrages routiers, y compris en installant des contingents de l’unité anti-racket dans toutes les grandes villes du pays, plutôt que de baser l’unité à Abidjan en la chargeant d’effectuer de manière occasionnelle des missions hors de cette ville.

Concernant le rétablissement de l’état de droit:

  • Assurer la totale indépendance de la justice, y compris dans le contexte d’enquêtes et de poursuites judiciaires politiquement sensibles comme celles qui sont liées à la crise postélectorale. Souligner que les procureurs et les juges ne subiront pas de conséquences négatives du fait qu’ils poursuivent des personnes proches du gouvernement.
  • Envisager d’activer le mandat du rapporteur spécial de l’ONU sur l’indépendance des juges et des avocats.
  • Créer, dans la loi et dans les faits, un mécanisme de protection des témoins, afin de mieux soutenir les victimes et les témoins dans les affaires sensibles.

Concernant le droit foncier et les conflits fonciers:

  • Faire une priorité de la résolution rapide des affaires de spoliation de terres liées à la crise postélectorale. Conformément au droit international, notamment aux lignes directrices exposées dans les Principes de Pinheiro, faire en sorte que les personnes déplacées du fait du conflit puissent revenir en toute sécurité et récupérer leurs terres et leurs habitations.
  • Consulter les populations locales dans toute la Côte d’Ivoire, à travers un processus officiel, avant de modifier davantage les lois ou de rédiger des décrets concernant la réforme du domaine foncier rural. Faire en sorte que tous les groupes politiques et ethniques, les femmes et les jeunes soient inclus dans ces consultations.
  • Entamer le processus de délimitation des terroirs villageois, en donnant la priorité aux régions du pays où les questions foncières et les conflits intercommunautaires sont étroitement liés.
  • Ratifier la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance à apporter aux personnes déplacées en Afrique et mettre la loi ivoirienne en conformité avec ses dispositions.

Concernant le désarmement et la réforme du secteur de la sécurité:

  • Renforcer les efforts pour désarmer et réintégrer les anciens combattants des deux côtés de la ligne de fracture politico-militaire du pays.
  • Mettre fin à l’utilisation de forces parallèles – y compris de milices et d’anciens combattants volontaires – dans des fonctions liées à la sécurité, notamment aux barrages routiers dans tout le pays. Faire en sorte que l’autorité principale en matière de sécurité intérieure demeure la police et la gendarmerie, plutôt que l’armée.

Concernant les violences sexuelles:

  • Mettre fin à l’impunité pour les violences sexuelles en ouvrant des enquêtes sur toutes les allégations de violence sexuelle et en poursuivant en justice les individus contre lesquels pèsent suffisamment de preuves de telles exactions, en conformité avec les normes internationales en matière de procès équitable.
  • Fournir gratuitement des certificats médicaux aux victimes de viol et réformer le code de procédure pénale afin que les auteurs de viols puissent être poursuivis avec toute la rigueur de la loi.
  • Améliorer l’assistance juridique et les services médicaux et psychosociaux à la disposition des victimes de violences sexuelles. Consulter les organisations ivoiriennes de défense des droits des femmes ainsi que divers experts afin de développer et mettre en œuvre de tels programmes dans tout le pays.

Your tax deductible gift can help stop human rights violations and save lives around the world.

Région/Pays