(Paris) - La décision du gouvernement français d'accueillir le détenu algérien Lakhdar Boumediene en France indique une avancée positive vers la fermeture de Guantanamo, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Puisque cinquante à soixante détenus ne peuvent être renvoyés dans leurs pays d'origine de crainte d'être torturés, ils devront être accueillis ailleurs pour que Guantanamo puisse fermer.
Lakhdar Boumediene serait à bord d'un avion en route vers la France et des porte-parole officiels du gouvernement français ont confirmé qu'il lui était proposé de résider en France.
« Les pays européens ont longtemps sommé les Etats-Unis de fermer Guantanamo », a indiqué Joanne Mariner, directrice du programme Terrorisme et contre-terrorisme à Human Rights Watch. « C'est extrêmement encourageant de voir la France contribuer maintenant de façon positive à la fermeture de Guantanamo en acceptant d'accueillir un détenu. »
Sur les deux-cent-quarante prisonniers environ encore détenus à Guantanamo, on estime à cinquante ou soixante, ceux qui, originaires de pays tels que l'Algérie, la Chine, la Lybie, la Tunisie et l'Ouzbékistan, ont informé leurs avocats qu'ils craignaient d'être torturés dans leur pays d'origine et ne voulaient pas y être renvoyés. Plusieurs d'entre eux ont été autorisés depuis des années à quitter Guantanamo et aucun d'eux n'est accusé de crime, mais ils restent en prison car ni les Etats-Unis ni un aucun autre pays n'ont bien voulu les accueillir.
Human Rights Watch a invité les autorités françaises à s'assurer que Lakhdar Boumediene recevrait bien l'aide adaptée à sa réintégration et a indiqué que ces dernières ne devraient pas poser de restrictions injustifiées à sa liberté.
Lakhdar Boumediene, dont la famille vit maintenant en France, a été arrêté en Bosnie parmi un groupe de détenus qui furent transportés par avion à Guantanamo au début de 2001. La plupart de ces hommes ont été renvoyés en Bosnie en décembre 2008, après qu'une cour fédérale américaine avait estimé que leur détention était injustifiée.
En juin 2008, Lakhdar Boumediene a été le demandeur principal dans une décision de la Cour suprême des Etats-Unis, faisant date, qui a reconnu le droit des détenus de Guantanamo à contester leur mise en détention devant les tribunaux civils.
Human Rights Watch a déposé des conclusions amicus (en tant qu'ami du tribunal) dans Boumediene c. Bush.
A ce jour, quelques vingt-sept anciens détenus qui étaient citoyens ou anciens résidents des Etats-membres de l'Union européenne ont été renvoyés en Belgique, au Danemark, en France, en Allemagne, en Espagne, en Suède et au Royaume-Uni. Treize détenus qui étaient citoyens ou anciens résidents ont été relâchés dans d'autres pays européens. Aucun n'est connu pour s'être livré à des activités militantes ou autres actions violentes.
Sous l'administration Bush, le gouvernement américain a fait des démarches auprès de nombreux pays pour leur demander de prendre en charge des détenus de Guantanamo et cela avec peu de succès. En 2006, l'Albanie a accepté d'accueillir cinq ouïghours, mais a refusé par la suite d'en prendre en charge davantage. Cependant, depuis que le président Obama a pris ses fonctions, plusieurs gouvernements européens ont exprimé leur volonté d'accueillir d'autres détenus.
« Nous espérons que Lakhdar Boumediene sera le premier d'une longue série de détenus que la France et les autres pays européens accepteront d'accueillir », a déclaré Joanne Mariner.