Tandis que les diplomates et les politiciens congolais se démènent pour éviter une guerre de grande envergure dans la province du Nord Kivu, dans l’Est de la République Démocratique du Congo, Human Rights Watch a publié aujourd’hui un rapport documentant des meurtres, des viols et des pillages épouvantables commis par toutes les parties au conflit.
Le rapport de 96 pages, “Nouvelle crise au Nord Kivu” décrit en détail les crimes contre les civils commis par les soldats de l’armée congolaise, par les troupes du général renégat Laurent Nkunda, et par les combattants d’une force d’opposition rwandaise appelée Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). Le rapport documente les dix-huit mois de conflit au cours duquel les civils ont supporté le poids des exactions.
« Les tentatives de résolution du conflit n’ont pas encore apporté de soulagement aux populations locales, » a déploré Anneke Van Woudenberg, chercheuse principale pour le Congo à Human Rights Watch. « Les politiciens doivent agir, tout de suite, si les citoyens congolais doivent être protégés et la justice rendue pour les crimes du passé. »
Un cessez-le-feu branlant entre l’armée congolaise et les troupes de Nkunda s’est écroulé à la fin du mois d’août et les accrochages se sont poursuivis, malgré l’annonce faite la semaine dernière par le gouvernement du report au 15 octobre de la date limite pour que les troupes dissidentes rejoignent l’armée nationale.
Nkunda, qui dirige les soldats dissidents, dit qu’il défend les intérêts des Congolais Tutsis, un groupe minoritaire auquel il appartient. Il prétend que les Tutsis du Nord Kivu, où il est basé, ne bénéficieront pas d’une protection suffisante s’il permet à ses troupes d’être complètement intégrées dans l’armée nationale et déployées à des postes situés dans d’autres parties du Congo.
Ses forces ont aussi combattu les combattants des FDLR, dont beaucoup sont des Rwandais Hutus ou des membres de groupes congolais liés aux Hutus. De temps à autre, les FDLR se sont battues contre les troupes de l’armée congolaise, mais en d’autres occasions, elles ont coopéré avec les soldats de l’armée gouvernementale. Au cours des opérations récentes, les FDLR étaient censées se battre avec les troupes gouvernementales contre Nkunda.
En plus des meurtres et des enlèvements d’un grand nombre de civils, les soldats se sont livrés à des viols généralisés ainsi qu’au pillage et à la destruction de biens. Toutes les forces ont eu recours aux enfants soldats et certains commandants ont essayé d’empêcher des agences de protection de l’enfant de localiser et de libérer des enfants de leurs rangs.
Depuis la fin de 2006, le conflit a entraîné le déplacement d’environ 370 000 personnes, alourdissant ainsi le fardeau des agences humanitaires, qui essaient déjà d’aider des centaines de milliers d’autres personnes déplacées lors de précédentes étapes du conflit.
Les forces de maintien de la paix de l’ONU et la communauté internationale ont mis du temps à réagir à la crise du Nord Kivu. Le 26 septembre, de hauts représentants des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de la France, de la Belgique et d’Afrique du Sud se sont réunis à New York et ont reconnu le risque d’une crise plus étendue. Ils se sont mis d’accord sur une feuille de route pour améliorer la situation sécuritaire, comportant une action plus énergique de la part des forces de maintien de la paix de l’ONU.
Il y a actuellement plus de 17 000 soldats de maintien de la paix de l’ONU au Congo. Répartis dans tout le pays immense qu’est le Congo, seulement 4500 sont basés au Nord. Leur mandat comprend la protection des civils, y compris en recourant à la force armée si nécessaire.
« Les forces de maintien de la paix de l’ONU doivent employer toutes leurs ressources civiles et militaires pour assurer la protection des civils vulnérables, » a insisté Van Woudenberg. « Elles doivent dénoncer les violations des droits humains quand elles se produisent, et se tenir prêtes à répondre rapidement à de nouvelles menaces. »