Aujourd’hui, dans son dernier rapport annuel sur le problème planétaire du minage des sols, l’International Campaign to Ban Landmines (ICBL – Campagne international pour l’interdiction des mines au sol) a fait savoir qu’en 2005, l’utilisation de mines antipersonnelles dans le monde était en déclin. L’ICBL a retiré l’Irak et l’Egypte de sa liste des pays producteurs de mines antipersonnelles, et assure qu’il n’existe actuellement aucun commerce connu de telles armes à travers le monde.
Le “Rapport 2005 sur le contrôle du minage des sols: vers une planète sans mines ”, long de 1053 pages et septième d’une série annuelle, fait état, dans tous les pays, d’une mise en conformité avec le Traité de 1997 sur l’Interdiction des Mines, ainsi que d’efforts visant à éradiquer les mines antipersonnelles. Human Rights Watch est un membre fondateur de l’ICBL, qui reçut le Prix Nobel de la paix en 1997, et l’une des quatre organisations de l’ICBL coordonnant l’action “Contrôle du minage des sols.”
“Cette année l’utilisation des mines au sol dans le monde est en recul,” d’après Steve Goose, directeur de la division consacrée aux armements de Human Rights Watch. “Mais la Birmanie, le Népal et la Russie, puisque leurs gouvernements continuent de faire poser des mines antipersonnelles en 2005, doivent être sévèrement condamnés.”
Ces trois mêmes pays utilisaient des mines antipersonnelles en 2004. Il y aussi des preuves tangibles de leur utilisation par l’armée géorgienne, bien que son gouvernement le nie.
A ce jour, les premiers utilisateurs de mines antipersonnelles sont les groupes armés rebelles, plutôt que les forces gouvernementales. Selon le rapport de l’ICBL, ces groupes rebelles ont fait usage de mines antipersonnelles (ou de dispositifs de fortune apparentés à des mines) dans treize pays, contre seize pays répertoriés dans le précédent rapport sur le “Contrôle du minage des sols.” L’utilisation des mines au sol par les groupes rebelles a été particulièrement importante en Birmanie, en Colombie, et au Népal.
Quatre pays se sont ralliés au Traité sur l’Interdiction des Mines cette année : l’Ethiopie (une nation fortement touchée par le problème, qui utilisait encore des mines en l’an 2000), le Bouthan, la Lettonie, et le Vanuatu. Au total, 147 états sont rattachés à ce Traité sur l’Interdiction des Mines, auxquels il faut rajouter sept autres pays qui l’ont signé, mais pas encore ratifié. Le traité interdit dans une vaste mesure l’utilisation, la production et la circulation des mines antipersonnelles; il exige la destruction, sur quatre années, de tous les stocks de mines, ainsi que la neutralisation des champs de mines sur dix ans.
Les pays solidaires du Traité sur l’Interdiction des Mines ont jusqu’ici détruit 38.3 millions de mines antipersonnelles issues de leurs réserves. Hier (21 novembre), l’Algérie est devenue le soixante-et-onzième pays ratificateur à achever la destruction de ses réserves. Les pays n’ayant pas signé le Traité détiennent un nombre de mines antipersonnelles en réserve qu’on estime à 160 millions. On peut citer principalement la Chine (110 millions selon les estimations), la Russie (26.5 millions), et les Etats-Unis (10.4 millions). Plus tôt cette année, la Russie a révelé pour la première fois le nombre de mines qu’elle stockait; 23.5 millions d’entre elles (sur 26.5 millions) devraient être détruites d’ici à 2015.
Le rapport 2005 a retiré l’Egypte et l’Irak de sa liste des producteurs de mines antipersonnelles, ce qui réduit ces derniers au nombre de treize, en fort contraste avec la bonne cinquantaine de fabricants qu’a compté le début des années 90. Pour la première fois, l’Egypte a officiellement annoncé l’existence d’un moratoire sur sa production, et les responsables irakiens ont confirmé la destruction de leurs infrastructures de production en 2003 par les bombardements de la Coalition. L’Irak a multiplié les déclarations en faveur de l’interdiction des mines antipersonnelles et fait part, lors de l’assemblé générale de l’O.N.U., de son intention de rejoindre les signataires du Traité sur l’Interdiction des Mines.
Les Etats-Unis ne fabriquent plus de mines antipersonnelles depuis 1997, mais développent depuis de nouveaux modèles qui se révèlent incompatibles avec le Traité. Le ministère de la défense des Etats-Unis devrait statuer en décembre sur le sujet de la production de l’un d’entre eux, baptisé “Spider.” Le Pentagone a réclamé une enveloppe totale de 1.77 milliards de dollars sur les cinq années à venir en vue de la recherche et de la production de nouveaux systèmes de mines au sol.
L’interdiction mondiale de facto du commerce de mines antipersonnelles a été respectée en 2004 et 2005. Depuis le milieu des années 90, on n’a constaté l’existence de trafics illicites ou de commerces officieux qu’à un niveau très faible.
En 2004, les donateurs de tous pays on pu rassemblé une somme record de 399 millions de dollars dédiée au déminage et à d’autres formes d’activisme, soit une augmentation de 60 millions, ou 18%, par rapport à l’année 2003. Sur les 84 pays touchés par le problème des terrains minés, trois ont reçu à eux seuls presque la moitié de ces financements: l’Afghanistan, l’Irak, et le Cambodge. Plus de 135 kilomètres carrés de terrains minés (l’équivalent de plus de 14 000 terrains de football américain, et de plus de 19 000 terrains de football) ont été neutralisés en 2004, dans 33 pays différents, entraînant la destruction d’environ 140 000 mines antipersonnelles, 50 000 mines anti-chars, et 3 millions d’objets d’artillerie n’ayant pas explosé.
En 2004, on a dénombré à travers le monde 6,521 nouveaux accidents liés aux mines ou au matériel d’artillerie n’ayant pas explosé, soit un net recul par rapport aux 8,065 cas relevés en 2003. Cependant, en raison des lacunes significatives existants dans beaucoup de pays, le rapport “Contrôle du minage des sols” estime à 15 000, voire 20 000, le nombre de nouvelles victimes chaque année. On a constaté de tels accidents dans 58 pays en 2004, soit huit de moins que l’année précédente.
Le “Rapport 2005 sur le contrôle du minage des sols” rassemble des informations au sujet de l’utilisation des mines au sol, de leur production, de leur commerce, de leur stockage, du déminage, des victimes et de leur assistance, dans 112 pays. Au total, ce sont 77 chercheurs affiliés au “Contrôle du minage des sols”, et issus de 72 pays, qui ont contribué à ce rapport. L’ICBL le présentera aux diplomates participant aux sixièmes rencontres des états signataires du Traité sur l’Interdiction des Mines qui débuteront officiellement à Zagreb, en Croatie, le 28 novembre.