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Le refus du gouvernement chinois d'autoriser des syndicats indépendants attise les protestations ouvrières, a déclaré Human Rights Watch dans un nouveau rapport publié aujourd'hui.

Le rapport de 50 pages, intitulé "Payer le prix : L'agitation ouvrière dans le Nord-Est de la Chine", analyse en détail les manifestations qui se sont déroulées de mars à mai 2002 dans trois villes du Nord-Est de la Chine, et la réponse du gouvernement face à ces évènements.

"Le Parti Communiste Chinois est confronté à un sérieux dilemme : il prétend protéger les ouvriers, mais ces mêmes ouvriers manifestent dans la rue", a déclaré Mike Jendrzejczyk, le directeur de la division Asie du bureau de Human Rights Watch à Washington. "Les ouvriers veulent avoir le droit de former leurs propres syndicats. Ils veulent avoir leur mot à dire dans les décisions qui concernent leur travail et leurs avantages."

Ces manifestations sans précèdent ont été les plus longues depuis le mouvement pro-démocratique de 1989. A Liaoyang, les méatallos licenciés des anciennes entreprises d'Etat sont descendus dans la rue par intermittence durant 10 semaines. A Daqing, les ouvriers licenciés qui travaillaient dans le secteur pétrolier se sont heurtés à une importante démonstration de force, et les forces de sécurité ont détenu au moins soixante ouvriers pour une période allant de 24 heures à deux semaines. A Fushun, des milliers de mineurs licenciés et des ouvriers provenant des usines situées aux alentours ont bloqué les routes et les lignes de chemins de fer jusqu'à ce qu'on leur donne une certaine somme d'argent.

Quatre des principaux dirigeants des manifestations de Liaoyang ont été inculpés le 30 mars 2002 après avoir tenté pendant quatre années de porter les plaintes des ouvriers à l'attention des autorités locales. Ils pourraient être jugés n'importe quand. Yao Fuxin, Pang Quingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming sont accusés de " réunion, marches et manifestations illégales " et risquent cinq ans de prison. Les quatre hommes ont été détenus pendant presque cinq mois, au cours desquels ils ont eu un accès limité voire inexistant à leur famille et pas de représentation juridique.

En Chine, les entreprises détenues par l'Etat, qui ont un jour promis aux ouvriers un emploi à vie et une retraite assurée, ont réduit le nombre de leurs employés ou fermé leurs portes. De nombreux ouvriers, dont certains travaillaient depuis des dizaines d'années, attendent de recevoir des mois de salaires impayés et ont perdu leur retraite, ainsi que leurs avantages sociaux et leur protection santé.

"Ces ouvriers manifestent contre l'hypocrisie du gouvernement chinois", a déclaré Mike Jendrzejczyk. "Bien que la constitution chinoise appelle les ouvriers 'les maîtres du pays', le gouvernement traite les ouvriers qui manifestent comme des criminels."

La loi chinoise interdit aux ouvriers de s'organiser de manière indépendante. Seule une organisation, la Fédération Chinoise des Syndicats, peut légalement représenter les ouvriers, et elle est sous le contrôle des autorités. Elle ne s'est jamais prononcée contre les lois et règlements utilisés pour justifier le fait de mettre des activistes syndicaux en prison.

Human Rights Watch considère que la réponse du gouvernement chinois à ces trois manifestations a été relativement contenue, en partie peut-être parce que l'agitation syndicale menace la légitimité du Parti Communiste Chinois, et que les autorités ont peur de provoquer une réaction encore plus violente et étendue si elles sévissent trop durement. Dans leur traitement des manifestations, les responsables chinois violent les droits fondamentaux de libre association, de libre expression et de libre réunion. Les autorités refusent de délivrer des autorisations de manifester, menacent les ouvriers salariés de perte de salaire au cas où un membre de leur famille participerait à des rassemblements, et limite l'accès aux media dans les zones concernées. Les forces de sécurité attaquent physiquement les manifestants, en mettent beaucoup en captivité pour de courtes périodes, refusant de les libérer s'ils ne promettent pas de renoncer à manifester de nouveau.

Human Rights Watch appelle le gouvernement chinois à libérer immédiatement et sans conditions tous ceux qui sont détenus pour faits d'activités pacifiques dont le but est de promouvoir les droits des ouvriers à s'associer librement. Cette demande urgente concerne les ouvriers détenus suite aux manifestations de cette année dans le Nord-Est, ceux détenus pour activisme syndical durant le mouvement pro-démocratique de 1989 et durant l'année 1992 et la période 1997-1998, et ceux détenus pour avoir révélé les problèmes des ouvriers devant un large public en Chine et devant les media internationaux.

La Chine devrait aussi tenir ses obligations envers la Convention des Droits Economiques, Sociaux et Culturels qu'elle a ratifiée en 2001. La Chine a déclaré que l'application de l'Article 8(1)(a) doit être en accord avec la Loi Syndicale Chinoise - cette même loi qui nie aux ouvriers chinois le droit de former des syndicats indépendants.

En tant que membre de l'Organisation Internationale du Travail (OIT), la Chine est obligée de respecter ses principes fondamentaux qui incluent la libre association et le droit de négociation collective. Human Rights Watch appelle les partenaires commerciaux de la Chine et les gouvernements engagés dans un 'dialogue' bilatéral sur les droits humains à faire pression sur Beijing pour que les autorités demandent l'aide de l'OIT pour réformer leurs pratiques syndicales et de les rendre conformes aux standards internationaux de liberté d'association.

Human Rights Watch lance un appel aux entreprises faisant des affaires en Chine, les exhortant à s'abstenir d'obtempérer aux demandes des autorités chinoises d'établir une discrimination envers, de licencier ou de punir de quelque manière que ce soit, les ouvriers qui essaient de former leurs propres syndicats, de manifester pacifiquement contre leurs conditions de travail ou de faire grève.

Le rapport de Human Rights Watch, "Payer le prix : L'agitation ouvrière dans le Nord-Est de la Chine", est disponible en anglais à l'adresse https://www.hrw.org/reports/2002/chinalbr02/.

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