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Sierra Leone : les plus sérieuses attaques depuis des mois

Les forces de maintien de la paix des Nations Unies doivent protéger les civils

(New York) - Les atrocités récentes contre des civils dans deux districts du nord et de l'est de la Sierra Leone sont les plus sérieuses commises depuis des mois, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Au nombre de ces atrocités, on compte le meurtre de plus de vingt civils par des milices pro-gouvernementales.

D'après de nombreux entretiens conduits par Human Rights Watch, tant les milices des Forces de Défense Civile (CDF), alliées du gouvernement, que les rebelles du Front Révolutionnaire Uni (RUF) ont attaqué et ont tué des civils, dans les districts du nord de la Sierra Leone, Kono et Koinadugu.

Human Rights Watch appelle les Nations Unies à déployer, aussi rapidement que possible dans la région, des forces de maintien de la paix.

"Les civils sont pris pour cibles dans des batailles mortelles livrées en représailles", a déclaré Peter Takirambudde, directeur exécutif pour l'Afrique à Human Rights Watch. "Ni le RUF, ni les CDF n'ont fait beaucoup d'efforts pour distinguer les cibles militaires des cibles civiles. Les Nations Unies doivent agir immédiatement pour arrêter ces atrocités."

Human Rights Watch a interrogé de nombreuses victimes et de nombreux témoins qui décrivent les attaques commises par les milices CDF, en juin et juillet, contre les villes de Worodu, Yiraia, Sukudu et Mansofinia, sous contrôle du RUF. Pour les quatre attaques sur lesquelles Human Rights Watch a réuni des documents, au moins vingt quatre civils, dont neuf femmes et neuf enfants, ont été tués et quelques dix-neuf civils de plus, dont onze enfants, ont été blessés.

Au cours du plus grave et du plus récent incident, le 17 juin, les milices CDF, communément connues sous les noms de Kamajors ou Donzos, tuèrent au moins vingt et un civils dans la ville de Yiraia. Au cours d'attaques apparemment décidées en représailles, fin juin et début juillet, le RUF a lancé des raids contre les villages alentours en les accusant de soutenir les milices CDF. Le RUF a tué au moins trois civils, en a blessé plusieurs autres et a enlevé seize personnes.

Onze témoins et blessés qui ont survécu à Yiraia ont décrit comment, tôt dans la matinée du 17 juin, de nombreux miliciens CDF, armés de fusils automatiques et de machettes ont attaqué le village situé à environ trente cinq miles, au nord de la riche ville diamantaire de Koidu. Plusieurs personnes, dont un vieil homme et au moins deux enfants, furent brûlées après que les attaquants eurent mis le feu à plusieurs maisons du village. Une survivante de douze ans, avec au moins cinq entailles profondes au cou, a été laissée pour morte après qu'un milicien eut tenté de lui trancher la gorge. Un autre homme, touché trois fois par balles par les attaquants, a décrit comment sa mère, son père, sa sœur et son fils ont tous été tués durant l'attaque. Une autre femme a décrit comment sa fille de cinq ans a eu la tête fracassée par un obus quand leur maison a été touchée par une grenade émise apparemment par un lance-roquettes. Un homme, qui avait quitté un camp de réfugiés en Guinée et était récemment rentré au village de Sukudu, a été tué par les CDF, au cours d'une autre attaque le 11 juillet.

Un chef local des CDF, dans le district de Kono, interviewé par Human Rights Watch le 17 juillet, a admis avoir attaqué Yiraia, village et base d'un membre important du RUF, en représailles contre des attaques précédentes du RUF contre leurs positions. Néanmoins, les chefs CDF de Freetown ont nié avoir ordonné ces attaques et ont déclaré qu'au moment de l'attaque de juin, les miliciens CDF n'agissaient pas sous les ordres du Ministère de la Défense.

Dans les raids, apparemment lancés en représailles, qui ont débuté fin juin, les rebelles du RUF ont attaqué plusieurs villes dont Porpon, Hermakono, Bumbanja, Dombadu et Samadu. Durant ces attaques, les rebelles ont tué au moins trois enfants, ont tranché l'oreille d'un homme, ont blessé plusieurs autres personnes avec des machettes et ont enlevé au moins seize personnes dont cinq enfants.

D'après des témoins interviewés par Human Rights Watch, plusieurs villages ont été brûlés et pillés par les deux camps et des centaines de civils ont été déplacé, suite à ces attaques, lesquelles se sont déroulées de la mi-juin jusqu'à la seconde semaine de juillet.

Des témoins prétendent que de nombreux miliciens des CDF qui rentrent actuellement dans les districts de Kono et Koinadugu et y lancent des attaques contre les territoires du RUF, étaient, jusqu'en avril 2001, basés dans des camps de réfugiés en Guinée ou aux abords de la frontière guinéenne avec la Sierra Leone. Pendant que fin mai 2001, la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL) était en mesure de faciliter le désarmement de 171 de ces miliciens, des centaines d'autres opèrent encore dans ce qui est une forteresse du RUF depuis 1998.

Human Rights Watch s'inquiète du fait que des centaines de réfugiés qui quittent les camps de réfugiés en Guinée pour rentrer dans leurs villages des districts de Kono et Koinadugu courent tout particulièrement le risque d'être pris pour cibles par le RUF, lors d'attaques lancées en représailles. Le RUF pourrait en effet les accuser d'apporter leur soutien aux miliciens des CDF.

Depuis qu'un cessez le feu a été décrété en novembre 2000 entre le RUF et le gouvernement sierra léonais, la MINUSIL a pu se déployer et/ou patrouiller dans tous les territoires sous contrôle du RUF. Depuis mai 2001, environ 7000 combattants des deux camps ont été désarmés. Alors que des milliers de combattants des les places fortes du RUF que sont Kambia et Lunsar ont désarmé et qu'une certaine autorité gouvernementale a été restaurée, les combattants dans la région de Kono, riche en diamants, ont exprimé leur réticence à abandonner les armes, causant ainsi des frustrations chez les responsables des Nations Unies et du gouvernement.

Human Rights Watch appelle la MINUSIL à accélérer son plan de déploiement dans les districts de Kono et de Koinadugu, afin de renforcer la protection des populations civiles. Human Rights Watch appelle également la section des droits humains de la MINUSIL à rendre publique son enquête sur l'attaque de Yiraia et à conduire d'autres investigations sur les attaques ultérieures commises tant par les CDF que le RUF, contre des civils des districts de Kono et Koinadugu.

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