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Salvador : Une éminente défenseure des droits humains arrêtée

Les autorités poursuivent leur répression contre les organisations de la société civile

 

Ruth López, El Salvador
L’avocate salvadorienne Ruth Eleonora López. © El Diario de Hoy

(Washington, 20 mai 2025) – Les autorités salvadoriennes ont arrêté Ruth Eleonora López, une éminente avocate spécialisée dans la défense des droits humains, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Le 18 mai, à 23 heures, la police salvadorienne a arrêté Ruth Eleonora López à son domicile de San Salvador. Ruth Eleonora López, qui dirige la division Lutte anti-corruption et Justice au sein de Cristosal, l'une des principales organisations de défense des droits humains au Salvador, est accusée de détournement de fonds. Toutefois, au moment de son arrestation, les autorités n'avaient encore fourni aucune information détaillée sur les allégations spécifiques portées contre elle.

« Ruth Eleonora López a courageusement dénoncé la corruption et les violations des droits humains au Salvador », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques à Human Rights Watch. « Son arrestation semble s'inscrire dans le cadre d'une intensification des efforts visant à réduire au silence les critiques du gouvernement Bukele. »

L'arrestation de Ruth Eleonora López est le dernier rappel en date que, sous la présidence de Nayib Bukele, le Salvador est de plus en plus hostile aux journalistes, aux dirigeants syndicaux et aux défenseurs des droits humains. Des personnes exprimant des critiques à l’égard du gouvernement Bukele sont qualifiées de « défenseurs de gangs » ; le gouvernement et ses partisans à l'Assemblée législative ont adopté des lois qui portent atteinte à la liberté d'expression et révoqué l'exonération fiscale de certaines ONG. Les autorités ont arrêté des défenseurs des droits humains, dont, récemment, un avocat et un pasteur évangélique ayant participé à une manifestation pacifique contre la décision d’expulser des habitants du territoire où ils vivaient précédemment. Face à l'escalade du harcèlement les visant, des procureurs qui ont dénoncé la corruption du gouvernement Bukele et ses négociations avec les gangs ont été contraints à l'exil, tout comme plusieurs journalistes.

Précédemment en mai, sept journalistes d'El Faro, un important média d'investigation, ont quitté le pays après avoir appris que le gouvernement avait émis des mandats d'arrêt à leur encontre ; cette décision a fait suite à l'enquête du journal sur des négociations secrètes entre le gouvernement Bukele et les gangs. Des actes d’intimidation et une campagne de diffamation ont ensuite contraint El Faro à délocaliser son personnel et ses finances au Costa Rica.

Une enquête menée en 2022 par Amnesty International et Access Now a révélé l'utilisation à grande échelle par le gouvernement du logiciel espion Pegasus de NSO Group contre des journalistes et des membres d'organisations de la société civile au Salvador.

L'administration Bukele a pris d'autres mesures pour réprimer la société civile. Le 13 mai, le président Bukele a annoncé qu'il présenterait à l'Assemblée législative un projet de loi sur les « agents étrangers » (« agentes extranjeros »), qui imposerait une taxe de 30 % à tout financement étranger perçu par les organisations de défense des droits humains et les médias indépendants.

Human Rights Watch a documenté que d'autres pays, comme la Russie et le Nicaragua, ont utilisé des lois sur les « agents étrangers » en tant qu’outil pour stigmatiser, contrôler et réduire au silence la société civile et les médias indépendants. En qualifiant les organisations recevant des financements étrangers d'agents de puissances étrangères, ces lois imposent des exigences de déclaration contraignantes, permettent une ingérence intrusive de l'État et conduisent souvent à la censure ou à la fermeture de ces organisations ou médias.

Les gouvernements étrangers devraient exprimer d’urgence leur inquiétude face à l'arrestation de Ruth Eleonora López, et appeler les autorités salvadoriennes à lui garantir l'accès à un avocat. Ils devraient également exiger le respect de son intégrité physique et le plein respect des garanties d'une procédure régulière, telles que garanties par le droit international, a ajouté Human Rights Watch. Ils devraient également exhorter le gouvernement Bukele à abandonner son projet de loi sur les « agents étrangers », qui porte atteinte au droit à la liberté d'association.

« La détention de Ruth Eleonora López risque d’éroder davantage encore la liberté d'expression et d'association au Salvador », a averti Juanita Goebertus. « Les gouvernements qui souhaitent voir une inversion de cette tendance autoritaire croissante devraient s'exprimer avant qu'il ne soit trop tard. »

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