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Soudan du Sud : Il faut éviter toute amnistie pour les crimes graves

Les négociations autour d’un accord de paix devraient garantir la justice

(Nairobi, le 9 juin 2014) – Les pourparlers de paix au Soudan du Sud devraient faire de la justice une composante essentielle de tout accord, a affirmé Human Rights Watch dans une lettre adressée aux médiateurs et rendue publique aujourd’hui. Les médiateurs devraient veiller à ce qu’il n’y ait pas d’amnistie pour les auteurs de crimes graves perpétrés en violation du droit international a ajouté Human Rights Watch.

Les négociations de paix doivent reprendre à Addis-Abeba, en Éthiopie, le 9 juin 2014, sous la médiation de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (Intergovernmental Authority on Development, IGAD), une organisation régionale de l’Afrique de l’Est.

« Les crimes dévastateurs commis dans le cadre du conflit en cours au Soudan du Sud sont issus de l’absence de justice pour les crimes brutaux perpétrés au cours de la longue guerre », a affirmé Daniel Bekele, Directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. « Les médiateurs doivent rompre avec le passé en veillant à ce que l’amnistie pour crimes graves ne soit pas une option. »

Le conflit au Soudan du Sud a éclaté dans la capitale, Juba, à la mi-décembre 2013, puis s’est propagé dans la quasi-totalité du pays. Le 23 janvier 2014, un accord de cessation des hostilités signé par les deux parties au conflit aux tous premiers jours des pourparlers a été rompu à plusieurs reprises. L’IGAD a depuis dépêché des équipes d’observateurs au Soudan du Sud pour veiller au respect de cet accord.

Les investigations de Human Rights Watch depuis décembre 2013 ont établi que les forces des deux camps sont responsables de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire, y compris de crimes de guerre et de possibles crimes contre l’humanité. Des civils ont été régulièrement pris pour cible, souvent en raison de leur ethnicité, notamment lors d’horribles massacres. Les forces des deux camps ont également commis en masse pillages et destructions de propriétés, parmi lesquelles des locaux médicaux et humanitaires dont les populations dépendent pour survivre et qui, en vertu des lois de la guerre, doivent être épargnés par les attaques.

Dans un rapport en date de mai 2014, la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud affirme qu’il y a « des raisons crédibles de croire que des crimes contre l’humanité ont été commis pendant le conflit à la fois par les forces gouvernementales et par celles de l’opposition ».

Le droit international ne laisse planer aucune ambiguïté quant à la nécessité de rendre justice pour les crimes graves. Les traités internationaux, y compris les Conventions de Genève de 1949 ratifiées par le Soudan du Sud, exigent des parties au conflit qu’elles poursuivent en justice les responsables présumés de crimes graves. Les Nations Unies ainsi que la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples ont publié des principes exprimant leur opposition à toute amnistie pour crimes graves dans le cadre des accords de paix.

Au cours des 20 dernières années, l’expérience de Human Rights Watch dans de nombreux pays révèle qu’en l’absence de justice, la paix nourrit souvent des cycles de violence récurrents. Personne n’a eu à rendre de comptes à ce jour pour les crimes graves commis au Soudan, y compris dans le cadre de l’Accord de paix global de 2005 ayant mis fin à la longue guerre civile dans ce pays et qui, à terme, a abouti à la création du Soudan du Sud en tant que nation indépendante. Le souvenir des crimes perpétrés au cours de la guerre civile et l’absence d’établissement des responsabilités ont contribué à alimenter la crise actuelle.

En revanche, l’engagement de poursuites judiciaires équitables et crédibles relatives à des crimes graves contribue au respect de l’état de droit.

« Pour garantir une paix et une sécurité durables au Soudan du Sud, les besoins des victimes et l’importance de la justice doivent faire partie intégrante des pourparlers », a conclu Daniel Bekele.

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