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Résumé des recommandations pour la onzième session

I. Réflexions sur la Cour pénale internationale à l'occasion du dixième anniversaire de l'entrée en vigueur du Statut de Rome

A. Augmentation du soutien politique à la CPI

B. Renforcer l’impact de la cour au sein des communautés affectées

II. Élection du Procureur adjoint

III. Coopération

A. Évolution positive des pratiques de l'Assemblée sur la coopération

1. Réunions d’experts intersessionnelles

2. Mise en œuvre des procédures pour répondre à la non-coopération

3. Réunion plénière sur la coopération

B. Arrestations

1. Nécessité d'efforts d'arrestations adaptés

2. Utilisation créative de la diplomatie

3. Stratégies à long terme

4. Procédures nationales et législation de mise en œuvre

IV. Complémentarité

 



 

Résumé des recommandations pour la onzième session

 

Dans leurs déclarations au cours du Débat général et d'autres forums de discussion pertinents de l'Assemblée, les États parties devraient :

 

  • Affirmer leur engagement envers la mission et le mandat de la Cour pénale internationale (CPI) pour mettre fin à l'impunité pour les crimes qui préoccupent le plus la communauté internationale ;

 

  • Mettre l'accent sur l'indépendance de la CPI et de son procureur et s'engager à protéger la cour de toute ingérence politique ;

 

  • Encourager les autres États parties à continuer d'exprimer et de mettre en œuvre un soutien diplomatique et politique envers la cour ;

 

  • S'engager à poursuivre le dialogue en cours avec le Conseil de sécurité des Nations Unies pour consolider les pratiques du Conseil concernant les renvois devant la cour; et

 

  • Appuyer la participation significative des victimes, la sensibilisation et la présence sur le terrain, le Fonds au profit des victimes ainsi que l'attention à l'héritage de la cour en tant qu’éléments du travail de la cour qui sont particulièrement pertinents pour créer un impact au sein des communautés affectées.

 

En ce qui concerne la réunion plénière sur la coopération, les États parties devraient :

 

  • Contribuer activement en venant prêts à partager les leçons tirées de leurs expériences et les bonnes pratiques sur les thèmes retenus pour le débat ;

 

  • S'appuyer sur le rapport de 2007 du Bureau sur la coopération et ses 66 recommandations en vue d’améliorer la coopération des États ;

 

  • Souligner l'obligation des États parties à la CPI de coopérer pleinement avec la cour, notamment en procédant à des arrestations, et s'engager à s’entraider pour fournir une coopération totale même dans des circonstances difficiles ;

 

  • Évaluer si la cour dispose d'une capacité suffisante pour soutenir les efforts d'arrestation ; et

 

  • S'engager à adopter des politiques au niveau national pour consolider la prévention et apporter des réponses appropriées à la non-coopération, et à éviter les contacts avec les personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la CPI.

 

En ce qui concerne la réunion plénière sur la complémentarité, les États parties devraient :

 

  • Envoyer des représentants de haut niveau, notamment les responsables d’agences de développement ou de ministères, pour participer au débat ;

 

  • Adresser un message clair sur l'importance de la justice nationale pour les crimes odieux et un engagement à long terme sur sa réalisation ;

 

  • S'engager à continuer de promouvoir l'importance des initiatives relatives à l’obligation de rendre des comptes avec le personnel diplomatique et de développement sur le terrain ;

 

  • Partager les expériences sur les initiatives prises pour promouvoir la justice nationale pour les crimes odieux dans les pays faisant l’objet d’une analyse ou d’une enquête de la CPI. Cela pourrait inclure des informations sur ce qui a et n'a pas fonctionné en termes de mise en œuvre des initiatives visant à renforcer les efforts nationaux pour traduire les criminels en justice, notamment dans le domaine de la coordination des bailleurs de fonds ; et
     
  • Faciliter les efforts pour ancrer la complémentarité au sein de l'Assemblée des États Parties, notamment en faisant appel aux points focaux pour convoquer des réunions sous les auspices des groupes de travail existants à La Haye et à New York sur des sujets précis relatifs à la complémentarité.

 

En ce qui concerne l'élection du vice-procureur de la CPI, les États parties devraient :

 

  • Mettre de côté les intérêts particuliers et ne voter que pour les candidats les plus hautement qualifiés, en donnant la priorité à (1) une expérience confirmée d'excellence professionnelle dans des affaires criminelles complexes ; (2) une capacité confirmée à agir en toute indépendance et impartialité dans l'exercice des fonctions professionnelles ; ( 3) une expérience confirmée d'excellence professionnelle dans la gestion institutionnelle ; et (4) une expérience confirmée dans le travail avec d'autres organismes ou agences afin d'atteindre efficacement un objectif commun.

 

En ce qui concerne la résolution omnibus, l'Assemblée devrait :

 

  • Exprimer son engagement politique à travers un langage consolidé envers la participation significative des victimes, la sensibilisation, le Fonds au profit des victimes, la présence sur le terrain et l'attention à l'héritage de la cour en tant qu’éléments du travail de la cour qui sont particulièrement pertinents pour créer un impact au sein des communautés affectées.

 

En ce qui concerne une résolution autonome sur la coopération, l'Assemblée devrait :

 

  • Réfléchir aux résultats et recommandations de la discussion en séance plénière sur la coopération, notamment en prenant note de tout résumé publié par le modérateur, dans le but de fournir un point de référence supplémentaire pour de futurs efforts visant à renforcer la coopération ;

 

  • Conserver les mots entre crochets dans le projet de résolution concernant l’obligation pour les Etats parties d’éviter tout contact non-essentiel avec des personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la CPI ;

 

  • Renouveler le mandat du facilitateur pour la coopération afin de continuer à mettre l’accent sur  les mesures nécessaires pour renforcer la coopération avec la cour, notamment par l'organisation d'autres réunions intersessionnelles ;

 

  • Demander au facilitateur pour la coopération d’élaborer des propositions en consultation avec les États parties pour la création d’un groupe de travail intersessionnel sur la coopération en vue d’établir  ce groupe de travail lors de la 12ème session de l'Assemblée ; et

 

  • Faire de la coopération un point permanent de l’agenda pour les futures sessions de l'Assemblée.

 

En ce qui concerne une résolution autonome sur la complémentarité, l'Assemblée devrait :

 

  • Refléter les résultats et recommandations de la discussion en séance plénière sur la complémentarité, notamment en prenant note de tout résumé publié par le modérateur, dans le but de fournir un point de référence supplémentaire pour de futurs efforts ;

 

  • Inclure une mention relative à l'importance de la consolidation de la volonté ainsi que des capacités ; et

 

  • Reconnaître le lien entre les efforts de complémentarité et les stratégies de sortie de la cour, et l’impact à long terme ou héritage dans les pays faisant l’objet d’une situation référée à la CPI.

 

En ce qui concerne l'adoption du budget 2013 pour la CPI, les États parties devraient :

 

  • Exprimer leur préoccupation concernant la capacité de la cour à créer un réel impact au sein des communautés affectées et insister pour que cette préoccupation fournisse un repère auquel l'adéquation des ressources fournies à la cour est comparée.

 

En ce qui concerne les discussions sur la mise en œuvre des procédures de l'Assemblée pour faire face aux situations de non-coopération, l'Assemblée devrait :

 

  • Donner pour mandat au Bureau de fournir un rapport complémentaire afin de parvenir à une liste commune d'autres mesures disponibles pour l'AEP, notamment obtenir des garanties de non-répétition et la suspension des droits de vote à l’AEP.



 

I. Réflexions sur la Cour pénale internationale à l'occasion du dixième anniversaire de l'entrée en vigueur du Statut de Rome

 

Cela fait maintenant dix ans que le Statut de Rome, le traité de la CPI, est entré en vigueur. En juillet 2002 — beaucoup plus rapidement que ce qui avait été prévu et seulement quatre ans après l'adoption du traité à Rome — le 60ème États  membre de la CPI ratifia le traité, donnant compétence à la cour pour juger les crimes de génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Une décennie plus tard, l'adhésion au traité a plus que doublée, avec 121 États membres. Son deuxième procureur, Fatou Bensouda, de nationalité Gambienne, a pris ses fonctions en juin 2012, héritant d'une charge de travail importante avec des enquêtes ouvertes dans sept pays. Même si la portée de la CPI reste trop limitée — les États-Unis, la Chine et la Russie sont restés en dehors du système et ont utilisé leur influence pour protéger leurs alliés de la compétence de la cour— pour de nombreuses communautés affectées par les atrocités de masse, « La Haye » représente de plus en plus le dernier et le meilleur espoir de justice.

 

Il s'agit d'une réalisation digne d'être célébrée, et cette année d’anniversaire a été dignement marquée par des conférences, des réunions et des ateliers. L’hommage le plus approprié, bien sûr, est un engagement renouvelé envers la mission de la CPI et de voir la mise en œuvre effective de son mandat dans la pratique. La première décennie de la cour n'a pas été facile, et elle a parfois déçu par rapport aux attentes suscitées par la première cour pénale internationale permanente. Elle est également confrontée à des défis qui n'étaient pas présents lors de sa création, en particulier, les conditions économiques mondiales qui réduisent la priorité et les ressources accordées à la justice internationale. Ceci placera probablement de nouveaux obstacles sur le chemin de la cour, alors qu’elle cherche à améliorer ses résultats, tout en réalisant pleinement son mandat.

 

Par conséquent, alors que la cour entame sa deuxième décennie, tous les composants du système du Statut de Rome — notamment les fonctionnaires et le personnel de la cour, les États parties et l'Assemblée des États parties (AEP) — devront accroître leurs efforts pour s’assurer que la CPI puisse répondre aux aspirations de ses fondateurs. Lors de la session de l'AEP qui se tiendra à La Haye du 14 au 22 novembre 2012, les États membres de la CPI participeront à un Débat général organisé autour du thème du « Dixième anniversaire de l'entrée en vigueur du Statut de Rome : les défis à venir. » Human Rights Watch énonce ci-dessous deux défis qui devraient susciter la discussion dans le Débat général et l'attention des États parties au-delà de la session de l'Assemblée : (1) accroître le soutien politique en faveur de la CPI et (2) consolider l'impact de la cour au sein des communautés affectées.

 

Les débats additionnels en séance plénière sur la coopération et la complémentarité à l'ordre du jour de l'AEP sont les bienvenus : la coopération et la complémentarité sont deux domaines essentiels dans lesquels des efforts accrus seront nécessaires pour soutenir la CPI et plus largement, la lutte contre l'impunité. Nous abordons plus en détail la coopération et la complémentarité, ainsi que l'élection du prochain procureur adjoint de la CPI, qui aura lieu lors de la session de l'Assemblée, dans le reste du présent mémorandum.[1]

 

A. Augmentation du soutien politique à la CPI

En dépit du nombre croissant de ses membres et de l'engagement de nombreux États parties, le soutien public et diplomatique nécessaire à la cour pour s'acquitter de son mandat judiciaire sans interférence ne s’est pas pleinement concrétisé. Au lieu de cela, ce soutien a eu tendance à fluctuer, au gré des courants changeants de la politique mondiale. Les États parties n'ont pas encore pleinement intégré l’exécution de leurs obligations envers la CPI au reste de leurs autres objectifs importants, mais différents, de politique diplomatique ou économique. Le président Omar el-Béchir du Soudan — faisant l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI — et ses alliés au sein de l'Union africaine ont persisté dans des tentatives de ralliement de l’opposition à la cour, notamment en s’appuyant sur le mécontentement légitime concernant la portée encore trop limitée de la justice internationale. À certains égards, ils ont repris les rennes là où les États-Unis — qui ont amélioré de manière encourageante leurs relations avec la cour — les avaient laissées au cours de la seconde administration de George W. Bush.

 

Le Conseil de sécurité de l’ONU a offert un faible soutien à la cour, référant des situations pour enquête pour ne fournir ensuite qu’un appui limité pour assurer la coopération et les arrestations dans les affaires qui en résultent. D'importants efforts pour changer cette situation ont vu le jour, notamment un tout premier débat organisé sous la présidence du Conseil de l'État membre le plus récent de la CPI, le Guatemala, sur la relation entre la CPI et le Conseil. L'amélioration de cette relation et l’obtention d’un soutien à la cour plus cohérent de la part du Conseil exigeront une attention renforcée.[2]

 

Il n’y a peut-être pas eu de plus grand signe de vulnérabilité de la part de la cour cette année que la détention par une milice libyenne de quatre membres du personnel de la CPI en juin 2012. Ces quatre personnes — détenues dans la ville occidentale de Zintan — étaient en Libye pour affaires officielles de la cour et leur détention n'avait aucune base légale. Les autorités centrales de Libye ont publiquement défendu les actions de la milice, alors que la CPI a émis des quasi-excuses afin d’obtenir leur libération.

 

Au bout de 10 ans, les États parties et d'autres partenaires internationaux ont encore du mal et — trop souvent — n’arrivent pas à mettre en place, parmi les principales priorités de leurs administrations, le soutien dont la cour a besoin pour réussir. Cette lacune peut être liée à des frustrations de certains États parties au sujet des défaillances de performance de la cour, énoncées ci-dessous. Quelles qu’en soient les causes, cela porte atteinte à l'institution que ces États ont eux-mêmes créée. La CPI reste encore trop récente et trop fragile pour que les États parties se relâchent concernant l'expression et la mise en œuvre de cet engagement constant. Cela ne fait, après tout, que 20 ans depuis la création du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et le début du projet moderne et extrêmement ambitieux de justice internationale, visant à mettre fin à l'impunité pour les atrocités perpétrées à grande échelle.

 

Bien que l'existence de la CPI en tant qu'institution permanente, l’augmentation de ses membres et son opérationnalisation accrue font figure de rempart contre un retour à l'antipathie et la licence dans le cas de graves crimes internationaux, ni la norme de la reddition des comptes, ni la cour elle-même n’ont évolué au point que ses partisans puissent se laisser aller. Pour que la cour soit de plus en plus en mesure de prendre en charge des affaires importantes, mais politiquement impopulaires, de garantir des arrestations et de faire respecter son indépendance, la CPI devra recevoir davantage et non moins d’expressions d'engagement politique — que ce soit lors de la prochaine session de l'AEP, dans des forums stratégiques comme le Conseil de sécurité de l'ONU et les organisations régionales, ou par le biais de contacts bilatéraux — et la mise en œuvre de cet engagement politique dans la pratique.

 

Le Débat général de l'AEP reste un forum important pour faire avancer le soutien politique envers la cour, en particulier lorsque des déclarations sont prononcées par de hautes autorités. Les États parties à la CPI devraient utiliser les déclarations du Débat général et de la réunion plénière sur la coopération pour :

 

  • Affirmer leur engagement envers la mission et le mandat de la CPI pour mettre fin à l'impunité pour les crimes qui préoccupent le plus la communauté internationale ;

 

  • Mettre l'accent sur l'indépendance de la CPI et de son procureur, et s'engager à protéger la cour de toute ingérence politique ;

 

  • Encourager les autres États parties à continuer d'exprimer et de mettre en œuvre un soutien diplomatique et politique pour la cour ; et

 

  • S'engager à poursuivre le dialogue avec le Conseil de sécurité des Nations unies afin de consolider les pratiques du Conseil sur les renvois à la cour.

 

B. Renforcer l’impact de la cour au sein des communautés affectées

Dire que le projet moderne de la justice internationale est nouveau et que la CPI est encore plus récente n'excuse pas les lacunes dans le développement de la cour pendant la dernière décennie. La CPI n’a pas assez avancé dans l'accomplissement de sa mission et de son mandat de lutte contre l'impunité comme il se doit.

 

Certaines de ces lacunes ont attiré une attention considérable.

 

Largement blâmé pour la lenteur de ses procédures — un seul verdict a été prononcé même si un autre est attendu dans une deuxième affaire avant la fin de l'année, un autre procès est en cours, et trois affaires sont prévues pour passer en procès — les fonctionnaires de la cour montrent maintenant des signes plus concrets de mesures prises pour améliorer les performances de la cour. Suite à des discussions menées cette année dans le cadre du Groupe d'étude de l'Assemblée sur la gouvernance, un « Groupe de travail sur les enseignements tirés de l'expérience», composé de juges, élaborera des recommandations aux États parties pour amender le règlement de procédure et de preuve. L'accent sera mis sur l'accélération de la procédure, tout en préservant un procès équitable et d'autres droits compris dans le Statut de Rome.[3]Il n'est pas encore clair si cela conduira à un changement réel, mais l'attention portée à cette question est la bienvenue.

 

Des aspects de la politique de Luis Moreno-Ocampo, le premier procureur de la CPI, ont eu tendance à exacerber plutôt que de remédier aux accusations de partialité et de politisation des travaux de la cour, par exemple, à travers des stratégies d’accusation qui trop souvent ont semblé favoriser un côté ou l'autre d’un conflit.[4]Le procureur qui vient de prêter serment, Fatou Bensouda, a souligné qu'à son avis, «la justice, la véritable justice, n’est pas quelque chose à prendre ou à laisser. Afin d’être efficaces, justes, et avoir un réel pouvoir de dissuasion, les activités et les décisions du Bureau du Procureur continueront de se baser uniquement sur les principes du droit et les éléments de preuve.»[5]

 

Mais le sujet le moins souvent abordé  à l’occasion de ce dixième anniversaire  est de savoir si la CPI est à la hauteur de l'aspiration principale de ses fondateurs, à savoir, si elle est équipée pour rendre justice et avoir un impact réel parmi les communautés affectées.

 

La CPI détient la possibilité d'améliorer le fonctionnement de la justice internationale. Elle bénéficie de dispositions innovantes dans le Statut de Rome et de l'expérience des tribunaux qui existaient avant elle, qui ont souvent été critiqués pour rester trop éloignés des communautés de victimes qu’ils devaient servir. Faire avancer la justice internationale à la CPI devrait englober non seulement les normes les plus élevées de l'administration judiciaire, le respect des droits à un procès équitable, et des progrès dans le développement du droit pénal international, mais également une préoccupation réelle et opérationnelle quant à placer les communautés affectées au cœur du travail de la cour.

 

Cependant, il s'agit d'une vision de la cour qui ne s’est pas encore réalisée. Quoi qu’il en soit, il semble que la CPI et ses États parties risquent de se contenter au cours du temps d'une conception beaucoup plus réductrice de son mandat.

 

Plutôt que de développer des bureaux extérieurs robustes pour soutenir les activités de la cour, celle-ci a dû répartir son personnel entre les différents pays, afin d’étendre à de nouvelles situations des activités comme la sensibilisation.[6]Le Fonds au Profit des victimes met actuellement en œuvre son mandat d'assistance dans seulement deux des sept situations ouvertes devant la Cour : en Ouganda et en République démocratique du Congo.[7]En plus de créer une impression de partialité, l'approche du premier procureur, mentionnée ci-dessus, n'a pas toujours donné la priorité à l'expérience des communautés affectées, en ce que les affaires retenues n'ont pas toujours correspondu aux tendances sous-jacentes des crimes les plus graves ni désigné les personnes largement considérées comme faisant partie des principaux responsables de ces crimes. Cela a potentiellement créé de réelles lacunes dans la capacité de la cour à rendre une justice significative.[8]

 

D’autres problèmes de longue date ont à voir avec l’accès des victimes à leur droit à participer aux procédures devant la cour, droit garanti par le Statut de Rome. Ces problèmes vont de retards dans le traitement des demandes des victimes à la garantie de ressources suffisantes pour les avocats des victimes ce qui permettrait d’ assurer une véritable représentation de leurs clients.[9]Ces défis sont susceptibles d'augmenter car un nombre croissant de victimes cherchent à accéder à leurs droits devant la cour. Le Groupe de travail sur les enseignements tirés de l'expériencea identifié plusieurs aspects de la participation des victimes comme devant faire l’objet d’une étude plus approfondie.[10]

 

Ces lacunes, ainsi que d'autres dans la mise en œuvre par la cour de son mandat d'une manière qui met un accent pratique sur l'impact dans les communautés affectées, ont découlé en partie de décisions politiques de représentants de la cour. Mais il est difficile de ne pas voir l'influence des États parties à l’œuvre. Les États parties ont accordé moins d'importance d'une manière générale dans leurs discussions à la garantie que le travail de la cour est fondé sur le souci de son impact parmi les communautés affectées.

 

Alors que la contribution conjointe du Groupe de travail de La Haye sur les victimes, les communautés affectées et le Fonds au profit des victimes et des réparations a attiré l'attention sur ces questions, les discussions des États parties ont eu tendance à mettre l'accent, mais pas exclusivement, sur les conséquences financières de telles mesures sur le budget de la cour. Une préoccupation palpable concernant l'impact budgétaire imprègne le rapport sur les discussions, en particulier, sur la mise en œuvre de la « Stratégie révisée concernant les victimes »[11]de la cour. Lors de la dernière session de l'Assemblée des États Parties, des efforts concertés ont eu lieu — en fin de compte infructueux — pour que la formulation qui avait été régulièrement adoptée concernant les activités de sensibilisation de la cour soit omise de la résolution omnibus. Bien que l'appréciation par les États parties de l’importance des activités de sensibilisation dans les communautés affectées semble s'être améliorée au cours de l’année dernière (et son rôle a été reconnu dans le rapport le plus récent du Comité du budget et des finances de l'Assemblée[12]), cela a exigé des efforts coordonnés de la part de la société civile pour expliquer, une fois de plus, la nécessité de s'assurer que la justice soit non seulement rendue mais également perçue comme telle. Les « stratégies de sortie » de la CPI dans les pays faisant l’objet d’une situation ont attirées une attention croissante, notamment du Comité du budget et des finances et de certains États parties. Mais une discussion sur l’héritage ou impact de la cour à long terme n'a pas encore eu lieu à l'Assemblée.

 

Ceci constitue une dérogation à la pratique antérieure des États parties. Le souci de l'impact de la CPI dans les communautés affectées a certainement été mis en avant par les organisations non gouvernementales, mais il a également fait l'objet d'un consensus opérationnel parmi les États parties alors que la CPI débutait ses fonctions. Les États parties, par exemple, ont poussé la cour à améliorer ses activités de sensibilisation lorsque la cour elle-même a été lente à les entamer.[13]Lors de la conférence de révision de Kampala en 2010, « L'impact du système du Statut de Rome  sur les victimes et les communautés affectées» a fait la première page de l'ordre du jour.

 

Cette dérive par rapport au souci de l'impact peut résulter de la frustration des États parties concernant la progression limitée de la cour dans ses travaux, diminuant leur ambition à l'égard de l'impact de ces procédures. La question des ressources est également, sans aucun doute, une source de ce problème. Les efforts déployés par certains États parties, confrontés aux conditions économiques difficiles mentionnées ci-dessus, visant à maitriser le budget de la cour, ont été un facteur dans l'effilochage du consensus sur l'importance de l'impact. Des ressources supplémentaires seront probablement nécessaires pour appuyer la mise en œuvre plus robuste du mandat de la cour, notamment des ressources à l'appui des enquêtes et des affaires supplémentaires dans chaque situation.

 

Il est probable que la cour et l'Assemblée devront faire face à des contraintes de ressources pendant un certain temps. Dans ces circonstances, il est essentiel que les collaborateurs de la cour maximisent le financement alloué à la cour et cherchent à être aussi efficaces que possible. Dans ce contexte, l'Assemblée a un rôle important à jouer, guidant la cour dans la façon dont elle utilise ses ressources limitées sans porter atteinte à son mandat général. Indépendamment de la façon dont le budget de la Cour est fixé pour une année donnée, la cour et ses États parties ne peuvent pas permettre que la question de l'impact soit omise de l'ordre du jour. Même si les ressources mises à la disposition du tribunal ne sont pas optimales, l'Assemblée devrait insister pour que la question de l'impact de la cour au sein des communautés affectées reste au cœur de son travail. Comme indiqué plus haut, ce sont des leçons tirées des tribunaux ad hoc qui, si elles sont ignorées, coûteront beaucoup plus aux États parties et à la CPI sur le long terme en termes de perte de crédibilité, de légitimité et d'efficacité.

 

Par conséquent, alors que la cour entame sa deuxième décennie, les pays membres de la CPI et leurs représentants devraient donner la priorité au rétablissement d'un consensus partagé, concernant l'importance de veiller à ce que la cour soit au service des communautés affectées et ait un impact à long terme dans les situations de pays. Réaffirmer ce consensus va prendre du temps. Cela devra se faire à travers les contributions et les discussions avec les représentants de la cour au sein des groupes de travail de l'Assemblée, dont un grand nombre, notamment les contributions sur les victimes, les réparations, la complémentarité et le plan stratégique de la cour, pourrait répondre à l'amélioration de cet impact.

 

A court terme, lors de la prochaine session de l’Assemblée, le rétablissement d'une vision partagée pour la cour pourrait prendre au moins deux formes. Tout d'abord, dans les déclarations du Débat général et les résolutions de l'Assemblée, les États parties devraient :

 

  • Appuyer la participation significative des victimes, la sensibilisation, la présence sur le terrain, le Fonds au profit des victimes et l'attention à l'héritage de la cour en tant qu'éléments du travail de la cour particulièrement pertinents à l'impact à court et à long terme au sein des communautés affectées.

 

Deuxièmement, lors des négociations budgétaires, les États parties devraient :

 

  • Exprimer leur préoccupation concernant la capacité du tribunal à avoir un réel impact au sein des communautés affectées et insister sur le fait que cette préoccupation devrait fournir un repère afin de comparer l'adéquation des ressources fournies à la cour.



 

II. Élection du procureur adjoint

 

Lors de la prochaine session de l'AEP, les États parties éliront un nouveau procureur adjoint à partir d’une liste de trois candidats proposés par le procureur de la CPI, Fatou Bensouda. Un procureur adjoint fort est essentiel pour seconder le procureur dans sa tâche de supervision du Bureau,  pour assurer une gestion efficace de celui-ci, et également pour aider à la prise de décision au plus haut niveau, tout en permettant la délégation appropriée des responsabilités et d'assurer la liaison au nom du Bureau avec d'autres organismes et personnel de la cour.

 

Nous demandons instamment aux États parties de donner la priorité au mérite dans leur examen des candidats. À notre avis, cela signifie donner la priorité aux mêmes qualités que celles qui étaient importantes pour l'élection du procureur de l'an dernier. Celles-ci comprennent :

 

  • Une expérience confirmée d'excellence professionnelle dans des affaires criminelles complexes ;
  • Une aptitude confirmée à agir en toute indépendance et impartialité dans l'exercice des fonctions professionnelles ;
  • Une expérience confirmée d'excellence professionnelle dans la gestion institutionnelle ; et
  • Une expérience confirmée dans le travail avec d'autres organismes ou agences afin d'atteindre efficacement un objectif commun.

 

Il est probable qu'un procureur adjoint fera office d’ambassadeur supplémentaire pour le Bureau et la cour auprès de ses nombreux partenaires, notamment les communautés affectées, les États parties et la communauté internationale en général. Il est donc important que la personne élue possède également une expérience confirmée dans la communication avec un large éventail de parties prenantes. Cependant, étant donné que les responsabilités d'un procureur adjoint impliqueront principalement la gestion quotidienne du Bureau, nous recommandons que les États parties mettent davantage l'accent sur l'excellence professionnelle des candidats dans les affaires criminelles complexes et la gestion institutionnelle.

 

Chacun des trois candidats a rempli un questionnaire préparé par la Coalition pour la Cour pénale internationale (CCPI). Ces questionnaires, disponibles en ligne, peuvent aider les États parties à évaluer leurs qualifications à la lumière des critères énoncés ci-dessus, ainsi que d'autres critères importants.[14]

 

Enfin, Human Rights Watch note la décision du procureur de ne demander, cette fois, que l'élection d'un procureur adjoint pour s’occuper des poursuites. Le premier procureur de la cour  a initialement établi deux postes de procureur adjoint, un pour les poursuites et l'autre pour les enquêtes. Bien que le poste de procureur adjoint chargé des enquêtes soit resté vacant depuis plusieurs années, à notre avis, un procureur adjoint expérimenté pour les enquêtes pourrait offrir au Bureau un certain nombre d'avantages importants.

 

Un procureur adjoint pour les enquêtes pourrait jouer un rôle central dans la conceptualisation et la prise de décision concernant la mise en œuvre de la stratégie d'enquête du Bureau à l'appui de ses poursuites. Il serait également utile pour s'assurer que les points de vue, les besoins et les évaluations des enquêteurs soient pris en compte au plus haut niveau au sein du Bureau.

 

Dans une lettre adressée au procureur de la CPI accueillant sa prise de fonction, nous lui avons demandé de se poser la question de savoir si l'élection d'un procureur adjoint chargé des enquêtes ayant de l’expérience dans la conception et la gestion d’enquêtes complexes pourrait aider à mieux définir les priorités et améliorer les enquêtes du Bureau ou si d’autres mesures pourraient être prises à cet égard.[15]Si le procureur décidait de demander l'élection d'un second procureur adjoint, les États parties devraient être prêts à apporter les ressources requises pour ce poste, ainsi qu’à assurer une élection fondée sur le mérite.

 

III. Coopération

 

A. Évolution positive des pratiques de l'Assemblée sur la coopération

Au cours des 10 années écoulées depuis l'entrée en vigueur du Statut de Rome, l’étendue de la coopération et du soutien des États au travail de laCPIest devenue plus claire. Cela est vrai en ce qui concerne le soutien diplomatique et politique nécessaire à la cour pour mener à bien son travail judiciaire de façon indépendante, comme indiqué dans la partie I ci-dessus, ainsi que l'expertise technique et la capacité dédiée afin de garantir que les autorités nationales soient équipées pour répondre aux demandes d'assistance judiciaire et d'appui logistique.

 

Tout particulièrement lorsqu’il s’agit d’assistance judiciaire et de soutien logistique, les États parties ont l'occasion par le biais de l'Assemblée de s'entraider pour consolider la coopération et l'assistance à la cour, notamment par l'échange des bonnes pratiques. Mais, jusqu'à cette année, l'Assemblée n’avait fait que des progrès limités s’agissant de s’équiper pour faciliter une coopération plus efficace par les États parties.

 

La nomination d'une série de points focaux ou facilitateurs pour faire avancer la discussion sur la coopération a constitué un outil important, en particulier pour promouvoir le dialogue entre les États parties et la cour. De plus, le rapport de 2007 du Bureau sur la coopération — avec ses 66 recommandations, regroupées autour des thèmes des mécanismes juridiques généraux ; du soutien diplomatique et public ; de la coopération à l'appui des analyses, des enquêtes, des poursuites et des procédures judiciaires ; de l’arrestation et de la remise des criminels ; de la protection et de la sécurité des témoins ; de la logistique et de la sécurité ; du personnel ; de la coopération dans le cadre des Nations Unies et de la coopération avec les organisations internationales et régionales[16]— demeure une référence importante, bien que celle-ci soit sous-utilisée.

 

Mais ce travail des points focaux et des facilitateurs de coopération ne s'était pas traduit par une discussion plénière sur la coopération lors de la session annuelle de l'Assemblée, ce qui aurait porté les discussions devant un public plus large. Ce travail n'avait pas non plus abouti, comme nous l'avons recommandé dans le passé, à une décision de l'Assemblée de constituer un « groupe de travail » intersessionnel ou autre mécanisme sur la coopération visant à augmenter la capacité du facilitateur pour la coopération à effectuer des travaux dans les régions prioritaires, avec la participation d’experts basés dans les capitales nationales.[17]L’attention de l’Assemblée au niveau de la coopération avait au lieu de cela été reléguée à des références dans les déclarations du Débat général, des consultations informelles et la négociation de textes de résolution. Bien que ces éléments soient importants — et le Débat général, comme il est indiqué ci-dessus, reste une importante tribune pour réaffirmer l'engagement politique à la CPI — ils ne remplacent pas les discussions d'experts centrées sur l’amélioration de la coopération des États en termes concrets.

 

Cette année fournit un certain nombre d'occasions importantes pour faire évoluer les pratiques de l'Assemblée sur la coopération de manière positive. Les États parties devraient saisir ces opportunités à la lumière de la nécessité de redoubler d'efforts pour soutenir la cour alors que celle-ci entre dans sa deuxième décennie. L'Assemblée et les Etats membres individuels ne devraient pas rester inactifs face aux besoins manifestes de la cour.

 

1. Réunions d’experts intersessionnelles

Dans le cadre de la facilitation du Groupe de travail de La Haye sur la coopération sous la direction d’Anniken Ramberg Krutnes, Ambassadrice de la Norvège, un séminaire sur les demandes d'assistance dans l'identification, le gel et la saisie des avoirs et des biens a eu lieu à La Haye le 1er octobre 2012. Un résumé des recommandations de la réunion, qui tient compte du rôle de la cour, des États et d'autres organes importants comme le Conseil de sécurité de l'ONU, est annexé au rapport du Bureau sur la coopération pour cette session.[18]

 

Cette attention est méritée. L’amélioration de la coopération en ce qui concerne l'identification, le gel et la saisie des avoirs, peut bénéficier aux victimes, sous la forme de l’exécution finale des décisions de confiscation à l'encontre des personnes condamnées comme mesure de réparation en faveur des victimes . Elle peut également bénéficier au système d'aide juridique de la cour où le dépistage des avoirs peut être pertinent pour la détermination de l'indigence, et la cour peut demander le remboursement des frais de justice à partir des avoirs gelés. L'information financière peut aussi avoir un intérêt direct pour le Bureau des enquêtes du procureur. En outre, comme le fait remarquer le rapport du Bureau de 2007, le gel des avoirs peut aider à démanteler les réseaux de soutien qui facilitent la perpétration continue de crimes et entravent les arrestations.[19]

 

À notre avis, ce type de réunion est dans la lignée de l’orientation de l'Assemblée vers un « groupe de travail » intersessionnel sur la coopération en fournissant une occasion de débat ciblé sur les domaines prioritaires avec des experts invités et l'échange de bonnes pratiques. Lors de la prochaine session de l’Assemblée, les États parties devraient tenir compte du fait que de tels ateliers sur d'autres domaines prioritaires de coopération, tels que la protection des témoins, devraient être organisés dans l'année à venir et devraient encourager la tenue de réunions supplémentaires. Au fil du temps l'expérience de ces séminaires pourrait fournir un soutien supplémentaire pour la création d'un « groupe de travail » de l’Assemblée sur la coopération, et les États parties devraient envisager la création, enfin, d'un groupe de travail de coopération lors de la 12ème session de l’Assemblée l'année prochaine. Il est fondamental que  les experts et ceux qui répondront au nom des autorités nationales aux demandes de coopération de la cour soient présents afin de tirer le meilleur parti de ces réunions.

 

2. Mise en œuvre des procédures pour répondre à la non-coopération

Cette année a vu la mise en œuvre des procédures du Bureau sur la non-coopération adoptées lors de la 10ème session de l’Assemblée. L'adoption et la mise en œuvre ultérieure de ces procédures — comme il en est question ci-dessous — reflètent un effort important de la part de l'Assemblée pour se réconcilier avec ses responsabilités en vertu des articles 87 et 112 du Statut de Rome de réagir aux conclusions de non-coopération par les chambres.[20]

 

Comme le savent les États parties, les procédures s'articulent autour de deux scénarios distincts : tout d'abord, lorsque la cour a déféré une situation spécifique de non-coopération à l'AEP, et, d'autre part, préalablement à une saisine de la cour pour non-coopération, lorsqu'une action d'urgence peut être nécessaire pour assurer la coopération dans l'arrestation et la remise d'une personne faisant l’objet d’un mandat d'arrêt de la CPI.[21]Nous abordons de façon plus détaillée ci-dessous la question de l'importance cruciale de ces deux types de procédures pour assurer l'exécution des mandats d'arrêt de la CPI.

 

Les procédures dans le premier scénario ont été mises en œuvre au cours de l’année dernière, en réponse à deux conclusions de décembre 2011 de la chambre préliminaire de la CPI selon lesquelles le Tchad et le Malawi avaient omis de se conformer à la demande de la cour d'arrêter et de remettre le président soudanais Omar el-Béchir. Cela représente un réel engagement de la part de l'Assemblée et de son président, mais illustre également les réelles difficultés rencontrées lorsqu’il s’agit d’apporter une réponse efficace et significative qui puisse se traduire par une meilleure coopération à l'avenir.[22]

 

D'une part, selon le rapport du Bureau sur les procédures soumises pour la prochaine session de l’Assemblée, le dialogue du Bureau avec le Malawi semble avoir contribué à une évolution positive. Le Malawi « a réagi promptement aux communications du Président et s’est engagé dans un dialogue visant à la non-répétition de l'incident de non-coopération qui a déclenché les actions du Président. » Suite à un changement de gouvernement, le Malawi a par la suite refusé d'accueillir el-Béchir une deuxième fois sur son territoire sans l'arrêter, ce qui a entraîné le déplacement du sommet de l'Union africaine de juin 2012 de Lilongwe à Addis-Abeba. Cela a représenté une étape importante dans le renforcement des obligations des États parties africains de la CPI à faire appliquer les mandats d'arrêt de la cour et de l'engagement du Malawi envers la CPI, en dépit des décisions de l'Union africaine appelant les États parties africains à ne pas coopérer dans l'arrestation et la remise d'el-Béchir.

 

D'autre part, toujours selon le rapport du Bureau, le dialogue avec le Tchad n'a abouti qu'à ce que le gouvernement réaffirme sa position selon laquelle il était en pleine conformité avec le droit international, en invoquant les mêmes décisions de l'Union africaine effectivement rejetées par le Malawi.

 

Ce bilan mitigé démontre à la fois les résultats positifs qui peuvent être obtenus par le biais des procédures de non-coopération de l'Assemblée—  parallèlement à d’autres efforts de plaidoyer, notamment par les États et la société civile[23]— et la nécessité pour l'Assemblée d'aller plus loin dans le développement de ces procédures. Le Bureau recommande que la non-coopération du Tchad soit examinée durant la prochaine session de l'Assemblée. Cela pourrait se faire dans le cadre plus large d'une discussion sur la continuation de l'amélioration et de la modernisation des procédures de réponse de l'Assemblée aux cas de non-coopération.

 

Trois domaines peuvent présenter un intérêt particulier.

 

Premièrement, le rapport du Bureau fait remarquer que la présidente de l'Assemblée « a appelé les États parties à évoquer la décision de la Chambre préliminaire I dans leurs contacts bilatéraux avec les autorités du Tchad », mais n’indique pas dans quelle mesure cela a pu avoir lieu ou pas.[24]À notre avis, rendre les procédures de l'Assemblée sur la non-coopération aussi efficaces que possible exige que ces procédures se répercutent bien au-delà du Bureau lui-même. Les États parties en situation de non-respect de leurs obligations au regard du Statut de Rome devraient être contraints à entendre leur défaut de coopération directement de la part d'autres États parties et aux plus hauts niveaux de la diplomatie. Au cours des discussions de cette Assemblée, les États parties pourraient envisager le partage dans les grandes lignes de leur expérience en faisant des efforts de dialogue avec d'autres États parties sur les questions de non-coopération.

 

Deuxièmement, outre suggérer l'adoption d'une résolution de l'Assemblée, les procédures adoptées sur la non-coopération ne portent pas sur les modalités réelles d'une « réponse formelle » censées être prises par l’AEP suite au dialogue avec l'État concerné dans le cas où une affaire est renvoyée par la cour. La perspective d'un blâme public devant l'AEP est probablement l'un des outils les plus puissants disponibles à l'Assemblée pour assurer la coopération. Dans le même temps, les États parties devraient poursuivre les discussions et :

 

  • Donner autorité au Bureau pour fournir un rapport complémentaire afin de parvenir à une liste commune de mesures alternatives disponibles pour l'AEP, notamment obtenir des garanties de non-répétition et la suspension des droits de vote à l’AEP.

 

Enfin, il est clair qu'un engagement continu sera nécessaire au sein de la CPI, de ses États parties et de l'Union africaine. Les décisions de non-coopération de l'Union africaine ont fait pression sur les États africains parties à la CPI. À cet égard, Human Rights Watch se félicite de la tenue en octobre 2012 d'une seconde réunion conjointe UA-CPI à Addis-Abeba avec le soutien de l'Organisation internationale de la Francophonie, ainsi que de la visite de la présidente de l'Assemblée, l'Ambassadrice Tiina Intelmann d'Estonie, à Addis en octobre 2012.[25]

 

3. Réunion plénière sur la coopération

La prochaine session de l'Assemblée comporte, pour la première fois, une réunion plénière sur la coopération. Ceci est un développement important qui servira à donner à la coopération la plate-forme que le sujet mérite au sein des débats de l'Assemblée. C'est également un retour à l'exemple donné par le bilan sur la coopération lors de la conférence de révision de Kampala en 2010 et donnera un plus ample effet à la Déclaration de Kampala sur la coopération, qui « [a] décide[é] que l'AEP devrait, dans l’examen de la question de la coopération, mettre un accent particulier sur le partage des expériences. »[26]Human Rights Watch a recommandé depuis plusieurs années que l'Assemblée crée un point permanent sur la coopération sur l’ordre du jour de ses sessions annuelles.

 

Human Rights Watch croit savoir que les thèmes à l'étude au cours de la discussion plénière sur la coopération sont (1) l'identification, le gel et la saisie des biens ; et (2) les arrestations. Tous les thèmes retenus pour la discussion sont susceptibles de représenter un petit sous-ensemble de questions urgentes de coopération et ne devraient pas diminuer la préoccupation pour d'autres domaines, notamment, par exemple, les besoins urgents identifiés par la cour de conclure des accords supplémentaires pour la relocalisation (sur une base temporaire ou plus permanente) des témoins, des victimes et autres personnes à risque.[27]Mais des discussions ciblées portant sur un certain nombre de domaines sont susceptibles de produire des résultats plus concrets.

 

Afin de tirer le meilleur parti de cette opportunité, il sera important que les États parties soient prêts à apporter des contributions significatives aux thèmes identifiés par la discussion. Une discussion plénière sur la coopération, bien qu'étant une évolution significative dans la pratique de l'Assemblée, ne portera ses fruits que si  le temps et les investissements consacrés par les États parties dans sa préparation ainsi que leur participation active au cours de la session sont suffisants. Pour contribuer à l’information  des États parties dans leurs préparatifs et leurs contributions, nous vous proposons ci-dessous quelques réflexions sur les arrestations. Une discussion sur les arrestations engage un certain nombre de questions difficiles et sensibles, notamment les problèmes de non-coopération dans les arrestations par des membres de la CPI et les décisions prises par l'Union africaine concernant l'immunité des chefs d'État, mentionné ci-dessus. Bien que ces questions méritent réflexion, nous pensons que l'accent devrait être mis dans la discussion plénière sur les expériences des État parties à ce jour en accord avec l'esprit d’ « échange de bonnes pratiques ».

 

B. Arrestations

Une attention de l'Assemblée ciblée sur les arrestations est nécessaire. Bien sûr, la session de l'Assemblée n'est pas un forum où les États parties devraient discuter des spécificités des efforts particuliers d'arrestation. Cette discussion, sans surprise, serait mieux placée dans d'autres contextes. Néanmoins, la « valeur ajoutée» d’une discussion sur les arrestations à l'Assemblée, en s'appuyant sur les enseignements tirés de l’expérience en général, réside dans la création d'une plus grande clarté concernant ce qui est nécessaire et dans l’augmentation du soutien réel pour exécuter et assister des mandats d'arrêt dans la pratique.

 

Bien qu'il y ait eu des pratiques positives sur les arrestations, avec la reddition de six suspects à la CPI par les autorités de la République démocratique du Congo, la France, la Belgique et la Côte d'Ivoire, des mandats d'arrêt contre 12 autres personnes restent en suspens.[28]

 

La non-arrestation de Joseph Kony et d'autres commandants de haut rang de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) a laissé la LRA libre d'exporter ses atrocités au travers des frontières d'Afrique centrale, créant ainsi de nouvelles générations de victimes de la LRA en République démocratique du Congo, au Sud-Soudan, et en République centrafricaine.[29]Cela a bloqué les progrès de la cour en Ouganda, en menaçant de saper les investissements dans la sensibilisation et la facilitation de la participation des victimes au sein des communautés affectées et en exigeant que la cour poursuive les opérations même en l'absence d'une procédure judiciaire.

 

De même, la non-arrestation de Bosco Ntaganda, qui jusqu'à récemment avait était protégé par les autorités congolaises et promu au sein de l'armée congolaise, a laissé un record inégalé de nouvelles exactions. Depuis que la CPI a émis un premier mandat d'arrêt contre Ntaganda en août 2006 (un second mandat d'arrêt pour une nouvelle série d’accusations a été émis en juillet 2012), les recherches de Human Rights Watch ont documenté sa participation répétée à des violations de droits humains, des violations des lois de la guerre et des atrocités à grande échelle.[30]

 

Contraindre un gouvernement récalcitrant à procéder à l’arrestation et à la reddition de criminels constitue le « cas difficile » de la coopération. En opposant le décret de la cour aux prérogatives de la souveraineté nationale, l'arrestation est le « talon d'Achille » de l'application des décisions qui met en évidence les limites d'un système de justice internationale encore naissant. Malgré les difficultés, l'expérience de deux décennies de pratique de tribunaux pénaux internationaux montre que les efforts déployés par les États pour exercer leur influence à la fois politique, diplomatique et économique peuvent être décisifs pour l'arrestation et la reddition de criminels.

 

Tandis que le Statut de Rome célèbre le dixième anniversaire de son entrée en vigueur, la communauté de la justice internationale en général marque deux étapes importantes : le verdict dans le procès de l'ancien président du Liberia, Charles Taylor, devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), premières poursuites judiciaires jamais intentées au niveau international à l’encontre d'un ancien chef d'état depuis Nuremberg, et le début des procès devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) de ses derniers accusés encore en fuite, dont l'ancien chef serbo-bosniaque Ratko Mladic.

 

Ces évolutions ont été rendues possibles par des efforts concertés et collectifs sur les arrestations. La reddition au TPIY par la Serbie de personnes inculpées a été directement liée à la pression diplomatique autour des négociations sur son adhésion à l'Union européenne. Dans le cas de Taylor, l’augmentation de la pression diplomatique en 2006 par certains États, notamment le Royaume-Uni et les États-Unis, a contribué à sa reddition. En dépit de son inculpation pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité, Taylor avait bénéficié d’un refuge au Nigeria.

 

L'expérience à ce jour offre au moins quatre enseignements pour les arrestations devant la CPI. Les États parties pourraient réfléchir à ces enseignements ainsi qu’à d’autres tirées de leur propre pratique dans leurs contributions au cours de la discussion plénière sur la coopération.

 

1. Nécessité d'efforts d'arrestations adaptés

Il n'existe pas deux scénarios d'arrêt susceptibles d'être les mêmes ou sensibles aux mêmes stratégies. Dans certains cas, l'arrestation d'un suspect peut être bloquée par le refus des autorités nationales d'appréhender un individu sur leur territoire. Dans d'autres cas, les autorités nationales n'ont pas toujours la capacité de mener des opérations de répression.

 

Ces deux situations présentent des défis difficiles nécessitant des réponses différentes. Dans le premier cas, l'utilisation créative de la diplomatie, comme on le verra ci-dessous, peut s’avérer l'ingrédient le plus important, en catalysant la volonté de la part des autorités nationales de procéder à des arrestations, notamment en augmentant le prix à payer si ce n’est pas fait. Dans le deuxième cas, augmenter la capacité nationale d'arrestation — peut-être même un défi plus grand — peut exiger d’aborder simultanément la volonté politique nécessaire entre plusieurs pays ou organisations intergouvernementales pour soutenir une opération d'arrestation internationale et apporter l'expertise nécessaire pour mener à bien ces opérations, ainsi que de s'assurer qu’un cadre juridique de base soit en place. Cela peut être pertinent dans la négociation des mandats des missions de maintien de la paix régionales et des Nations Unies.

 

Dans les deux scénarios les moyens pour atteindre ces objectifs diffèrent également selon les circonstances sous-jacentes. Les grandes campagnes publiques peuvent parfois être efficaces pour catalyser la pression publique en faveur de l’arrestation ; d'autres fois, ces campagnes publiques peuvent perturber des négociations délicates. Le choix des outils de plaidoyer est important et peut évoluer à mesure que les efforts d'arrestation se développent dans une affaire donnée.

 

Compte tenu de la nécessité d'une approche sur mesure, et du nombre de cas existants de la cour, les États parties devraient envisager de renforcer la capacité et les ressources de la cour pour analyser et traiter — notamment en mobilisant le soutien des États parties et des autres acteurs internationaux — les facteurs conduisant à la non-arrestation.

 

2. Utilisation créative de la diplomatie

Même si les approches sur mesure sont nécessaires, la valeur du recours à la diplomatie active et basée sur des principes est susceptible d'être un ingrédient important dans les efforts d'arrestation fructueux, en particulier lorsque les autorités nationales agissent pour protéger les individus de la justice. Les exemples du TPIY et de Taylor cités ci-dessus illustrent amplement ce sujet. À cette fin, les États parties devraient régulièrement soulever la question de l’arrestation et la reddition lors de contacts bilatéraux avec les États non coopératifs, lors d’interactions avec des États tiers influents, lors de réunions avec des organisations intergouvernementales régionales et internationales et lors des sessions de l’AEP. Les États parties devraient également faire preuve de créativité dans l'identification et l'utilisation pertinente de leur influence politique et, le cas échéant, économique, telle que des sanctions.

 

L'adoption par l'Assemblée de procédures relatives à la non-coopération est un exemple de mobilisation de la diplomatie créative. Cela est particulièrement vrai si, comme recommandé ci-dessus, les États parties établissent des contacts bilatéraux afin de s'assurer que l'exécution des procédures par le Bureau se répercute dans les capitales et si l'Assemblée continue à élaborer une liste de réponses aux conclusions de la CPI sur la non-coopération. Human Rights Watch se félicite également des travaux en cours par l'Union européenne d’élaboration de directives à l’intention de ses institutions et de ses États membres afin de déployer d'une manière cohérente les outils diplomatiques à sa disposition pour répondre aux cas de non-coopération. Ce travail peut servir de modèle à d'autres organisations régionales ou États parties afin d’élaborer des procédures qui guideront leurs propres réponses.

 

3. Stratégies à long terme

Les gouvernements récalcitrants sont capables de créer de véritables obstacles et, par conséquent, les arrestations peuvent prendre un certain temps. Tout en faisant tout leur possible pour hâter l’arrestation et la reddition des criminels de sorte que les procédures judiciaires de la cour puissent aller de l'avant de manière efficace, les États parties doivent également être en mesure d’adopter, dans les cas difficiles, une vision à long terme. Cela a certainement été l'expérience de tous les tribunaux ad hoc et  spéciaux. Il y a eu un retard de 16 années pour traduire Mladic devant le TPIY, et il a fallu 15 ans aux autorités serbes à Belgrade pour appréhender le leader serbo-bosniaque Radovan Karadzic. L’arrestation de Charles Taylor a pris près de trois ans, une fois que l'acte d'accusation a été rendu public. Félicien Kabuga ainsi que d’autres accusés du Tribunal pénal international pour le Rwanda sont toujours en fuite.

 

La nécessité d'adopter une vision à long terme, cependant, n'est pas une excuse pour tomber dans l'inaction. Les États parties ont un rôle important à jouer pour réaffirmer la validité et l'importance des mandats d'arrêt de la CPI dans le cadre de stratégies à long terme lorsque l'arrestation et la remise immédiates sont improbables. Des réponses fortes et cohérentes aux conclusions de la CPI de non-coopération dans l'exécution de mandats d’arrêt sont un élément clé pour hâter les progrès. Comme indiqué plus haut, les efforts déployés par l'Assemblée et l'Union européenne à cet égard sont les bienvenus. Tout aussi importante est l'attention donnée à la fois dans les procédures de l’Assemblée et aussi, à notre connaissance, dans les discussions de l'Union européenne sur l'anticipation et la prévention de la non-coopération dans l'exécution des mandats d'arrêt (c'est-à-dire des procédures d’« alerte précoce »).

 

Nous répétons ici les observations que nous avons faites avant la dernière session de l’Assemblée sur l'importance de ces types de réponses pour une stratégie d'arrestation à long terme réussie. Les visites d’el-Béchir prévues dans certains États parties et même certains États non-parties ont été évitées grâce à des efforts concertés entre les diplomates et la société civile internationale et locale pour exercer une certaine pression sur les autorités nationales afin qu’elles interdisent sa venue ou qu’elles l’arrêtent. Il s'agit notamment de visites au Kenya, en République centrafricaine, en Libye, en Zambie et en Malaisie. De plus, à certains moments, même là où les visites ont eu lieu, par exemple au Malawi, des efforts similaires ont réussi à assurer une large couverture médiatique sur les obligations des États parties à la CPI d'exécuter les mandats d'arrêt de la cour et sur l'opposition de la société civile et d’États parties de la CPI à de telles visites sans arrestation.

 

Ces succès sont loin, bien sûr, d'être des arrestations. Mais ils garantissent qu’el-Béchir soit connu internationalement comme un fugitif, signalent  que l’approche politique « les affaires sont les affaires » ne devrait pas exister avec ceux qui cherchent à échapper à la justice ainsi qu’affirment l'intégrité des mandats d'arrêt de la CPI et l'importance de la coopération avec la CPI. Au fil du temps, ceci contribue à maintenir la validité des mandats d'arrêt et peut contribuer à la marginalisation qui est, à certains moments, une condition préalable à une éventuelle arrestation.

Enfin, un élément important pour signaler que l’approche politique « les affaires sont les affaires » n’a plus cours avec les individus faisant l’objet d’un mandat d'arrêt de la CPI est d'éviter les contacts entre ces personnes et les représentants des États parties à la CPI ou d'autres États. En particulier lorsque ces contacts font l’objet d’une certaine publicité qui peut se répercuter au niveau international et promouvoir un sentiment que le mandat d'arrêt de la CPI est mis de côté et n'a pas de soutien international. Le Bureau du procureur a souligné l'importance d'éviter les contacts non essentiels, comme l'ont fait les Nations Unies et l'Union européenne.[31]D'autres États parties devraient envisager d'adopter des politiques nationales pour éviter les contacts avec les fugitifs de la CPI.

 

4. Procédures nationales et législation de mise en œuvre

Même si la mobilisation d’efforts d'arrestation a souvent un élément politique important, les États parties ne devraient pas négliger l'importance d'avoir des procédures nationales mises en place pour traiter de manière appropriée les demandes de la cour d'arrestation et de reddition. Cela permet de s'assurer que les États peuvent en pratique répondre à leur obligation de coopérer avec la cour et c’est une composante importante de l'exigence contenue dans l'article 88 du Statut de Rome que «les États Parties veillent à prévoir dans leur législation nationale les procédures qui permettent la réalisation de toutes les formes de coopération visées dans [la partie IX du Statut]. » Le rapport de 2007 du Bureau sur la coopération note, cependant, qu'« un certain nombre de questions peuvent constituer des obstacles à un transfert rapide. » Il recommande qu'« il peut être utile pour les États Parties d’envisager d'établir préalablement à une demande, des lignes directrices nationales pertinentes pour fournir une assistance logistique en matière de transferts. Ces lignes directrices peuvent également traiter des questions relatives aux suspects en transit à travers le territoire des États parties. La cour peut être en mesure de fournir une liste des questions liées aux transferts. »[32]Un échange de bonnes pratiques au sujet de ces procédures nationales est susceptible d'être particulièrement utile lors de la réunion plénière de l'Assemblée sur la coopération.

 

L'expérience récente au Kenya et en Afrique du Sud souligne également une interaction importante entre la législation sur la mise en œuvre du Statut de Rome et les efforts d'arrestation. Le Kenya a mis en œuvre le Statut de Rome en 2009, tandis que la mise en œuvre en Afrique du Sud du Statut de Rome de la Loi sur la Cour pénale internationale est entrée en vigueur en 2002. Dans les deux pays, ces lois ont consolidé l'obligation d'arrêter el-Béchir, indépendamment de la décision de l’Union africaine de juillet 2009 appelant ses pays membres à ne pas coopérer dans l'arrestation et la reddition d’el-Béchir.[33]

 

En Afrique du Sud, les autorités ont conclu que, malgré la décision de l’Union africaine  de juillet 2009, la ratification du Statut de Rome et la législation nationale de mise en œuvre obligeraient à l'arrestation d’el-Béchir s’il devait entrer en Afrique du Sud.[34]Au Kenya, la visite d’el-Béchir en août 2010 en toute liberté a incité la section kényane de la Commission internationale de juristes (CIJ-Kenya) à pétitionner auprès de la Cour suprême pour obtenir un mandat d'arrestation provisoire. Le tribunal a statué en faveur de CIJ-Kenya et a émis le mandat contre el-Béchir, estimant que CIJ-Kenya avait qualité pour demander un mandat en vertu de la Loi relative aux crimes internationaux suite à l'omission du ministre responsable de se conformer à ses obligations de le faire au regard de la loi.[35]Un appel dans l'affaire reste en suspens, mais le mandat demeure en vigueur.[36]Ces situations reflètent l’éventualité que la disponibilité de procédures nationales, notamment par la législation de mise en œuvre, peut réduire la latitude pour  la prise de décision politisée en ce qui concerne le respect des obligations de coopération.

 

À la lumière de ce qui précède, dans des déclarations au cours de la réunion plénière sur la coopération, les États parties devraient :

 

  • Contribuer activement à la réunion plénière sur la coopération en étant prêts à partager les enseignements et les bonnes pratiques sur les thèmes retenus pour le débat, c'est-à-dire l’identification, le gel et la saisie des actifs financiers et les arrestations ;

 

  • S'appuyer sur le rapport du Bureau de 2007 sur la coopération et ses 66 recommandations en vue de renforcer la coopération avec les États ;

 

  • Souligner l'obligation des États parties à la CPI de coopérer pleinement avec la cour, notamment en procédant à des arrestations et en s'engageant à s’entraider et à fournir la coopération la plus complète même dans des circonstances difficiles ;

 

  • Évaluer si la cour dispose d'une capacité suffisante pour soutenir les efforts d'arrestation ; et

 

  • S'engager à adopter des politiques au niveau national pour consolider la prévention et la réponse à la non-coopération, et à éviter les contacts avec les personnes faisant l’objet de mandats d’arrêt de la CPI comme un élément clé des stratégies d'arrestation à long terme.

 

Dans la résolution autonome sur la coopération, les États parties devraient :

 

  • Réfléchir aux résultats et aux recommandations de la discussion plénière sur la coopération, notamment en prenant note de tout résumé publié, afin de fournir un point de référence supplémentaire pour de futurs efforts visant à améliorer la coopération ;

 

  • Conserver les mots entre crochets dans le projet de résolution concernant l’abstention des contacts non-essentiels avec des personnes faisant l’objet de mandats d’arrêt de la CPI ;

 

  • Renouveler le mandat de facilitateur pour la coopération en vue de maintenir l’attention au sein de l'AEP sur les mesures nécessaires pour renforcer la coopération avec la cour, notamment par l'organisation d'autres réunions intersessionnelles et demander au facilitateur pour la coopération d’élaborer des propositions en consultation avec les États parties pour la création d’un groupe de travail sur la coopération en vue d’établir ce groupe de travail lors de la 12e session de l'AEP ; et

 

  • Faire de la coopération un point permanent de l’agenda pour les futures sessions de l'AEP.



 

IV. Complémentarité

Le principe de complémentarité dans le Statut de Rome précise que la responsabilité primordiale de la lutte contre l’impunité pour les atrocités repose directement sur les épaules des États.[37]Toutefois, ce n’est qu’à Kampala que les États ont commencé à envisager la façon de répondre aux défis très réels auxquels les États sortant d’un conflit ou de violences intenses sont confrontés pour remplir cette obligation en pratique. La résolution de Kampala sur la complémentarité, qui reconnaissait que «d'autres mesures doivent être adoptées au plan national si nécessaire et que l'assistance internationale doit être renforcée afin de pouvoir poursuivre efficacement les auteurs des crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale » a contribué à enclencher les discussions sur la meilleure façon d’intégrer les acteurs du développement dans la lutte contre l’impunité.[38]

 

La prise de conscience qui a commencé à Kampala a continué de s’approfondir lors des discussions plus techniques entre les praticiens de la justice internationale et les acteurs du développement  sous l’égide du processus de « Greentree » convoqué conjointement par l’organisation non gouvernementale Centre International pour la Justice Transitionnelle et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). En quelques années à peine, les discussions diplomatiques sur la CPI et l’avenir de la justice internationale se sont de plus en plus centrées sur ce que les États peuvent faire — notamment par le biais de leur allocation d’assistance au développement — afin d’améliorer la capacité nationale à gérer les crimes odieux.

 

Dans ce contexte, nous nous réjouissons du débat général sur la complémentarité lors de l’AEP de cette année. Comme nous l’avons déjà déclaré, l’AEP, organisme réunissant les États donateurs et bénéficiaires, les parties non étatiques et la société civile unis par un engagement commun à lutter contre l’impunité pour les crimes relevant du Statut de Rome, est idéalement placée pour agir comme garant du principe de complémentarité. Le fait que l’administratrice du PNUD, pilier central du développement au sein du système de l’ONU, prononcera le discours d’ouverture est un tribut au potentiel pour le progrès de l’intégration de la lutte contre l’impunité pour les crimes odieux parmi les acteurs du développement.

 

L’évolution positive dans les cercles diplomatiques sur le principe de complémentarité, bien qu’ importante, doit aller de pair avec des progrès concrets sur le terrain où de telles atrocités ont été commises. À cet égard, l’enthousiasme suscité par la complémentarité ne devrait pas obscurcir le fait que les obstacles à la réalisation de la justice nationale pour les crimes odieux peuvent être notables.

 

De nombreux systèmes judiciaires nationaux font face à un défi manifeste, à savoir celui des capacités : mener des enquêtes, des poursuites judiciaires, et juger les affaires portant sur des atrocités exigent une expertise spécialisée. Dans de nombreuses situations, les bailleurs de fonds peuvent aider à renforcer les capacités en canalisant des fonds déjà affectés à des projets de réforme de l’État de droit plus spécifiquement vers le renforcement de capacités des systèmes nationaux à rendre justice pour des crimes internationaux (par exemple par le biais de programmes de formation stratégiques et rigoureux pour aider à élaborer les ensembles de compétences nécessaires, en établissant des mécanismes de protection des témoins, et en formant du personnel de sécurité). Affecter des fonds spécifiques pour les crimes relevant du Statut de Rome comme une sous catégorie « liée mais distincte » de l’assistance à l’État de droit — à la façon de ce qui est déjà fait par les États pour la piraterie, le terrorisme et le crime organisé — peut encourager la coopération avec le gouvernement bénéficiaire concerné lorsqu’il s’agit d’identifier les critères de réussite. De cette façon, une participation plus engagée entre le bailleur de fonds et le gouvernement bénéficiaire accroit l’influence du bailleur lorsqu’il s’agit de voir les résultats au niveau national.

 

Cela bien sûr suppose l’adhésion et le soutien continus des acteurs du développement qui déterminent les priorités de financement sur le terrain — un facteur clé qui ne peut pas être tenu pour acquis. Nos récentes recherches en Guinée, par exemple, ont révélé que tandis que les partenaires internationaux, dont l’Union européenne, la France, l’Allemagne et le PNUD, fournissent une assistance importante à l’État de droit, aucun de ces fonds n’ont jusqu’ici été orientés spécifiquement vers la menée d’enquêtes et de poursuites de crimes émanant du massacre du 28 septembre 2009.[39]Nous espérons que l’adoption de la « boite à outils » sur la complémentarité de l’Union européenne, longtemps attendue, qui est essentiellement un manuel fournissant des instructions pour son développement de projets en vue de renforcer les capacités nationales à répondre aux crimes internationaux graves, répandra davantage la complémentarité dans les missions diplomatiques sur le terrain.

 

À cette fin, sans transformer la cour en une agence du développement, le personnel de la CPI a un précieux rôle à jouer pour combler les lacunes de capacités afin de garantir que l’assistance des bailleurs de fonds est utilisée au mieux. De fait, le rapport de la cour à l’AEP souligne un certain nombre de domaines spécifiques où les efforts de renforcement des capacités sont tout spécialement nécessaires, et où l’expertise de la cour pourrait être particulièrement utile pour concevoir et organiser la prestation d’une telle assistance.[40]Comme le reconnait également le rapport, lorsque ces efforts sont entrepris dans les situations de la CPI faisant l’objet d’une enquête et qu’ils utilisent l’expertise de la CPI,  ils peuvent renforcer l’héritage de la cour ou l’impact à long terme et faciliter l’éventuelle sortie de la cour.[41]

 

Mais l’assistance au développement, même lorsqu’elle est attribuée avec la contribution de la cour, n’est pas par elle-même suffisante pour constater une avancée sur le terrain lorsqu’il s’agit de rendre justice pour les crimes odieux. La réussite des projets de renforcement de capacités visant à soutenir les efforts de justice nationale dépend de la volonté du gouvernement bénéficiaire à les laisser se développer. Il n’est pas surprenant que cette volonté puisse être peu répandue. Les crimes odieux — les crimes les plus graves que connaisse l’humanité — sont par nature très sensibles et difficiles à poursuivre, en particulier lorsqu’ils sont commis en réponse à des tensions ethniques ou politiques anciennes.

 

Le caractère sensible de ces crimes ne fait que s’intensifier si les individus qui en sont responsables occupent des postes de pouvoir au gouvernement. Lorsqu’une volonté existe, elle peut être inégale, ayant pour résultat un appétit de poursuivre seulement les supposés « perdants » du conflit, qui peuvent également être les ennemis politiques du gouvernement en place. Si la réalisation d’une certaine justice peut bénéficier à un électorat de victimes, la recherche d’une lutte déséquilibrée contre l’impunité risque d’exacerber au lieu de calmer les tensions sous-jacentes qui ont débouché sur  le déclenchement des violences et les crimes commis à grande échelle en premier lieu.

 

Les efforts pour réaliser la justice nationale doivent également affronter la réalité d’institutions défaillantes dans des pays qui se relèvent d’un conflit ou d’un épisode de violence intense. Les atrocités perpétrées à grande échelle sont en général le résultat de l’effondrement d’institutions cruciales pour le soutien à l’État de droit. D’après les recherches que nous avons menées en Côte d’Ivoire, en République démocratique du Congo et en Guinée, cela se manifeste le plus souvent dans le secteur de la justice par le manque d’indépendance judiciaire et d’impartialité, soit en raison d’un passé — parfois de plusieurs décennies — d’ingérence politique de la part du pouvoir exécutif, soit du fait de la corruption généralisée, soit des deux. Poursuivre des affaires sensibles portant sur des atrocités, qui peuvent impliquer des politiques ou des acteurs gouvernementaux, peut s’avérer difficile lorsque des juges et des procureurs ne disposent pas de la culture institutionnelle et du soutien nécessaires pour juger les allégations sans avoir à craindre des représailles professionnelles ou personnelles.

 

Bien sûr, les défis que nous venons d’évoquer n’ont rien de nouveau. De fait, ils fournissent un rappel frappant des raisons pour lesquelles la CPI a été créée en premier lieu. Mais la nature profondément ancrée de ces obstacles ne devrait pas être utilisée comme une excuse pour s’exonérer des efforts visant à s’y attaquer. En réalité, la complexité des obstacles auxquels doit faire face une justice nationale efficace pour les crimes odieux ne fait que souligner davantage le rôle central que les acteurs du développement doivent jouer dans la conception de programmes visant à développer les capacités, notamment ceux qui ont pour but de renforcer la société civile locale. Il demeure essentiel pour les responsables du développement de travailler étroitement avec les acteurs politiques au sein de leurs gouvernements afin d’employer leur influence collective pour éroder le manque de volonté avec le temps.

 

Au cours des dernières années, le lien entre la justice et le développement est devenu plus perceptible. Dans son rapport de 2011 sur le développement dans le monde, la Banque mondiale a reconnu qu’ « un épisode de violence majeur […] peut effacer une génération entière de progrès économique. »[42]L’impunité affaiblit la confiance du public, ce qui laisse l’État vulnérable à des violences épisodiques. Rompre les cycles de violence exige de consolider les institutions légitimes, notamment celles qui rendent la justice.[43]Cela est crucial pour renforcer la confiance du public et créer les conditions nécessaires à la réalisation du développement durable.

 

De fait, dans un certain nombre de situations faisant l’objet d’une enquête ou d’une analyse par la CPI, notamment la Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo, l’Ouganda et la Guinée, il existe un certain niveau de reconnaissance de la part des gouvernements respectifs de la valeur d’entreprendre une démarche visant à rendre une justice nationale pour les atrocités commises sur leur sol. La recherche de la justice dans chacun de ces pays n’est pas sans défaillances. Néanmoins, les acteurs politiques et du développement des États parties à la CPI qui sont à l’œuvre dans ces pays peuvent utiliser leur influence combinée — les premiers par le biais de la diplomatie publique et privée, les deuxièmes par le biais de programmes visant au renforcement de capacités — pour aider ces gouvernements à se rapprocher de la réalisation d’une justice indépendante et impartiale.

 

Une chose est claire : vaincre les obstacles des capacités nationales et de la volonté exige une reconnaissance forte parmi les diplomates et les acteurs du développement dans les 121 États parties à la CPI que la lutte contre l’impunité pour les crimes odieux requiert une attention, un soutien et un investissement à long terme. La réussite de cet engagement à long terme est renforcée par la coordination entre les bailleurs de fonds œuvrant dans un pays donné. Travailler ensemble peut contribuer à améliorer l’efficacité en évitant la duplication des efforts et appuyer l’influence politique collective des États parties visant à encourager des efforts nationaux significatifs pour poursuivre les crimes internationaux graves.

 

Au vu de tout ce qui précède, nous formulons les recommandations suivantes aux États parties alors qu’ils se préparent pour la prochaine session de l’Assemblée et pour le débat sur la complémentarité.

 

Premièrement et surtout, nous pressons les États de s’engager à un niveau aussi élevé que le PNUD, en :

 

  • Envoyant des représentants de haut niveau pour participer au débat de l’AEP sur la complémentarité. Cela ne fera que renforcer la priorité que les États accordent à la recherche d’une exigence nationale de rendre justice pour les crimes internationaux graves. De plus, dans la mesure où c’est réalisable, nous insistons auprès des États pour qu’ils saisissent l’opportunité offerte par le débat pour appuyer la tendance à la recherche de la justice pour les crimes odieux en incluant les acteurs du développement dans leurs délégations et en les encourageant à participer au débat.

 

Deuxièmement, les États parties peuvent par le biais de leurs contributions au Débat général et la discussion sur la complémentarité :

 

  • Continuer à envoyer un message clair sur l’importance de la justice nationale pour les crimes odieux, et en s’engagement à long terme envers sa réalisation. Cela peut faire partie de l’établissement de fondations de support nécessaires entre gouvernements — aussi bien les autorités chargées des poursuites que les bailleurs de fonds internationaux fournissant une assistance.

 

Troisièmement, ce message devrait aussi faire écho au sein des missions diplomatiques et avec les acteurs du développement dans les pays où des crimes odieux ont été commis. C’est le seul moyen de faire correspondre l’enthousiasme diplomatique avec les résultats sur le terrain. Dans leurs déclarations, les États parties devraient :

 

  • S’engager à intégrer davantage l’importance des initiatives visant à lutter contre l’impunité auprès du personnel diplomatique et chargé du développement sur le terrain.

 

Quatrièmement, les États parties devraient dans leurs déclarations au cours du Débat général et de la session plénière sur la complémentarité:

 

  • Souligner l’importance du renforcement des capacités et de la volonté, celle-ci se définissant comme la création et le maintien d’un climat favorable à la réalisation d’une justice indépendante et impartiale. Les États parties devraient également insister sur l’inclusion d’une formulation similaire dans le projet de résolution sur la complémentarité.

 

Cinquièmement, la discussion sur la complémentarité peut fournir une opportunité aux États parties de :

 

  • Partager les expériences relatives aux initiatives entreprises pour promouvoir la justice nationale pour les crimes odieux  dans les pays faisant l’objet d’une analyse ou d’une enquête de la CPI. Ce partage pourrait inclure les informations sur ce qui a ou n’a pas fonctionné en termes de mise en œuvre des initiatives visant à renforcer les efforts nationaux pour traduire les criminels en justice, notamment dans le domaine de la coordination des bailleurs de fonds ; et

 

  • Faciliter les efforts visant à ancrer la complémentarité dans l’AEP, notamment en appelant les points focaux à organiser des réunions sous les auspices des groupes de travail existants à La Haye et à New York sur des sujets spécifiques liés à la complémentarité.

 

Ces sujets pourraient inclure, par exemple, les efforts continus menés par les acteurs de l’ONU pour mettre en œuvre des projets spécifiques sur le terrain (à New York) ou bien les efforts visant à coordonner les approches de la complémentarité dans diverses capitales (et en invitant à La Haye quelques responsables du développement basés en Europe). De cette façon, les délégations pourraient maintenir une discussion dynamique sur les  stratégies possibles pour vaincre les défis auxquels est confrontée la recherche  d’une justice nationale pour les crimes odieux. Ceci pourrait conduire finalement à un groupe de travail sur la complémentarité si le besoin en est justifié dans le futur.

 

Enfin, dans la résolution sur la complémentarité, les États parties devraient :

 

  • Reconnaître le lien entre les efforts de complémentarité et les stratégies de sortie de la cour, ainsi que son impact ou son héritage à long terme dans les pays faisant l’objet d’une situation dont la CPI est saisie.
 

[1]Human Rights Watch joint également des documents préparés conjointement par la Coalition pour la Cour pénale internationale en prévision de cette session de l’Assemblée sur le budget et les finances, les communications et la sensibilisation, la coopération, les élections, la représentation légale et la surveillance de l’AEP. Ces documents seront disponibles à leur parution à l’adresse suivante : http://iccnow.org/?mod=asp11.

[2]Pour plus d’informations sur ce débat, voir la Lettre de Human Rights Watch aux ministres des Affaires étrangères des États parties à la CPI, « October 17 Thematic Debate at the Security Council on the Council's Relationship with the ICC », 16 octobre 2012, https://www.hrw.org/news/2012/10/16/letter-october-17-thematic-debate-sec....

[3]Voir Assemblée des États parties (AEP), « Report of the Bureau on the Study Group on Governance », ICC-ASP/11/31, 23 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-31-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012), paras. 10-17; AEP, « Study Group on Governance: Lessons learnt:First report of the Court to the Assembly of States Parties », (« Lessons Learnt First Report »), ICC-ASP/11/31/Add.1, 23 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-31-Add1-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012), paras. 13-19.

[4]Human Rights Watch, Unfinished Business: Closing Gaps in the Selection of ICC Cases, septembre 2011, https://www.hrw.org/reports/2011/09/15/unfinished-business.

[5]Fatou Bensouda, élue procureur de la CPI, « Ceremony for the solemn undertaking of the Prosecutor of the International Criminal Court », La Haye, 15 juin 2012, http://www.bpi-icb.com/images/pdf/15062012fbsolemnundertaking.pdf (consulté le 4 novembre 2012), p. 2.

[6]Voir, par exemple, AEP, « Proposed Programme Budget for 2013 of the International Criminal Court », ICC-ASP/11/10, 16 août 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-10-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012), para. 457 (notant le redéploiement de deux responsables de sensibilisation depuis la République démocratique du Congo vers la Côte d’Ivoire, et aussi que le même agent de sensibilisation est également responsable des activités de sensibilisation pour les situations du Soudan et de la Libye).

[7]Les juges ont récemment donné le feu vert pour la mise en œuvre de six projets dans une troisième situation, celle de la République Centrafricaine. Situation in the Central African Republic, ICC, ICC-01/05, « Decision on the ‘Notification by the Board of Directors in accordance with Regulation 50 a) of the regulations of the Trust Fund for Victims to undertake activities in the Central African Republic’ », 23 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/doc/doc1496856.pdf(consulté le 4 novembre 2012).

[8]Human Rights Watch, Unfinished Business.

[9]Voir Groupe de travail pour les droits des victimes (GTDV), « The Implementation of Victims’ Rights before the ICC: Issues and Concerns Presented by the Victims’ Rights Working Group on the occasion of the 10th Session of the Assembly of States Parties, 12 - 21 December 2011 », http://www.vrwg.org/VRWG_DOC/2011_VRWG_ASP10.pdf(consulté le 4 novembre 2012), pp. 7-10; Voir également Équipe de la CCPI sur la représentation légale, « Submission and Recommendations on the ‘Proposal for a review of the legal aid system of the Court in accordance with resolution ICC-ASP/10/Res.4 of 21 December 2011’ », http://iccnow.org/documents/CICC_Paper_on_Legal_Aid_9-03-12.pdf (consulté le 4 novembre 2012), pp. 3-4.

[10]AEP, Annexe à « Lessons Learnt First Report », p. 5. Les chambres de l’affaire Gbagbo et des deux affaires au Kenya ont déjà pris des décisions cette année pour, dans le premier cas, s’orienter vers un processus collectif de demande, et, dans les deux autres, pour éliminer carrément le processus de demande et pour mettre en place un système de représentation légale combinant des avocats extérieurs avec des avocats émanant du Bureau du conseil public pour les victimes. Procureur c. Laurent Gbagbo, CPI, Case No.ICC-02/11-01/11, « Second decision on issues related to the victims' application process », 5 avril 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/doc/doc1392379.pdf (consulté le 4 novembre 2012); Procureur c. William Samoei Ruto and Joshua Arap Sang, CPI, Case No. ICC-01/09-01/11, « Decision on victims' representation and participation », 3 octobre 2012, http://icc-cpi.int/iccdocs/doc/doc1479374.pdf (consulté le 4 novembre 2012); Procureur c. Francis Kirimi Muthaura et Uhuru Muigai Kenyatta, CPI, Case No.ICC-01/09-02/11, « Decision on victims' representation and participation », 3 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/doc/doc1479387.pdf (consulté le 4 novembre 2012). Voir aussi REDRESS, « Q&A: ICC Decision on Victims' Representation and Participation in the Kenya Cases », 18 octobre 2012, http://www.vrwg.org/home/home/post/39-q--a---the-landmark-icc-decision-on-victims--representation-and-participation-in-the-kenya-cases (consulté le 4 novembre 2012).

[11]AEP, « Report of the Bureau on Victims and affected communities and the Trust Fund for Victims and Reparations », ICC-ASP/11/32, 23 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-32-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012), paras. 16-23.

[12]AEP, « Report of the Committee on Budget and Finance on the work of its nineteenth session », ICC-ASP/11/15, 29 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-15-ENG.pdf, para. 36 (« Public outreach, of course, was essential to raising awareness and promoting understanding of the Court’s mandate and work, primarily among the affected communities. »).

[13]Voir Human Rights Watch Courting History: The Landmark International Criminal Court’s First Years, juillet 2008, https://www.hrw.org/sites/default/files/reports/icc0708webwcover.pdf, p. 120.

[14]Les trois candidats sont Paul Rutledge, James Stewart et RaijaToiviainen. Les questionnaires de la CCPI peuvent être consultés à l’adresse : http://iccnow.org/?mod=electiondeputyprosecutors.

[15]Lettre de Human Rights Watch à Fatou Bensouda, élue procureur de la CPI, « Priorities for the New International Criminal Court Prosecutor », 8 juin 2012, https://www.hrw.org/news/2012/06/08/icc-letter-prosecutor-elect-fatou-bensouda.

[16]AEP, « Report of the Bureau on Cooperation », (« 2007 Report of the Bureau on Cooperation »), ICC-ASP/6/21, 19 octobre 2007, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/library/asp/ICC-ASP-6-21_English... (consulté le 4 novembre 2012).

[17]Voir nos recommandations sur un groupe de travail sur la coopération dans Human Rights Watch, « Memorandum for the Tenth Session of the International Criminal Court Assembly of States Parties », 28 novembre 2011, https://www.hrw.org/news/2011/11/28/human-rights-watch-memorandum-tenth-session-international-criminal-court-assembly-st, pp. 28-29; « Memorandum for the Ninth Session of the International Criminal Court Assembly of States Parties », 16 novembre 2010, https://www.hrw.org/news/2010/11/16/human-rights-watch-memorandum-ninth-s..., pp. 13-14.

[18]« Summary of the 1 October 2012 workshop on cooperation, including proposals and suggestions from the participants », annexe II de AEP, « Report of the Bureau on cooperation » (« 2012 Report of the Bureau on cooperation »), ICC-ASP/11/28, 23 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-28-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012).

[19]AEP, « 2007 Report of the Bureau on cooperation », para. 41.

[20]Les articles 87(5) et (7) prévoient que lorsqu’un État partie ou unÉtat non partie ayant conclu un arrangement ad hoc ou un accord avec la cour « omet de se conformer » à une demande de coopération, la cour « peut en prendre acte et en référer » à l’AEP, ou, dans le cas d’un renvoi par le Conseil de sécurité de l’ONU, au Conseil. Pour sa part, l’AEP examine alors selon l’article 112(2) (f) « toute question relative à la non-coopération ».

[21]AEP, « Report of the Bureau on potential Assembly procedures relating to non-cooperation », ICC-ASP/10/37, 30 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-37-ENG.pdf (consulté le 4 novembre 2012), paras.10-11.

[22]Le Conseil de sécurité des Nations Unies, pendant ce temps, n’a pris aucune mesure pour faire appliquer son mandat de répondre aux constats de non-coopération établis par la CPI en ce qui concerne les renvois du Conseil de sécurité. Ce dernier a renvoyé à la cour la situation au Darfour, Soudan, en mars 2005 et la situation en Libye en février 2011.

[23]Voir par exemple, « AU Summit: Malawi Stands With Darfur Victims », communiqué de presse conjoint d’un réseau informel d’organisations de la société civile africaine et d’organisations internationales ayant une présence en Afrique et qui travaillent sur la CPI et l’Afrique, 8 juin 2012, https://www.hrw.org/news/2012/06/08/au-summit-malawi-stands-darfur-victims.

[24]AEP, «  Report of the Bureau on non-cooperation » ICC-ASP/11/29, 1ernovembre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-29-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012), para. 8.

[25]« President of the Assembly visit to Addis Ababa », communiqué de presse de l’AEP, 26 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/NR/exeres/FE60FBF4-49A0-4F80-B706-EAE130EF30E0.htm(consulté le 4 novembre 2012) ; « Second Joint African Union-International Criminal Court Seminar Concludes in Ethiopia », communiqué de presse de la CPI, 18 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/menus/icc/press%20and%20media/press%20releases/news%20and%20highlights/pr843?lan=en-GB(consulté le 4 novembre 2012).

[26]Conférence d’examen du Statut de Rome, « Cooperation », Déclaration RC/Decl.2, 11 juin 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/RC-Decl.2-ENG.pdf (consulté le 15 novembre 2011), para. 8. Elle donne également suite aux résolutions de l’Assemblée des deux dernières sessions. La résolution omnibus de la neuvième session a rappelé la déclaration de Kampala et a « demand[é] au facilitateur [de la coopération] d’examiner des propositions visant à partager des expériences et d’autres initiatives pour renforcer la coopération, comme de faire de la question de la coopération un point permanent à l’ordre du jour de l’Assemblée», tandis que la résolution sur la coopération de la dixième session prévoyait un point de l’agenda sur la coopération pour la prochaine session de 2012. AEP, « Strengthening the International Criminal Court and the Assembly of States Parties », ICC-ASP/9/Res.3, 10 décembre 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-9-Res.3-ENG.pdf (consulté le 4 novembre 2012), para.11; AEP, « Cooperation », ICC-ASP/10/Res.2, 20 décembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/Resolutions/ICC-ASP-10-Res.2-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012), para. 14. Le projet de résolution sur la coopération pour cette session de l’Assemblée comprend aussi une référence à un point de l’agenda pour la 12èmesession qui peut utilement cimenter la coopération en tant que point permanent de l’agenda. « Draft Resolution on Cooperation », annexe I à l’AEP, « 2012 Report of the Bureau on cooperation », para. 23.

[27]AEP, « Report of the Court on cooperation », ICC-ASP/10/40, 18 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-40-ENG.pdf(consulté le 4 novembre 2012), paras.39-46, 95.

[28]Sur ces 12 individus, un — Vincent Otti, qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt dans le cadre de la situation de l’Ouganda — est présumé mort, tandis qu’une chambre préliminaire de la CPI a décidé que la Libye peut reporter la remise de Seif el-Islam Kadhafi en attendant le résultat de la contestation de l’admissibilité de la Libye dans le procès qui lui est intenté.

[29]Voir par exemple, Human Rights Watch, Trail of Death: LRA Atrocities in Northeastern Congo, mars 2010, https://www.hrw.org/sites/default/files/reports/drc0310webwcover_0.pdf; The Christmas Massacres: LRA attacks on Civilians in Northern Congo, février 2009, https://www.hrw.org/sites/default/files/reports/drc0209webwcover_1.pdf.

[30]Voir par exemple, « DR Congo: Bosco Ntaganda Recruits Children by Force », communiqué de presse de Human Rights Watch, 16 mai 2012, https://www.hrw.org/news/2012/05/15/dr-congo-bosco-ntaganda-recruits-children-force; Human Rights Watch, Bosco Ntaganda—Wanted for War Crimes, vidéo, 13 avril 2012, https://www.hrw.org/video/2012/04/13/bosco-ntaganda-wanted-war-crimes.

[31]Voir Bureau du procureur de la CPI, « Prosecutorial Strategy, 2009-2012 », 1erfévrier 2012, http://www.icc-cpi.int/NR/rdonlyres/66A8DCDC-3650-4514-AA62-D229D1128F65... (consulté le 4 novembre 2012), para. 48; David Hutchinson and Marcus Pallek, « Introductory Remarks to Legal Opinions of the Office of Legal Affairs of the United Nations », International Organizations Law Review, vol. 3 (2006), p. 397; « Action Plan to follow-up on the Decision on the International Criminal Court », annexe au Political and Security Committee memorandum to COREPER, Conseil de l’Union européenne, “I” Item Note, 12 juillet 2011, http://www.iccnow.org/documents/EU_Action_Plan_st12080_en11.pdf (consulté le 4 novembre 2012), p. 14.

[32]AEP, « 2007 Report of the Bureau on cooperation », para. 43.

[33]Assemblée de l’Union africaine, « Decision on the Meeting of African States Parties to the Rome Statute of the International Criminal Court (ICC) », Assembly/AU/Dec. 245 (XIII) Rev. 1, 3 juillet 2009, http://www.africaunion.org/root/au/Conferences/2009/july/summit/decisions/ASSEMBLY%20AU%20DEC%20243%20-%20267%20(XIII)%20_E.PDF (consulté le 4 novembre 2012), para. 10.

[34]Information du gouvernement sud-africain « Notes following the briefing of Department of International Relations and Co-operation’s Director-General, AyandaNtsaluba », 31 juillet 2009, http://www.info.gov.za/speeches/2009/09073110451001.htm(consulté le 4 novembre 2012).

[35]« High Court Decision on Al Bashir Arrest Warrant », communiqué de presse de la Section kenyane de la Commission internationale de juristes, 2 décembre 2011, http://www.icj-kenya.org/index.php/more-news/435-pressstatement-al-bashir(consulté le 5  novembre 2012).

[36]Humphrey Malalo, « Kenya court refuses to shelve ruling on Sudan’s Bashir », Reuters, 20 décembre 2011, http://af.reuters.com/article/topNews/idAFJOE7BJ02X20111220?pageNumber=2&virtualBrandChannel=0(consulté le 4 novembre 2012).

[37]Statut de Rome de la Cour pénale internationale (Statut de Rome), A/CONF.183/9, 17 juillet 1998, entré en vigueur le 1erjuillet 2002, préambule, art. 17.

[38]Conférence de révision du Statut de Rome, « Complémentarité », Résolution RC/Res.1, 8 juin 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/RC-Res.1-ENG.pdf (consulté le 4 novembre 2012), para 3.

[39]Le 28 septembre 2009, plusieurs centaines de membres des forces de sécurité guinéennes ont fait irruption dans un stade de la capitale guinéenne, Conakry, et ont ouvert le feu sur des dizaines de milliers de sympathisants de l’opposition qui s’y trouvaient pacifiquement rassemblés. À la fin de l’après-midi, au moins 150 Guinéens avaient péri ou étaient mourants, et des dizaines de femmes avaient subi des violences sexuelles  brutales, dont des viols individuels et en groupe. Human Rights Watch, Bloody Monday: The September 28 Massacre and Rapes by Security Forces in Guinea, décembre 2009, https://www.hrw.org/sites/default/files/reports/guinea1209web_0.pdf.

[40]AEP, « Report of the Court on complementarity », ICC-ASP/11/39, 16 octobre 2012, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP11/ICC-ASP-11-39-ENG.pdf (consulté le 4novembre 2012).

[41]Ibid., paras. 18-20.

[42]La Banque mondiale, Conflict, Security, and Development: World Development Report 2011 (Washington, D.C.: The International Bank for Reconstruction and Development/The World Bank, 2011), p. 6.

[43]Ibid., p. 2. Les recherches que nous menons dans de nombreuses situations de pays faisant l’objet d’une enquête et d’une analyse de la CPI — dont le Kenya, la Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo et la Guinée — soutiennent la conclusion qu’une impunité généralisé encourage une violence cyclique. S’en prendre aux auteurs de crimes commis à grande échelle par des procès indépendants et impartiaux, en contribuant à démanteler les structures criminelles qui ont abouti à la commission de ces crimes, en apportant la vérité aux victimes et en décourageant d’autres individus de commettre des crimes similaires, peut aider à briser les tendances dévastatrices de la violence.

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