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Koweït : Les autorités devraient cesser de persécuter les partisans de l'opposition égyptienne résidant dans le pays

Les forces de sécurité de l'État ont arrêté et expulsé 21 partisans de Mohamed El Baradei

(New York, le 10 avril 2010) - Les forces de sécurité de l'État du Koweït devraient cesser d'arrêter et d'expulser les partisans expatriés du candidat de l'opposition égyptien, le Dr Mohamed El Baradei, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Le Koweït devrait immédiatement libérer tous les Égyptiens encore détenus, et autoriser ceux qui ont été expulsés à réintégrer leurs foyers au Koweït.

À la suite des arrestations de trois citoyens égyptiens le 8 avril 2010, les forces de sécurité du Koweït ont détenu plus de la moitié d'une trentaine de personnes qui se sont réunies le 9 avril pour discuter des arrestations, et elles ont expulsé 21 résidents koweïtiens ayant la nationalité égyptienne, sur une période de 48 heures.

« En s'en prenant aux partisans d'El Baradei, le Koweït est en train de faciliter la répression exercée par les autorités égyptiennes », a observé Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Les citoyens koweïtiens devraient se demander pourquoi leurs services de sécurité s'en prennent à des Égyptiens souhaitant des réformes dans leur pays, au lieu de protéger les intérêts sécuritaires nationaux. »

Mohamed  Farrag Mohamed  al-Farghally, Tamar Farrag Mohamed  al-Farghally, et Tariq Tharwat - citoyens égyptiens détenus le 8 avril après avoir participé à une petite réunion de partisans d'El Baradei dans un café local - ne sont pas rentrés chez eux ni n'ont revu leurs familles depuis la fin de cette journée. Amira al-Farghally, l'épouse de Mohamed, a expliqué à Human Rights Watch que quatre hommes en civil ont escorté son mari, menotté, jusque chez eux aux environs de minuit le 8 avril. Les officiers ne sont restés que quelques minutes, s'emparant de tee-shirts représentant El Baradei et le drapeau égyptien avec le slogan « Min agl it-taghyeer » (« Pour le changement »).

« Quand je leur ai demandé pourquoi ils l'arrêtaient, ils ont répondu : ‘Ne vous en faites pas ; nous l'emmenons juste au [département] [des] enquêtes ; il sera de retour bientôt, inch'allah », a expliqué Amira al-Farghally. « Je suis seule ici au Koweït, avec seulement mon fils de 10 mois. »

Le soir du 9 avril, un groupe d'une trentaine de personnes s'est retrouvé en face du supermarché et restaurant du Sultan Center dans le quartier de Salmiya, pour discuter d'une réponse à apporter aux trois premières arrestations. L'Assemblée nationale pour le changement, un groupe formé par El Baradei, a posté sur son site web les informations sur la réunion ; les participants ne s'étaient jamais rencontrés auparavant. Selon l'un d'entre eux, les officiers de la sécurité de l'État ont soudainement convergé sur les personnes rassemblées, s'emparant de 15 à 20 d'entre elles.

« Ils nous ont demandé pourquoi nous nous trouvions là. Nous avons répondu que nous étions venus après avoir lu les informations sur Internet, sur le site web du Dr El Baradei », a indiqué un des participants à Human Rights Watch. Il a expliqué que lorsque les personnes rassemblées ont dit aux officiers de sécurité : « Nous sommes juste assis ici, nous allons partir maintenant », ils ont répliqué : « C'est interdit de rester là comme ça ». Il a raconté que les officiers de sécurité avaient alors commencé à emmener les gens.

Le ministre de l'Intérieur du Koweït, cheikh Jaber al-Khaled al-Sabah, a déclaré le 10 avril à Human Rights Watch que les personnes arrêtées et expulsées avaient enfreint les lois du Koweït sur les rassemblements publics et sur la diffamation en critiquant le Président égyptien Hosni Moubarak.

« Ce sont des visiteurs au Koweït, et nous les considérons comme des visiteurs au Koweït. Quand quelqu'un enfreint la loi, il doit retourner dans son pays », a affirmé al-Sabah. « Nous n'autorisons pas les manifestations dans ce pays. »

L'article 12 de la loi koweïtienne de 1979 concernant les rassemblements publics interdit aux non-citoyens de participer à des défilés, des manifestations ou des rassemblements publics au Koweït. Mahmoud Samy, l'une des personnes arrêtées le 9 avril, a indiqué à Human Rights Watch qu'il était le premier d'entre elles à être relâché. Les officiers de sécurité l'ont autorisé à rentrer chez lui tôt le 10 avril, aux environs de 1 heure du matin, heure locale.

« Ils ont mentionné que je risquais d'être transféré en Égypte », a précisé Samy, qui vit au Koweït depuis plus de dix ans. « Ils m'ont dit que tout rassemblement de plus de 20 personnes au Koweït, sans avoir demandé une autorisation, est contraire à la loi. Ils ont ajouté que les autres seraient progressivement libérés, mais que certains d'entre eux seraient peut-être expulsés du Koweït. »

Le 10 avril, le gouvernement a expulsé 17 citoyens égyptiens dont Tamer Farrag Mohamed  al-Farghally, vers le Caire. « Le Koweït n'applique que de façon sélective ses restrictions de la liberté d'assemblée, qui de toute façon violent le droit humain fondamental de s'assembler et d'exprimer ses opinions librement », a conclu Sarah Leah Whitson. « En expulsant des résidents et membres de longue date de la communauté d'affaires, le gouvernement koweïtien est responsable de discrimination contre les résidents égyptiens, en les privant de leurs foyers et de leurs emplois du jour au lendemain. »

Plus de 250 000 citoyens égyptiens vivent et travaillent actuellement au Koweït.

Mohamed El Baradei, l'ancien directeur général égyptien de l'Agence internationale de l'énergie atomique, a formé en mars l'Assemblée nationale pour le changement.  Le nombre de partisans sur Facebook de son éventuelle campagne présidentielle a rapidement augmenté, dépassant 200 000 personnes.  Les élections présidentielles en Égypte doivent se dérouler en septembre 2011. L'attaque contre les partisans d'El Baradei au Koweït fait suite à  la répression brutale cette semaine par les forces de sécurité égyptiennes d'une manifestation au Caire. Cet incident a été notamment marqué par les passages à tabac et les arrestations de plus de 90 manifestants qui demandaient l'abrogation de certaines lois sécuritaires en Égypte.

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