(Jérusalem) - Les conclusions de l'armée israélienne concernant le comportement de ses troupes à Gaza, révélées le 22 avril, sont dénuées de crédibilité et confirment la nécessité d'une enquête internationale impartiale sur les présumées violations graves du droit humanitaire international par Israël comme par le Hamas, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Israël et le Hamas doivent coopérer avec le juge Richard Goldstone, un éminent juriste international nommé par le Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies pour enquêter sur les graves violations des lois de la guerre pendant le récent conflit.
« Les résultats de l'enquête de l'armée israélienne ont clairement démontré son incapacité à s'auto-évaluer objectivement », a déclaré Joe Stork, directeur adjoint de la division Afrique du Nord et Moyen-Orient au sein de Human Rights Watch. « Ces conclusions sont une tentative évidente de masquer les violations des lois de la guerre commises par les forces israéliennes à Gaza. Seule une enquête impartiale permettra d'apporter un semblant de réparation aux victimes de ces violations. »
Après la fin de la plupart des hostilités, les Forces Israéliennes de Défense (FID) ont créé cinq équipes dirigées par des colonels pour enquêter sur la conduite des soldats israéliens lors de l'opération « Plomb Durci », menée du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009. Ces équipes ont examiné les attaques de l'armée contre des infrastructures des Nations Unies ainsi que des infrastructures et équipes médicales, et ont enquêté sur les accusations de tort causé aux civils non impliqués dans les hostilités, l'utilisation de munitions au phosphore blanc et la destruction de structures civiles.
L'enquête de l'armée israélienne a conclu que durant les combats à Gaza, l'armée a « agi en conformité avec les lois internationales ». Les enquêtes « ont révélé un très petit nombre d'incidents au cours desquels des erreurs de renseignement ou opérationnelles ont eu lieu », erreurs qui étaient « inévitables et se produisent dans toutes les situations de combat, en particulier dans le type de combat où les FID ont été forcées d'agir par le Hamas, qui a choisi de combattre en se mêlant à la population civile ».
L'enquête de Human Rights Watch sur les combats à Gaza a conclu que les forces israéliennes étaient responsables de graves violations des lois de la guerre, dont l'utilisation d'artillerie lourde et d'armes au phosphore blanc dans des zones densément peuplées, l'apparente prise pour cible de personnes tentant de démontrer leur statut de civils, ainsi que la destruction d'objectifs civils excédant les nécessités militaires. Certains des cas d'usage de phosphore blanc ont démontré la preuve de crimes de guerre, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport de 71 pages publié le mois dernier.
Les conclusions militaires selon lesquelles « aucune munition au phosphore blanc n'a été utilisée dans des zones urbaines » est de toute évidence fausse, selon Human Rights Watch. Les chercheurs de Human Rights Watch ont trouvé à Gaza, immédiatement après la fin des hostilités, des fragments d'obus, des restes de réceptacles et des douzaines de morceaux de feutre brulé contenant des résidus de phosphore blanc dans les rues, sur les toits des bâtiments, dans les jardins résidentiels, et dans une école des Nations Unies. Des obus d'artillerie contenant du phosphore blanc ont également touché un hôpital et le quartier général de l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNWRA), tous deux dans le centre de la ville de Gaza.
Human Rights Watch a également établi que le Hamas avait commis de graves violations des lois de la guerre en tirant délibérément et de manière indiscriminée des roquettes Qassam et Grad sur des zones civiles d'Israël. Le Hamas n'a fait preuve d'aucune volonté d'enquêter ou de poursuivre en justice les combattants palestiniens auteurs de crimes de guerre, et ses porte-parole continuent de justifier les attaques de roquettes sur des cibles civiles israéliennes, a précisé Human Rights Watch.
Human Rights Watch a déclaré que les enquêtes militaires israéliennes ne permettaient pas de déterminer si et comment les forces israéliennes ont violé les lois de la guerre. Sans accès à Gaza, les enquêteurs militaires n'ont pas pu s'entretenir de manière adéquate avec les victimes et témoins palestiniens sur les accusations de violations.
De plus, les officiers qui ont mené ces enquêtes, tous colonels, n'étaient pas d'un rang suffisant pour enquêter sur des abus résultant de politiques décidées par des officiers supérieurs, a indiqué Human Rights Watch. En juin 2006, après qu'une explosion apparemment causée par un obus tiré par les FID a tué 7 membres d'une famille palestinienne sur une plage de Gaza, l'armée israélienne avait nommé un général de division pour mener l'enquête.
« Une enquête doit être minutieuse, transparente et menée par un officier supérieur pour être crédible » a dit M. Stork. « Aucune de ces enquêtes ne répond à ces critères. »
Dans les conclusions de ses enquêtes, l'armée israélienne a déclaré qu'une « enquête centrale et opérationnelle des FID » sur l'ensemble de l'opération à Gaza est en cours et que des « questions additionnelles » sont passées en revue par un « processus de vérification et d'enquête à plusieurs niveaux au sein des FID ».
Les résultats des enquêtes publiés aujourd'hui tentent de justifier la mort de civils en indiquant que l'armée israélienne a prévenu la population de Gaza de l'imminence des attaques. Human Rights Watch a observé que de tels avertissements n'autorisent pas une force à conduire des attaques qui seraient autrement illégales. De plus, dans le cas de Gaza, ces avertissements se sont révélés fréquemment trop vagues et par conséquent « inefficaces », ainsi qu'exigé par le droit international.
« Si les FID estiment qu'elles n'ont rien fait de mal à Gaza, alors Israël doit coopérer entièrement avec la commission d'enquête Goldstone », a déclare M. Stork. « Israël comme le Hamas devraient accueillir favorablement cette enquête. »