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(New York) - Les récentes affirmations du gouvernement soudanais faisant état d'une amélioration de la situation au Darfour ne reflètent pas la réalité, ont déclaré quinze organisations dans un rapport publié aujourd'hui. Cherchant à étayer l'argument selon lequel le Conseil de sécurité de l'ONU devrait surseoir à l'examen de la délivrance d'un mandat d'arrêt par la Cour pénale internationale à l'encontre du Président Omar el-Béchir, le Soudan prétend que des améliorations importantes ont été enregistrées au Darfour. Le 3 décembre prochain, le procureur de la CPI doit informer le Conseil de sécurité de l'état d'avancement de son enquête.

Contrastant vivement avec les déclarations de Khartoum, le rapport de 28 pages, « Rhétorique contre réalité - La situation au Darfour », rédigé par une coalition d'organisations non gouvernementales - dont Save Darfur Coalition, Human Rights First et Human Rights Watch - décrit le manque de progrès constaté au Darfour au cours des derniers mois sur le plan de la sécurité, de la situation humanitaire, du déploiement des forces de maintien de la paix et de la justice nationale.

Suite à l'annonce émise le 14 juillet par le procureur de la CPI  informant qu'il déposait une requête aux fins de délivrance d'un mandat d'arrêt contre le Président Béchir pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide, son administration a entamé une campagne diplomatique visant à convaincre les membres du Conseil de sécurité de suspendre l'affaire engagée contre lui. Le gouvernement a fait une série de déclarations publiques proclamant sa volonté d'exercer la justice dans le cadre des tribunaux nationaux et d'instaurer la paix au Darfour, affirmant que la situation sur le terrain s'était améliorée. Lors d'une interview télévisée accordée le 17 octobre, le Président Béchir a soutenu que la situation au Darfour était maintenant « tout à fait normale ».

« La situation au Darfour est loin de ce que le monde définirait comme « normale », a souligné Julia Fromholz, Directrice du Programme crimes contre l'humanité à Human Rights First. « Des millions de personnes vivent sous la menace quotidienne de la violence et dépendent de l'aide humanitaire qui est entravée ou totalement bloquée par l'insécurité régnante et les innombrables contraintes bureaucratiques. »

Le rapport décrit l'insécurité qui règne au Darfour. Entre juillet et octobre 2008, les bombardements gouvernementaux et les combats au Nord-Darfour ont entraîné le déplacement de quelque 90 000 personnes. En octobre, les forces gouvernementales et leurs milices alliées ont mené des attaques contre 13 villages au moins à proximité de Muhajariya, au Sud-Darfour. À cette occasion, au moins 44 civils auraient été tués. Même en novembre, après que Khartoum eut déclaré un « cessez-le-feu unilatéral et sans condition », l'armée soudanaise a continué de bombarder des villages au Nord-Darfour et au Darfour occidental.

« Une fois encore, le gouvernement soudanais parle de paix avec les diplomates et les journalistes tout en faisant la guerre au Darfour », a dénoncé Jerry Fowler, Président de Save Darfur Coalition. « Et une fois encore, ce sont les civils qui font les frais de la violence. »

Plus de quatre millions de personnes ont toujours besoin d'aide humanitaire au Darfour mais en septembre, la situation déplorable sur le plan de la sécurité a empêché les agences humanitaires d'avoir accès à 250 000 personnes, le chiffre le plus élevé enregistré jusqu'à présent en 2008. Depuis le début de l'année, 170 travailleurs humanitaires ont été enlevés et 11 tués. Le gouvernement soudanais continue également de faire obstacle à l'acheminent de l'aide en imposant des contraintes bureaucratiques et en harcelant le personnel humanitaire.

La force de maintien de la paix Nations Unies/Union africaine (MINUAD) fonctionne à moins de 50 pour cent des capacités prévues dans son mandat et fait l'objet d'attaques répétées. Le gouvernement soudanais s'est à nouveau engagé à honorer ses obligations et à faciliter le déploiement de la force, mais ces promesses doivent encore se traduire en actes. Au niveau local, les forces et autorités gouvernementales gênent la MINUAD dans son travail de protection des civils en recourant à des méthodes obstructionnistes et bureaucratiques, voire en se livrant à des attaques violentes.

Les autorités soudanaises ont également annoncé une série de mesures prétendument destinées à améliorer la justice nationale pour les crimes perpétrés au Darfour, notamment un nouveau procureur pour le Darfour. Néanmoins à ce jour, le procureur n'a examiné que trois affaires et aucune nouvelle poursuite n'a été engagée en lien avec les principales atrocités.

« La communauté internationale a la malencontreuse habitude de juger le Soudan sur ses paroles plutôt que sur ses actes », a relevé Richard Dicker, Directeur du Programme de justice internationale de Human Rights Watch. « Le Conseil de sécurité ne doit pas se laisser duper par Khartoum en offrant l'impunité à Béchir en échange de vaines promesses. Suite à la déclaration de leur président en date du 16 juin, les membres du Conseil de sécurité devraient réaffirmer que toutes les parties au conflit ont l'obligation contraignante de coopérer avec la Cour. »

Le présent rapport a été produit par :

Human Rights First; Human Rights Watch; Save Darfur Coalition; Action pour les Droits Humains et l'Amitié - Sénégal; Arab Coalition for Darfur; Arab Program for Human Rights Activists; Cairo Institute for Human Rights studies; Centre for Human Rights - Sierra Leone; Cercle de Réflexion et d'Action pour le Développement Economique et Social - Mali; Darfur Relief and Documentation Centre; Fédération Internationale des ligues des droits de l'homme; International Refugees Rights Initiative; L'Action de la jeunesse Guinéenne pour l'Aide au Développement et à la Prospérité - Guinée Conakry; Socio-Economic Rights & Accountability Project - Nigeria; West African Refugees and Internally Displaced Persons Network - Sénégal

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