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Le transfert de l’ancien président du Liberia, Charles Taylor, vers le tribunal pour crimes de guerre pour la Sierra Leone, soutenu par les Nations unies représente un pas immense vers la justice pour les atrocités commises en Afrique de l’Ouest.  
 
Lundi soir, Taylor a disparu de Calabar au Nigeria où il a passé les trois dernières années. Il a été arrêté aujourd’hui par les autorités nigérianes à la frontière avec le Cameroun. Taylor, accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité pour le rôle qu’il a joué en soutenant les forces rebelles en Sierra Leone a ensuite été embarqué dans un avion à destination de Monrovia où les autorités des Nations unies l’ont immédiatement arrêté pour le conduire vers le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, à Freetown.  
 
« C’est un moment extraordinaire pour les peuples d’Afrique de l’Ouest, » a déclaré Richard Dicker, directeur du Programme Justice internationale à Human Rights Watch. « Le procès de Taylor devrait permettre que soit rendue cette justice qu’attendent depuis si longtemps les victimes de la guerre brutale en Sierra Leone et que soit encouragé l’état de droit dans une région dévastée par la violence. »   
 
Suite à une demande de la nouvelle présidente du Liberia, Ellen Johnson-Sirleaf, le Nigeria a annoncé samedi qu’il consentirait au transfert de Taylor vers le Liberia. Cependant, lundi, le Nigeria a indiqué qu’il n’avait pas l’intention de transférer physiquement Taylor, ni de le détenir, faisant ainsi porter le poids de son arrestation et de son transfert au Liberia. Le lendemain, le gouvernement nigérian indiquait la disparition de Taylor.  
 
Le président du Nigeria, Olusegun Obasanjo est aux Etats Unis cette semaine et il doit rencontrer le président Bush aujourd’hui.  
 
« Le gouvernement américain a joué un rôle très positif dans les pressions exercées pour l’extradition de Taylor, » a déclaré Dicker. « Son transfert vers le tribunal pour crimes de guerre pour la Sierra Leone représente une étape clef dans l’engagement de la communauté internationale en faveur de la justice. »   
 
Créé en 2002 par un accord entre les Nations unies et le gouvernement de Sierra Leone, le Tribunal spécial est chargé de traduire en justice les personnes les plus impliquées dans les graves crimes commis depuis novembre 1996, notamment les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, les autres graves violations du droit international humanitaire et du droit sierra-léonais. Sont inclus dans ces crimes les meurtres, les mutilations, les viols et autres formes de violence sexuelle, l’esclavage sexuel, le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats, les enlèvements et le recours au travail forcé par les groupes armés.  
 
Le Tribunal spécial – dont le personnel est international et sierra-léonais et qui comporte des éléments du droit international et du droit sierra-léonais – représente un nouveau modèle très important en matière de justice internationale. Il est souvent décrit comme un tribunal « mixte » ou « hybride ». Neuf accusés sont actuellement jugés dans trois procès devant le Tribunal spécial. Human Rights Watch a procédé à une évaluation du travail de ce tribunal et a publié deux rapports sur les progrès accomplis.  
 
« Le Tribunal spécial représente une première dans le domaine de la justice internationale, » a déclaré Dicker. « Il travaille dur pour rendre accessible la justice aux habitants de Sierra Leone et pour protéger les témoins. Avec l’examen de Taylor, la cour doit maintenant garantir un procès équitable et approprié. »   
 
Contraint initialement de s’appuyer uniquement sur les contributions volontaires d’autres pays, le Tribunal spécial a été en permanence confronté à des difficultés financières. La cour a récemment manqué de fonds pour terminer ses opérations et mener à bien des activités « de suivi » comme la protection des témoins ayant comparu à la barre.  
 
« Maintenant plus que jamais, nous exhortons les bailleurs internationaux à fournir les financements nécessaires pour que la cour puisse terminer son travail avec succès, » a déclaré Dicker.  
 
Contexte   
 
Le 2 juin 2003, le Tribunal spécial pour la Sierra Leone a « révélé » l’accusation portée contre Taylor. Il est accusé d’être l’une des personnes « portant le plus de responsabilités » dans les crimes de guerre (meurtres, prises d’otages), crimes contre l’humanité (exterminations, viols, meurtres, esclavage sexuel) et autres graves violations du droit international humanitaire (utilisation d’enfants soldats) en Sierra Leone.  
 
L’accusation avance que Taylor a fourni une formation au Front Révolutionnaire Uni (RUF) conduit par Foday Sankoh et a aidé à son financement, en préparation de l’action armée du RUF en Sierra Leone et lors du conflit armé qui a suivi là-bas. L’accusation avance également que Taylor a agi de concert avec des membres de l’alliance rebelle du RUF et du Conseil des forces armées révolutionnaires, accusés de crimes horribles. 
 
Taylor a été élu président du Liberia en 1997 après une guerre civile de sept ans. Il a ensuite acquis une notoriété internationale à cause des abus brutaux commis par ses forces contre des civils et pour son recours à des enfants soldats organisés en « Unités de petits garçons ». De plus, le soutien de Taylor au RUF en Sierra Leone a contribué aux décès, aux viols et aux mutilations de milliers de civils dans ce pays, déclenchant les sanctions des Nations unies contre son régime. Les forces de Taylor ont également été impliquées dans des conflits dans les pays voisins que sont la Guinée et la Côte d'Ivoire. 
 
En 2003, Taylor a quitté le Liberia pour le Nigeria où l’asile lui a été accordé. Il vivait depuis lors à Calabar. Le Nigeria, agissant avec le soutien des Etats unis, de l’Union africaine et d’autres acteurs de la communauté internationale, a offert d’accueillir Taylor de façon temporaire pour mettre un terme à l’effusion de sang au Liberia et assurer une transition pacifique vers un nouveau gouvernement. En novembre 2005, la force de maintien de la paix au Liberia a reçu autorité pour arrêter et transférer Taylor vers le Tribunal spécial pour poursuites judiciaires s’il entrait sur le territoire du Liberia.

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