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Votre Excellence,

Human Rights Watch s'inquiète de la protection et du traitement des réfugiés sierra léonais et libériens en Guinée. Nous sommes conscients que le fait d'être un pays d'accueil pour des milliers de réfugiés représente une situation difficile pour le gouvernement guinéen. Nous comprenons aussi que votre gouvernement est confronté à des inquiétudes légitimes en matière de sécurité, face à une population étrangère aussi nombreuse. Cependant, Human Rights Watch détient la preuve de mauvais traitements contre des réfugiés, perpétrés par des responsables guinéens, à large échelle et de façon arbitraire. Il s'agit de coups, d'assassinats et de viols. Le rapport que nous joignons à cette lettre intitulé "Danger persistant pour les réfugiés", apporte des informations sur les abus commis contre les réfugiés, en Guinée, aux cours des derniers mois.

Nous souhaitons attirer plus particulièrement votre attention sur la section du rapport décrivant les terribles conditions dans la prison de Forecariah. Le rapport indique que plusieurs anciens prisonniers interviewés individuellement ont désigné deux gardiens de prison et un responsable administratif de haut rang comme responsables d'abus. Nous n'avons pas mentionné ces noms dans le rapport mais nous saisissons l'opportunité que nous offre ce courrier pour vous exhorter à enquêter sur ces allégations. Les témoins ont identifié les lieutenants X et Y comme ayant été impliqués dans des coups infligés à des réfugiés et dans la mort de l'un d'entre eux.* Un témoin a affirmé avoir entendu le Lieutenant Y se vanter d'avoir désigné des réfugiés pour être torturés et tués. De plus, un témoin a déclaré avoir reconnu, préfet de la région de Forecariah parmi les personnes présentes lorsque des responsables militaires ont fait sortir des prisonniers de leurs cellules et les ont emmenés.

Nous invitons le gouvernement guinéen à mener une enquête sur les incidents ainsi rapportés et notamment sur le rôle joué par les individus mentionnés ci-dessus. Nous invitons également le gouvernement guinéen à prendre les décisions nécessaires à l'instauration de mesures disciplinaires et criminelles appropriées contre les individus cités et contre toute autre personne soupçonnée d'abus similaires, si de telles allégations se révélaient exactes. Nous vous serions reconnaissants de nous informer des résultats de telles enquêtes et de toute action leur faisant suite.

Human Rights Watch reste préoccupé par votre discours de septembre 2000 dans lequel vous avez, sans distinction, rendu les réfugiés responsables de la déstabilisation à la frontière, déclaré que la plupart d'entre eux était des rebelles et appelé les Guinéens à défendre leur pays contre des invasions étrangères. Suite à ces déclarations, des milliers de réfugiés, dans les camps et à Conakry, ont été attaqués, battus, violés et raflés par la police, les soldats et les milices civiles armées. Nous vous exhortons à revenir sur ces accusations et à appeler au contraire les Guinéens à poursuivre leur longue tradition d'hospitalité offerte à leurs voisins fuyant des persécutions.

De plus, nous attirons votre attention sur d'autres recommandations contenues dans ce rapport. En particulier, il est conseillé à la Guinée de s'assurer que les procédures légales en matière de protection sont respectées lorsque les mesures permettant de filtrer les combattants rebelles et de les séparer des populations réfugiées sont appliquées. Il est également recommandé que la Guinée coopère pleinement avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés et le Comité International de la Croix Rouge (CICR) dans leurs efforts pour fournir protection aux réfugiés en Guinée.

Nous encourageons le gouvernement guinéen à travailler avec le HCR et la communauté humanitaire afin d'établir des procédures permettant de garantir protection et respect des droits de l'homme aux réfugiés libériens et sierra léonais, dans la zone frontière et dans les régions de Albadariah et Dabola. Des programmes de formation pour les responsables guinéens de haut rang doivent inclure les critères du droit international, tels que définis dans le Pacte International sur les Droits Civils et Politiques, afin de prévenir toute détention illégale de réfugiés. Les responsables de haut rang qui ne respectent pas ces dispositions doivent faire l'objet de mesures disciplinaires.

Nous apprécions l'attention que vous voudrez bien porter à ce problème urgent.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments distingués.

Peter Takirambudde
Directeur de la Division Afrique

*Les noms de ces personnes sont connus de Human Rights Watch qui ne souhaite pas les divulguer ici.

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