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Russie : Arrestations arbitraires de manifestants anti-guerre

Les arrestations massives de manifestants et d'activistes ont été accompagnées de violences policières

Manifestation anti-guerre à Saint-Pétersbourg, en Russie, dans la soirée du 24 février 2022, pour protester contre le lancement par le président Vladimir Poutine d’une opération militaire de grande ampleur contre l’Ukraine. © 2022 Reuters/Anton Vaganov

(Moscou, le 26 février 2022) – La police a arrêté arbitrairement plusieurs centaines de manifestants pacifiques à travers la Russie le 24 février, lors de rassemblements contre la guerre en Ukraine et tenus en guise de solidarité avec ce pays, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Les autorités ont également arrêté au moins deux défenseurs des droits humains ayant critiqué l'invasion russe en Ukraine, ont menacé de bloquer les médias dont les reportages sur la guerre divergeraient de la version officielle, et ont exigé que les plateformes de médias sociaux étrangers cessent de limiter les reportages des médias d'État russes.

Tôt dans la matinée du 24 février, le président Vladimir Poutine a annoncé le lancement d’opérations militaires contre l'Ukraine dans un discours public à la nation. Peu après la diffusion de son discours, les forces armées russes ont commencé à mener des attaques aériennes et terrestres contre plusieurs installations militaires à travers l'Ukraine. Alors que les hostilités se poursuivaient, des informations crédibles ont fait état de l'utilisation d'armes à sous-munitions par les forces russes, causant des morts et des blessés parmi les civils et endommageant des structures civiles telles que des écoles et des hôpitaux.

« Cela fait déjà des années que les autorités russes répriment la liberté d'expression et les manifestations pacifiques, afin d’étouffer les voix critiques », a déclaré Hugh Williamson, directeur de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. « Maintenant le gouvernement veut réduire au silence tous ceux qui élèvent leurs voix contre la guerre avec l'Ukraine. »

Une jeune manifestante est arrêtée par deux policiers sur la place Pouchkine, à Moscou, le 24 février 2022, lors d’une manifestation contre les opérations militaires de grande ampleur contre l’Ukraine ordonnées par le président Vladimir Poutine. Sur son masque, en lettres blanches, est inscrit le message « Non à la guerre ». © 2022 Aleksandr Kazakov/Kommersant/Sipa USA (Sipa via AP Images)

Selon OVD-Info, une association indépendante de défense des droits humains œuvrant pour la protection de la liberté de réunion en Russie, la police avait arrêté au moins 1 858 personnes entre le 24 février et le soir du 25 février. Ces personnes avaient participé à des manifestations anti-guerre dans 57 villes, dont Moscou, Saint-Pétersbourg, Krasnodar, Ekaterinbourg, Saratov, Nijni Novgorod et Voronej. Certains des manifestants détenus avaient brandi des affiches avec les messages « Non à la guerre, non au silence », « Stoppez la guerre », et d'autres slogans similaires.

À Moscou, le 24 février vers 15 h, la police a arrêté Marina Litvinovich, une militante des droits humains qui avait lancé sur les réseaux sociaux un appel à « sortir et dire que nous sommes contre la guerre ». Elle a été libérée quelques heures plus tard, dans l'attente d'une audience au tribunal et le lendemain, elle a été condamnée à une amende pour avoir enfreint les règles sur les rassemblements publics.

En réponse aux appels à des manifestations pacifiques, la Comité d'enquête de la Fédération russe a publié un communiqué avertissant que l'organisation de rassemblements non autorisés constitue une infraction passible de poursuites, et que toute personne organisant des « émeutes de masse » serait assujettie à une « peine sévère »  .

Un écran d'iPhone montre le compte Telegram d'OVD-Info, une organisation russe de défense des droits humains qui surveille les arrestations arbitraires de manifestants en Russie. Photo prise à Moscou le 25 décembre 2021. Fin février 2022, OVD-Info a surveillé le nombre croissant d’arrestations de manifestants qui protestaient contre la guerre en Ukraine. © 2021 AP Photo/Alexander Zemlianichenko

Dans la soirée du 24 février, des manifestants se sont rassemblés dans plusieurs villes de Russie pour manifester contre la guerre. Selon OVD-Info, plus de 1 000 manifestants ont été détenus arbitrairement à Moscou et environ 400 à Saint-Pétersbourg, les principales manifestations ayant eu lieu dans ces deux villes.

Human Rights Watch a analysé et vérifié 27 vidéos filmées au nord de la station de métro Gostinny Dvor à Saint-Pétersbourg et près de la place Pushkinskaya à Moscou, qui ont été diffusées sur les réseaux sociaux le 24 février. La plupart de ces vidéos montrent des arrestations brutales d’activistes pacifiques par des policiers. Dans au moins quatre cas, des vidéos montrent des policiers frappant des manifestants, les poussant au sol, les traînant, les saisissant par la tête ou les étouffant.

Les médias et OVD-Info ont également signalé d'autres cas d'usage excessif de la force par la police, des refus d'assistance médicale et des refus d'accès à des avocats.

Le 24 février, Roskomnadzor, l’agence russe chargée de la règlementation de l'Internet et d’autres médias, a publié un communiqué avertissant les médias de masse qu’ils devaient éviter de diffuser des informations « non vérifiées » ou « fausses ». et que seules les informations provenant de sources officielles peuvent être utilisées lors de reportages sur l’« opération spéciale » en Ukraine. L’agence a ajouté que toutes les « fausses » informations seraient immédiatement bloquées, et que la diffusion de « fausses nouvelles »  serait punie par des amendes.

Les actions des autorités visant à empêcher les personnes de participer à des manifestations publiques pacifiques et d'exprimer librement leurs opinions violent leurs droits fondamentaux, notamment les droits à la liberté d'expression et de réunion. Ces droits, ainsi que l'interdiction de la détention arbitraire, sont garantis par la Constitution russe, par la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), et par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP).

Communiqué complet en anglais : en ligne ici.

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