Il y a plus de deux ans, des policiers de la République démocratique du Congo ont abattu au moins 51 jeunes hommes et garçons et fait disparaître de force 33 autres dans le cadre d’une opération de police brutale baptisée « Opération Likofi ». Aujourd’hui, le gouvernement a présenté publiquement les conclusions de son rapport longtemps attendu sur l’opération.
Si le rapport reconnaît quelques cas d’inconduite policière pendant l’opération, il ne va pas assez loin. Il ne reconnaît pas l’ampleur totale des abus et n’appelle pas non plus à traduire les principaux responsables en justice.
L’Opération Likofi, menée entre novembre 2013 et février 2014, avait officiellement pour but de mettre fin aux crimes violents commis par ceux qu’on appelle les « kulunas », des membres de gangs, à Kinshasa, la capitale de la RD Congo. Mais la campagne policière a fini par répandre davantage de violence et de peur. Selon les recherches menées par Human Rights Watch, des policiers cagoulés ont traîné des présumés kulunas hors de leurs domiciles au milieu de la nuit et les ont abattus devant les membres de leurs familles et leurs voisins. Les corps de certaines victimes ont été emmenés par la police, et leurs familles n’ont jamais eu la possibilité d’organiser des funérailles. D’autres présumés kulunas ont été arrêtés, et n’ont plus jamais donné signe de vie.
Lorsque le gouvernement a reconnu que 421 corps non identifiés avaient étés enterrés au milieu de la nuit dans une fosse commune à Maluku, dans la périphérie de Kinshasa, les familles des personnes tuées ou portées disparues pendant l’Opération Likofi ont craint que leurs proches aient pu se trouver parmi les personnes enterrées là-bas. Jusqu’à ce jour, il n’est toujours pas clair qui finalement a été enterré à Maluku.
Les violations flagrantes des droits humains commises par des policiers au cours de l’Opération Likofi ont engendré une condamnation générale et poussé le Royaume-Uni et les États-Unis à suspendre leurs programmes d’aide à la réforme de la police à Kinshasa. Le gouvernement congolais avait alors promis de mener une enquête et de rendre ses résultats publics.
Maintenant que les conclusions du rapport du gouvernement ont enfin été rendues publiques – plus de deux ans et demi après le début de l’opération – les autorités congolaises devraient veiller à ce que les principaux responsables des violences fassent l’objet d’une enquête au pénal et soient poursuivis de manière appropriée, y compris le commandant de l’opération, le Général Célestin Kanyama, actuellement Commissaire provincial de la police pour la ville-province de Kinshasa. Les victimes et leurs familles méritent au moins cela.