Alors que les gens vivent de plus en plus longtemps, les systèmes de santé sont confrontés à un défi majeur : soigner de plus en plus de personnes qui souffrent de douleurs, de difficultés respiratoires, de nausées, d’anxiété et de dépression en raison de maladies chroniques à un stade avancé. Sans traitement adapté, ces symptômes peuvent détruire la qualité de vie des patients comme de leurs familles. Nos recherches ont montré que les personnes souffrant de douleurs sévères non traitées les décrivent souvent dans les mêmes termes que les victimes de tortures – un mal si intense qu’il ferait n’importe quoi pour que ça s’arrête.
La bonne nouvelle, c’est que la plupart de ces symptômes peuvent être contrôlées par des soins palliatifs, dont l’objectif est l’amélioration de la qualité de vie des personnes souffrant de maladies incurables. La mauvaise nouvelle, c’est que ces soins ne sont pas accessibles au plus grand nombre. Selon une étude de 2012, près de 100 pays n’ont pas de médecine palliative, ou alors très limitée. La situation est particulièrement désespérée en Afrique francophone qui, si ses dirigeants n’agissent pas, risque de prendre encore plus de retard sur les pays de l’Afrique anglophone, qui connaissent des progrès significatifs en la matière.
On estime que chaque année, environ 912 000 personnes, parmi lesquelles 214 000 enfants, ont besoin de soins palliatifs en Afrique francophone. Il est presque certain que ces chiffres vont encore augmenter, alors que le pourcentage de personnes âgées de plus de 65 ans – la part de la population la plus touchée par les maladies chroniques – devrait plus que doubler dans cette région d’ici 2050. Pourtant, l’étude de 2012 citée plus haut a établi que 16 pays d’Afrique francophone sur 22 n’ont aucuns services de santé offrant des soins palliatifs. En comparaison, tous les pays d’Afrique anglophone, à l’exception du Libéria, de l’Ile Maurice et des Seychelles, ont au moins quelques services de soins palliatifs. De la même manière, plus de la moitié des pays d’Afrique francophone pour lesquels nous disposons de données utilisent si peu de morphine, un antidouleur puissant indispensable à la gestion de la douleur, que cela ne suffit même pas pour traiter 5 pour cent des personnes qui meurent chaque année dans la souffrance suite à un cancer ou sont atteints du SIDA.
Un nouveau document publié par Human Rights Watch et neuf autres organisations analyse les défis et les opportunités en Afrique francophone. Pour la Journée mondiale des soins palliatifs 2015, nous appelons tous les dirigeants de la région à agir pour que les personnes qui ont la malchance de contracter une maladie incurable n’aient pas en plus à souffrir inutilement, de douleurs et d’autres symptômes que l’on sait traiter.