C’était un raid de nuit. Des combattants présumés d’une milice Lendu ont attaqué Loda, un village situé à une centaine de kilomètres au nord de Bunia, capitale provinciale de l’Ituri, le 17 juin. Ils ont tué six personnes, dont au moins deux enfants, par balle et à coups de machettes. Toutes les victimes étaient d’origine ethnique Hema. Une quarantaine de maisons ont été brulées.
Une témoin a déclaré à Human Rights Watch que « deux assaillants armés de machettes ont poursuivi [son] frère tandis que d’autres pillaient leur maison. » Elle a réussi à se cacher en brousse et a retrouvé le corps de son frère à son retour le lendemain matin. « Ils l’avaient découpé en morceaux », a-t-elle ajouté.
Au moins 444 civils ont trouvé la mort en Ituri depuis mars dans des attaques similaires à celle de Loda, selon des sources onusiennes. Plus de 200 000 personnes sont également déplacées depuis le début de l’année en conséquence. Des écoles et des centres de santé ont été détruits. La plupart des tueries suivent le même modus operandi, des combattants de la communauté Lendu – divisés en factions rivales et d’autres groupes – massacrant des habitants appartenant aux ethnies Hema et Alur.
La violence a redoublé d’intensité depuis la mort de Justin Ngudjolo, le chef de la Coopérative pour le développement du Congo (CODECO), issue de la communauté Lendu, dans une opération militaire de l’armée congolaise en mars dernier. Le groupe s’est depuis scindé en différentes factions et continue de tuer des civils à travers la province. Parallèlement, les forces de sécurité congolaises qui combattent les milices ont également commis de graves exactions, notamment des exécutions extrajudiciaires.
La violence actuelle découle de problèmes de longue date qui n’ont pas été réglés depuis le début des années 2000. D’innombrables massacres ont fait des dizaines de milliers de morts parmi les civils entre 1999 et 2007. La répartition des terres et des ressources naturelles entre les communautés était une question centrale à l’époque et l’est encore aujourd’hui.
Une grande partie de l’effusion de sang trouve son origine dans la compétition pour les mines d’or. Les mines de l’Ituri sont depuis longtemps une vache à lait pour les ex-rebelles, les politiciens et les militaires congolais impliqués dans la contrebande d’or vers les pays voisins.
En janvier, le bureau des droits de l’homme de l’ONU en RD Congo a déclaré que les meurtres, les viols ainsi que d’autres formes de violence visant la communauté Hema pouvaient constituer des crimes contre l’humanité. Le 4 juin, la Procureure de la Cour pénale internationale a également fait part de ses préoccupations concernant « une montée de violences graves » en Ituri, appelant les autorités congolaises à mener des enquêtes poussées sur les crimes présumés.
Le gouvernement devrait agir pour arrêter les massacres ciblant certaines communautés en Ituri. Une solution à long terme exigera des institutions étatiques qu’elles intensifient leurs enquêtes sur les abus et traduisent les responsables en justice. Enfin, il est crucial que les troupes congolaises respectent les droits humains afin qu’elles puissent faire partie de la solution au lieu d’aggraver la situation.
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#RDC – Des centaines de civils ont été tués depuis mars lors de violences #ethniques dans la province de l’#Ituri, dans l’est du pays. Le gouvernement devrait d’urgence agir pour y mettre fin et traduire les responsables en justice, selon @LewisMudge @hrw. https://t.co/pRRPqvGCe9
— HRW en français (@hrw_fr) June 22, 2020