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Russie : Le Kremlin ignore des menaces proférées contre un journal

Le dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov a menacé les journalistes de Novaya Gazeta

(Moscou, le 21 avril 2020) - La semaine dernière, le porte-parole du Kremlin a omis de reconnaître la gravité d’une menace proférée par le dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov contre le journal indépendant Novaya Gazeta, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Les autorités russes devraient immédiatement prendre cette menace au sérieux, enquêter à ce sujet et garantir la sécurité d'Elena Milashina, la correspondante du journal qui a souvent révélé des exactions commises en Tchétchénie.
 
La journaliste russe Elena Milashina, collaboratrice de Novaya Gazeta, photographiée après avoir été agressée à Grozny, en Tchétchénie, en février 2020. © 2020 Elena Milashina/Facebook
Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux le 13 avril, Kadyrov a condamné la récente publication par Novaya Gazeta d’un article indiquant que les mesures prises par les autorités tchétchènes pour empêcher la propagation du virus Covid-19 étaient entachées d’abus. Kadyrov a proféré des menaces de mort voilées contre les journalistes de Novaya Gazeta, affirmant que si les autorités russes n'agissaient pas pour les « stopper », les autorités tchétchènes s’en chargeraient, même si cela signifiait qu’un « crime » allait devoir être commis.

« La réaction désinvolte du Kremlin face à cette grave menace contre Novaya Gazeta est inacceptable et dangereuse », a déclaré Tanya Lokshina, directrice adjointe de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. « Kadyrov attendait un signal, et ceci ressemble à un feu vert donné aux autorités tchétchènes pour mettre à exécution ses menaces. »

Kadyrov a proféré sa menace au lendemain de la publication par Novaya Gazeta d’un article d'Elena Milashina intitulé « Mourir du coronavirus est le moindre mal ». L'article signalait que l'approche des autorités tchétchènes pour contenir l'épidémie était entachée d’abus, et que les résidents étaient si « terrorisés » qu’il préféraient ne pas demander d'assistance médicale, et donc risquer de mourir en cas d’infection, plutôt que d'exposer leurs familles au risque de stigmatisation et de représailles des autorités. L’article cite par exemple de précédentes déclarations publiques de Kadyrov, selon qui les personnes qui enfreignent les règles de confinement et pouvant infecter d’autres personnes sont comparables à des terroristes, qui mériteraient d’être jetés dans des fosses.

Dans ses remarques filmées le 13 avril, Kadyrov a accusé Novaya Gazeta de mensonges « malveillants » et a demandé aux autorités fédérales russes de « stopper ces non-humains ». Il a proféré une menace de mort voilée mais sans équivoque : « Si vous [autorités fédérales] n’agissez pas, et voulez que nous [autorités tchétchènes] commettions un crime et devenions des criminels, dites-le. L'un [d'entre nous] assumera alors ce fardeau, cette responsabilité. Il sera puni conformément à la loi, passera un certain temps en prison, puis en sortira. Ne faites pas de nous des bandits et des tueurs… »

Lors d’une conférence de presse tenue le 16 avril, le porte-parole du président Vladimir Poutine, Dmitri Peskov, a réagi à une question concernant la réponse du Kremlin à ces propos menaçants de Kadyrov. Il a répondu : «… Nous avons examiné cela. En effet, [cette déclaration] était assez émotionnelle. Mais d'un autre côté, la situation actuelle [celle du Covid-19] est assez émotionnelle. Et donc nous n’avons rien vu d’anormal dans cela. » Il a ajouté que le Kremlin « ne juge pas nécessaire » de répondre publiquement à Kadyrov.

Cette menace de Kadyrov contre Novaya Gazeta fait suite à de précédentes menaces et attaques menées par les autorités locales contre des journalistes et des défenseurs des droits humains ayant dénoncé des abus en Tchétchénie ; ces individus ont été traités d '« ennemis » et de « terroristes », emprisonnés et parfois obligés à quitter la Tchétchénie.

Elena Milashina a été la cible de menaces vicieuses de la part des autorités tchétchènes depuis qu'elle a dévoilé leur purge anti-gay au printemps 2017. En février 2020, un groupe de personnes a violemment agressé Elena Milashina et Marina Dubrovina, une avocate spécialisée dans la défense des droits humains à Grozny.

Communiqué complet en anglais :

www.hrw.org/news/2020/04/21/russia-kremlin-dismisses-threats-against-newspaper

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