(New York, le 26 novembre 2014) - Des dizaines de personnes ont fait l’objet de disparitions forcées au Turkménistan, certains depuis plus d'une décennie, a rappelé Human Rights Watch dans une vidéo diffusée aujourd'hui. Le gouvernement turkmène devrait immédiatement fournir aux proches de ces personnes des informations sur leur sort et sur le lieu de leur détention, et leur accorder le droit de visite.
Plusieurs des personnes « disparues » ont été condamnées à des peines de prison suite à la tentative présumée d'assassinat commise à l’encontre de l’ex-président Saparmourat Niazov le 25 novembre 2002.
« Les douze dernières années ont été marquées par le silence au sujet des prisonniers disparus, et par la répression », a déclaré Rachel Denber, directrice adjointe de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. « Le gouvernement turkmène doit enfin révéler où ces personnes sont détenues, voire confirmer qu’elles sont encore en vie. »
Dans la vidéo, l’opposant en exil Sapar Iklimov affirme qu'il n’a aucune information au sujet de ses trois frères depuis leur arrestation peu après l’incident du 25 novembre 2002. Ses frères Yklym, Aman et Oraz Iklymov ont été condamnés respectivement à la réclusion à perpétuité, à 20 ans de prison et à 19 ans de prison à l’issue de simulacres de procès lors desquels ils n’ont bénéficié d’aucune représentation légale efficace.
« J’ai besoin de savoir où est mon mari », insiste Tatyana Chikmouradova dans la vidéo. Son mari, l'ex-ministre turkmène des Affaires étrangères Boris Chikhmouradov, a été arrêté, jugé et condamné en décembre 2002 à 25 ans de prison à l’issue d’un procès expéditif de trois jours. En dépit de ses nombreuses lettres adressées aux autorités turkmènes, Tatyana Chikmouradova n'a pu obtenir aucune information au sujet de son mari, et n'a jamais été autorisée à correspondre avec lui, ou à lui rendre visite.
Parmi les autres victimes de disparitions forcées figurent Tagandurdy Khallyev, ex-président du parlement et ex-doyen de la principale faculté de droit du Turkménistan, et Batyr Berdyev, l'ancien ambassadeur du pays auprès de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Les deux hommes ont été arrêtés en 2002, et chacun a été condamné à 20 ans de prison.
Les familles des prisonniers « disparus » n’ont pu obtenir aucune information officielle sur leur sort, sur leur lieu détention ou sur leur état de santé à la suite des arrestations et des procès. Les autorités leur ont refusé le droit de correspondre avec les prisonniers ou de leur rendre visite. En outre, comme l’a documenté la campagne internationale « Prove They Are Alive ! » (« Prouvez qu’ils sont vivants ! »), lancée par plusieurs organisations de défense des droits humains dont Human Rights Watch, les autorités ont infligé une forme de punition collective aux membres des familles de plusieurs prisonniers. Certains ont été arrêtés, d’autres ont perdu leurs emplois, d’autres encore se sont vu refuser l’autorisation de voyager à l'étranger.
Le Turkménistan est l'un des pays les plus répressifs et fermés au monde, où un examen indépendant de la situation des droits humains est pratiquement impossible. Divers droits, y compris la liberté des médias et la liberté de culte, sont soumis à des restrictions draconiennes. Les défenseurs des droits humains et d'autres militants sont confrontés en permanence au risque de représailles par le gouvernement, qui recourt à l'emprisonnement comme outil de répression politique.
Human Rights Watch a appelé les gouvernements étrangers et les organisations internationales à presser le gouvernement turkmène de briser son silence sur les prisonniers « disparus », et de permettre à leurs familles, à des avocats et à des représentants des Nations Unies et d'organismes indépendants comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de visiter ou contacter sans entrave les prisonniers.
Les disparitions forcées sont strictement interdites en vertu du droit international, et constituent un crime grave en tant que violation du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et de la Convention contre la torture, deux traités auxquels le Turkménistan est un État partie. Les disparitions forcées enfreignent plusieurs droits, notamment le droit à la vie, le droit de ne pas être soumis à la torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que le droit de toute personne détenue d'être traitée avec humanité.
À l’issue de son examen de l’application au Turkménistan des principes du PIDCP, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a exprimé en mars 2012 sa préoccupation au sujet de la « pratique de la mise au secret des détenus », et a exhorté les autorités à « [divulguer] immédiatement le lieu où se trouvent ceux qui ont été condamnés » et à « leur permettre de recevoir la visite des membres de leurs familles et de s’entretenir avec leurs avocats ».
Pour lire le communiqué intégral en anglais, veuillez cliquer ici.
----------------
Tweet (2019)
Alors que le #HDIM2019 touche à sa fin, un grand merci aux organisations #sociétécivile pour les événements de qualité organisés sur les violations des #droitsdelhomme dans la région #OSCE. Ici la plateforme #Provetheyarealive alerte sur les #disparitionsforcées au #Turkménistan pic.twitter.com/PyVFpvrfut
— La France à l'OSCE (@RP_France_OSCE) September 27, 2019