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ONU : Rejeter la candidature du Venezuela au Conseil des droits de l’homme

Plusieurs pays présentant des bilans problématiques en matière de droits humains sont candidats à des sièges du Conseil

Le siège des Nations Unies à New York, photographié lors d'une session de l'Assemblée générale en octobre 2018. © 2018 AP Photo/Richard Drew

(New York, le 15 octobre 2019) – Plusieurs pays souhaitant siéger au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies affichent des bilans problématiques en matière de droits humains, selon Human Rights Watch qui appelle en particulier les États membres de l’ONU à rejeter la candidature du Venezuela. Il est clair que le gouvernement de ce pays, responsable de multiples abus, est loin de satisfaire aux exigences minimales pour faire partie du Conseil.

Le 17 octobre 2019, l’Assemblée générale de l’ONU élira 14 nouveaux membres du Conseil, où siègent 47 pays, pour un mandat de trois ans débutant en janvier 2020. Le groupe régional onusien Amérique latine et Caraïbes ne présentait au départ que deux candidats pour ses deux sièges au Conseil – le Venezuela et le Brésil –, de sorte que leur victoire était quasiment assurée. Mais le 3 octobre, le Costa Rica, qui a un bilan solide en matière de droits humains, a annoncé qu’il se portait candidat à un siège. Cela signifie que les 193 membres de l’Assemblée peuvent désormais empêcher le gouvernement abusif du Venezuela d’obtenir un siège.

« Maintenant que les États membres de l’ONU ont le choix, il n’y a plus d’excuse possible pour voter pour le Venezuela », a déclaré Louis Charbonneau, directeur du plaidoyer auprès des Nations Unies à Human Rights Watch. « Voter pour le Venezuela, ce serait voter pour la torture, le meurtre et l’impunité qui sont devenus la marque du gouvernement du président Nicolás Maduro. Ce serait un camouflet pour les millions de personnes qui ont fui le pays, subissant pour la plupart une situation humanitaire désespérée, et pour les innombrables victimes qui n’ont pas pu s’enfuir. »

Le 10 octobre, 54 organisations internationales et vénézuéliennes, dont Human Rights Watch, ont déclaré le 10 octobre que le Venezuela n’était pas digne d’être membre du Conseil. En septembre, le Conseil a adopté une résolution créant une mission d’enquête indépendante chargée d’enquêter sur les allégations d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées, d’arrestations arbitraires, de tortures et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants commis au Venezuela depuis 2014. Le Venezuela a rejeté cette résolution.

La résolution 60/251 de l’Assemblée générale de l’ONU, qui a créé le Conseil des droits de l’homme, demande aux pays élisant ses membres de « prendr[e] en considération le concours que chaque candidat a apporté à la cause de la promotion et de la défense des droits de l’homme ». Cela s’applique à leurs efforts accomplis pour promouvoir et défendre les droits humains sur leur propre territoire aussi bien qu’à l’étranger. Les membres du Conseil sont censés « observe[r] les normes les plus strictes en matière de promotion et de défense des droits de l’homme » et « coopére[r] pleinement avec le Conseil ».

Le Venezuela ne répond pas à ces exigences minimales, a déclaré Human Rights Watch. Plus de 4 millions de Vénézuéliens ont fui le pays pour échapper à l’urgence humanitaire et à la crise politique, économique et relative aux droits humains.

Dans deux des cinq zones géographiques de l’ONU, il n’y aura pas de concurrence pour les sièges du Conseil, ce qui signifie que la victoire de leurs candidats est courue d’avance lors du vote à scrutin secret. Ainsi quatre pays africains sont en course pour quatre sièges : le Bénin, la Libye, la Mauritanie et le Soudan. De même les Pays-Bas et l’Allemagne visent les deux sièges réservés au groupe Europe de l’Ouest.

Dans les groupes Europe de l’Est et Asie, plusieurs pays ont depose leur canddiature : au sein du deuxième groupe, l’Arménie, la Moldavie et la Pologne rivalisent pour deux sièges, et dans le deuxième groupe, l’Indonésie, l’Irak, le Japon, les Îles Marshall et la Corée du Sud se disputent quatre sièges.

Toutes les régions devraient veiller à proposer suffisamment de pays concurrents, ce qui permettrait aux membres de l’ONU de bloquer les gouvernements commettant le plus d’abus. En 2016, la Russie, tentant de se faire réélire au Conseil des droits de l’homme, a perdu par deux voix suite à l’indignation soulevée par le bombardement de civils à Alep en Syrie. Un manque de concurrence peut porter atteinte au respect des normes attendu chez les membres.

Le troisième pays candidat du groupe Amérique latine et Caraïbes est le Brésil, dont le président, Jair Bolsonaro, a adopté un discours hostile aux normes des droits humains. Son gouvernement a de fait donné le feu vert à des réseaux criminels qui détruisent la forêt tropicale amazonienne et agressent les défenseurs de l’environnement forestier. Enfin le Brésil est marqué par des atteintes chroniques des droits humains, notamment des violences policières. Mais au contraire du Venezuela, qui cherche constamment à entraver la capacité du Conseil à agir contre les abus, le Brésil a soutenu de nombreuses résolutions du Conseil s’attaquant à diverses violations dans le monde.

Quant à la Pologne, elle a systématiquement porté atteinte à l’indépendance et à l’efficacité de sa justice. Ces dernières années, les juges et procureurs ont fait l’objet de procédures disciplinaires pour s’être exprimés sur les réformes judiciaires, ce qui sape l’indépendance de la justice.

En Indonésie, il y a eu un accroissement de l’intolérance religieuse qui a provoqué des discriminations envers les minorités religieuses, les femmes et les personnes LGBT. Le gouvernement indonésien a toléré l’usage de centaines de réglementations discriminatoires, comme la loi sur le blasphème, pour poursuivre les minorités. En Irak, le gouvernement n’a pas garanti que toutes les forces susceptibles d’avoir commis des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des génocides, y compris les suspects de l’État islamique (EI), soient poursuivies en justice pour leurs crimes spécifiques. Les forces de sécurité irakiennes continuent à commettre des abus, tuant plus de 100 manifestants début octobre après avoir recouru à une force excessive et meurtrière lors de manifestations.

Quant au Soudan, il a de nombreux antécédents d’atteintes aux droits humains et d’impunité de crimes graves. S’il entre au Conseil des droits de l’homme, le nouveau gouvernement de transition devra montrer l’exemple dans la défense des droits humains, en prenant des mesures concrètes pour traduire les criminels en justice et entreprendre des réformes. Il devrait notamment mener des enquêtes crédibles sur les agressions de manifestants depuis le 18 décembre et livrer le président déchu Omar el-Béchir à la Cour pénale internationale.

En Mauritanie, les autorités se servent de lois pénalisant la diffamation, la diffusion de « fausses informations » et le blasphème afin de poursuivre et d’emprisonner des défenseurs des droits humains, des activistes, des blogueurs et des opposants politiques.

Le Conseil a été créé en 2006 pour remplacer la Commission des droits de l’homme, qui avait perdu sa crédibilité parce qu’elle comprenait des pays ayant gravement violé les droits humains.

« Les États membres de l’ONU ne devraient pas récompenser les gouvernements qui commettent des abus en leur octroyant un siège dans des organes aussi importants que le Conseil des droits de l’homme », a conclu Louis Charbonneau. « Certes, aucun gouvernement n’est parfait, mais il est évident que le Venezuela entrerait au Conseil dans l’idée de se protéger soi-même, ainsi que ses alliés, de critiques légitimes. Lorsque les États membres voteront, ils devraient avant tout veiller à bloquer le Venezuela. »

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