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Le 12 décembre 2016, l’Union européenne et les États-Unis ont annoncé des sanctions ciblées à l’encontre de neuf hauts responsables congolais qui ont joué un rôle clé dans la répression au cours des deux dernières années.

Des policiers congolais procèdent à l’arrestation de membres du mouvement jeunesse Filimbi participant à un sit-in pacifique devant le bureau de l'Union africaine à Kinshasa, le 29 octobre 2016. © Privé


Les sanctions américaines, consistant notamment en gels d’avoirs, touchent des personnes placées plus haut dans la chaîne de commandement que les précédentes sanctions annoncées en juin et septembre. Elles ciblent Kalev Mutondo, directeur de l’Agence nationale de renseignements congolaise (ANR), et Évariste Boshab, vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur pour s’être livré à des actes de nature à « affaiblir les processus démocratiques. » Mutondo et Boshab ont été pour l’essentiel les chevilles ouvrières de la répression au cours des deux années écoulées, alors que Kabila cherchait à se maintenir au pouvoir au-delà de l’expiration de son mandat.

Les sanctions de l’UE, qui comportent des interdictions de voyager à l’étranger et un gel des avoirs financiers, visent notamment quatre individus qui selon l’UE ont « contribué en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l'homme en RDC » : Ilunga Kampete, commandant de la Garde républicaine ; Gabriel Amisi Kumba, commandant de l'armée congolaise (FARDC) dans la région occidentale du pays ; Ferdinand Ilunga Luyolo, commandant de la Légion nationale d'intervention (LENI) de la Police nationale congolaise, une unité anti-émeutes ; et Célestin Kanyama, commissaire de la Police nationale congolaise (PNC) à Kinshasa.
 
L'UE a imposé des sanctions contre trois autres personnalités de haut rang « faisant obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d'élections en RDC, notamment par des actes de violence, de répression ou d'incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l'état de droit » : John Numbi, ancien inspecteur général de la PNC ; Roger Kibelisa, chef du département de la sécurité intérieure de l’ANR ; et Delphin Kahimbi, chef du service du renseignement militaire.

Dans sa déclaration annonçant les sanctions, l’UE a indiqué que « des mesures restrictives supplémentaires pourront être envisagées en cas d'obstruction du processus politique ou de nouvelles violences. ».

Kalev Mutondo
Dans son rôle de directeur de l’Agence nationale de renseignements (ANR), Kalev Mutondo a été l’un des principaux architectes des efforts du gouvernement visant à réprimer la contestation politique. Human Rights Watch a interviewé plus d’une dizaine de responsables gouvernementaux, membres de la coalition de la majorité de Kabila, et responsables des forces de sécurité au cours des deux dernières années sur le rôle de Mutondo.

Kalev Mutondo (deuxième en partant de la gauche), le directeur de l’Agence nationale de renseignements (ANR) en RD Congo, en compagnie de Marie Olive Lembe, la Première dame, et du président Joseph Kabila lors des célébrations pour l’anniversaire de l’indépendance du pays à Kindu, capitale de la province du Maniema, le 30 juin 2016. © 2016 Reuters


L’agence de renseignements dirigée par Mutondo a arbitrairement arrêté des dizaines de leaders de l’opposition et de jeunes activistes défenseurs des droits humains et pro-démocratie, dont beaucoup ont été détenus au secret pendant des semaines ou des mois, sans inculpation et sans accès à leur famille ou à un avocat. Certains ont été jugés sur la base d’accusations forgées de toutes pièces ; Mutondo aurait aussi joué un rôle dans l’intimidation de juges, et dicté des verdicts.

Certaines des personnes détenues par l’agence de renseignements à l’occasion de la répression du gouvernement ont été malmenées ou torturées, notamment à l’aide de chocs électriques et d’une forme de quasi-noyade. Ses agents ont aussi à maintes reprises intimidé, menacé et harcelé des activistes, journalistes et chefs ou partisans de l’opposition, apparemment dans le cadre d’une campagne plus large visant à répandre la peur et à réduire leurs activités.

Avant une manifestation de l’opposition à Kinshasa en septembre 2015, Mutondo fut au nombre de plusieurs responsables des services de sécurité et du parti au pouvoir qui ont engagé des hommes pour agresser des manifestants pacifiques. Armés de gourdins et de bâtons en bois, les assaillants ont frappé les manifestants, répandant peur et chaos parmi une foule de milliers de personnes. Plusieurs de ces recrues ont déclaré à Human Rights Watch qu’elles avaient été convoquées à une réunion avec des responsables organisée dans un camp militaire de Kinshasa la veille au soir, été payées environ 65 USD chacune, et reçu des directives pour mener l’attaque.

Les États-Unis ont imposé des sanctions contre Mutondo le 12 décembre.

Évariste Boshab
Évariste Boshab, vice-Premier ministre en charge de l'Intérieur et de la Sécurité, a joué un rôle de commandement important dans la répression au cours des deux dernières années.
 
Évariste Boshab. © Radio Okapi/Ph. Innocent Olenga Lumbahee


Depuis qu’il a accédé à ce poste en décembre 2014, Boshab est officiellement en charge des services de police et de sécurité et coordonne le travail des gouverneurs provinciaux. Ces entités ont à maintes reprises interdit ou réprimé les manifestations de l’opposition, emprisonné des activistes et des opposants, fermé des médias, et entravé la liberté de mouvement de dirigeants de l’opposition.

Avant la manifestation du 19 septembre à Kinshasa, Boshab a signé un communiqué présenté à la télévision nationale annonçant l’interdiction de toutes les manifestations et que quiconque sortirait « serait confronté aux rigueurs de la loi et que la police ferait son travail. » De nombreuses personnes ont interprété ceci comme un feu vert accordé aux forces de sécurité pour réprimer les manifestants.

Après la répression des manifestations à Kinshasa en janvier 2015 et en septembre 2016, le cabinet de Boshab a envoyé des policiers autour de la morgue principale et donné l’ordre aux employés de la morgue de ne donner aucun renseignement aux journalistes ou aux défenseurs des droits humains sur les corps des victimes tuées au cours de manifestations, ont déclaré des témoins.

Boshab a aussi été impliqué dans des tentatives visant à empêcher des organisations de droits humains et des mouvements pro-démocratie internationaux et congolais d’agir librement en RD Congo. Le 3 novembre, Boshab a donné l’ordre aux 26 gouverneurs d’interdire aux mouvements de jeunes Filimbi et LUCHA de mener des activités sous le prétexte que ces groupes n’étaient pas légalement enregistrés. Cela va à l’encontre de la législation congolaise qui n’exige pas des citoyens d’enregistrer leur organisation pour tenir une réunion pacifique.

Les États-Unis ont imposé des sanctions contre Boshab le 12 décembre.

Gaston Hughes Ilunga Kampete
Le Général Gaston Hughes Ilunga Kampete est le commandant de la Garde républicaine, chargée de la sécurité présidentielle, depuis fin 2014. La Garde républicaine est une force d’environ 12 000 soldats dont la mission consiste essentiellement à protéger le Président. D’après la législation congolaise, la Garde républicaine n’a pas vocation à maintenir l’ordre public.

Le général Ilunga Kampete (à droite) s'entretient avec le général Bahuma Ambamba (au centre) près de Chanzu, dans l'est de la RD Congo, le 5 novembre 2013. © 2013 Getty Images


Pendant les manifestations à Kinshasa en janvier 2015, les forces de sécurité ont tué par balles au moins 38 personnes. Les Gardes républicains sous le commandement de Kampete étaient parmi ceux qui ont tiré à balles réelles sur les foules de manifestants. Les Gardes républicains ont aussi tiré sans distinction dans un hôpital, blessant gravement trois personnes. Human Rights Watch a documenté plusieurs cas dans lesquels des soldats de la Garde républicaine avaient emporté les corps de personnes tuées par balles, essayant apparemment ainsi de faire disparaître les preuves de ces meurtres.

Des membres de la Garde républicaine, y compris certaines unités de la Garde républicaine déployées en uniforme de police, ont été responsables de nombreux abus pendant les manifestations de septembre 2016 à Kinshasa. Les forces de la Garde républicaine ont tiré sur les manifestants, attaqué et brûlé les sièges de partis d’opposition, et brûlé à mort plusieurs personnes.

Plusieurs officiers ont déclaré à Human Rights Watch que Kampete, en collaboration avec le commandant de l’armée pour la zone occidentale du pays, le Général Gabriel Amisi, dirigeait un centre de commandement des opérations à Kinshasa pendant la semaine du 19 septembre et donnait des ordres aux unités des forces de sécurité qui exécutaient la répression sur le terrain. « Ordre a été donné d’éliminer les manifestants pour qu’ils ne puissent réussir leur mission » a confié un officier. « Ordre a été donné de tout faire pour qu’ils n’entrent pas dans la Gombe [quartier de la capitale où se trouvent la plupart des édifices gouvernementaux, la présidence et les ambassades] ».

Un autre a confié que les ordres étaient « d’écraser » les manifestations. Les soldats de la Garde républicaine qui allaient être déployés à Kinshasa la semaine du 19 septembre auraient reçu une prime le 16 septembre en vue de les motiver pour une réaction musclée pendant les manifestations, selon un officier de sécurité.

L’UE a imposé des sanctions contre Kampete le 12 décembre.

Gabriel Amisi

Le Général Gabriel Amisi (connu sous le nom de « Tango Four ») possède un lourd bilan en matière d’implication dans les graves atteintes aux droits humains en RD Congo. Officier de l’armée de l’ancien président Joseph Mobutu, Amisi a rejoint la rébellion de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), appuyée par le Rwanda, qui a évincé Mobutu en 1997. Amisi a plus tard rejoint une autre rébellion soutenue par le Rwanda, le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD)-Goma, et en mai 2002, il figurait parmi les commandants responsables des meurtres généralisés, des exécutions sommaires, des viols et des pillages qui ont eu lieu pendant la répression d’une mutinerie à Kisangani, comme l’ont montré les recherches de Human Rights Watch à l’époque.

Gabriel Amisi Kumba (surnommé « Tango Four »), ex-commandant de l’armée congolaise pour la région occidentale, promu en juillet 2018 au poste de chef d’état-major adjoint de l’armée congolaise chargé des opérations et du renseignement.   © 2016 Privé

Le Groupe d’experts de l’ONU sur la RD Congo a rapporté qu’Amisi aurait été plus tard impliqué dans le trafic de minerais, y compris l’étain et l’or, alors qu’il était commandant des forces terrestres de l’armée congolaise. Amisi a été suspendu de ses fonctions en novembre 2012, suite aux accusations portées par le Groupe d’experts selon lesquelles Amisi supervisait un réseau distribuant des munitions aux braconniers et aux groupes armés. Les autorités congolaises ont abandonné toutes les poursuites contre lui en juillet 2014.

Amisi est actuellement commandant de la première zone de défense, qui couvre la capitale, Kinshasa, ainsi que d’autres provinces occidentales. Des militaires sous son commandement ont été impliqués dans la répression violente des manifestations politiques au cours des deux dernières années et ont fait usage d’une force excessive et illégale.

Pendant les manifestations de septembre 2016 à Kinshasa, Amisi et le chef de la Garde républicaine, le Général Kampete, ont dirigé un centre de commandement des opérations à Kinshasa, ont déclaré plusieurs officiers de sécurité. Les généraux auraient donné des ordres aux forces de sécurité sur le terrain qui ont commis des exactions.

Human Rights Watch a constaté qu’Amisi, d’autres hauts dirigeants et des responsables du parti au pouvoir, dont le ministre de la Jeunesse et des Sports Denis Kambayi, avaient mobilisé et payé des membres de ligues de jeunes pour infiltrer les manifestations de septembre et inciter les manifestants à piller et à commettre des violences. Un membre de la ligue de jeunes associée au Vita Club, équipe de football dont Amisi est le président, a déclaré à Human Rights Watch qu’il avait été convoqué à une réunion avant les manifestations, où on lui avait ordonné d’infiltrer celles-ci.

Les États-Unis ont imposé des sanctions contre Amisi le 28 septembre et l’Union européenne lui en a aussi imposé le 12 décembre.

Célestin Kanyama
Le Général Célestin Kanyama a été nommé commissaire provincial de la police à Kinshasa en décembre 2013. Officiellement, Kanyama est placé sous les ordres de l’inspecteur général de la Police nationale congolaise, le Général Charles Bisengimana, mais on rapporte qu’il suit également les instructions d’autres hauts responsables congolais. La liste des violations des droits humains dans lesquelles Kanyama serait impliqué est très longue.

Célestin Kanyama. © 2014 Radio Okapi/Ph. John Bompengo


Entre novembre 2013 et février 2014, Kanyama était la principale personne aux commandes de l’Opération Likofi, une opération policière visant à réprimer des membres de gangs criminels organisés. C’est lui qui donnait les ordres pour la conduite de cette opération, qui a entraîné de nombreuses violations majeures des droits humains. Des agents de police participant à l’opération ont exécuté sommairement au moins 51 jeunes hommes et adolescents et ont soumis 33 autres à des disparitions forcées.

Kanyama et les troupes placées sous ses ordres seraient responsables d’une grande partie de la répression à Kinshasa en 2015 et 2016, que ce soit contre des activistes, des opposants politiques ou des manifestants, notamment d’arrestations arbitraires et de mesures répressives contre les manifestations politiques de janvier 2015 et septembre 2016.   

Kanyama faisait aussi partie des hauts responsables des forces de sécurité et du parti au pouvoir qui ont recruté des voyous pour s’attaquer à une manifestation politique pacifique dans la capitale le 15 septembre 2015.

À l’époque où il était commissaire de police du district de Lukunga à Kinshasa, il avait déjà été impliqué dans les violences de la période électorale de 2011, lorsque des policiers et d’autres agents sécuritaires avaient tué des centaines de partisans de l’opposition dans les rues de Kinshasa.

Les États-Unis ont imposé des sanctions contre Kanyama le 23 juin, ainsi que l’Union européenne par la suite, le 12 décembre.

John Numbi
John Numbi est l’ancien inspecteur général de la police nationale congolaise. En 2008, il a été impliqué dans le déploiement d’environ 600 agents de police pour réprimer le groupe politico-religieux Bundu Dia Kongo (BDK), basé dans le Bas-Congo. Les recherches menées par Human Rights Watch à l’époque ont montré que, pendant trois semaines d’opérations policières, la police a tiré sur des adhérents du BDK qui manifestaient, dont certains étaient violents, sans avertissement préalable, tuant plus de 200 personnes et blessant des dizaines d’autres. La police a fait usage d’une force excessive et létale et, dans certains cas, a délibérément tué des personnes qui étaient blessées, y compris des personnes qui cherchaient des soins médicaux dans les centres de santé, qui s’enfuyaient ou qui, de toute autre manière, ne constituaient pas une menace pour la police. La police a systématiquement brûlé des lieux de réunion, des maisons et d’autres bâtiments appartenant aux adhérents du BDK. La police a arrêté plus de 150 partisans du BDK suspectés, y compris des personnes qui n’avaient participé à aucune action contre la police, et a torturé ou maltraité certains d’entre eux.

John Numbi, ancien inspecteur général de la police nationale. © 2016 Privé

Le 1er juin 2010, un éminent défenseur des droits humains, Floribert Chebeya, qui avait documenté les abus commis par la police contre le BDK, s’est rendu au quartier général de la police à Kinshasa suite à un appel téléphonique le convoquant au bureau de Numbi. Son corps a été trouvé peu de temps après. Le chauffeur de Chebeya, Fidèle Bazana, est toujours porté disparu. Suite à l’indignation généralisée en RD Congo et dans le monde entier face à ce qui semblait être un double meurtre impliquant Numbi, ce dernier a été suspendu de ses fonctions d’inspecteur général de la police nationale le 5 juin 2010. En 2012, un haut tribunal militaire a refusé d’examiner le rôle présumé de Numbi dans le meurtre.

Bien que Numbi n’ait plus de fonctions officielles, plusieurs responsables du gouvernement et des forces de sécurité ont assuré à Human Rights Watch qu’il demeurait un proche conseiller du président Kabila et qu’il avait une grande influence sur la sécurité et la politique dans l’ex-province de Katanga. Dans les quatre provinces composant l’ancienne province de Katanga, trois candidats aux élections de mars 2016 pour les postes de gouverneurs ont déclaré à Human Rights Watch que Numbi les avait menacés et leur avait intimé de retirer leur candidature. Un haut responsable du gouvernement basé au Katanga a lui aussi témoigné que Numbi avait menacé de mort des candidats de l’opposition pendant les élections des gouverneurs, leur ordonnant de retirer leur candidature et de ne pas contester les résultats. Ce fonctionnaire a également déclaré que Numbi était « le véritable gouverneur » des quatre provinces qui formaient auparavant la province du Katanga.

Les États-Unis ont imposé des sanctions contre Numbi le 28 septembre, et l’Union européenne le 12 décembre.

Delphin Kahimbi
Le Général Delphin Kahimbi est impliqué dans de graves violations des droits humains en RD Congo, telles que des arrestations arbitraires, des tortures et des mauvais traitements infligés à des détenus, en particulier de l’ethnie tutsie.
Kahimbi est supposé avoir arrêté arbitrairement et détenu des personnes dans sa résidence privée de Goma en 2006, alors qu'il était commandant adjoint de la 8ème Région militaire. Un homme arrêté à Goma en décembre 2006 a affirmé qu’il avait été battu avec une ceinture et torturé avec des chocs électriques, y compris par Kahimbi en personne.

En 2008, en tant que commandant en second de l’armée congolaise dans le Nord-Kivu et à la tête du commandement opérationnel des zones de Kiwanja and Rutshuru, pendant les opérations contre le groupe rebelle Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), Kahimbi a fait preuve d’une hostilité considérable à l’égard des troupes de maintien de la paix de l’ONU. Il a sciemment exposé les Casques bleus et les civils rassemblés près de leurs camps au risque d’être piégés dans des tirs croisés. Entre autres actions entravant la coopération avec les Casques bleus, Kahimbi semble avoir joué un rôle dans l’incitation de manifestations anti-Casques bleus. Celles-ci ont entraîné des restrictions des patrouilles de l’ONU, ce qui fait que les Casques bleus étaient souvent absents lorsque des habitants étaient attaqués.

En 2014, dans ses fonctions de coordinateur du processus de pré-désarmement, démobilisation et réintégration des ex-combattants, Kahimbi, aux côtés d’autres officiers, a failli à son devoir de fournir soins et nourriture correcte aux combattants démobilisés, à leurs femmes et à leurs enfants dans un camp militaire congolais isolé. Au moins une centaine de personnes y sont mortes de faim et de maladie.

Plus récemment, en tant que chef des renseignements militaires, Kahimbi a été impliqué dans des arrestations arbitraires, des détentions et des mauvais traitements à Kinshasa, entre autres dans le contexte de la répression des partis d’opposition. Ainsi Norbert Luyeye, président du parti d’opposition Union des Républicains (UR), a été arrêté chez lui, avec six autres personnes, le 7 août 2016. Le 4 août, au siège de son parti, Luyeye avait déclaré qu’il se produirait un vide juridique si la Commission électorale nationale indépendante (CENI) échouait à convoquer des élections en septembre. Il avait appelé à se rassembler le 4 septembre, dans le quartier Ndjili de Kinshasa, pour préparer les manifestations du 19 septembre. Toutes ces personnes sont détenues par les services militaires de renseignements, sans avoir été légalement inculpées ni autorisées à voir leur famille ou un avocat.

Cubain Tshimbalanga, un membre du parti d’opposition Solidarité congolaise pour la démocratie (SCODE), a été arrêté à Kinshasa le 26 septembre. Détenu au quartier général des renseignements militaires de Kinshasa, il a été passé à tabac avant d’être libéré début octobre. Pendant sa détention, il n’a été ni inculpé, ni autorisé à rencontrer ses proches ou ses avocats. Martin Fayulu, leader d’opposition et président du parti Engagement pour la citoyenneté et le développement (ECIDE), a également été détenu pendant plusieurs heures au Q.G. des renseignements militaires de Kinshasa le 14 février 2016, et un certain nombre de ses biens ont été saisis.

L’Union européenne a imposé des sanctions contre Kahimbi le 12 décembre.

Ferdinand Ilunga Luyolo
Chef de l’unité anti-émeutes de la police, appelée Légion nationale d’intervention (LENI) de la police congolaise, le Colonel Ferdinand Luyolo était à la tête des troupes impliquées dans un usage excessif de la force pendant les manifestations de Kinshasa en septembre 2016.

Plusieurs agents des forces de sécurité ont rapporté à Human Rights Watch que c’était le colonel Luyolo qui commandait les unités de la Garde républicaine déployées en uniforme de police pendant les manifestations de septembre, armées de fusils d’assaut et de grenades, et responsables de nombreux meurtres. Ils ont aussi déclaré que les troupes commandées par Luyolo étaient responsables de la disparition des cadavres des victimes.

L’Union européenne a imposé des sanctions contre Luyolo le 12 décembre.

Roger Kibelisa
Chef du département de la sécurité intérieure à l’Agence nationale de renseignements (ANR), Roger Kibelisa est impliqué dans la répression de l’opposition, notamment dans l’arrestation arbitraire, la détention et les mauvais traitements à l’égard de dizaines de prisonniers politiques. De nombreux prisonniers politiques et activistes ont été arrêtés, détenus dans des conditions inhumaines, et dans certains cas maltraités au centre de détention dit « 3Z », le bâtiment de l’ANR à Kinshasa dans lequel se trouve le bureau de Kibelisa. L’accès au centre 3Z est régulièrement refusé aux familles des détenus, aux avocats et aux défenseurs des droits humains.

Un des prisonniers politiques qui sont passés par le centre 3Z a décrit une cellule surpeuplée, grouillant d’insectes, où ils étaient forcés de dormir les uns contre les autres, « serrés comme des sardines », tandis que de gros rats leur marchaient dessus. Il a rapporté qu’ils étaient obligés de se soulager dans des seaux en plastique dans la cellule, qu’ils passaient la plupart de la journée dans l’obscurité et qu’on ne leur donnait à manger qu’une fois par jour – une assiette contenant jusqu’à 18 haricots, a-t-il compté quelques fois. On ne leur donnait qu'un savon pour deux, tous les deux mois, et ils n’avaient droit ni aux insecticides ni aux rasoirs.

Un activiste détenu au 3Z a déclaré que les gardes leur disaient souvent : « Ici vous êtes prisonniers. Vous n’avez aucun droit ».

L’Union européenne a imposé des sanctions contre Kibelisa le 12 décembre.

 

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