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Burundi : L’ONU devrait maintenir des rapports réguliers sur la situation des droits humains

La surveillance par le Conseil de sécurité est essentielle pour la justice et les réformes

Une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies (photo d'archives). © 2016 Andrew Kelly/Reuters

(New York) – Le Conseil de sécurité des Nations Unies devrait continuer à surveiller la situation des droits humains préoccupante au Burundi en accordant une attention particulière aux violations continues et à la justice, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Des incidents de sécurité et des informations faisant état de meurtres, de disparitions et d’arrestations arbitraires persistent au Burundi, malgré les espoirs initiaux de réforme après l’élection d’un nouveau président en mai 2020.

Dans une déclaration présidentielle sous la conduite de l’Afrique du Sud, le Conseil a décidé le 4 décembre de mettre fin aux rapports périodiques sur le Burundi, tout en continuant à évoquer la situation dans ce pays lors de ses réunions semestrielles sur la région des Grands Lacs et l’Afrique centrale. L’Afrique du Sud occupe actuellement la présidence tournante du Conseil de sécurité, ainsi que la présidence de l’Union africaine (UA).

« Les réunions du Conseil de sécurité sur le Burundi sont devenues de plus en plus controversées et irrégulières, alors que le Burundi et ses alliés au sein du Conseil tentent d’empêcher la surveillance indispensable de la situation dans le pays », a indiqué Louis Charbonneau, directeur du plaidoyer auprès des Nations Unies à Human Rights Watch. « En pratique, la surveillance limitée du Conseil de sécurité sur le Burundi continuera probablement comme avant, mais pour de nombreux Burundais, cela envoie un message symbolique inquiétant à un moment charnière pour le pays. »  

La résolution 2303, adoptée en juillet 2016 en réponse à l’aggravation de la crise sécuritaire et des droits humains au Burundi, exigeait que le Secrétaire général de l’ONU fasse rapport au Conseil de sécurité sur la situation au Burundi tous les trois mois. Le gouvernement burundais n’a cessé d’exiger que ce pays soit retiré de l’ordre du jour du Conseil. Les rapports ont eu lieu à intervalles irréguliers et plusieurs ont été reportés ou annulés à l’approche des élections de mai 2020 dans le pays. La raison en était, d’après certaines informations, que le Burundi menaçait de rompre les liens avec l’Envoyé spécial de l’ONU pour le Burundi, Michel Kafando, qui a démissionné en octobre 2019. Michel Kafando n’a pas été remplacé et il est prévu que son bureau soit fermé en décembre 2021.

Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a créé une Commission d’enquête sur le Burundi en 2016, qui est chargée d’enquêter et établir des rapports sur les graves violations et abus en matière de droits humains commis au Burundi depuis que la crise a éclaté en 2015. Dans son rapport de septembre 2020, la commission a conclu que de graves violations des droits humains, qui, dans certains cas, peuvent constituer des crimes contre l’humanité, persistaient en 2019 et en 2020. En octobre, le gouvernement burundais a tenté, sans y parvenir, d’empêcher le renouvellement du mandat de la Commission d’enquête lors de la dernière session du Conseil.

En novembre, le Bureau du Secrétaire général de l’ONU a publié un rapport exposant sa stratégie pour relancer le dialogue et ses activités au Burundi. Ce rapport a fourni une évaluation superficielle de la situation des droits humains au Burundi – malgré une intensification des violations des droits humains dans les mois précédents – et s’est abstenu de formuler une recommandation claire sur le fait de maintenir ou non le Burundi sur l’ordre du jour du Conseil de sécurité. Le Burundi a répondu en annonçant qu’il accepterait uniquement une assistance sur les aspects de développement socio-économique et que le Bureau de l’Envoyé spécial de l’ONU pour le Burundi serait fermé d’ici décembre, bien qu’une extension d’un an ait été négociée à la hâte.

Dans sa déclaration présidentielle du 4 décembre, le Conseil de sécurité a salué la volonté du gouvernement de « renforcer les relations » avec les acteurs régionaux et internationaux, tout en exprimant des inquiétudes sur les violations et abus continus en matière de droits humains. Le Conseil a aussi souligné la nécessité d’accomplir des progrès vers la promotion de l’État de droit, un système judiciaire indépendant, le respect des libertés fondamentales et la responsabilisation pour les abus au Burundi, et a appelé le gouvernement à coopérer avec les Nations Unies pour atteindre tous ces objectifs.

Les gesticulations politiques et les menaces du gouvernement ne devraient pas détourner l’attention du fait que, comme le reconnaît le Conseil de sécurité, des efforts soutenus seront nécessaires pour améliorer la situation des droits humains au Burundi. Le Conseil de sécurité ne devrait pas écarter la surveillance des droits humains dans ses efforts pour renforcer le dialogue avec la nouvelle administration.

Les Nations Unies devraient établir des rapports détaillés sur la situation des droits humains, humanitaire et sécuritaire au Burundi pour les réunions sur la région des Grands Lacs et l’Afrique centrale du Conseil de sécurité et le Conseil devrait y répondre de manière adéquate, a indiqué Human Rights Watch.

En septembre 2019, la Commission d’enquête a signalé que huit facteurs de risque communs aux atrocités criminelles étaient présents au Burundi. La plupart des facteurs n’ont pas été traités de manière structurelle par la nouvelle administration, par exemple en remédiant aux abus commis par la ligue des jeunes du parti au pouvoir et au contrôle qu’elle exerce sur la population.

En 2015, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA a demandé des rapports mensuels à la présidente de la commission sur la situation des droits humains et les actes de violence au Burundi. Cependant ces rapports ont été irréguliers et incohérents.

« Mettre fin au glissement du Burundi vers une situation de non-droit nécessitera une réforme systémique et une volonté politique forte », a conclu Louis Charbonneau. « D’ici là, la transition fragile et la situation des droits humains et sécuritaire instable au Burundi devraient rester sous étroite surveillance internationale. »

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