|
|
Soudan |
|
|
|
||
|
||
Présentation Générale Résumé Normes Iinternationales: les Principes de Paris Facteurs Importants Etat des Lieux Contributions Innovatrices et Positives des Commissions Les Iniatives Régionales Le Role de la Communauté Internationale Conclusion Recommandations Abréviations Remerciements |
Le gouvernement actuel du Front National Islamique a pris le pouvoir en 1989 lors d'un coup d'Etat militaire qui a renversé un gouvernement élu. Depuis lors, il continue d'exercer un contrôle en limitant les libertés d'expression, de réunion et d'association, notamment les activités des ONG de défense des droits de l'homme, et en réduisant au silence ses détracteurs par des inculpations politiques passibles de la peine de mort ou par d'autres moyens. Depuis plus de seize ans, le Sud est plongé dans une guerre civile qui a donné lieu à des exactions commises sur une grande échelle tant par les forces gouvernementales que par les groupes rebelles ; elle a fortement perturbé la vie de la population et a causé des pertes parmi les civils. Des civils ont été sauvagement massacrés, d'autres ont été enlevés et réduits en esclavage, forcés de quitter leurs maisons, réduits à la famine ou victimes d'une multitude d'autres exactions, tout cela entraînant le déplacement de centaines de milliers de personnes. La région des Monts Nouba, située au centre du pays, a été particulièrement affectée et jusqu'en 1999, le gouvernement avait décrété une interdiction générale de tout envoi d'aide humanitaire aux zones rebelles des Monts Nouba. En 1995, un nouveau front a été ouvert à l'Est contre le gouvernement par un groupe de Musulmans et d'Arabes opposés au gouvernement. Les pressions internationales se sont intensifiées à l'encontre du gouvernement en raison de ses pratiques insignes en matière de droits de l'homme. Il a été fortement critiqué par des organes tels que le Comité des Droits de l'Enfant de l'ONU, l'Organisation Internationale du Travail, le Groupe de travail de l'ONU sur les formes contemporaines d'esclavage, l'Assemblée Générale de l'ONU, la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU, le Comité des Droits de l'Homme de l'ONU. Depuis 1993, la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU a surveillé l'évolution de la situation en désignant un rapporteur spécial et d'autres rapporteurs spéciaux et représentants de l'ONU, notamment ceux traitant de l'intolérance religieuse, des enfants dans les conflits armés, de la liberté d'opinion et d'expression, et des personnes déplacées à l'intérieur du pays, ont signalé les exactions perpétrées au Soudan, tout comme l'ont fait la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, et d'autres, notamment toutes les principales ONG des droits de l'homme et bon nombre de groupes spécialisés, en particulier ceux qui axent leur travail sur l'esclavage. Il n'est pas surprenant que devant toute l'attention portée par la communauté internationale sur la situation au Soudan, le gouvernement ait décidé de créer, en 1994, un organe national des droits de l'homme, le Advisory Council for Human Rights [Conseil consultatif des droits de l'homme]. Il espérait sans doute que ce dernier contribuerait à tempérer les critiques internationales tout en aidant à préparer les rapports sur les droits de l'homme que le gouvernement doit remettre à l'ONU et à d'autres organes et en se chargeant des arrangements nécessaires lors des visites effectuées par les rapporteurs de l'ONU au Soudan. Selon son rapporteur, le Dr. Ahmed el Mufti, le Advisory Council for Human Rights a été créé en vertu d'un décret présidentiel et est chargé, en dépit de sa nature consultative, de la supervision générale de toutes les activités relatives aux droits de l'homme. Antérieurement, il existait, au sein du ministère de affaires étrangères, un petit comité de coordination responsable de ces questions, mais ses responsabilités ont été reprises par le Conseil consultatif des droits de l'homme. En vertu du décret présidentiel de 1994, le Conseil consultatif des droits de l'homme, en coordination avec d'autres agences de l'Etat compétentes, a les fonctions et pouvoirs suivants : · apporter à l'Etat des avis dans le domaine des droits de l'homme; · mener les recherches et études nécessaires sur les droits de l'homme et répondre aux demandes qui peuvent être adressées à l'Etat dans ce domaine; · demander les informations et données nécessaires à toute agence de l'Etat ou autre; participer aux conférences et comités locaux, régionaux et internationaux portant sur les droits de l'homme; · organiser et préparer les visites effectuées par des particuliers et des organisations en lien avec les droits de l'homme au Soudan; et · élaborer les réglementations nationales nécessaires pour délimiter les tâches du Conseil consultatif des droits de l'homme. Interrogé par Human Rights Watch en 1998, le Dr Ahmed el Mufti a déclaré que le rôle du Conseil consultatif des droits de l'homme était de : s'assurer que le gouvernement réponde aux exigences régionales et internationales relatives à la présentation de rapports et participer à la rédaction des rapports sur le pays; réagir lorsque des accusations sont portées contre le gouvernement et fournir des informations à la communauté internationale à propos des questions des droits de l'homme; enfin, suivre le cas des personnes détenues par les forces de sécurité et insister pour qu'elles soient libérées ou qu'un chef d'inculpation soit prononcé.1 Le Conseil consultatif des droits de l'homme est divisé en huit sous-comités thématiques traitant respectivement de la détention, des droits de la femme, des droits de l'enfant, de la tolérance religieuse, de l'esclavage et des disparitions, du rassemblement pacifique, de l'examen judiciaire, et de la liberté d'expression. Les réunions sont convoquées sur décision du président de chaque sous-comité et les sous-comités doivent tous présenter leur rapport à l'ensemble du conseil qui est censé se réunir une fois par mois. Il y aurait un comité des droits de l'homme affilié dans chacun des vingt-six états du pays. Procédure d'engagement et de nominationLe Conseil consultatif des droits de l'homme compte vingt-cinq membres, dont le ministre de la justice et procureur général qui est président du conseil, et vingt-quatre autres membres nommés par lui. Le nombre de membres n'est pas spécifié dans le décret mais il doit y avoir des représentants des organes suivants : l'appareil judiciaire; le cabinet du procureur général; l'assemblée nationale; le bureau de la sûreté publique; les ministères des affaires étrangères, de l'intérieur, du travail et de la réforme administrative, et de la culture et de l'information; le commissariat à l'aide sociale; le commissariat aux réfugiés; les facultés de droit des universités; l'ordre des avocats; et des ONG de défense des droits de l'homme. Néanmoins dans la pratique, peu d'ONG de défense des droits de l'homme fonctionnent de façon indépendante au Soudan et on ne connaît aucune d'entre elles qui siège au Conseil consultatif des droits de l'homme. ActivitésSelon le Conseil consultatif des droits de l'homme, ses principales activités depuis 1994 ont consisté à répondre aux préoccupations exprimées par la communauté internationale plutôt qu'à mener des campagnes indépendantes auprès d'autres branches gouvernementales pour la prévention et la réparation des atteintes aux droits de l'homme. Une grande partie de son travail a consisté plus particulièrement à faciliter les visites du rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme de l'ONU, à «coopérer» avec lui et à réagir à ses rapports. Le Dr el Mufti a énuméré les réalisations du Conseil consultatif : avoir fourni des « informations complémentaires» à l'organe de supervision de la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale (1994), avoir réagi à un rapport public d'Amnesty International (1995), avoir «reçu» le rapporteur spécial de l'ONU sur l'intolérance religieuse lorsque ce dernier s'est rendu au Soudan, avoir envoyé une invitation au Groupe de Travail de l'ONU sur les formes contemporaines d'esclavage, avoir préparé les rapports sur le Soudan pour l'ONU et la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples et avoir réagi face aux préoccupations soulevées par Human Rights Watch (1996). En 1997, selon le Dr el Mufti, le Conseil consultatif a continué à aider le rapporteur spécial sur l'intolérance religieuse et en 1998, pour la première fois, il a réalisé un travail d'importance en contribuant à l'élaboration d'une déclaration détaillée des droits de l'homme à incorporer dans la constitution de 1998. Par ailleurs, en 1998 aussi, il a organisé des formations sur les droits de l'homme pour le personnel judiciaire et les forces de l'ordre, et des séminaires et ateliers sur les droits de l'homme.2Le Dr. Ahmed El Mufti a signalé que le Conseil consultatif se penche également sur les questions suivantes : · l'usage des pouvoirs de détention : il reçoit des rapports réguliers des forces de sécurité sur le nombre de personnes détenues, leur condition et les accusations portées contre elles. Il peut attirer l'attention sur des cas de détention injuste. · l'examen judiciaire : le Conseil vérifie si toutes les détentions se font dans le cadre de la loi et porte à l'attention du gouvernement toutes les allégations de torture. · les visites dans les prisons : le Conseil a obtenu pour certains détenus l'autorisation de recevoir des visites des membres de leurs familles. Il est toutefois impossible d'évaluer l'impact du Conseil consultatif ou celui de ses interventions étant donné leur manque de transparence et l'absence totale d'ONG des droits de l'homme indépendantes au Soudan. Pour sa part, le Conseil consultatif des droits de l'homme considère que sa principale faiblesse réside dans son manque de ressources financières et techniques. Depuis 1999, principalement par le biais du département des droits de l'homme du Ministère de la Justice sous la direction du Dr. El Mufti, le Conseil consultatif des droits de l'homme a accordé une attention particulière au problème du «rapt et du travail forcé des femmes et des enfants» réduits en esclavage ou à une forme de servitude semblable à l'esclavage. Cet intérêt semble être lié aux changements intervenus au niveau international, où l'U.E. a pris la place des Etats-Unis en tant que principal critique de la situation des droits de l'homme au Soudan mais elle a adopté une approche beaucoup plus discrète et plus conciliante.3Lors de la session de la Commission des droits de l'homme de l'ONU en 1999, ce ton plus constructif a abouti à un accord sur une résolution collective dans laquelle le gouvernement soudanais acceptait de s'efforcer de mettre un terme aux exactions. Depuis lors, les autorités soudanaises semblent travailler sur base d'une liste de points découlant de la résolution collective tout en réclamant les louanges de la communauté internationale chaque fois qu'un progrès est opéré, comme par exemple après avoir autorisé l'ONU à mener deux missions d'évaluation des besoins dans les Monts Nouba alors qu'elles refusaient cette autorisation depuis dix ans. Le fait que le Conseil consultatif ait récemment mis l'accent sur les enlèvements et l'esclavage représente un changement d'attitude important. Avant 1999, le gouvernement niait farouchement l'existence de l'esclavage au Soudan, prétendant qu'il ne s'agissait que de prises d'otages tribales. Il évite encore l'emploi du mot esclavage mais le 15 mai 1999, Ali M.O. Yassin, en sa qualité de ministre de la justice, procureur général et président du Conseil consultatif des droits de l'homme, a promulgué un décret créant le Committee on the Eradication of Abduction of Women and Children [Comité pour l'élimination des rapts de femmes et d'enfants] (CEAWC). Ce comité a son siège au ministère de la justice et utilise ses installations ainsi que celles du Conseil consultatif des droits de l'homme.4La résolution de la Commission des droits de l'homme de l'ONU de 1999 appelait spécifiquement le gouvernement à enquêter sur les rapts de femmes et d'enfants se produisant dans le cadre de la guerre au Soudan méridional, à traduire en justice toute personne soupçonnée de soutenir ou de participer à de telles activités, de faciliter le retour des enfants concernés dans des conditions de sécurité, et d'accepter une enquête multilatérale sur les causes du problème et sur les moyens d'éradiquer cette pratique.5 Les membres du Conseil consultatif ont été nommés au CEAWC, les autres membres étant pour la plupart des fonctionnaires du gouvernement, et le rapporteur du Conseil consultatif, le Dr El Mufti, a été désigné président du CEAWC. Il est intéressant de constater que James Agware, un dirigeant ethnique dinka représentant le Comité dinka, lequel s'emploie depuis des années à sauver des esclaves, a également été nommé membre du CEAWC.6En tant que seule organisation locale ayant fait ses preuves dans le domaine du sauvetage7des esclaves, le Comité dinka a ajouté à la crédibilité du CEAWC. Mais des difficultés se sont posées au départ : à deux reprises, le Dr El Mufti et d'autres responsables gouvernementaux ont dû se rendre de Khartoum au Darfour après que James Agware ait été arrêté par les autorités locales afin de leur assurer que le Comité dinka avait le soutien du gouvernement.8 En juillet 1999, avec le financement de l'UNICEF, le CEAWC a accueilli un atelier de trois jours à Khartoum, lequel a réuni des responsables du gouvernement, des policiers, des chefs tribaux du Kordofan et du Darfour, des chefs dinkas, des ONG locales et d'autres.. Human Rights Watch, qui s'était vu refuser l'entrée dans le pays depuis quatre ans, était aussi invitée et y a participé en qualité d'observateur. L'atelier a abouti à une résolution appelant le gouvernement et les autres parties intéressées à collaborer pour mettre fin aux rapts et au travail forcé et permettre aux femmes et aux enfants de retrouver leurs familles. Agissant au nom du CEAWC, le Comité dinka a sauvé de l'esclavage plusieurs centaines de femmes et d'enfants mais les entretiens avec les personnes libérées, la recherche de leur famille et la fourniture d'un hébergement et autres services ont demandé plus d'efforts et de moyens que prévu, ce qui fait que le CEAWC a placé un moratoire sur les sauvetages jusqu'à ce que le retard soit résorbé. Au début 2000, le travail de recherche ne semblait pas avoir commencé dans les zones rebelles. La plus grande partie du financement de l'opération provient de l'UNICEF, certains fonds ayant aussi été versés par des agences internationales de développement telles que Save the Children/UK.9 Jusqu'à ce jour, le travail a été axé sur le sauvetage et le regroupement familial et aucune poursuite en justice n'a été entamée par le CEAWC contre les responsables, bien que son mandat lui confère ce pouvoir.10La prévention de nouveaux rapts ou prises d'esclaves est cruciale, car si elle ne peut se faire, les sauvetages ne seront qu'un perpétuel recommencement. Jusqu'à présent le CEAWC a abordé ce sujet avec précaution et il espère que l'installation de ses bureaux dans des zones affectées du Darfour et du Kordofan11aura un effet dissuasif. La question de la prévention est délicate pour le CEAWC car bon nombre de rapts ont lieu au cours d'opérations conjointes menées par l'armée et les milices tribales dans les zones de guerre du sud. En effet, lors du carrefour organisé à Khartoum en juillet 1999, le point qui a le plus échauffé le gouvernement et ses alliés a été la suggestion que le convoi d'approvisionnement militaire avait joué un rôle en facilitant les rapts. Des témoignages ont depuis longtemps confirmé le fait que les milices tribales qui escortent et «gardent» le convoi à travers le territoire rebelle jusqu'à Wau, une ville de garnison, s'éloignent parfois à cheval pour aller piller et incendier les villages dinkas longeant leur route et enlever les habitants des villages. FinancementLes membres du Conseil consultatif des droits de l'homme ne sont pas salariés bien que la plupart perçoivent un salaire des ministères ou autres organes qu'ils représentent. Son personnel est composé de fonctionnaires salariés du ministère de la justice, principalement de jeunes avoués. En 1998, le Conseil consultatif a reçu 80 millions de livres soudanaises [environ 33.600 $US]. Des subsides ont été versés par des sources néerlandaises et par l'UNICEF pour le rapt et le travail forcé. Le Conseil consultatif a également demandé l'assistance du Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme et du PNUD dans le domaine technique et de la formation . EvaluationLe Conseil consultatif des droits de l'homme est loin d'être indépendant, son président et bon nombre de ses membres étant des fonctionnaires de l'Etat, et il semble surtout destiné à être le porte-parole du gouvernement et à trouver des excuses au bilan déplorable de ce dernier sur le plan des droits de l'homme. En fait, il n'est rien de plus que le département droits de l'homme du ministère de la justice, avec lequel il partage son personnel. Néanmoins, le fait qu'il se soit penché récemment sur les rapts et l'esclavage, même si c'est parce que cela sert les intérêts politiques internationaux du gouvernement, représente l'effort le plus sérieux qu'il ait entrepris à ce jour et un changement de cap par rapport au passé. Le gouvernement soudanais semble faire passer la responsabilité de la question des droits de l'homme au sein du gouvernement d'un groupe ad hoc à l'autre, ce qui illustre bien qu'il est peu enclin à considérer les droits de l'homme comme une partie intégrante de son programme institutionnel actuel. Le département des droits de l'homme, situé au ministère de la justice, est en pleine phase de développement et son évolution semble en avoir fait un département où la protection des droits de l'homme peut avoir un avenir institutionnel, plus que dans le cas du Conseil consultatif des droits de l'homme. Bon nombre de ses fonctions sont celles confiées au Conseil consultatif des droits de l'homme et les mêmes personnalités sont membres des deux organes. Malgré son inactivité, une raison d'être importante du Conseil consultatif des droits de l'homme est qu'à travers lui, le gouvernement donne l'apparence de faire quelque chose à propos de la situation insigne des droits de l'homme pour laquelle le Soudan s'est retrouvé sous le feu des critiques extrêmement virulentes de la communauté internationale. |
Rapport Annuel
Afrique: dossiers Afrique: actualités Afrique du Sud Bénin Cameroun Ghana Kenya Liberia Malawi Mauritanie Nigeria Ouganda Rwanda Sénégal Sierra Leone Soudan Tchad Togo Zambie |
|
||
RETOURNER EN HAUT Copyright © 2001 Human Rights Watch |
||
|