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Kazakhstan : La communauté LGBT vit dans la peur

Le gouvernement et le Comité international olympique devraient agir face aux problèmes de la discrimination et de l’homophobie

(Berlin, le 23 juillet 2015) – Le gouvernement du Kazakhstan omet de protéger les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) contre les violences et les discriminations, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. Les personnes LGBT au Kazakhstan sont en butte à des réactions hostiles et à des exactions, à un manque de mécanismes adéquats de riposte et de soutien, et à un climat croissant de peur dans le contexte d’efforts récents pour adopter une loi contre la « propagande » LGBT.

Le rapport de 31 pages, intitulé « ‘That’s When I Realized I Was Nobody’: A Climate of Fear for LGBT People in Kazakhstan » (« ‘C’est alors que j’ai réalisé que je n’étais personne’ : Climat de peur pour les personnes LGBT au Kazakhstan »), documente des attitudes homophobes généralisées, des traitements haineux, et l’absence de protection accordée par la police et par d’autres agences gouvernementales aux personnes LGBT au Kazakhstan. Ce rapport s’appuie sur des entretiens approfondis menés auprès de personnes LGBT, d’activistes, d’experts en droits humains, et de prestataires de services sociaux et de santé au Kazakhstan. Human Rights Watch a également analysé la législation proposée sur la « propagande » présentée au parlement du Kazakhstan début 2015 qui a été ensuite abandonnée.

« Le climat de peur pour les personnes LGBT au Kazakhstan est nourri d’une part par les exactions et la discrimination auxquelles elles sont confrontées directement, et d’autre part par les exactions et la discrimination lorsqu’elles tentent de signaler les violations de leurs droits aux autorités », a déclaré Kyle Knight, chercheur sur les droits des personnes LGBT à Human Rights Watch et auteur du rapport. « Le gouvernement kazakh devrait affirmer clairement son soutien aux droits humains des personnes LGBT, garantir qu’aucune législation discriminatoire n’est promulguée, et prendre des mesures immédiates pour lutter contre l’homophobie. »

Human Rights Watch a documenté l’atmosphère de peur dans laquelle vivent les personnes LGBT au Kazakhstan, et une série d’exactions auxquelles elles sont confrontées, notamment la réponse insuffisante donnée par les autorités et les prestataires de services. Dans un cas, un homosexuel à Almaty a expliqué à Human Rights Watch que lorsqu’il a tenté de signaler une agression à la police dans un parc, il a montré l’endroit où cela s’était produit, devant une discothèque gay, et les policiers ont refusé d’enquêter, disant : « Oh c’est là que vous étiez, vous veniez de cette direction ? Et bien c’est là où se trouve la discothèque de pédés alors nous ne pouvons pas vous aider. » Une psychologue d’une clinique pour le VIH à Almaty a indiqué que sur les centaines de clients gays et bisexuels qu’elle avait vus au cours des cinq dernières années, aucun n’avait conçu de stratégie pour faire son coming out en toute sécurité.

Une mère lesbienne à Almaty a déclaré : « Le problème est que nous commençons à croire ces vilaines choses sur nous-mêmes parce qu’il n’existe aucun contre-argument en public. »

Almaty, la ville animée du sud du pays qui est l’ancienne capitale du Kazakhstan, est candidate pour accueillir les Jeux olympiques d’hiver 2022. La seule autre ville candidate est Pékin. Les deux pays connaissent de graves problèmes de droits humains, mais dans le courant du processus de candidature pour les Jeux, le parlement du Kazakhstan a proposé d’adopter une législation anti-gay sur la « propagande » qui serait allé directement à l’encontre de la règle de la Charte olympique selon laquelle la discrimination est incompatible avec le Mouvement olympique. Cette législation n’a pas été promulguée, mais l’un des membres du parlement a proposé de la réintroduire. Le Comité International Olympique (CIO) choisira le pays hôte de 2022 le 31 juillet 2015, à Kuala Lumpur.

« Le CIO devrait rester vigilant sur les regrettables discriminations et les atteintes aux droits humains de la part des candidats à l’accueil des Jeux olympiques », a insisté Kyle Knight. « Le CIO et le gouvernement du Kazakhstan devraient condamner publiquement la discrimination anti-LGBT afin bien montrer qu’il n’y pas de place pour l’homophobie dans le sport mondial ou dans les pays qui souhaitent accueillir les Jeux olympiques. »

En décembre 2014, dans le cadre de son « Agenda olympique 2020 », le CIO a confirmé que tous les futurs contrats des villes hôtes comprendront une clause spécifique interdisant la discrimination sur la base de l’orientation sexuelle. Cette initiative du CIO a été largement perçue comme un blâme à l’égard de la Russie, qui avait adopté une loi discriminatoire similaire contre la « propagande » homosexuelle avant les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi de 2014.

En dépit du renforcement des exigences du CIO, début 2015, le parlement du Kazakhstan a adopté un projet de loi contre la « propagande de l'orientation sexuelle non-traditionnelle. »

Le processus d’adoption du projet de loi dans ses dernières étapes n’était pas transparent, et les versions finales des lois n’ont jamais été rendues publiques. Les lois ont été envoyées au Président Nursultan Nazarbayev afin qu’il les signe après avoir été soumises au sénat en février. Le 18 mai, le Conseil constitutionnel du Kazakhstan a jugé la législation en attente inconstitutionnelle, mais n’a pas abordé les aspects discriminatoires des projets de loi.

Si la loi n’a été rejetée qu’au motif qu’elle était rédigée dans des termes trop vagues, il n’y a aucune garantie qu’une législation future respecterait l’obligation de non-discrimination dans le droit international des droits humains et la Charte olympique, a remarqué Human Rights Watch.

« [La communauté gay] est restée silencieuse et [a] essayé de survivre aux exactions qui se présentent », a déclaré un homosexuel de 29 ans à Human Rights Watch en mars au Kazakhstan. « Et pourtant vous pouvez voir qu’au parlement aujourd’hui ils veulent nous qualifier de ‘propagande illégale.’ »

Le rapport d’évaluation rendu public par le CIO en juin sur la volonté d’Almaty d’accueillir les Jeux olympiques indique que « Le gouvernement national [du Kazakhstan] et les gouvernements régionaux et municipaux d’Almaty se sont engagés à respecter strictement les dispositions de la Charte olympique et du Contrat ville hôte. » Human Rights Watch a écrit quatre fois au CIO en lui demandant d’agir pour s’assurer que le gouvernement du Kazakhstan n’introduise pas de lois discriminatoires.

Le 15 juillet, le président du CIO, Thomas Bach, a répondu à Human Rights Watch que « Le CIO est une organisation fermement opposée à toutes formes de discrimination dans le sport. »

« De plus, dans le contexte de l’évaluation pour les Jeux », a écrit Thomas Bach, « la commission d'évaluation du CIO a cherché à obtenir l’assurance de la part des deux villes candidates et de leurs autorités gouvernementales locales que le Contrat ville hôte et la Charte olympique seraient pleinement respectés pour tous les participants des Jeux olympiques et dans les questions liées aux Jeux. »

« Les recherches de Human Rights Watch montrent qu’il y a un large fossé entre la Charte olympique et l’environnement sur le terrain au Kazakhstan », a conclu Kyle Knight. « Toute assurance doit être envisagée dans le cadre du climat persistant au Kazakhstan de discrimination et de peur pour les personnes LGBT que Human Rights Watch a documenté dans son rapport. »

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