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France

Événements de 2024

Une femme et un enfant se reposent après une tentative infructueuse de rejoindre le Royaume-Uni en bateau, à Ambleteuse, dans le nord de la France, le 19 mai 2024. 

© 2024 AP Photo/Bernat Armangue

Les élections législatives anticipées de 2024 ont été marquées par une montée des rhétoriques racistes et xénophobes. Les contraintes imposées par le gouvernement à la société civile ont impacté la capacité des organisations non gouvernementales à mener à bien leurs missions. Les indicateurs nationaux ont montré une augmentation des crimes racistes, antisémites et xénophobes ainsi que l’augmentation des inégalités économiques dans la société française. Les Jeux olympiques, qui ont permis à la France de rayonner à l’échelle mondiale, ont donné lieu à des abus contre les personnes vivant dans la rue et à l’utilisation de technologies de surveillance intrusives suscitant des inquiétudes en matière de respect de la vie privée et de discrimination. Migrants et demandeurs d’asile ont été confrontés à des conditions de vie désastreuses.   

L’État de droit

La loi française sur le « séparatisme » de 2021 continue de restreindre la liberté d’association et d’expression, notamment pour les organisations de défense de l’environnement, de lutte contre les discriminations et de défense des droits humains. Des mesures telles que le « Contrat d’engagement républicain » imposent des exigences strictes aux organisations, les obligeant à affirmer leur engagement en faveur de la laïcité et des valeurs républicaines.

Le rapport de la Commission européenne de juillet 2024 sur l’État de droit a fait état de ces préoccupations, en soulignant les problèmes liés à l’octroi et au retrait de subventions publiques aux organisations non gouvernementales. Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies s’est fait l’écho de ces préoccupations en novembre.

L’institution du Défenseur des droits a mis en garde contre les restrictions croissantes pesant sur les libertés d’expression, de réunion et d’association.   

Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les défenseurs de l'environnement a signalé la répression menée par les autorités françaises contre les militants environnementaux, évoquant un recours excessif à la force par la police, des interdictions restrictives et un usage abusif des lois antiterroristes.

La Commission européenne a critiqué le recours par la France à des procédures législatives accélérées, limitant le débat démocratique.   

Les associations de défense de la liberté de la presse ont condamné les arrestations en juin puis en juillet de journalistes enquêtant respectivement sur les ventes d'armes françaises à Israël et sur des questions environnementales.   

Droits économiques sociaux et culturels

En janvier 2024, Oxfam France a constaté une aggravation des inégalités économiques en France, citant un rapport de novembre 2023 de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Ce rapport indique que le niveau de vie a diminué pour les 90 % les plus pauvres de la population française et augmenté pour les 10 % les plus riches en 2022. 

En avril, les autorités ont repris la destruction des habitations informelles dans le département d’outre-mer le plus pauvre de France, Mayotte, à la suite d’une opération lancée en 2023 qui associait de façon néfaste la migration irrégulière à la criminalité et aux maladies. Ces opérations n’ont pas répondu aux besoins sociaux urgents des habitants de Mayotte.

Le droit au logement régresse à travers la France, selon une association de défense du droit au logement et la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH).   

Discrimination et intolérance

La période précédant les élections législatives anticipées de juin, convoquées par le président Macron après la défaite de son parti et l’arrivée en tête du Rassemblement national d’extrême droite aux élections européennes de juin, a été marquée par une montée des discours racistes, xénophobes et discriminatoires. Des centaines de milliers de personnes ont manifesté contre l’intolérance de l’extrême droite, et une majorité d’électeurs a finalement rejeté l’arrivée au pouvoir du Rassemblement national.

Cinq organisations de défense des droits humains, dont Human Rights Watch, ont déposé une plainte auprès du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale, affirmant que les contrôles d’identité policiers discriminatoires ciblant les personnes noires ou arabes, ou perçues comme telles, constituent un racisme systémique, et demandant que le gouvernement prenne des mesures spécifiques pour mettre fin au profilage ethnique.   

Le rapport annuel 2024 de la CNCDH révèle une augmentation significative des crimes de haine en 2023, selon les données du ministère de l’Intérieur. Les actes antisémites ont connu une hausse considérable de 284 %, atteignant un pic après les attaques d’octobre 2023 en Israël et à Gaza. Les actes antimusulmans sont aussi en hausse, avec une augmentation de 29 % et les autres actes racistes et xénophobes ont augmenté de 21 %. La CNCDH a condamné le rôle de responsables politiques et de certains médias dans la normalisation des discours de haine à travers une rhétorique discriminatoire.

Le rapport 2024 de SOS Homophobie a mis en évidence une détérioration du climat pour les personnes LGBT et une augmentation significative des discours anti-LGBT en ligne. Une enquête de l’Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne (Fundamental Rights Agency ou FRA) auprès des personnes LGBT a confirmé des taux élevés de discrimination, en particulier pour les personnes transgenres, avec seulement 15 % des victimes déclarant les incidents qu’elles ont subis. Parmi les personnes interrogées, 71% ont perçu une augmentation de la violence contre les personnes LGBT et 61 % ont déclaré éviter les démonstrations d'affection en public.  

Demandeurs d’asile et migrants

Une loi sur l’immigration, considérée comme la « plus régressive » depuis des décennies, a été promulguée en janvier. Les décrets d’application publiés en juillet prévoient notamment des délais d’appel réduits pour les demandeurs d’asile, une extension de la détention et l’obligation pour les personnes étrangères de signer des contrats par lesquels elles s’engagent à respecter les valeurs françaises, suscitant des critiques de la part d’ONG. Après sa nomination en septembre, le ministre de l’Intérieur a formulé des déclarations menaçant les droits des migrants et des demandeurs d’asile, suscitant de vives inquiétudes au sein de la société civile.

Les migrants et les demandeurs d’asile ont été confrontés à des conditions de vie inhumaines, à la détention ainsi qu’à des abus de la  police.

Des personnes ont continué à entreprendre la dangereuse traversée de la Manche, du fait de l’absence de voies sûres et légales de migration et d’asile vers le Royaume-Uni, ainsi que des politiques de la France et du Royaume-Uni qui privilégient la dissuasion au détriment du sauvetage de vies humaines et de la prise en compte des facteurs qui poussent les personnes à se déplacer. L’Organisation internationale pour les migrations fait état d’un nombre record d’au moins 75 personnes disparues ou mortes pendant les traversées, entre janvier et novembre 2024.

En avril, le Défenseur des droits a dénoncé des refoulements illégaux à la frontière franco-italienne.

Fin 2023 et début 2024, la France a expulsé des ressortissants soudanais vers le Soudan malgré le conflit armé dévastateur en cours dans ce pays.

Droits des enfants

À Marseille et ailleurs en France, les enfants migrants non-accompagnés sont soumis à des évaluations arbitraires de leur âge, les privant de l’accès à des droits fondamentaux tels que le logement, la santé et l’éducation. En mai, 27 organisations non gouvernementales ont déposé une requête auprès du Conseil d’État pour contraindre les autorités à aligner le système français d’évaluation et d’hébergement des mineurs isolés sur les dispositions concernées de la Convention relative aux droits de l’enfant.

Un rapport publié en août par l'UNICEF et la Fédération des acteurs de la solidarité a dénoncé le nombre toujours croissant d'enfants sans logement, contraints de dormir dans la rue.

Les autorités françaises n’ont toujours pas rapatrié 120 enfants français et leurs mères,  détenus arbitrairement dans des conditions dégradantes dans des camps et prisons du nord-est de la Syrie.

Droits des femmes et des filles

En mars, la France a inscrit la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans sa Constitution, une première mondiale et une victoire pour les droits reproductifs.

Le rapport annuel 2024 du Haut Conseil pour l’égalité a indiqué que les femmes continuent de subir des violences, des discriminations et du harcèlement à des niveaux alarmants, les signalements de violence sexuelle ayant doublé entre 2017 et 2022.   

Malgré la ratification de la Convention de l’Organisation internationale du travail sur la violence et le harcèlement dans le monde du travail (C190) en 2023, le gouvernement français n’a toujours pas adopté les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les dispositions de la convention et la recommandation qui l’accompagne.

En avril, l’Institut d’études des politiques publiques a révélé qu’entre 2012 et 2021, 94 % des plaintes pour viol et 86 % des plaintes pour violences sexuelles ont été classées sans suite par la justice française.

L'ouverture en septembre du procès sans précédent pour les viols de Mazan a suscité une large mobilisation des organisations féministes, renouvelant les appels à inclure la notion de consentement dans la définition juridique française du viol.

En juillet, la Cour européenne des droits de l’homme a rejeté une plainte déposée par 261 travailleuses du sexe contre la loi française de 2016 criminalisant le paiement de services sexuels. Plusieurs agences de l’ONU et organisations non gouvernementales ont critiqué cette loi.

Justice internationale

En mai, des juges français ont condamné trois hauts responsables syriens pour leur rôle dans l’emprisonnement, la disparition forcée et la torture de deux ressortissants franco-syriens en 2013.

En juin, la cour d’appel de Paris a confirmé un mandat d’arrêt français contre l’ancien président de la Syrie Bachar el-Assad pour l’utilisation d’armes chimiques en Syrie en 2013 ; une contestation ultérieure du mandat par le procureur général était en cours au moment de la rédaction du présent rapport.

Jeux olympiques

La France a accueilli les Jeux olympiques et paralympiques, les premiers depuis que le Comité international olympique a adopté un cadre stratégique sur les droits humains. Des institutions indépendantes et des organisations non gouvernementales, dont Human Rights Watch, ont exprimé leurs inquiétudes quant aux violations des droits humains liées aux Jeux.  

Avant les Jeux, cela s’est traduit par une intensification des opérations d’expulsion qualifiées par un collectif inter-associatif de « nettoyage social » de personnes vivant dans la rue ou dans des logements précaires, notamment les personnes migrantes.   

Pendant les Jeux olympiques, les autorités ont eu recours à une technologie de vidéosurveillance algorithmique controversée, autorisée par une loi temporaire d’urgence, vivement critiquée pour ses atteintes aux droits à la vie privée et à la non-discrimination. En juin, la CNCDH a mis en garde contre les risques que cette loi représente pour les droits, notamment des interventions policières injustifiées et des discriminations à l’encontre des personnes racisées.

Les autorités françaises et plusieurs associations sportives ont interdit aux athlètes françaises de porter le hijab, empêchant des femmes et des filles musulmanes de concourir, une mesure discriminatoire dénoncée par les Nations unies, de nombreux athlètes et des organisations non gouvernementales.   

Le harcèlement en ligne des boxeuses Lin Yu-Ting de Taïwan et Imane Khelif d’Algérie pendant les Jeux olympiques, qui a donné lieu à l’ouverture d’une enquête par les autorités françaises, a souligné les préjudices causés par des politiques de « tests de féminité » pour les athlètes féminines.