(La Haye) - Les États parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) devraient axer leur session annuelle sur le renforcement des engagements de la Cour en faveur de la justice et de la poursuite des pires crimes internationaux, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.
En amont de la session, Human Rights Watch a publié un rapport de 18 pages de recommandations aux États parties à la CPI qui assistent à leur Assemblée annuelle à La Haye du 6 au 11 décembre 2021. Cette année, à l’occasion de leur 20e Assemblée, les États membres examineront le rapport approfondi rendu par des experts indépendants sur le fonctionnement et les performances de la Cour. Ils éliront également le Procureur adjoint, pour faire suite à l’élection, plus tôt cette année, du nouveau Procureur, Karim Khan.
« Dans un monde émaillé de multiples conflits, la CPI est encore plus nécessaire qu’on ne se l’imaginait il y a vingt ans », a déclaré Richard Dicker, directeur du programme Justice Internationale à Human Rights Watch. « Les États membres de la CPI devraient recentrer leurs efforts visant à assurer que la Cour reçoit le soutien politique et pratique dont elle a besoin pour rendre la justice. »
En septembre 2020, un groupe d’experts indépendants mandaté par l’Assemblée a rendu son rapport final sur l’amélioration des performances de la Cour, à la suite de plusieurs revers sur des aspects clés des travaux de la CPI. Au cours de l’année écoulée, les États membres de la Cour, avec l’assistance d’organisations de la société civile, ont commencé à évaluer les près de 400 recommandations contenues dans le rapport. Lors de la session de l’Assemblée, les gouvernements devraient évaluer les progrès accomplis et adopter une résolution aux fins de poursuivre leur travail d’examen du rapport l’année prochaine.
De nombreux États membres ont insisté sur ce processus d’examen en vue de renforcer l’indépendance et la transparence de la Cour, a indiqué Human Rights Watch. Pour accélérer les avancées l’année prochaine, les États membres devraient centrer leurs discussions sur les recommandations des experts portant sur les responsabilités qui incombent à leur propre gouvernement vis-à-vis de la CPI, en particulier celles qui ont trait à la coopération, à l’amélioration des procédures d’élection et à l’engagement d’assurer à la Cour un financement suffisant au regard de ses missions.
Il conviendrait de renforcer la coopération des États parties avec la Cour, a souligné Human Rights Watch. L’annulation il y a quelques mois des sanctions imposées par l’ancien gouvernement américain à certains responsables de la CPI offre l’exemple le plus récent d’une coopération entre des États membres, des organisations de la société civile et de la Cour pour défendre la mission de cette dernière. Les États membres devraient prioritairement mettre en œuvre les recommandations des experts indépendants pour élaborer une stratégie visant à contrer toute opposition politique aux enquêtes de la Cour.
Les États parties à l’Assemblée adopteront le budget annuel de la Cour, alors que le fossé se creuse entre la charge de travail de la CPI et les ressources dont elle dispose. Le budget, abondé par les États parties, a été maintenu à une croissance proche de zéro depuis 2017. Avec l’ouverture de trois nouvelles enquêtes cette année, en Palestine, aux Philippines et au Venezuela, la Cour est désormais chargée d’enquêter sur seize situations. Le Procureur cherche également à reprendre une enquête sur la situation en Afghanistan.
Pour assurer l’impartialité de la Cour, il est essentiel que le processus judiciaire ne soit pas perçu comme trop sélectif ou inégalitaire en raison de contraintes budgétaires. Pour Human Rights Watch, c’est la raison pour laquelle les États membres devraient s’efforcer au cours de cette session de mettre à exécution les programmes visant à organiser une conférence des bailleurs de fonds, telle que recommandée par le groupe d’experts indépendants pour discuter du niveau d’activité optimal de la Cour et des ressources dont elle a besoin pour assurer au mieux la justice internationale.
Compte tenu du rôle important du Procureur adjoint au sein du Bureau du Procureur, son élection lors de cette session est cruciale, et les États membres devraient prendre leur décision en se fondant uniquement sur ses compétences. En dépit de la nécessaire procédure de vérification diligente des candidats mise en place aux fins de veiller aux hautes qualités morales des candidats, cette élection a été menée à la hâte et sans consulter la société civile. Les États membres devraient au cours de cette session adopter une résolution qui ouvrira la voie à l’élaboration, l’année prochaine, d’un mécanisme permanent d’habilitation pour toutes les élections à venir au sein de la Cour.
« La 20e session de l’Assemblée des États membres marque un tournant pour la CPI et le processus d’examen des experts », a conclu Richard Dicker. « Les gouvernements devraient prendre les mesures nécessaires pour permettre à la Cour de remplir son mandat essentiel. »