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Manifestation massive contre les violences faites aux femmes, tenue à Paris le 23 novembre 2019. © 2019 Christian Hartmann/Reuters
La pandémie a contribué à une augmentation de 30 % des cas de violence domestique signalés au début du confinement en mars 2020. Les gouvernements ont la capacité de prendre des mesures clé pour que les victimes de violences domestiques puissent chercher de l'aide sans perdre leur emploi. Pourtant, la législation française et les politiques des entreprises ne sont pas à la hauteur de l’enjeu.

Pendant le confinement dû au Covid-19 en 2020, la plupart des crimes et actes de violence ont diminué en France. Mais les signalements de violences conjugales et de viols, eux, ont, augmenté. La pandémie a contribué à une augmentation de 30 % des cas de violence domestique signalés dans les deux semaines qui ont suivi le début du confinement en mars 2020. Les interventions de police à domicile ont augmenté de près de 50 %. 

Les gouvernements ont la capacité de prendre des mesures clé pour que les victimes de violences domestiques puissent chercher de l'aide sans perdre leur emploi. Pourtant, la législation française et les politiques des entreprises ne sont pas à la hauteur de l’enjeu.

Une lettre de 34 militantes féministes et responsables associatives influentes publiée dans Libération le mois dernier témoigne d'un ras-le-bol croissant. 

La France se positionne comme fer de lance de l'égalité des sexes dans le monde, notamment en accueillant le Forum Génération Egalité à Paris du 30 juin au 2 juillet. Cet événement réunira des gouvernements, des représentant.e.s de la société civile et des entreprises qui s'engageront à mettre en œuvre un "plan d'accélération" sur dix ans en faveur de l'égalité femmes-hommes, y compris pour mettre fin aux violences de genres. Mais pour être un réel leader mondial, la France doit également agir sur son propre territoire. 

Les autorités françaises s’apprêtent enfin à ratifier la convention historique de l'OIT sur la violence et le harcèlement (C190), qui établit des normes mondiales pour prévenir et répondre à la violence et au harcèlement dans le monde du travail. C’est une étape positive. Mais la signature de ce traité ne devrait être qu’un début, et le véritable test sera de savoir si les femmes bénéficieront effectivement de ces nouvelles protections sur leur lieu de travail. 

Les lois sur la violence domestique adoptées en France ces deux dernières années ont introduit certains changements, tels que les bracelets de géolocalisation pour aider à l'exécution des ordonnances de protection et la fin de la médiation dans les procédures de divorce incluant un partenaire violent. Mais ces lois ne couvrent pas les protections dont les victimes de violences domestiques ont besoin au travail. 

D'autres pays font mieux. 

L'Italie, la Nouvelle-Zélande et les Philippines ont adopté des lois qui accordent aux survivantes de violence domestique un congé payé leur permettant de s'absenter de leur lieu de travail pour quitter leur partenaire et se protéger, ainsi que leurs enfants. L'Australie et Puerto Rico leur offrent un congé non-rémunéré. Certaines entreprises, comme Facebook, accordent également un congé payé aux employés confrontés à la violence domestique. 

L'Espagne accorde aux victimes de violences sexistes le droit de réduire et de réorganiser leur temps de travail, de changer de lieu de travail et de suspendre un contrat de travail. Au Brésil, les juges peuvent ordonner aux employeurs de maintenir les victimes de violence domestique dans leur emploi et de leur accorder un congé temporaire.  

Sans un ensemble complet de mesures de protections portant sur le logement, la sécurité, la santé et l'emploi, la violence domestique peut s’avérer mortelle. En 2019, 146 femmes ont été tuées par un partenaire en France. En 2020, 90.  

La lutte contre les violences sexistes est une priorité affichée du président Emmanuel Macron. La pandémie de Covid-19 et les confinements ainsi que le ralentissement économique qui s’en est suivi n'ont fait que renforcer l'urgence et la nécessité de ces protections. La voie à suivre n'est pas un mystère. Des associations féministes, des syndicats et d’autres groupes de la société civile ont identifié les lacunes du droit français et proposé des solutions concrètes pour avancer, notamment dans le monde du travail.  

La France devrait suivre l'exemple d'autres pays et proposer des congés payés et des modalités de travail flexibles, afin d'aider les survivantes à trouver un abri, à obtenir des conseils ou à demander des protections juridiques sans craindre de perdre leur emploi.  

Les employeurs français ne devraient attendre d'être contraints pour avancer - ils peuvent dès maintenant prendre des mesures pour renforcer la protection à travers la formation et la sensibilisation du personnel. Ils ne devraient pas exercer de représailles à l'encontre des survivantes qui prennent un congé pour se rétablir, se rendent au travail avec des blessures visibles, ou dont l'agresseur est venu sur le lieu de travail et a été source de troubles. La protection temporaire contre le licenciement pour les travailleuses confrontées à la violence domestique est une réforme clé nécessaire. 

En conséquence, nous appelons les parlementaires français à soutenir l’intégration dans le droit français de mesures de protection sur le lieu de travail pour les survivantes de violences domestiques. Il est possible de le faire par le biais d'amendements aux propositions de loi "Accélérer l'égalité économique et professionnelle" et "Renforcer la prévention en matière de santé au travail" qui sont ou seront prochainement discutées au Sénat.

La France est en retard par rapport à d'autres pays dans la lutte contre les violences domestiques. Les protections qui permettent aux survivantes de violences conjugales de trouver la sécurité et l'aide nécessaires sont déterminantes. Il est temps d'agir.  

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