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États-Unis : Biden devrait axer la politique étrangère sur les droits humains

Les 12 recommandations clés de Human Rights Watch en vue d'une politique étrangère américaine respectueuse des droits humains

Le président élu des États-Unis, Joe Biden, s’adressait à des partisans lors d’un rassemblement tenu dans le stade « Heinz Field » à Pittsburgh, en Pennsylvanie, le 2 novembre 2020, à la veille de l’élection. © 2020 AP Photo/Andrew Harnik

Les États-Unis devraient s’efforcer de (re)devenir un leader mondial en matière de droits humains. Human Rights Watch propose 12 priorités pour que la prochaine administration américaine mette en place une politique étrangère axée sur les droits.

Les États-Unis ont le pouvoir, l’influence et les ressources nécessaires pour susciter des changements positifs pour les droits humains au-delà de leurs frontières. La défense des droits humains dans le monde est plus forte lorsque les États-Unis se joignent aux autres pays pour promouvoir et protéger ces droits. Or, même si les décideurs politiques américains adhérèrent souvent aux principes des droits humains et à des valeurs humanitaires, les États-Unis n’ont pas toujours défendu fidèlement ces droits à l’étranger et ont été complices, ou ont commis, de graves abus dans le cadre de leur politique étrangère et de leur engagement auprès des autres pays. Le gouvernement américain a souvent invoqué les droits humains de façon sélective ou pour atteindre un objectif diplomatique à court terme. Le président devrait au contraire s’engager, en paroles et en actes, en faveur d’une politique étrangère qui donne constamment la priorité à la promotion et la protection des droits humains, pas seulement en tant que moyen servant un but.

Alors que les États-Unis sont aux prises avec un racisme systémique et d’autres violations des droits humains au niveau national, il est particulièrement important que le président s’assure que la politique étrangère américaine aide à éliminer la discrimination dans le monde entier, plutôt que d’y contribuer, et renforce l’égalité en droit et en pratique.

Le président élu Joe Biden peut commencer par proclamer publiquement son engagement en faveur d’une politique étrangère axée sur les droits humains. Lorsque son administration prendra ses fonctions en janvier 2021, elle devrait immédiatement prendre des mesures pour mettre en œuvre les engagements ci-dessous, plaçant ainsi les États-Unis en bonne voie d’inscrire les droits humains dans leurs priorités de politique étrangère.

Recommandations :

Respecter les droits sur le plan national afin de donner l’exemple à l’étranger

Soutenir les gouvernements qui respectent les droits, pas ceux qui les violent

Adopter une position de leader mondial sur la question du climat

Participer aux négociations internationales en vue de réformes

Soutenir les défenseur.e.s des droits humains

Promouvoir et protéger les droits sexuels et reproductifs

Apporter une protection aux demandeurs d’asile et réfugiés

Veiller à ce que tout usage de la force soit légal et minimise les pertes civiles

Ne pas vendre ou transférer d’armes à des gouvernements responsables d’abus

Appuyer la justice pour les victimes de crimes graves

Donner la priorité à une diplomatie axée sur les droits humains

Contribuer à la lutte mondiale contre la pauvreté et l’inégalité

 

Respecter les droits sur le plan national afin de donner l’exemple à l’étranger

Un principe clé de la politique étrangère américaine devrait être de s’investir en faveur des droits humains au sein même des États-Unis. Dans le pays, de nombreuses personnes ont exprimé leur désir de liberté, d’équité et de justice à travers des manifestations et des actions citoyennes. 

La crédibilité des États-Unis pour ce qui est de promouvoir les droits humains dans le monde a souvent pris un coup en raison du manque de respect de ces droits dans le pays lui-même. Les mauvais traitements infligés aux détenus de Guantanamo Bay, l’incapacité à apporter des soins médicaux abordables pour tous, la sévère restriction du droit de demander asile, tout en séparant de force des enfants de leur famille à la frontière, ont non seulement conduit d’autres pays à rejeter toute critique de la part des États-Unis, les jugeant hypocrites ou égoïstes, mais ont même inspiré des régimes abusifs.

Étant donné que les États-Unis n’ont pas su faire état de leurs antécédents de discrimination systémique, d’incarcération de masse, d’abus policiers non remis en question et d’actes de torture restés impunis, il est plus difficile à leurs représentants de dénoncer les abus similaires commis par les autorités d’autres pays.

Les recommandations de Human Rights Watch à l’attention de la prochaine administration américaine plaidant spécifiquement pour le respect des droits humains dans le pays sont détaillées ici

Soutenir les gouvernements qui respectent les droits, pas ceux qui les violent

Le gouvernement américain a la capacité d’encourager la protection et la promotion des droits humains dans le monde entier. Le président devrait déclarer explicitement que le pays soutiendra les gouvernements qui mettent en avant les droits humains et qu’il n’accordera aucune faveur à ceux qui les violent. Alors que le Covid-19 continue à mettre à l’épreuve les gouvernements, notamment leur capacité de réagir à cette crise, le président devrait s’opposer publiquement aux gouvernements qui cherchent à s’octroyer les pleins pouvoirs grâce à des mesures d’urgence, sous prétexte de combattre la pandémie. Il devrait rappeler avec clarté que le respect des droits est parfaitement compatible avec la santé publique et la sûreté.

L’influence des États-Unis auprès des autres nations peut s’exercer de façon aussi simple qu’une invitation à la Maison-Blanche suivie d’une photo avec le président, ou en déployant tous les moyens de l’assistance américaine en matière de sécurité et de l’appui diplomatique. La prochaine administration devrait veiller à ce que tous les liens noués par les États-Unis soient compatibles avec la promotion et la protection des droits humains. Les rencontres avec les dirigeants mondiaux, aussi bien publiques que privées, devraient être l’occasion d’aborder des questions de droits humains. Ceux qui violent les droits humains ne devraient pas se voir dérouler le « tapis rouge ». Pour ce qui est de décider si un pays devrait bénéficier d’une aide militaire, de ventes d’armes ou d’autres formes d’assistance en matière de sécurité, les antécédents du gouvernement en question vis-à-vis des droits humains devraient faire partie intégrante de l’évaluation.

La prochaine administration devrait infliger des sanctions ciblées contre les dirigeants et autres responsables étrangers ayant commis de graves atteintes aux droits humains, notamment en se servant abondamment et résolument de la loi Magnitski portant sur la responsabilisation en matière de droits humains. Les États-Unis devraient s’opposer à ce que les gouvernements abusifs puissent accueillir des événements multilatéraux tels que le G20, qui redoreraient leur image internationale, et réagir à ce type de décisions de façon à faire largement connaître leurs préoccupations relatives aux droits humains.

Adopter une position de leader mondial sur la question du climat

Le réchauffement climatique touche chaque région du monde via de multiples répercussions sur les droits sociaux et économiques, dues à l’augmentation des conflits, aux migrations forcées et aux flux de réfugiés. La façon dont les gouvernements réagiront affectera les droits à la vie, à la santé et à la nourriture. En tant que deuxième émetteur de gaz à effet de serre du monde, les États-Unis devraient prendre la tête des efforts mondiaux visant à la fois à atténuer le changement climatique et à aider les populations à s’adapter à ses effets. La prochaine administration devrait faire en sorte que les États-Unis réintègrent l’Accord de Paris. Elle devrait adopter, voire s’efforcer d’inscrire dans la loi, des mesures ambitieuses pour atteindre les objectifs de cet accord, en réduisant drastiquement et rapidement les émissions de gaz à effet de serre grâce à une transition vers des énergies plus propres.

Participer aux négociations internationales en vue de réformes

Le président devrait s’engager à nouveau en faveur du multilatéralisme et mettre les droits humains au premier plan des relations internationales de l’administration américaine. Les États-Unis devraient reprendre pleinement part au travail du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies et remettre en place les financements en faveur du Fonds des Nations Unies pour la population et de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies. Ils devraient annuler le retrait du pays de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et se joindre à leurs alliés pour soutenir des initiatives sanitaires mondiales qui n’intègrent pas de politiques ou d’intentions hostiles aux droits reproductifs. Alors que le monde a du mal à combattre la pandémie de Covid-19, le président devrait veiller à ce que les recherches financées par les États-Unis soient mises en commun avec les autres nations et orienter le pays vers des plans d’approvisionnement mondiaux du vaccin qui soient accessibles à tous.

Par ailleurs, le président devrait encourager le Sénat à ratifier des traités internationaux clés relatifs aux droits humains, comme le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention relative aux droits des personnes handicapées, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la Convention relative aux droits de l’enfant.

Enfin le président devrait mettre fin à l’usage des mines terrestres antipersonnel et des armes à sous-munitions et adhérer aux traités internationaux bannissant ces armes. Afin de dissiper les inquiétudes fondamentales découlant du fait de retirer tout contrôle humain de l’usage de la force, le président devrait collaborer avec les autres pays pour interdire les armes totalement autonomes, parfois appelées « robots tueurs ».

Soutenir les défenseur.e.s des droits humains

Le soutien manifesté par les États-Unis en faveur des défenseur.e.s des droits humains et des autres personnes détenues pour avoir pacifiquement exercé leurs droits s’est avéré crucial pour limiter les abus et favoriser des réformes positives dans le monde entier. Les alliances que les États-Unis ont récemment nouées avec des gouvernements abusifs, ainsi que leur silence sur le chapitre des droits humains, ont diminué leur capacité d’aider ceux qui, à l’étranger, aspirent à la liberté et à la justice. 

Le président devrait proclamer publiquement que les États-Unis se tiendront aux côtés de tous les défenseurs des droits humains de la planète afin qu’ils puissent effectuer leur travail de défense des droits, s’exprimer sans crainte des représailles, former des organisations non gouvernementales, se réunir pacifiquement, ou encore rechercher, obtenir et recevoir des informations. Les États-Unis devraient s’efforcer de faire libérer les prisonniers politiques et réclamer que tout mauvais traitement fasse l’objet de poursuites.

Promouvoir et protéger les droits sexuels et reproductifs

Le président devrait déclarer clairement que les droits sexuels et reproductifs sont des droits humains et qu’ils ont une grande priorité, en émettant un décret présidentiel visant à abroger la politique de Protection de la vie dans le cadre de la santé mondiale (aussi appelée « Règle du bâillon mondiale » ou « Politique de Mexico ») et en particulier à annuler les dispositions élargissant cette politique. Ce décret présidentiel devrait par ailleurs préciser l’assistance fédérale qui est permise à l’échelle nationale et mondiale en vertu des lois actuelles, afin de garantir l’accès le plus large possible à une santé procréative intégrale, y compris le recours à l’avortement.

La protection des droits et de la santé sexuels et reproductifs devrait non seulement constituer une priorité à l’égard des politiques appliquées dans le pays, mais également être défendue par les États-Unis dans le monde et au sein des tribunes multilatérales. Dans ses rapports annuels portant sur les droits humains dans les différents pays, le département d’État devrait évaluer le respect de ces droits dans le monde. Le président devrait rejeter le rapport de la Commission des droits inaliénables, qui a cherché à créer une hiérarchie des droits incompatible avec le droit international relatif aux droits humains et avec les obligations légales internationales des États-Unis.

Apporter une protection aux demandeurs d’asile et réfugiés

Ces dernières années, le gouvernement américain a adopté une approche régressive des droits des personnes quittant leur pays pour échapper à la persécution et à d’autres abus. Il est allé jusqu’à fermer ses frontières terrestres aux demandeurs d’asile, démanteler les procédures de demande d’asile et fortement diminuer le nombre de réfugiés qu’il accepte de réinstaller. Par ailleurs, il a fait pression sur d’autres gouvernements pour qu’ils prennent part à des programmes abusifs qui ont renvoyé les gens vers le danger.

La prochaine administration devrait prendre un engagement en faveur des réfugiés en veillant à ce que ses politiques d’immigration et de frontières protègent les droits des migrants et des demandeurs d’asile. Les États-Unis devraient prendre conscience que leur approche de la protection des réfugiés affecte les politiques des autres pays et montrer l’exemple en procédant à une réinstallation généreuse des réfugiés. La réinstallation de réfugiés est un instrument permettant de répartir les responsabilités internationales et d’aider les pays situés en première ligne des conflits et accueillant l’immense majorité des réfugiés du monde.

Les efforts des États-Unis pour protéger les demandeurs d’asile devraient s’attaquer aux problèmes systémiques sous-jacents qui font que les gens fuient leur pays, notamment à travers des initiatives d’assistance à l’étranger destinées à améliorer le respect des lois, la responsabilisation et le développement économique équitable, à lutter contre la corruption, la violence, la discrimination et la destruction de l’environnement, ainsi qu’à renforcer l’état de droit. Le gouvernement américain devrait mettre fin aux pressions politiques et aux financements qu’il apporte aux mesures d’application de lois migratoires au-delà de ses frontières et qui ont pour objectif ou pour effet de porter atteinte au droit des personnes à quitter leur propre pays, au droit de chercher refuge face aux persécutions subies dans un pays, ou qui violent les droits humains de toute autre façon.

Veiller à ce que tout usage de la force soit légal et minimise les pertes civiles

Les États-Unis sont impliqués dans des conflits armés du monde entier, parfois ouvertement, parfois en secret. Dans ces conflits, les forces et personnels des États-Unis ont tous l’obligation légale de se conformer au droit international humanitaire (lois de la guerre).

Le président devrait réexaminer les politiques américaines portant sur l’usage de la force, ainsi que les institutions impliquées, pour veiller au respect du droit international. Les actions secrètes et clandestines étant opaques par nature, le public et les victimes ne peuvent demander de comptes à leur sujet. La prochaine administration devrait s’assurer que l’usage de la force par le pays respecte toutes les normes applicables des droits humains et du droit humanitaire. 

Dans les cas où les lois de la guerre ne s’appliquent pas, par exemple en dehors des conflits armés reconnus, le personnel des États-Unis devrait se conformer strictement au droit international relatif aux droits humains, qui donne la priorité au droit à la vie et n’autorise l’usage de la force létale qu’en cas de danger imminent pour la vie d’un individu. Le personnel américain ne devrait pas être partenaire de forces étrangères qui enfreignent le droit international de façon répétée.

La prochaine administration devrait veiller à ce que la politique à venir du département de la Défense visant à protéger les civils soit exhaustive, donne la priorité à la transparence et tienne compte des risques de protection dans les nouveaux types de guerres. Les allégations de dommages aux civils résultant des actions des États-Unis à l’étranger devraient faire l’objet d’une enquête prompte et impartiale, avec la contribution de la société civile, débouchant sur les procédures judiciaires appropriées, des réformes en fonction des enseignements tirés, ainsi que sur des réparations pour les victimes et leurs proches.

 

Ne pas vendre ou transférer d’armes à des gouvernements responsables d’abus

Le gouvernement autorise actuellement les sociétés américaines à vendre des armes, des technologies et du matériel à divers pays qui portent atteinte aux droits humains. Parfois ces armes sont employées en toute impunité pour commettre des crimes de guerre tout à fait prévisibles ; parfois elles partent enrichir l’arsenal d’un État, pour être plus tard utilisées contre ses propres citoyens. Ces ventes d’armes américaines confèrent du même coup un sceau de crédibilité et de soutien de la part des États-Unis.

Le président devrait s’engager à fixer de nouvelles normes relatives aux droits humains pour la vente et le transfert d’armes, technologies et matériel américains. L’administration devrait immédiatement procéder à une évaluation interservices des ventes et transferts d’armes, entre autres à des forces de l’ordre étrangères, dans le but d’adopter et d’améliorer des politiques axées sur le respect des droits humains.

Une nouvelle Politique sur le transfert des armes classiques devrait donner une plus grande place aux droits, fixant des normes élevées s’appliquant aux transferts. Une stricte procédure de contrôle devrait garantir que seuls les gouvernements engagés à respecter le droit international relatif aux droits humains et humanitaire pourront bénéficier de l’appui militaire des États-Unis. Le département d’État devrait prendre l’initiative en ce sens en consultant des organisations indépendantes travaillant directement dans les pays affectés afin qu’elles lui apportent leur perspective de terrain au sujet des conflits et opérations dont ils sont partenaires. Les États-Unis devraient déclarer un moratoire sur les ventes et transferts d’armes, y compris aux forces de l’ordre étrangères, tant que ces procédures ne sont pas en place.

Le président devrait collaborer avec le Congrès pour renforcer et élargir l’application des lois Leahy, qui interdisent à l’armée américaine de soutenir les unités militaires étrangères commettant de graves violations des droits humains, et pour réformer la Loi de contrôle des exportations d’armes en renforçant les dispositions portant sur les droits humains et en veillant à ce que les transferts d’armes soient notifiés au Congrès afin que le pouvoir législatif puisse exercer sa responsabilité de supervision.

 

Appuyer la justice pour les victimes de crimes graves

Il est essentiel de garantir que les auteurs des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, des génocides et autres crimes graves violant le droit international en répondent devant la justice afin de consolider le respect des droits humains et l’état de droit sur toute la planète. Le président devrait indiquer que les États-Unis sont engagés à ce que justice soit rendue pour les graves crimes internationaux, quels que soient leurs auteurs ou l’endroit où ils ont été commis. En guise de premier pas pour se faire le champion de la justice, la prochaine administration devrait s’efforcer d’établir les responsabilités pour les atteintes aux droits humains que les États-Unis ont eux-mêmes commis par le passé dans le monde, mais aussi s’engager à prévenir les abus similaires à l’avenir.

Le président devrait s’assurer que le pays apporte son appui au mandat fondamental de la Cour pénale internationale (CPI), ce tribunal de dernier recours qui se consacre, à travers des procès équitables, à rendre justice aux victimes qui n’ont aucun autre recours possible. Il devrait immédiatement annuler le décret présidentiel permettant d’infliger des sanctions destinées à saper le travail de la CPI. Les États-Unis devraient œuvrer dans le but d’adhérer au Statut de Rome, se tenant ainsi aux côtés des 123 pays membres dans leur engagement à rendre justice pour les plus graves crimes internationaux.

Même sans être membre, les États-Unis peuvent apporter leur assistance aux affaires jugées par la CPI, notamment en coopérant pour l’arrestation des fugitifs et la collecte de preuves. La prochaine administration devrait également apporter son soutien aux autres efforts judiciaires internationaux et nationaux, aux mécanismes d’enquête internationaux ainsi qu’aux affaires d’atrocités jugées par des tribunaux américains en vertu des lois sur la compétence universelle.

Le nouveau président sera en fonction lors du 20e anniversaire des attentats du 11 septembre 2001. Personne n’a été traduit en justice pour ces attentats à cause des bévues qui se sont succédé pendant des années de la part des administrations américaines : détention de suspects sans respect des procédures légales à Guantanamo Bay, tortures infligées aux auteurs présumés, puis tentative de les juger au sein de commissions militaires foncièrement défaillantes. Le président devrait veiller à ce que les coupables des attentats du 11-Septembre soient poursuivis comme il se doit, devant les tribunaux fédéraux normaux, et fermer le centre de détention de Guantanamo Bay, où il reste une quarantaine d’hommes.

Ces vingt dernières années, il n’y a pas eu de reconnaissance adéquate de la torture, des transferts illégaux de détenus et des autres crimes graves commis par des responsables américains – jusqu’au plus haut niveau – lors de la « guerre mondiale contre le terrorisme ». Le président devrait s’engager envers une véritable reconnaissance de l’usage de la torture par les États-Unis, en faisant en sorte que tous les responsables en répondent devant la justice et en s’engageant à ne pas récompenser ni promouvoir tout individu ayant élaboré, soutenu ou mis en œuvre ces politiques. Le rapport de la Commission du renseignement du Sénat sur le programme de torture de la CIA devrait être immédiatement déclassifié.

 

Donner la priorité à une diplomatie axée sur les droits humains

Toutes les initiatives d’aide à l’étranger des États-Unis devraient tenir compte des impératifs et des implications en matière de droits humains. Les stratégies relatives aux relations économiques, technologiques et commerciales devraient elles aussi refléter des considérations de droits humains.

Les relations que les États-Unis entretiennent avec les gouvernements étrangers ont le potentiel de dissuader les atteintes aux droits humains. Des messages diplomatiques forts, adressés en public et en privé lorsque de tels abus sont commis, peuvent en effet pousser les États à mettre fin à ces abus, à forcer les responsables à rendre compte de leurs actes tout en veillant à ce que justice soit rendue aux victimes, et à adopter les réformes nécessaires pour que cessent les abus systémiques.

La prochaine administration devrait adresser à son corps diplomatique un message clair proclamant que les droits humains devraient être au cœur de leur travail quotidien. Les chefs de mission devraient recevoir une formation en droit international relatif aux droits humains et en droit international humanitaire. Ils devraient se tenir régulièrement informés de la situation des droits humains dans leur pays d’accueil en faisant notamment appel à divers groupes de la société civile locale, surtout ceux représentant les populations marginalisées. 

Les négociations de paix, les missions de maintien de la paix et les pourparlers portant sur des traités devraient tous systématiquement comprendre un volet droits humains. Ils devraient renforcer l’engagement pris par les États-Unis, en vertu de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU et des résolutions consécutives sur les femmes, la paix et la sécurité, ainsi que de la Loi sur les femmes, la paix et la sécurité de 2017.

 

Contribuer à la lutte mondiale contre la pauvreté et l’inégalité

La pauvreté, les situations financières précaires et les inégalités ont augmenté à l’échelle mondiale du fait de la pandémie de Covid-19. Cette pandémie a eu des impacts économiques disproportionnés sur beaucoup de groupes déjà marginalisés sur le plan socio-économique, notamment les femmes, les enfants, les personnes handicapées, les migrants, les travailleurs du secteur informel et les personnes vivant dans des logements de fortune, menaçant leur droit à la nourriture, à la santé, au logement, à l’éducation et à un niveau de vie adéquat. La Banque mondiale estime que le Covid-19 placera 150 millions de personnes supplémentaires dans une situation d’extrême pauvreté d’ici 2021, contribuant à « la hausse des inégalités de revenu, la baisse de la mobilité sociale dans la population vulnérable et le déclin de la résilience aux chocs futurs ».

Trouver une solution au coronavirus est tout autant une question de lutte contre la pauvreté que de préservation de la vie et de la santé des gens. Il s’agit d’un défi transnational, les pays dépendant les uns des autres pour sortir de cette crise. Le président devrait veiller à ce que les États-Unis coopèrent et collaborent avec l’OMS et les autres pays pour que tout vaccin anti-Covid-19 qui serait développé par les États-Unis soit disponible et abordable pour tous dans le monde, et prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les sociétés produisant et vendant les vaccins le fassent de façon transparente et abordable.

Le pays devrait accomplir des efforts concertés pour ne pas courir le risque de laisser une génération entière de femmes et de filles en dehors de l’économie, et s’attaquer aux facteurs qui entravent la pleine participation des femmes et des filles à l’économie. Ces facteurs sont notamment la violence basée sur le genre, les soins non rémunérés qu’elles dispensent et la probabilité accrue que les adolescentes ne retournent pas au collège ou au lycée.

Pour mettre fin à l’augmentation de la vulnérabilité économique et promouvoir une croissance inclusive pendant et après la pandémie de Covid-19, les États-Unis devraient étendre leur aide aux pays aux ressources les plus limitées, en faveur de programmes de protection sociale et pour prévenir les mesures d’austérité. Les initiatives et projets de développement devraient être empreints du respect des droits humains et mis en place en consultant ceux qui sont directement affectés par les financements.

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