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Le 6 décembre, le Comité contre la torture des Nations unies a publié ses observations finales après un examen de routine de la situation au Rwanda. Pendant cet examen, les membres du comité ont émis des inquiétudes à propos de violations graves – torture, exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées et intimidation de journalistes, de défenseurs des droits humains et de membres de partis de l’opposition – et ont posé de nombreuses questions précises sur les actions du gouvernement rwandais.

La réponse du gouvernement rwandais a été de nier, nier, nier. Concernant les détentions illégales et les abus dans les camps militaires, malgré des preuves accablantes du contraire, le gouvernement a écrit dans son rapport final au comité que « nous voulons répéter et insister qu’il n’y a pas de lieux de détention non officiels ou secrets au Rwanda. »

En octobre, Human Rights Watch a publié un rapport documentant les abus commis dans des camps militaires près de Kigali, la capitale, ainsi que dans le nord-ouest du pays. Depuis au moins sept ans, l’armée rwandaise a fréquemment détenu et torturé des personnes, les battant, les asphyxiant, leur administrant des électrochocs et organisant des simulacres d’exécutions. La plupart des détenus ont été portés disparus et maintenus au secret, c’est-à-dire sans contact avec leur famille, leurs amis ni un avocat. Beaucoup d’entre eux ont été détenus pendant des mois dans des conditions déplorables. Nous continuons à recevoir des informations sur de nouveaux abus.

De nombreuses personnes qui ont été torturées ont été contraintes d’avouer des crimes contre la sécurité de l’État et ont été plus tard transférées dans des centres de détention officiels. Au lieu de se taire, des dizaines de victimes ont osé s’exprimer lors de leurs procès. Quand le comité a demandé au gouvernement rwandais pourquoi les juges n’ont pas enquêté quand les accusés ont déclaré avoir été torturés – ce que le gouvernement est tenu de faire en vertu de la Convention contre la torture – le gouvernement a simplement présenté un tableau dans son rapport affirmant que personne n’avait prétendu avoir été torturé dans des procès de 2013 à 2017.

Ceci est en contradiction flagrante avec les faits. De 2011 à 2016, nous avons documenté 65 cas dans lesquels des personnes ont déclaré au tribunal avoir été détenues illégalement dans des camps militaires ou des lieux secrets illégaux. Parmi ces cas, 36 personnes ont indiqué avoir été torturées, battues ou contraintes d’avouer des crimes qu’elles n’avaient pas commis. Ces déclarations ont été faites publiquement au tribunal pendant les procès que nous avons suivis, ou sont consignées dans des décisions judiciaires officielles.

En réponse aux allégations, faites notamment par Human Rights Watch, relatives aux actes de torture pratiqués à Kami, une base militaire située à proximité de Kigali, le gouvernement a écrit dans son rapport qu’il avait besoin de « clarifications sur ces allégations… parce que les personnes qui prétendent avoir été torturées… dans le camp militaire de Kami sont inconnues. Ces rapports n’ont pas fourni les noms de victimes et de suspects ; de ce fait, aucune enquête n’a été menée. » Je dis à Johnston Busingye, le ministre de la Justice, qui a dirigé la délégation rwandaise au comité, de bien vouloir se reporter à l’Annexe I, pages 103-109 de notre dernier rapport.

Nous avons fourni les numéros de dossier et l’identité des personnes qui ont osé s’exprimer devant les tribunaux. Ce n’est pas difficile à vérifier. Que le gouvernement se contente de dire que ces personnes n’ont jamais parlé représente le dernier acte de torture. Il leur refuse le droit de dire la vérité sur ce qui s’est passé.

Le gouvernement soutient qu’il ne détient aucun prisonnier politique. Le gouvernement déclare également que tout cas de disparition forcée fait l’objet d’une enquête. Là encore, les faits récents racontent une autre histoire. Prenez le cas de Théophile Ntirutwa, représentant à Kigali des Forces démocratiques unifiées (FDU)-Inkingi, parti d’opposition interdit. Ntirutwa a été l’objet de disparition forcée le 6 septembre, après l’arrestation de plusieurs autres membres des FDU le même jour, et il a été maintenu au secret jusqu’au 23 septembre. Pendant cette période, la police n’a pas voulu confirmer à Human Rights Watch ni à sa famille s’il se trouvait en garde à vue.

Il a maintenant été accusé d’avoir soutenu un groupe armé. Le 21 novembre, lors d’une audience, Ntirutwa a déclaré devant le tribunal : « J’ai été porté disparu pendant 17 jours… Ma famille n’a pas été informée de l’endroit où je me trouvais, non plus que les organisations de défense des droits humains. Mon épouse a signalé à la police que j’avais fait l’objet d’une disparition. Pendant tout ce temps j’ai été maintenu les yeux bandés et menotté, avant qu’il ne soit révélé que je me trouvais dans un poste de police. »

Ce sont des paroles prononcées dans une salle d’audience publique. Le gouvernement devrait respecter ses obligations, ouvrir une enquête et réclamer des comptes aux responsables de cette disparition forcée. Mais si l’on en croit l’histoire récente, il est probable que rien ne se passera. Ntirutwa avait déjà été arrêté le 18 septembre 2016, prétendument par l’armée, à Nyarutarama, une banlieue de Kigali. Il a déclaré avoir été battu et interrogé sur son appartenance aux FDU-Inkingi, et relâché deux jours plus tard. Des rapports sur cette détention ont été publiés, mais le gouvernement n’a pas mené d’enquête.

Le comité a écrit dans son rapport final qu’il était « très préoccupé » tant par le fait que le Rwanda n’avait pas mené d’enquêtes sur les allégations de torture que par son « absence de clarification quant à savoir s’il avait ou non ouvert une enquête sur les allégations de détention illégale ou au secret. »

Les observations finales du comité sont préoccupantes quant à la situation au Rwanda. Tandis que techniquement le Rwanda a fait des progrès dans sa législation, dans la réalité il ne semble pas prendre au sérieux l’interdiction absolue de la torture. Le Rwanda est tenu à la fois par le droit national et par les obligations découlant des traités internationaux d’agir en cas d’allégations de torture et de disparitions forcées, et de prendre des mesures pour prévenir de tels abus. Au lieu de nier l’existence de ces abus, il devrait démontrer qu’il est prêt à remplir ces obligations.

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