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Les gouvernements de divers pays agissent en faveur des droits reproductifs

Le sommet « She Decides » vise à contrer la mesure « Global Gag Rule » prise par Trump

(Bruxelles) –Les gouvernements devraient s’engager à soutenir politiquement et financièrement les droits à la santé reproductive et sexuelle, afin de lutter contre la Global Gag Rule (« règle du bâillon mondiale ») imposée par les États-Unis, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Les Pays-Bas, la Belgique, le Danemark et la Suède organisent le 2 mars un sommet à Bruxelles qui vise à renforcer les soutiens à l’initiative de financement « She Decides » (« C’est elle qui décide »), dont le but est de soutenir les organisations affectées par les restrictions américaines et les coupes budgétaires qui en découlent.

Trois jeunes Népalaises tiennent leurs bébés alors qu’elles attendent de voir un médecin devant son bureau à Chitwan, dans la région centrale du pays. Les mariages précoces sont fréquents au Népal, tout comme les grossesses parmi les adolescentes, d’où l’importance de l'accès à des services de santé génésique et de l'information sur ce thème. 12 avril 2016. © 2016 Smita Sharma pour Human Rights Watch


Dès le premier jour de sa prise de fonctions, le président américain Donald Trump a signé une version étendue de la « Global Gag Rule » ou règle du bâillon mondiale, appelée aussi « politique de Mexico ». Cette mesure prive les organisations non gouvernementales étrangères de tout soutien financier américain pour la santé au cas où elles utilisent des fonds, même d’une autre origine, pour offrir une information sur l’avortement, proposer la possibilité d’avorter ou encore promouvoir l’assouplissement des lois sur l’avortement. Les lois américaines interdisent déjà d’utiliser des fonds des États-Unis pour favoriser l’avortement dans des centres de planning familial à l’étranger.

« Les gouvernements, les groupes non gouvernementaux aussi bien que le secteur privé doivent être solidaires avec les femmes et les filles pour protéger leur droit à la santé, » a déclaré Nisha Varia, directrice du plaidoyer auprès de la division Droits des femmes à Human Rights. « Cette politique néfaste mise en place par ladministration Trump restreint les choix des femmes, favorise la censure de linformation au sujet d’options médicales essentielles et réduira une grande variété de services de santé dans de nombreux pays qui en ont désespérément besoin. »



Les États-Unis constituent la première source de donations du monde au bénéfice d’initiatives de santé. Lorsque des versions antérieures de la règle du bâillon mondiale avaient été imposées par des présidents républicains par le passé, elles s'appliquaient seulement aux fonds américains dédiés au planning familial, soit environ 575 millions de dollars, une partie des fonds que les USA consacrent actuellement à la santé dans le monde. Mais la version de l’administration Trump a radicalement étendu ses restrictions pour inclure toute l’aide financière américaine à la santé dans le monde. Ces fonds, qui représentent jusqu’à 9,5 milliards de dollars, ne soutiennent pas seulement le planning familial, mais aussi la santé maternelle et infantile, la nutrition, le traitement et la prévention du VIH/sida ainsi que d’autres maladies infectieuses comme le paludisme, la tuberculose et des maladies tropicales souvent oubliées.
Les gouvernements, les groupes non gouvernementaux aussi bien que le secteur privé doivent être solidaires avec les femmes et les filles pour protéger leur droit à la santé. Cette politique néfaste mise en place par l’administration Trump restreint les choix des femmes, favorise la censure de l’information au sujet d’options médicales essentielles et réduira une grande variété de services de santé dans de nombreux pays qui en ont désespérément besoin.
Nisha Varia

Directrice du plaidoyer auprès de la division Droits des femmes


En effet, les organisations étrangères qui reçoivent des fonds américains pour la santé devront choisir entre perdre leur financement américain et accepter les restrictions de la règle, qui interdit au personnel de santé de donner à ses patients des informations médicales complètes et exactes ou de leur fournir des soins qui pourraient leur sauver la vie. La dernière fois que la règle du bâillon mondiale était en vigueur – affectant des montants de financement bien moindres –, les prestataires de santé touchés, qui offrent souvent des services médicaux variés dans les régions pauvres en ressources, avaient dû fermer des cliniques et réduire leur personnel.

Human Rights Watch a réuni des informations détaillées sur les dégâts causés par l’absence d’un soin de santé complet pour les femmes et les filles. Par exemple, les grossesses non désirées favorisent le mariage d’enfants au Népal, en Tanzanie et au Malawi, aboutissant généralement à la fin de la scolarité de la jeune fille. Au Kenya, Human Rights Watch a établi que les filles qui accouchent avant d’être suffisamment développées risquent de développer une fistule obstétricale, ce qui les stigmatise et leur cause des problèmes de santé pendant toute leur vie. Dans les pays où l’avortement est très restreint, comme au Brésil, en Colombie, en Équateur et en Haïti, Human Rights Watch a montré que les femmes risquaient leur vie en subissant des avortements dangereux. Les médecins se sentent impuissants face aux lois prohibant l’IVG qui font grimper la morbidité et la mortalité maternelles.

« Laccès à un soin de santé complet, dont la contraception et lIVG sûre et légale, réduit le nombre de grossesses non désirées et davortements, ainsi que le nombre de femmes et de filles qui meurent pendant la grossesse et laccouchement, » a déclaré Varia. « Même sil est encore trop tôt pour déterminer quelle quantité de financements américains seront suspendus, il est certain que sil se produit un écart important, les conséquences seraient catastrophiques pour la santé et la vie des femmes, à moins que dautres donateurs naugmentent leur financement. »

Le gouvernement néerlandais a lancé l’initiative internationale « She Decides » qui vise à soutenir les organisations proposant un soin complet de santé génésique. Les gouvernements qui augmentent le montant de leur coopération bilatérale en matière de santé sexuelle et reproductive peuvent annoncer qu’ils le font dans le cadre d’un soutien à l’initiative « She Decides ». Les donateurs privés peuvent contribuer à un fonds de « She Decides » qui recueille les dons du public, que ce soit des individus, des fondations ou des corporations.

La Belgique, le Canada, le Cap-Vert, le Danemark, la Finlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède ont déjà annoncé leur soutien à l’initiative « She Decides ». Plusieurs autres gouvernements ont indiqué qu’ils annonceraient leur soutien lors du sommet multipartite de Bruxelles le 2 mars.

Une résolution du Parlement européen, adoptée le 14 février, appelait l’Union européenne et ses États-membres à « contrer les effets de la règle du bâillon mondial en augmentant de manière significative le financement en matière de santé génésique et sexuelle et droits connexes (...) en recourant tant aux fonds nationaux qu’aux fonds de l’Union en faveur du développement. » Plusieurs pays connus pour leur soutien de longue date à la santé des femmes dans le cadre de leur aide humanitaire à l’étranger, comme l’Australie, la France, le Japon et le Royaume-Uni, n’ont pas encore fait connaître leur stratégie.

Près de 225 millions de femmes et de filles n’ont pas accès à la contraception dont elles ont besoin. Même si la mortalité maternelle a chuté de 44% de 1990 à 2015, elle reste un grave problème. L’Organisation mondiale de la santé estime que chaque jour, environ 830 femmes et filles meurent de causes liées à la grossesse ou à l’accouchement qui pourraient être évitées. Elle estime également que dans les pays en voie de développement, près de 7 millions de femmes par an sont traitées pour des complications d’avortements dangereux et qu’au moins 22 000 en meurent chaque année.

Il est particulièrement crucial pour les jeunes filles de bénéficier d’une éducation sexuelle complète et d’un accès à la contraception et à l’IVG médicalisée, vu que les complications dues à la grossesse et l’accouchement sont une des principales causes de mortalité dans le monde pour les filles de 15 à 19 ans. En cas de réduction du financement de l’information, des services et des médicaments nécessaires à la santé génésique, le nombre de ces victimes pourrait fortement augmenter.

Un projet de loi présenté au Congrès américain – le « Global Health, Empowerment, and Rights (HER) Act » – serait en mesure d’abroger définitivement la règle du bâillon mondiale. Même s’il est improbable que cette législation soit adoptée sous l’administration actuelle, un consensus grandissant la considère comme une bonne stratégie à long terme.

« La règle du bâillon mondiale étendue par le président Trump est un texte hostile aux femmes, à la famille et à la santé, mais également à la liberté dexpression. Il menace de faire reculer des soins de santé conquis de haute lutte dans le monde entier, » a déclaré Nisha Varia. « Les donateurs auraient tout intérêt à protéger leur investissement dans la santé mondiale en sengageant à fournir de nouveaux fonds pour aider à combler cet écart. » 

 

 

 

AFP :

 

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