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La plainte pour génocide contre Israël devant la Cour internationale de justice

Le Brief du Jour du 10 janvier 2024

La Cour internationale de Justice à La Haye, aux Pays-Bas, le 27 août 2018. © 2018 Mike Corder/AP Photo

Demain sera un jour important pour le gouvernement d'Israël et le peuple palestinien, ainsi que pour l'histoire de la justice internationale. La plus haute juridiction du monde commencera les auditions sur les accusations de génocide à Gaza.

Il est essentiel de comprendre de quoi il est question dans cette affaire - et de quoi il n’est pas question - pour savoir à quoi elle pourrait mener et quels impacts elle pourrait avoir dans les semaines, les mois et les années à venir. Permettez-moi d'en rappeler les grandes lignes, étape par étape.

Le 29 décembre, le gouvernement sud-africain a porté plainte auprès de la Cour internationale de justice (CIJ), alléguant qu'en commettant des atrocités contre le peuple palestinien depuis le 7 octobre, Israël violait la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. Le gouvernement israélien a déclaré qu'il serait représenté à la CIJ pour s'opposer à ces allégations.

La CIJ est une juridiction indépendante basée à La Haye, chargée de régler les litiges juridiques internationaux entre les États. Il ne s'agit pas de la Cour pénale internationale (CPI, également basée à La Haye), qui peut traiter des responsabilités individuelles pour des crimes d'atrocité. La CIJ s'occupe des questions qui opposent un État à un autre, et cette affaire vise à déterminer la responsabilité gouvernementale en matière de génocide.

La convention en question, souvent appelée "convention sur le génocide", est un traité international auquel Israël, l'Afrique du Sud et la plupart des autres pays ont adhéré. Elle définit le génocide comme des actes "commis dans l'intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel".

L'Afrique du Sud allègue qu'Israël a violé la convention sur le génocide en commettant un génocide à l'encontre des Palestiniens de Gaza et en ne faisant rien pour l'empêcher. Selon l'Afrique du Sud, cela implique notamment de ne pas tenir les hauts fonctionnaires israéliens et d'autres personnes responsables de leur incitation directe et publique au génocide.

La requête de l'Afrique du Sud auprès de la CIJ indique qu'Israël tue des Palestiniens de Gaza en grand nombre, leur inflige de graves blessures corporelles et mentales, impose des mesures visant à empêcher les naissances palestiniennes et impose des conditions de vie calculées pour entraîner la destruction des Palestiniens en tant que groupe.

L'Afrique du Sud cite les expulsions et les déplacements massifs, la privation d'accès à la nourriture et à l'eau, aux soins médicaux, aux abris, aux vêtements, à l'hygiène et à l'assainissement, ainsi que la destruction du mode de vie des Palestiniens à Gaza.

L'Afrique du Sud soutient en outre que les "actes de génocide" doivent être situés dans "le contexte plus large de la conduite d'Israël à l'égard des Palestiniens pendant les 75 ans d'apartheid, les 56 ans d'occupation belligérante du territoire palestinien et les 16 ans de blocus de la bande de Gaza".

Il s'agit manifestement de questions énormes et complexes, et il ne faut donc pas s'attendre à une décision rapide. Cette affaire - et la détermination dans un sens ou dans l'autre du génocide - pourrait prendre des années avant d'aboutir à une décision finale.

Toutefois, l'Afrique du Sud a demandé à la Cour de prendre des "mesures provisoires" et "d'extrême urgence" pour protéger la population palestinienne de Gaza contre d'autres atteintes et garantir le respect par Israël de la convention sur le génocide. L'Afrique du Sud affirme que les Palestiniens de Gaza ont "un besoin urgent et grave de la protection de la Cour".

C'est cette demande immédiate de mesures provisoires qui sera l'objet des audiences des 11 et 12 janvier.

Les mesures provisoires spécifiques demandées par l'Afrique du Sud comprennent une suspension immédiate des opérations militaires d'Israël à Gaza et des mesures visant à empêcher la destruction et à assurer la préservation des preuves liées à l'affaire de la CIJ. Il s'agirait notamment d'autoriser l'accès à Gaza aux missions d'enquête, aux mandats internationaux et à d'autres organismes.

L'Afrique du Sud a également demandé à la Cour d'exiger qu'Israël lui rende compte des mesures prises pour exécuter toute ordonnance de mesures conservatoires dans un délai d'une semaine à partir de son émission, puis à intervalles réguliers jusqu'à ce que la Cour rende sa décision finale. Lors des débats oraux de demain, l'Afrique du Sud pourrait demander expressément à la CIJ de rendre publics les rapports d'Israël.

La décision de la CIJ sur cette demande urgente de mesures provisoires pourrait être prise relativement rapidement - peut-être dans une semaine ou un mois.

Cependant, les gouvernements n'ont pas besoin d'attendre aussi longtemps. En ce moment même, les Palestiniens de Gaza sont confrontés à des conditions de vie catastrophiques en raison des crimes de guerre perpétrés par les autorités israéliennes. Les gouvernements du monde entier peuvent, et doivent, agir immédiatement.

Comme le demande ma collègue et experte Balkees Jarrah  : "Combien de sonnettes d'alarme devront encore être tirées et combien de civils devront encore souffrir ou être tués illégalement avant que les gouvernements n'agissent ?"

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