(Bamako, le 14 avril 2015) – Le gouvernement malien devrait prendre des mesures pour stopper les crimes violents et les abus de plus en plus fréquents, commis par les groupes armés et les forces de sécurité de l’État, qui menacent la sécurité de la population dans le nord et le centre du Mali, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Deux ans après l’intervention militaire menée par la France dans le pays en crise, il règne toujours une anarchie et une insécurité généralisées.
Dans le Nord, une brève reprise des combats à la mi-2014 a provoqué le retrait des soldats et des fonctionnaires maliens, notamment des fonctionnaires de justice. Ainsi, de vastes portions de territoires se sont retrouvées sans autorité étatique et ont été le théâtre d’abus commis en toute impunité par les séparatistes touaregs, les groupes armés islamistes, les milices progouvernementales et les bandits. Depuis janvier 2015, un nouveau groupe armé islamiste a lancé une vague d’attaques contre des civils dans le centre du Mali.
« La criminalité endémique, les attaques perpétrées par les groupes armés et les abus commis par les forces de sécurité constituent un risque pour les citoyens ordinaires au centre et dans le nord du Mali » a déclaré Corinne Dufka, directrice de recherches sur l’Afrique de l’Ouest à Human Rights Watch. « Les groupes armés doivent cesser les violences et le gouvernement malien devrait prendre des mesures urgentes pour inverser cette tendance, qui menace les progrès en matière de sécurité et d’État de droit des deux dernières années. »
Pendant deux semaines en février et en mars, Human Rights Watch a mené des entretiens avec plus de 150 victimes et témoins dans la ville de Gao, dans le nord du Mali, et dans la capitale, Bamako, notamment avec des chauffeurs, des commerçants, des bergers et des bandits ; des détenus ; des représentants du gouvernement local, de la sécurité et du ministère de la Justice, des travailleurs humanitaires ; des associations de victimes ; des diplomates et des représentants des Nations Unies ; ainsi que des leaders religieux, de la jeunesse et des communautés. Les conclusions de Human Rights Watch s’appuient sur les recherches menées dans le pays depuis 2012.
Human Rights Watch a constaté une recrudescence des crimes violents commis depuis la mi-2014 par des bandes criminelles et des groupes armés dans le Nord, avec peu, voire pas de réaction de la part du gouvernement. Des bergers ont affirmé que des hommes armés circulant à moto s’étaient emparés de leurs troupeaux de bétail, et des petits commerçants ont décrit avoir été victimes d’embuscades et de vols alors qu’ils se rendaient aux marchés des villages locaux. Des chauffeurs de camion ont indiqué avoir été stoppés par des hommes armés, certains bien organisés, qui volaient les véhicules, les conducteurs et les passagers et qui, à plusieurs reprises, ont tué des chauffeurs et mis le feu à leurs véhicules.
Dans le centre du Mali, un groupe armé islamiste, parfois appelé la Force de libération du Macina, a commis de graves abus au cours d’opérations militaires contre les forces de sécurité maliennes. Les assaillants ont exécuté sommairement au moins cinq hommes soupçonnés d’avoir travaillé comme guides ou d’avoir fourni des informations à l’armée.
Des témoins ont raconté que des combattants de ce groupe ont traîné le chef d’un village près de Dioura hors de sa maison avant de l’exécuter, et qu’ils ont abattu un autre homme un jour de marché dans un village près de Nampala. Le groupe a également incendié plusieurs bâtiments du gouvernement local et a détruit une tour de communication. Lors des réunions publiques et dans des tracts distribués dans les villes et les villages, le groupe a menacé de mort la population locale si elle collaborait avec les forces françaises, le gouvernement ou la mission de maintien de la paix de l’ONU.
L’armée malienne et les autres forces de sécurité ont répondu aux attaques par des opérations militaires qui ont entraîné des actes de torture et d’autres mauvais traitements, des vols et des allégations d’arrestation arbitraire, selon les témoignages de nombreux témoins et victimes recueillis par Human Rights Watch.
Un enseignant coranique âgé d’environ 70 ans a montré à Human Rights Watch sa robe tachée de sang et a raconté que les soldats l’avaient battu en détention : « Dès le moment où j’ai été arrêté dans mon champ, j’ai été brutalisé... dans le camion et dans le camp. Ils [les soldats] m’ont donné des coups de pieds et de poings et ont forcé 18 d’entre nous à boire de l’urine. À cause des coups, j’ai eu du sang dans les urines pendant plusieurs jours. »
Dans le Nord, des groupes armés ont délibérément pris pour cible les Casques bleus des Nations Unies mandatés pour protéger les civils. Les attaques visant la mission des Nations Unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA) se sont intensifiées depuis la mi-2014. Depuis la création de la MINUSMA en juillet 2013, elle a fait l’objet d’au moins 79 attaques hostiles, dans lesquelles 35 Casques bleus ont trouvé la mort et plus de 130 ont été blessés. Des groupes armés islamistes ont revendiqué la responsabilité de bon nombre de ces attaques.
Des bandits et, dans quelques cas, des groupes armés ont attaqué au moins 13 véhicules des organisations humanitaires depuis novembre 2014, compromettant sérieusement la capacité de ces organisations à venir en aide aux populations dans le besoin. La plupart des attaques de banditisme semblaient être motivées par le vol.
De nombreuses personnes ont décrit l’utilisation d’enfants soldats, certains à peine âgés de 12 ans, par les groupes rebelles et, dans une moindre mesure, par les milices progouvernementales. En vertu du droit international, il est interdit aux groupes armés au Mali de recruter des enfants de moins de 18 ans ou de les impliquer dans des combats.
Le gouvernement devrait travailler avec la MINUSMA pour garantir une meilleure sécurité aux civils résidant hors des grandes villes, notamment les jours de marché, par exemple en augmentant le nombre de patrouilles, a déclaré Human Rights Watch. Le gouvernement devrait également mener des enquêtes et traduire en justice les membres des forces de sécurité, des forces progouvernementales et des groupes armés non étatiques impliqués dans les récents abus graves, et devrait accélérer le déploiement de la police, des gendarmes et du personnel du ministère de la Justice dans les villes et les villages du Nord. Les groupes armés devraient cesser leurs violences et leurs menaces à l’encontre des civils et des travailleurs humanitaires.
« Le Mali est inondé par les armes et les bandits, et le rythme des attaques s’intensifie », a expliqué Corinne Dufka. « Le gouvernement malien a besoin de rétablir sa présence dans le Nord afin que tout le monde bénéficie de la sécurité élémentaire indispensable pour vivre normalement. »
Meurtres et menaces par un groupe armé islamiste dans le centre du Mali
Depuis janvier 2015, un groupe armé islamiste a attaqué plusieurs villes et villages dans les régions de Mopti et Ségou, dans le centre du Mali. Parmi les villes attaquées figurent Nampala, Tenenkou, Dioura, Boulkessi, Gathi-Lemou et Dogofry.
Des témoins ont raconté à Human Rights Watch que la vaste majorité de ses combattants semblaient être des Peuls venant d’un groupe armé islamiste allié soit au Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), soit à Ansar Dine. Certains témoins ont dit avoir entendu les hommes armés se désigner comme la Force de libération du Macina, en référence à une région du centre du Mali.
Cette nouvelle zone d’opérations d’un groupe armé islamiste a suscité une peur considérable au sein de la population, et a conduit à la fuite de nombreux représentants du gouvernement local, y compris des administrateurs, des maires, des chefs, des enseignants et des juges. Un maire local a raconté :
Mon peuple est effrayé ; ces hommes armés se déplacent de village en village en permanence, tentant de recruter nos jeunes et de les convertir à leur religion. Hier encore, des personnes m’ont appelé, alarmées, pour me dire que les djihadistes étaient venus parce que Dieu les avait orientés vers ce village-ci ou celui-là. Mon peuple se sent sous pression de tous côtés : s’ils informent l’armée, ils seront exécutés en tant qu’informateurs ; s’ils ne le font pas, l’armée pensera que ce sont des collaborateurs.
La plupart des attaques du groupe visaient les forces de sécurité. Cependant, Human Rights Watch a documenté le meurtre de cinq hommes, s’apparentant à des exécutions, et des menaces à l’encontre de plusieurs autres personnes. Les résidents et les administrateurs locaux ont indiqué qu’ils pensaient que les personnes exécutées avaient, à un moment donné, travaillé comme guides locaux ou informateurs pour les services de sécurité.
De nombreux autres meurtres d’informateurs présumés ont été commis par des groupes armés islamistes ailleurs dans le Nord. La section des droits de l’homme de la MINUSMA a documenté plus de dix meurtres de ce type en 2014. Plus récemment, des sources crédibles ont rapporté que le 19 mars 2015, dans la région de Tombouctou, Al-Qaïda au Magreb islamique (AQMI) a tué puis décapité un homme de l’ethnie touareg accusé de collaboration avec les forces françaises.
Un berger peul âgé a décrit l’exécution d’un homme d’âge moyen le 14 janvier, dans la ville de Tolladji, située à 17 kilomètres à l’est de Nampala :
Il était environ 15 heures le jour du marché. Je vendais mes animaux. Ils sont arrivés sur deux motos, deux djihadistes armés sur chaque moto, et sont allés directement chez un vendeur d’essence nommé M’barré Dembélé. Il avait l’air de savoir qu’ils le cherchaient parce que, dès qu’ils sont arrivés, il s’est enfui en courant. Un des djihadistes a sauté de sa moto et lui a couru après. M’barré a jeté les bras autour d’un homme plus âgé, en l’implorant « S’il te plaît, sauve-moi », mais le djihadiste est venu droit sur M’barré, lui a tiré une balle dans le flanc, puis dans la tête après qu’il soit tombé. Le djihadiste, qui parlait notre langue [pulaar], s’est tourné vers l’homme âgé et lui a demandé s’il allait bien. Ils ont tiré en l’air pour disperser ceux qui s’étaient rassemblés et sont repartis. Ils étaient vêtus de gris, en shorts et en turbans. Ils n’ont rien volé ; ils en avaient après M’barré.
Deux résidents du village de Wouro Tiéllo ont indiqué qu’un chef local du nom de Nouhoum Diall a été tué le 7 janvier. Des islamistes armés l’ont forcé à sortir de sa maison durant la nuit et l’ont traîné sur 200 mètres. L’un des résidents a expliqué pourquoi, selon lui, Diall était visé :
Beaucoup de jeunes de ce mouvement sont les fils de nos propres villages – nous les connaissons. Ils ont rejoint le MUJAO en 2012 et font maintenant partie d’un nouveau mouvement. Le chef du village n’aimait pas ce qu’il se passait et, en tant qu’autorité locale, il a informé l’armée de leurs allers et venues. Ces personnes voulaient que Nouhoum impose leur propre version de l’Islam, mais il a refusé. C’est pour ça qu’ils l’ont tué.
Un responsable local de la région a parlé de ce qui s’apparentait à une campagne de peur pour faire fuir les fonctionnaires et ceux considérés comme proches de l’armée.
Ces personnes ont brûlé le bâtiment du maire, ont détruit les certificats de naissance et de mariage. Et depuis l’attaque, ils se sont rendus aux domiciles du maire, de son adjoint, des personnes qui ont aidé les militaires et de ceux qui n’aiment pas leur version de l’Islam et leur ont dit de partir, sinon ils les tueraient. Un homme m’a raconté au début du mois de février que les djihadistes sont arrivés sur deux motos et ont tiré plusieurs salves sur sa porte, en lui hurlant de partir. Il s’était mis à l’abri à l’intérieur avec sa famille ; il a compris le message et a fui immédiatement. Maintenant il vit caché. Et ce n’est pas le seul à qui c’est arrivé.
Abus commis par les forces de sécurité maliennes et des groupes progouvernementaux
Human Rights Watch a interrogé 34 hommes qui ont été arrêtés par les forces de sécurité au cours d’opérations dans le nord et le centre du Mali entre décembre 2014 et fin février 2015. La majorité d’entre eux étaient des Peuls arrêtés dans le centre du Mali suite aux récentes attaques dans la région.
Les détenus ont décrit de nombreux cas de mauvais traitements, y compris des abus physiques et psychologiques, notamment des menaces de mort, des actes de torture et la privation de nourriture, d’eau et de soins médicaux. Les abus les plus fréquents et les plus graves ont été infligés par des soldats de l’armée durant les premiers jours suivant les arrestations. La plupart des hommes arrêtés ont indiqué que les abus ont cessé lorsqu’ils ont été remis aux gendarmes.
Onze hommes ont montré à Human Rights Watch des signes physiques de mauvais traitements, notamment des cicatrices à la tête, au visage, aux poignets, aux jambes et à la poitrine. Un berger de 32 ans a déclaré avoir perdu une dent sous les coups des soldats. Un artisan du cuir de 45 ans qui présentait des cicatrices visibles au-dessus de l’œil droit a raconté : « Ils [les soldats] m’ont frappé à la tête et sur le côté. Mes yeux étaient couverts par mon turban mais j’ai senti le sang couler sur ma poitrine pendant un long moment. »
Dans un cas, des soldats de la base militaire de Nampala ont vraisemblablement commis des abus graves contre 18 personnes détenues pendant deux jours à la fin du mois de janvier ou au début du mois de février. Depuis le moment de leur arrestation dans plusieurs villages voisins, les hommes ont expliqué qu’ils ont été frappés à coups de pieds, de poings, de crosses de fusils et que, pendant une nuit, ils ont été forcés de boire de l’urine et ont été menacés de mort.
Un homme de 31 ans avec une cicatrice de 5 centimètres à l’arrière de la tête a décrit ce qui est arrivé aux hommes arrêtés :
Nous étions tous dans une seule cellule, assis avec les mains liées et les yeux bandés. Ils [les soldats] venaient souvent pour nous donner des coups de pieds et nous frapper à de nombreuses reprises. Ils nous ont dit : « Vous êtes des rebelles... Cette nuit, nous vous emmènerons dehors pour vous tuer tous. » À un moment donné, nous les avons entendu uriner dans une bouteille devant notre cellule ; ils sont entrés, se sont placés de chaque côté de chacun de nous et nous ont forcé à boire... Ceux qui refusaient étaient roués de coups et forcés à boire, en leur maintenant la tête en arrière... D’autres ont eu de l’urine versée dans le nez. Plus tard, ils nous ont arrosés avec de l’eau sale et pendant la nuit, ils marchaient dans la cellule en nous frappant et en nous insultant.
Deux hommes touaregs, âgés de 25 et 27 ans, ont raconté qu’ils ont été arrêtés à un domicile privé à Gao, à la mi-février, par la milice progouvernementale appelée Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés (GATIA), qui les accusait de vendre des munitions aux groupes armés dans le nord du pays. Les hommes touaregs ont expliqué que les miliciens leur ont volé un téléphone portable et de l’argent avant de les livrer à des soldats, identifiés par les deux Touaregs comme des Bérets rouges d’élite. Ils ont dit que les soldats les ont sévèrement brutalisés jusqu’au lendemain dans la base militaire de Camp Firoun à Gao, avant de les remettre aux gendarmes. Les poignets des hommes présentaient de profondes cicatrices à cause des cordes serrées et leurs mains étaient toujours gonflées lorsque Human Rights Watch s’est entretenu avec eux deux semaines plus tard. L’un des hommes a déclaré :
Les soldats nous ont lié les mains et les pieds ensemble derrière le dos avec un câble électrique, en serrant tellement que le câble nous cisaillait la peau. Ils nous ont laissés sur le sol dans une pièce comme ça de 21 h à 9 h le lendemain matin. Ils nous ont battus et frappés à coups de pieds. Nous avons supplié pour avoir de l’eau à boire mais, à la place, ils nous ont arrosés d’eau en disant « Les moustiques vont vous dévorer cette nuit ».
Un berger peul de 31 ans interrogé par Human Rights Watch à l’hôpital a expliqué qu’à la fin de l’année 2014, il avait été arrêté avec environ 30 autres hommes peuls accusés de soutenir les rebelles islamistes dans un village situé à l’ouest de Douentza et que la Garde nationale leur avait donné l’ordre de s’allonger les uns sur les autres à l’arrière de deux pick-ups. Ses jambes avaient été gravement blessées et lésées par le poids des autres hommes arrêtés et par une chaîne métallique sur laquelle il avait été forcé de s’allonger. Les hommes de la Garde nationale les ont battus lui et les autres pendant plusieurs heures dans une base à Mondoro.
Au moins 11 autres personnes arrêtées ont été brutalisées par un groupe de gendarmes à Sévaré. Deux détenus ont expliqué que les gendarmes frappaient ou giflaient brièvement les détenus puis « ordonnaient [aux détenus] de se battre et se frapper les uns les autres pendant plusieurs minutes ».
Plusieurs hommes ont indiqué que pendant leur détention, les soldats et parfois les gendarmes les dépouillaient de leur argent, leurs téléphones portables, leurs bijoux et autres possessions. Un homme âgé arrêté par des soldats dans un village près de Niono a raconté que les soldats avaient volé plus de 1,2 million de francs CFA (1 990 USD) trouvés dans son domicile.
Les entretiens menés par Human Rights Watch avec des dizaines d’hommes arrêtés, accusés de soutenir les groupes armés en 2013 et 2014, ont montré que quasiment tous les individus placés en détention par les services de sécurité maliens avaient été frappés et que nombre d’entre eux avaient été sévèrement brutalisés. À l’inverse, parmi les 34 détenus interrogés par Human Rights Watch en 2015 à Bamako, seule la moitié environ a déclaré avoir subi des mauvais traitements en détention.
Utilisation d’enfants soldats par les groupes armés dans le Nord
De nombreux commerçants, bergers, hommes d’affaires et résidents des villages et des villes sous le contrôle des groupes armés dans le Nord ont évoqué l’utilisation d’enfants soldats, dont certains à peine âgés de 12 ans, par le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), le Haut-conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et les factions du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA). Un homme arrêté au début du mois de février a signalé que, parmi ses ravisseurs faisant partie d’une milice progouvernementale, deux étaient des enfants non armés d’environ 15 ans. Deux enfants, âgés de 14 et 15 ans, étaient présents dans un groupe de huit personnes arrêtées par les gendarmes à la fin du mois de mars, suite à l’explosion du 23 mars ayant détruit une maison à Gao suspectée d’être utilisée pour fabriquer des engins explosifs improvisés.
Une dizaine de personnes ont indiqué avoir vu des enfants soldats aux points de contrôle et aux côtés de combattants plus âgés dans et autour des villes de Djebock, Ménaka, Imnaguel, Adran Tikilite, Tinabacor, Anafis, Inalabrabya et Tinfadimata, dans les régions de Gao et Kidal. Ils ont dit que la plupart des enfants étaient de l’ethnie arabe ou touareg.
Un conducteur qui transporte régulièrement des marchandises de Gao à Anafis a raconté : « La dernière fois que j’y suis allé, j’ai vu au moins cinq d’entre eux, les plus jeunes ayant 15 ans environ ». Un commerçant qui se déplace souvent à Djebock a dit : « Même dimanche dernier, j’ai vu cinq de ces jeunes... de 13, 14, 15 ans ». Un berger qui faisait paître ses moutons près de Djebock a raconté : « Des enfants ? J’en vois tout le temps... Ils sont moins nombreux que pendant la guerre de 2012, mais ils sont toujours là. »
Plusieurs personnes ont expliqué que les combattants plus âgés dissimulaient la présence des enfants dans leurs rangs aux groupes d’aide humanitaire internationaux et aux Nations Unies. Ce récit d’un fonctionnaire de Ménaka était typique :
Les enfants sont là ; il y a quelques jours même, le 28 février, j’ai vu plusieurs d’entre eux gérer un point de contrôle ; l’un d’eux avait environ 13 ans, il était tellement jeune que son arme traînait par terre. Mais chaque fois que des étrangers, la MINUSMA ou des personnes d’organismes d’aide humanitaire arrivent, on leur crie de courir se cacher derrière un bâtiment et de rester hors de vue. Mais nous savons que les enfants sont là !
Des sources de l’ONU ont indiqué à Human Rights Watch qu’une dizaine d’écoles dans les régions de Gao, Tombouctou et Kidal sont occupées par des membres des groupes armés.
Criminalité non contrôlée dans le Nord
Alors que le banditisme et les autres crimes violents constituent un problème de longue date au Mali, les résidents, les membres des forces de sécurité et les chefs de communauté ont expliqué que le problème était devenu particulièrement aigu depuis la mi-2014, après que les forces de sécurité étatiques ont cessé les patrouilles.
Le gouvernement a l’obligation de garantir à tous les Maliens sécurité et respect de leurs droits. Le droit international reconnaît la responsabilité de l’État en cas de non-protection des populations contre les violations des droits et les violences perpétrées par des acteurs privés. Le comité des droits de l’homme de l’ONU précise qu’un État a l’obligation de protéger les individus non seulement contre les violations de droits commises par des représentants du gouvernement, mais aussi contre les actes violents commis par des personnes ou entités privées. En l’occurrence, un gouvernement peut se trouver en situation de violer les droits humains par le fait de ne pas protéger la population, y compris par l’absence de mesures appropriées « pour prévenir, punir, mener des enquêtes ou réparer les torts causés par de tels actes commis par des personnes ou des entités privées ».
À Gao, Human Rights Watch a mené des entretiens avec environ 50 victimes et témoins des récents incidents de banditisme menés par des criminels et des groupes armés dans le Nord, y compris des conducteurs, des propriétaires d’entreprise de transport, des passagers, des petits commerçants, des bergers et des marchands. Les attaques étaient concentrées sur les jours de marché et le long de plusieurs portions de grande route et de routes secondaires empruntées par les commerçants.
Un administrateur de l’hôpital public à Gao a affirmé que depuis mai 2014, « le nombre de personnes blessées du fait du banditisme a considérablement augmenté », en soulignant que l’hôpital avait traité au moins 10 personnes suite à des incidents de banditisme sur les trois derniers mois. Des témoins et des chefs de communauté locaux ont expliqué qu’ils connaissaient plusieurs personnes ayant été tuées dans des incidents de banditisme.
La plupart des attaques étaient menées par des petits groupes d’hommes se déplaçant à moto et armés de fusils d’assaut militaires. Plusieurs victimes, cependant, ont décrit les attaques comme des « opérations » impliquant de plus grands groupes d’hommes en uniforme intégral ou partiel, armés de fusils et de lance-grenades et utilisant des pick-ups équipés de grosses mitraillettes. Ces assaillants mentionnaient habituellement un motif politique, tel que la prise pour cible des forces de la MINUSMA ou l’intention d’établir un État séparatiste connu sous le nom d’Azawad.
Des victimes et des témoins pensaient que bon nombre des attaquants étaient d’actuels ou d’anciens combattants d’un des groupes armés opérant dans le Nord. Selon eux, les attaquants avaient été enhardis par la présence limitée des forces de sécurité étatiques et par un système de justice dysfonctionnel. La grande majorité des assaillants étaient décrits comme de jeunes hommes des ethnies touareg, arabe et, dans une moindre mesure, peule.
Vol organisé de bétail
Human Rights Watch s’est entretenu avec 10 bergers dont le bétail, les moutons, les chèvres et les chameaux ont été volé depuis juillet 2014 ; un groupe de défense des droits humains local a déclaré avoir documenté de nombreux autres cas. Les bergers ont décrit un mode opératoire selon lequel plusieurs hommes à moto entrent dans la zone de pâturage en tirant en l’air pour effrayer les animaux, avant de les regrouper et de les emmener en les encadrant avec leurs motos. Certains pensaient que leurs animaux ont ensuite été embarqués dans des camions stationnés à quelques kilomètres.
Un berger a décrit une « opération » en décembre impliquant deux camions remplis d’hommes en uniforme qui lui ont lié les mains, lui ont enroulé le turban sur les yeux et l’ont obligé à rester allongé pendant qu’ils emmenaient ses 70 moutons et ses 20 vaches. L’incident s’est produit à 25 kilomètres au nord de Djebock dans un secteur vraisemblablement contrôlé par le MNLA d’après la victime et plusieurs témoins interrogés par Human Rights Watch. Human Rights Watch n’a cependant pas pu confirmer si ce groupe était à l’origine du vol.
Le berger a précisé : « Il y avait beaucoup de soldats. Leurs pick-ups étaient équipés de grosses mitrailleuses 12.7... Ils ont dit que les animaux leur appartenaient parce que j’étais sur leur territoire, l’Azawad. Mes animaux étaient tout pour moi... Depuis, je suis obligé de vivre dans cette ville [Gao] où je n’ai rien. »
Les autres bergers, tous issus des groupes ethniques bellah et peul, ont mentionné les conséquences dévastatrices de la perte de leurs animaux sur leur capacité à subvenir aux besoins de leurs familles. La plupart ont indiqué qu’ils cherchaient leurs animaux sur les marchés au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Burkina Faso. Un berger et son père, à qui 11 vaches ont été volées à la mi-février 2015 près de Tinassemed, à environ 55 kilomètres de Gao, ont expliqué leur perte :
Chaque vache vaut au moins 250 000 francs CFA (415 USD)... Mon père est devenu fou de colère et de frustration... Il a passé des semaines à marcher péniblement d’un marché à l’autre en suivant les rumeurs selon lesquelles nos vaches avaient été vues ici et là. Il est toujours là-bas à les chercher. Sur chaque marché, nous guettons leur meuglement... Nous connaissons le meuglement de chacune. Mes amis nous ont dit d’abandonner, que les bandits nous tueront. Mon espoir est de négocier avec le chef local du MNLA... Il y a de bonnes personnes dans chaque organisation ; peut-être pourrions-nous au moins récupérer quelques bêtes.
Un berger de 43 ans, dont le troupeau entier de plus de 100 chèvres a été volé en juillet 2014 à environ 80 kilomètres au sud de Gao, a indiqué :
Ils les ont toutes prises. J’ai travaillé ma vie entière pour avoir un troupeau de cette taille. J’ai suivi les traces des animaux et des motos pendant des heures et j’ai cherché partout en vain. C’est grâce à mes animaux que je pouvais nourrir et vêtir les 12 membres de ma famille, maintenant il me reste deux ânes pour aller chercher de l’eau. Pour nous, la perte de nos animaux équivaut à perdre tout espoir d’avenir pour vous et votre famille. Maintenant, je ne suis rien.
Vols prenant pour cible des commerçants
Des commerçants qui se déplacent de village en village pour vendre et acheter des marchandises ont décrit des incidents de banditisme fréquents et, selon eux, de plus en plus nombreux, leur faisant perdre de l’argent ou leur moto. Un représentant de la branche de Gao de l’Association malienne des droits de l’homme a indiqué avoir documenté 52 cas de banditisme, la plupart visant des petits commerçants, au cours des deux premiers mois de l’année 2015. À titre de comparaison, il a documenté 100 cas sur toute l’année 2014.
Plusieurs commerçants ont rapporté qu’ils avaient été dévalisés plusieurs fois l’année dernière. Un jeune homme a expliqué qu’il avait été volé en décembre 2014 puis en janvier 2015, lorsque quatre hommes armés portant des vêtements militaires et civils les ont forcé lui et un ami à s’arrêter à 70 kilomètres de Gao alors qu’ils revenaient du marché d’Amasarakate, et leur ont pris leur argent et leurs motos :
Mon ami et moi sommes allés au marché sur deux motos flambant neuves. Nous en avons vendu une et j’ai récupéré une dette que l’on me devait de 450 000 francs CFA (745 USD), mais sur le chemin du retour, nous sommes tombés dans une embuscade ; ils nous ont frappés, tout en rigolant alors qu’ils volaient la moto et prenaient l’argent dans ma poche, en disant « Azawad 1, Mali zéro » comme si c’était un match de foot. Mais ce n’est pas une blague, c’est ma vie. Au lieu d’avancer, je suis maintenant lourdement endetté.
Deux autres commerçants qui ont été volés le 5 janvier à environ 35 kilomètres de Djebock et ont perdu 2,2 millions de francs CFA (3 650 USD) et 1,5 million de francs CFA (2 490 USD) ont raconté : « Nous sommes démoralisés. Nous travaillons dur pour avoir un avenir, peut-être fonder notre propre famille, mais nous nous sentons abandonnés par l’État entre les mains de ces hommes en turban et armés de fusils. Honnêtement, que pouvons-nous faire ? »
Banditisme contre des véhicules de transport
Près de 20 chauffeurs et propriétaires d’entreprise de transport à Gao ont raconté à Human Rights Watch que le nombre d’attaques par des bandits a augmenté et leur violence s’est intensifiée depuis la mi-2014, après que les forces de sécurité étatiques ont diminué le nombre de patrouilles le long des grandes routes principales. Beaucoup de chauffeurs ont expliqué qu’ils avaient été victimes de une à cinq attaques, tandis qu’un propriétaire d’entreprise de transport possédant 15 camions a indiqué : « Un [de mes camions] a touché une mine, un autre a été incendié et je ne compte plus le nombre de fois où mes camions ont été endommagés par des bandits. » Plusieurs ont précisé qu’auparavant les bandits ne tiraient pas sur les véhicules pour les forcer à s’arrêter, mais que cela devient de plus en plus courant.
En dehors de la région de Gao, les journaux locaux consultés par Human Rights Watch ont signalé de nombreux incidents de banditisme dans les régions de Tombouctou et de Ségou.
Les chauffeurs ont expliqué que les attaques de bandits étaient généralement menées par de petits groupes d’hommes armés de fusils d’assaut Kalachnikov, qui tiraient en l’air pour forcer les chauffeurs à s’arrêter, puis ils pillaient le véhicule et volaient l’argent et les marchandises des nombreux passagers qui utilisent généralement les véhicules de transport comme transport public. Ces marchandises étaient chargées sur un camion qui attendait. Des victimes ont raconté que les bandits, qui les gardaient parfois pendant plusieurs heures, ne semblaient pas craindre d’être arrêtés.
Un chauffeur transportant des marchandises depuis l’Algérie a raconté qu’il a été stoppé à 140 kilomètres de Kidal à la fin du mois de février 2015 par quatre hommes armés, circulant à bord d’un Land Cruiser. Ceux-ci l’ont forcé à quitter la route principale, puis, a-t-il expliqué : « Ils nous ont gardés de 5 h à 16 h, prenant leur temps pour décharger toutes nos marchandises... du thé, des tissus, des fruits, même des motos, que nous transportions. Nous sommes déçus par nos propres soldats et gendarmes. La MINUSMA essaie [de nous protéger], mais ils ne peuvent pas tout faire. »
Un autre chauffeur a raconté qu’en août 2014, des hommes armés ont arrêté quatre gros camions de transport et ont tué un de ses collègues. « Après nous avoir mis en ligne, les bandits qui parlaient arabe et tamashek nous ont compté, un, deux, trois et quatre, et ont tout simplement tué le chauffeur touareg en quatrième position » a-t-il expliqué. « Ils nous ont tout volé et sont partis avec son véhicule. »
Les chauffeurs ont indiqué que les forces de sécurité n’avaient généralement pas effectué de patrouilles régulières et adéquates pour empêcher les attaques ou pour enquêter et traduire en justice les auteurs de ces actes. Les propriétaires d’entreprise de transport avaient déposé plainte auprès de la gendarmerie, essentiellement pour faciliter le remboursement des pertes par leur compagnie d’assurance. Personne n’a indiqué que les incidents avaient fait l’objet d’enquêtes dignes de foi par les gendarmes et beaucoup, comme ce chauffeur, ont expliqué se sentir « abandonnés » par l’État :
Nous sommes seuls sur les routes. Il n’y a pas d’armée pour nous défendre, les gendarmes ne sortent pas des limites des villes. Il y a tellement de groupes armés que nous ne savons pas qui est qui. La MINUSMA se protège essentiellement elle-même... Nos camions sont incendiés, nous perdons de l’argent par extorsion à droite et à gauche. Lorsque nous montons dans nos camions et prenons la route, seul Dieu nous protège et nous ramène sains et saufs à la maison.
Extorsion aux points de contrôle
Des chauffeurs, des hommes d’affaires et des résidents de Gao interrogés par Human Rights Watch se sont plaints d’être obligés à verser de l’argent aux points de contrôle tenus par des groupes armés et, dans une moindre mesure, par les forces de sécurité gouvernementales. Ils ont raconté que l’extorsion par les groupes armés est plus systématique et plus organisée, avec des prix définis pour entrer et sortir des principales villes et de nombreux villages. À l’inverse, l’extorsion par la police, les gendarmes et les soldats était plus informelle, avec des variations dans les sommes exigées, et moins fréquente. Des reçus étaient rarement fournis, et les chauffeurs ont dit que s’ils ne payaient pas, ils étaient battus et arrêtés pendant « des heures sinon des jours de temps perdu, ce que nous ne pouvons pas nous permettre », comme décrit par un des chauffeurs.
Les chauffeurs de gros camions de transport devaient généralement payer de 5 000 à 10 000 francs CFA (8,30 à 16,60 USD) à chaque point de contrôle important. Quatre propriétaires d’entreprise de transport et trois chauffeurs conduisant des marchandises de Gao vers les villes du Nord ont précisé que l’extorsion avait un lourd impact économique sur leur activité. Les conducteurs transportant de la nourriture et d’autres marchandises de Gao à Agelhouk disaient que chacun payait un total de 120 000 francs CFA (200 USD) à huit points de contrôle gérés par plusieurs groupes armés différents et un point de contrôle tenu par une milice soutenue par l’État.
Attaques contre la MINUSMA
Les Casques bleus de la MINUSMA ont été déployés au Mali en juillet 2013 et ont été mandatés pour protéger les civils et créer des conditions propices à l’apport de l’aide humanitaire. Les Casques bleus font l’objet de fréquentes attaques et ont, par conséquent, subi de lourdes pertes : 35 morts et plus de 130 blessés. Le MUJAO, AQMI et Al Mourabitoune ont revendiqué bon nombre de ces attaques.
Même si quelques décès ont eu lieu lors d’attaques de bases de la MINUSMA situées à proximité des bases de l’armée malienne ou des troupes françaises, la grande majorité des attaques et, par conséquent, des victimes ont été recensées lorsque la MINUSMA effectuait des patrouilles ou escortait des convois transportant du carburant, des denrées alimentaires, des médicaments et d’autres fournitures. Dans la plupart des cas, il semble que les Casques bleus ont été délibérément pris pour cible.
L’incident le plus meurtrier contre des soldats de maintien de la paix au Mali est une embuscade menée le 3 octobre 2014 qui a tué neuf Casques bleus du Niger et qui ciblait une patrouille acheminant de l’essence de Ménaka à Ansongo. Une attaque le 18 septembre qui a tué cinq Casques bleus tchadiens visait un convoi de troupes qui venait prendre la relève sur leur base à Agelhouk. Les Casques bleus tchadiens ont été les plus lourdement touchés, avec 19 morts.
Depuis la fin de l’année 2014, des hommes armés ont incendié des voitures commerciales et des camions, y compris plusieurs véhicules transportant des denrées alimentaires et de l’essence pour la MINUSMA et deux utilisés pour l’aide humanitaire. Un gendarme à Gao a indiqué que depuis janvier 2015 au moins six véhicules ont été incendiés, dans certains cas, avant même que leur contenu soit pillé. Il a qualifié ces attaques d’« actes de sabotage ».
Selon plusieurs témoins, les attaques contre leurs véhicules semblaient être des opérations militaires bien organisées. Le conducteur d’un camion transportant des fournitures pour la base de la MINUSMA d’Agelhouk à la fin de l’année 2014 a décrit une de ces attaques :
Quinze kilomètres avant Agelhouk, des hommes ont soudain tiré dans mes pneus pour me forcer à m’arrêter. J’ai vu un Land Cruiser équipé d’un lance-roquette et un gars qui donnait les ordres ; huit hommes sur la plate-forme et une moto avec trois hommes armés portant des jerricanes d’essence. Ils parlaient arabe... Ils ont pris l’essence, l’ont versée sur le véhicule et y ont mis le feu. Ils n’ont pas volé le contenu, ni posé de questions. Ils savaient ce qu’ils voulaient faire.
Le conducteur d’un camion transportant des denrées alimentaires et des fournitures jusqu’à une base de MINUSMA a raconté une autre attaque bien organisée commise début 2015 :
Environ 55 kilomètres avant Ménaka, des hommes ont surgi et ont tiré pour m’obliger à m’arrêter. Ils ont ordonné à mes apprentis et à moi-même de nous allonger face contre terre sur le bord de la route. Ensuite ils ont aspergé le camion d’essence et sans rien dire, ils ont jeté quelques petites bombes pour mettre le feu. Il y avait plein de choses dans notre camion mais ils n’ont rien volé.
Attaques contre des travailleurs humanitaires
Des bandits et des groupes armés s’en prennent de plus en plus aux véhicules des organisations humanitaires, en particulier dans le Nord, et plus récemment près de Tenenkou, dans la région de Mopti, affectant les livraisons humanitaires. Les travailleurs humanitaires ont expliqué que le motif de la plupart des attaques semblait être le vol. Depuis novembre 2014, il y a eu au moins 13 attaques contre des véhicules humanitaires dans le Nord, au cours desquelles les travailleurs humanitaires ont été dévalisés ou leurs véhicules ont été volés ou incendiés. Du fait de l’insécurité généralisée et de ces attaques, il est de plus en plus difficile pour les organisations humanitaires de mener à bien leurs programmes de santé, de nutrition et d’éducation, entre autres. Les travailleurs humanitaires ont indiqué à Human Rights Watch que l’assistance à des milliers de bénéficiaires a été compromise par l’insécurité croissante et par la difficulté pour les travailleurs humanitaires d’accéder régulièrement aux communautés dans le besoin
Quelques incidents ont entraîné des morts. À la fin du mois de mai 2014, deux travailleurs humanitaires pour le Conseil norvégien pour les réfugiés ont été tués lorsque leur véhicule a percuté un engin explosif improvisé près de Tombouctou. Le 30 mars 2015, un chauffeur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a été tué et un collègue blessé dans une lors d’une embuscade entre Gao et Ansongo. Le CICR a indiqué dans une déclaration qu’ils se dirigeaient vers le Niger pour collecter des médicaments pour l’hôpital de Gao, à bord d’un camion clairement identifié par l’emblème de la Croix-Rouge. Le groupe armé islamiste MUJAO a revendiqué l’attaque.