Dispositions légales enfreignant la Directive 2004/38/CE
Garanties procédurales inadaptées
Poursuite de la discrimination illégale contre les Roms
Human Rights Watch présente respectueusement ses observations à la Commission européenne dans le cadre de son analyse du respect du droit européen et des mesures et lois adoptées par la France s’agissant des Roms de nationalités européennes.
Après avoir mené des recherches et une analyse minutieuses sur l’éloignement par la France de ressortissants européens appartenant à la communauté Rom, nous estimons que le droit et les pratiques de la France dans ce domaine violent ses obligations, tant au regard du droit européen que du droit international relatif aux droits humains.
En octobre 2010, le Gouvernement français s’est engagé devant la Commission européenne à introduire dans un projet de loi sur l’immigration des dispositions visant à garantir la bonne transposition de la Directive européenne de 2004 relative à la liberté de circulation (Directive 2004/38/CE) (ci-après “la Directive”). Cet engagement suivait les préoccupations exprimées par la Commission au sujet de l’expulsion par la France, au cours de l’été 2010, de ressortissants européens appartenant à la communauté Rom.
Malheureusement, la loi n° 2011-672 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité (ci-après “loi de 2011 sur l’immigration”) promulguée le 17 juin 2011, n’apaise pas les inquiétudes qui avaient suscité l’intervention de la Commission.
Tout d’abord, la loi contient des dispositions qui enfreignent directement la Directive et semblent conçues pour faciliter l’éloignement des Roms se trouvant en France.
Deuxièmement, les garanties procédurales sont incompatibles avec les exigences de la Directive et reviennent à un échec de la transposition de celle-ci.
Troisièmement, et en pratique, les autorités françaises continuent de cibler les ressortissants européens Roms pour les éloigner, souvent à la faveur de leur évacuation des camps ou des squats, d’une manière qui constitue une discrimination illégale aux termes du droit européen et des droits humains. Ces préoccupations sont détaillées ci-après.
Dispositions légales contrevenant à la Directive 2004/38/CE
Human Rights Watch reconnaît que la loi de 2011 sur l’immigration comporte des dispositions en vue d’assurer des garanties procédurales équitables et adaptées, satisfaisant à la Directive.
Conformément à l’article 27 de la Directive 2004/38/CE, la loi précise que les autorités peuvent signifier à un ressortissant européen une obligation de quitter le territoire français (OQTF) pendant les trois premiers mois de son séjour en France si le comportement de cette personne représente une “menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société” (article 39-3) de la loi française. Conformément à l’article 28 de la Directive, la loi stipule aussi que ces décisions sont soumises à une prise en compte individualisée de la situation personnelle du ressortissant européen.
“Abus de droits”
L’article 39 de la loi instaure le pouvoir de signifier une OQTF aux ressortissants européens dont le séjour en France constitue un “abus de droits” défini comme “le fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire [de la France] alors que les conditions requises pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois ne sont pas remplies” et “le séjour en France dans le but essentiel de bénéficier du système d’assistance sociale”. Il est limpide que ceci est incompatible avec la Directive de 2004.
La Directive garantit à tous les ressortissants européens le droit de se rendre et de demeurer dans un autre pays de l’UE jusqu’à trois mois “sans autres conditions ou formalités que l’exigence d’être en possession d’une carte d’identité ou d’un passeport en cours de validité” (article 6). Le droit de séjour au-delà de trois mois dépend de la satisfaction d’un ou plusieurs critères, énoncés à l’article 7, notamment que les personnes concernées sont des travailleurs salariés ou non salariés, ou disposent de ressources suffisantes pour subvenir à leurs besoins sans devenir une charge pour le système d’assistance sociale du pays d’accueil.
La Directive indique de façon explicite que l’éloignement ne devrait pas être la “conséquence automatique du recours à l’assistance sociale” de l’État membre d’accueil. Les lignes directrices adoptées par la Commission européenne en 2009, destinées à améliorer l’application de la Directive de 2004, indiquent clairement que “[s]eule la perception de prestations d’assistance sociale peut être considérée comme pertinente pour déterminer si l’intéressé représente une charge pour le système d’assistance sociale”[1]. La simple supposition qu’une personne pourrait devenir une charge pour le système d’assistance sociale ne peut justifier une mesure d’expulsion.
De fait, si l’absence de ressources suffisantes peut constituer un motif permettant de décider qu’un ressortissant européen ne satisfait pas aux conditions d’un séjour au-delà de trois mois, seule la preuve qu’une personne représente une charge déraisonnable pour les finances publiques peut constituer un motif pour ordonner son éloignement.
Le risque est très réel que la clause permettant l’éloignement des personnes réputées séjourner en France “dans le but essentiel de bénéficier du système d’assistance sociale” n’inscrive dans la loi une pratique de décisions systématiques d’éloignement des Roms de France, sur la simple hypothèse qu’il pourraient un jour bénéficier du système social, ce qui est une approche incompatible avec les obligations de la France au regard du droit européen. Un avis de novembre 2008 du Conseil d’État français valide cette pratique en estimant que l’insuffisance des ressources peut justifier une décision d’éloignement à l’encontre d’un ressortissant de l’Union européenne “alors même que l’intéressé n’est pas encore effectivement pris en charge par le système d’aide sociale”[2]. À notre avis, la Directive 2004/38/CE exige une prise en compte individualisée sur la base de faits, de sorte que la décision qu’une personne constitue un fardeau déraisonnable pour l’État ne peut être envisagée que si celle-ci a effectivement bénéficié d’une aide sociale.
Human Rights Watch a examiné 198 décisions portant OQTF notifiées à des Roms roumains entre août 2010 et mai 2011 par six préfectures différentes réparties sur tout le territoire français. Chaque préfecture utilise un formulaire standard, et pratiquement toutes les décisions portant OQTF adoptées par une préfecture donnée sont identiques. On constate cependant quelques écarts entre les formulaires utilisés par les différentes préfectures[3].
Deux cas seulement parmi ceux que nous avons examinés contenaient des éléments de preuve – sous la forme de déclarations des deux intéressés – que quelque forme de prestation sociale avait été perçue. Aucun des autres dossiers ne contenait la moindre preuve.
Certains des formulaires en question affirment catégoriquement que l’intéressé a dépassé la période de trois mois sans satisfaire aux conditions d’un séjour à long terme; il est parfois indiqué que l’intéressé ne peut prouver que son séjour en France n’a pas dépassé trois mois; parfois encore le formulaire conclut que l’intéressé constitue un fardeau déraisonnable pour l’État français ou ne dispose pas de ressources suffisantes pour éviter de devenir un fardeau, bien qu’aucune preuve ne soit apportée selon laquelle la personne en question constituerait, de fait, un fardeau de quelque type que ce soit pour l’État.
Après qu’une série de jugements du tribunal administratif de Lyon eut annulé des décisions portant OQTF au motif de l’absence d’un examen individualisé, la préfecture du Rhône a entrepris d’insérer dans ses décisions, fin 2010, un nouveau paragraphe standardisé. Selon le Service œcuménique d'entraide(CIMADE), une organisation travaillant sur les droits des migrants, le tribunal administratif de Lyon a annulé 12 décisions portant OQTF entre octobre 2010 et avril 2011 au motif de l’absence d’évaluation individualisée[4]. Il est intéressant d’observer qu’une autre chambre du même tribunal administratif a rejeté 11 appels interjetés contre des décisions identiques pendant la même période[5]. La totalité des 26 décisions portant OQTF, délivrées par la préfecture du Rhône entre décembre 2010 et avril 2011 et examinées par Human Rights Watch, contient le libellé suivant:
Considérant qu’il apparaît clairement que [la personne] vit dans des conditions d’existence particulièrement précaires, qu’elle n’a pas d’emploi déclaré, ne dispose pas de moyens de subsistances ou de ressources suffisantes, éléments constatés lors de ses déclarations le [date], qu’elle déclare vivre de la mendicité et ne disposer d’aucune couverture médicale …[6]
Six dossiers n’indiquent pas que l’intéressé vit de la mendicité, et dans deux cas l’intéressé a déclaré avoir reçu une aide sociale.
À notre avis, ce paragraphe standardisé n’est là que pour la forme et l’absence d’informations complémentaires laisse penser qu’il n’a été procédé à aucun examen particulier authentique et complet. Par exemple, il ne fait pas état de questions aussi fondamentales que la santé de l’intéressé, sa situation familiale, ou l’incidence de l’éloignement de la France sur les membres de sa famille, en particulier des enfants susceptibles d’être inscrits dans le système scolaire français. Il ne présente non plus aucune évaluation de la situation au retour dans le pays d’origine.
Soixante-et-onze des décisions examinées par Human Rights Watch ne contenaient aucune preuve que la personne était entrée en France plus de trois mois avant la décision portant OQTF. Dans 35 de ces décisions venant de trois préfectures différentes (Rhône, Haute-Savoie et Loire), le formulaire indique simplement que l’intéressé “ne justifie pas d’une présence inférieure à trois mois sur le territoire français”, ce qui fait peser sur l’intéressé la charge de la preuve de sa date d’entrée. Le tribunal administratif de Lyon a, à bon droit, annulé en appel au moins douze décisions depuis novembre 2010, pour partie parce que les autorités n’avaient pas établi que les personnes concernées avaient effectivement séjourné pendant plus de trois mois.
Dans 36 décisions portant OQTF, en provenance des préfectures du Val-de-Marne et de Seine-Saint-Denis, les formulaires affirment sans apporter de preuve que les intéressés ont séjourné en France pendant plus de trois mois.
La pratique administrative, tout comme l’approche des tribunaux administratifs, varie d’une région à l’autre. Ainsi que nous l’avons vu plus haut, la préfecture du Rhône a adapté ses méthodes – ou du moins ses formulaires – pour répondre aux rejets du tribunal. Cependant, les préfectures de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne utilisaient en avril 2011 exactement les mêmes formulaires et procédures qu’en août 2010.
Finalement, il est intéressant de noter que le fait de ne pas quitter la France dans le mois suivant la notification d’une OQTF peut mener à la détention et à une reconduite forcée. Entre octobre 2010 et mai 2011, la CIMADE a retrouvé dans la région lyonnaise onze cas d’arrestation et de détention de Roms qui n’avaient pas quitté la France dans le délai prescrit, d’un mois. Le tribunal administratif a annulé la mesure de détention et ordonné la remise en liberté de huit de ces personnes, tout en confirmant le maintien en détention des trois autres. Au cours de la même période, 107 Roumains et six Bulgares ont été détenus au Centre de rétention administrative (CRA) de Lyon. Neuf autres ressortissants européens seulement, de cinq autres pays, ont été détenus durant la même période[7].
L’épreuve de Gyongy
Gyongy est une femme de 53 ans, originaire de Tinka, en Roumanie. Fin octobre 2010, elle et plusieurs membres de sa famille se sont installés dans des garages abandonnés, à Lyon, à la suite de leur expulsion d’un grand campement Rom proche de la gare de la Part-Dieu, au centre de Lyon. Le 22 novembre 2010, Gyongy a été incarcérée pour n’avoir pas quitté la France alors qu’une OQTF lui avait été notifiée le 8 octobre 2010 (la décision datait d’août). Elle est restée deux jours au Centre de rétention, jusqu’à ce qu’un juge spécial, “des libertés et de la détention” estime que sa détention avait été illégale et ordonne sa remise en liberté le 24 novembre. Le juge a considéré que la police n’avait aucun raison d’arrêter Gyongy, car son intervention aux garages s’était déroulée sur la base d’un arrêté mentionnant une occupation illégale “par des étrangers, notamment des Roumains” et s’appuyant sur un rapport d’huissier du 15 novembre 2010, qui ne mentionnait pas Gyongy dans la liste des occupants.
Elle a néanmoins été emmenée par la police à l’aéroport de Lyon après son audition et y a été retenue pendant quatre heures tandis que sa carte d’identité roumaine lui était confisquée. À sa libération, elle a reçu l’ordre de revenir deux jours plus tard pour prendre un vol régulier vers Bucarest.
Le 19 novembre, trois jours avant sa mise en détention, Gyongy était tombée malade parce que des policiers avaient fait usage de gaz lacrymogènes à proximité des garages. Selon les témoignages recueillis par Human Rights Watch quelques jours seulement après l’événement, auprès de nombreux Roms roumains vivant dans les garages et d’un bénévole français présent lors de l’intervention, deux policiers ont fait usage de ces gaz au moment où ils quittaient les lieux, vers 18h30, les dispersant à seulement quelques mètres du premier garage[8].
Gyongy a dit à Human Rights Watch: “J’étais dehors avec les enfants. Je n’ai pas vu quand la personne a sorti le spray. J’ai vu la fumée. Tout le monde est allé vers la sortie. Je suis restée en arrière car je cherchais une fille [sa petite-fille] mais je suis tombée dans les pommes. J’avais la langue enflée et je ne pouvais pas respirer. Je ne pouvais pas crier car la langue était enflée et j’ai entendu quelqu’un dire ‘elle est morte, elle est morte’”[9]. Plusieurs enfants, dont un nourrisson de cinq jours, ont été emmenés en salle d’urgence. Dans un courrier à Human Rights Watch, le préfet du département a déclaré que les policiers avaient répandu du gaz à environ trente mètres des garages en direction d’un chien errant qui les menaçait[10]. Tous les Roms interrogés ont déclaré qu’ils n’avaient jamais vu de chien dans ce secteur.
Menace à l’ordre public
L’article 63 de la loi stipule que des mesures (arrêté d’expulsion) peuvent être prises à l’encontre des ressortissants européens seulement dans le cas où leur comportement personnel représente une “menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société”. Cette formulation concorde avec l’article 27 de la Directive 2004/38/CE.
Cependant, l’article 65 élargit les pouvoirs du préfet, avec une procédure différente (arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, APRF) lui permettant d’expulser tout étranger, y compris un ressortissant européen, réputé constituer une menace pour l’ordre public, notamment s’il est “passible de poursuites pénales” pour certains délits tels que trafic de drogues, la traite des êtres humains, tirer profit de la prostitution d’autrui, certaines formes de vol aggravé, l’exploitation de la mendicité et l’occupation illégale de terrain[11]. Des déclarations de hautes personnalités, discutées ci-après dans la section sur la discrimination et liant les deux derniers délits ci-dessus aux Roms, laissent penser que ces clauses pourraient cibler ces mêmes Roms.
La formulation de l’article 65 permet de soumettre un étranger, y compris un ressortissant européen, qui a résidé légalement en France pendant moins de trois mois, à un arrêté de reconduite à la frontière sur la base du simple soupçon qu’il aurait commis l’une des infractions énumérées ci-dessus; aucune condamnation n’est nécessaire. Il convient par ailleurs de noter que la loi française limite à 48 heures le délai d’appel à l’encontre d’un APRF à compter de sa notification, ce qui est très bref.
Cet article est en contradiction directe avec la Directive 2004/38/CE qui établit l’exigence minimale élevée de “menace réelle, actuelle et suffisamment grave” pour un intérêt fondamental de la société, en matière d’éloignement aux motifs de l’ordre public et de la sécurité. Conformément aux Lignes directrices relatives à la Directive, adoptées par la Commission européenne en 2009, et à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, les décisions d’éloignement prises pour de tels motifs doivent respecter le principe de proportionnalité et être exclusivement fondées sur le comportement personnel de la personne visée. Ces mesures ne peuvent être prises pour des motifs généraux de prévention ni justifiées en invoquant simplement un risque général.
Le fait que différentes procédures soient engagées ne modifie que bien peu le fait essentiel : l’article 65 permet l’éloignement de ressortissants européens pour des motifs de sécurité publique sur la base d’une exigence minimale de preuve largement inférieure à celle établie dans la Directive 2004/38/CE et confirmée par la Cour de justice de l’Union européenne.
L’inclusion d’un délit pénal d’occupation illégale de terrain comme motif d’éloignement est particulièrement troublante. Il semble que l’on veuille ici contourner la jurisprudence du droit administratif, bien établie en France, selon laquelle l’occupation illicite d’un terrain, même dans des circonstances constituant un risque pour la santé publique, ne suffit pas à caractériser l’existence d’une menace à l’ordre public[12]. En août 2010, le tribunal administratif de Lille a annulé onze APRF, en rejetant l’argumentaire des autorités selon lequel l’occupation illégale d’un terrain justifiait une mesure de reconduite à la frontière pour des motifs d’ordre public[13].
Déjà, avant la Loi sur l’immigration, les arrestations en flagrant délit pour des délits mineurs pouvaient déclencher un APRF. En octobre 2010, la préfecture des Alpes-de-Haute-Provence a délivré un APRF à l’encontre d’I.C., le lendemain de son arrestation pour vol présumé dans une déchetterie. En avril 2011, la préfecture du Rhône a délivré deux APRF au moins à l’encontre de deux hommes arrêtés lors d’incidents distincts dans lesquels ils étaient accusés de vol dans des déchetteries. Un ARPF a été notifié à A.N. le jour même de son arrestation; M.A. l’a reçu le lendemain. Il est difficile de considérer qu’une aussi petite criminalité puisse constituer une “ menace réelle, actuelle et suffisamment grave” pour un intérêt fondamental de la société française.
Garanties procédurales inadaptées
La loi introduit de façon explicite l’exigence que les décisions portant obligation de quitter le territoire français, concernant des ressortissants européens, pour “abus de droits” (en vertu de l’article 39) et les arrêtés d’expulsion pour menace à un intérêt fondamental de la société (en vertu de l’article 63) soient fondés sur une évaluation de la situation de l’intéressé, “notamment la durée du séjour de l’intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et [de] l’intensité de ses liens avec son pays d’origine”. S’agissant de ces articles, la loi est formulée d’une manière qui correspond au libellé de l’article 28 de la Directive 2004/38/CE.
Mais ces garanties procédurales sont inexistantes dans l’article 65 relatif aux APRF motivés par le soupçon que l’intéressé à commis certains délits, ce qui crée une incertitude quant à la question de savoir si les autorités seraient censées procéder, dans de tels cas, à des évaluations du comportement personnel.
Outre les lacunes concernant les mesures de reconduite au titre de l’article 65, la loi française néglige de mentionner certains aspects essentiels de l’appréciation de la proportionnalité qu’exige la Directive.
La Commission européenne a indiqué que l’appréciation de la proportionnalité d’une mesure d’éloignement pour des motifs d’ordre public ou de sécurité publique devrait inclure “l’incidence de l’éloignement sur la situation économique, personnelle et familiale de l’intéressé (y compris sur les autres membres de la famille qui auraient le droit de rester dans l’État membre d’accueil)” [mis en relief dans l’original] ainsi que “la gravité des difficultés auxquelles le conjoint/partenaire et le ou les enfants risquent d’être confrontés dans le pays d’origine de la personne concernée”[14].
La Commission a également souligné que toute forme de reconduite ou d’éloignement fondée sur des motifs d’ordre public ou de sécurité publique devrait veiller à la gravité de la menace que représente pour la société la présence de la personne concernée, la nature des infractions, leur fréquence, le risque cumulé et le préjudice causé, ainsi que le comportement de la personne concernée depuis les faits reprochés.
Selon la Commission, une condamnation pénale ne constitue pas, en et par elle-même, un motif justifiant une mesure de reconduite ou d’éloignement. Même des condamnations multiples ne suffisent pas en l’absence d’éléments supplémentaires montrant que la présence de la personne constitue une menace permanente pour la sécurité publique[15].
Il faut noter à cet égard que la loi sur l’immigration récemment adoptée ne dit pas de façon explicite que des condamnations antérieures ne sont pas susceptibles de justifier, à elles seules, un éloignement au motif de l’ordre public.
Nous considérons donc que la Loi de 2011 sur l’immigration, parce qu’elle n’exige pas explicitement en son article 65 une prise en compte personnalisée des intéressés et parce qu’elle ne spécifie pas tous les éléments d’une telle évaluation, n’apporte pas les garanties procédurales fondamentales demandées par la Directive 2004/38/CE.
Poursuite de la discrimination illégale contre des Roms
Nous savons que la Commission a analysé les pratiques de la France s’agissant des expulsions de ressortissants roumains et bulgares à la lumière du droit européen relatif à la liberté de circulation.
Nous avons de vraies raisons de craindre que les Roms de ces pays ont aussi été spécifiquement ciblés en violation de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. L’article 21-1 de la Charte interdit clairement la discrimination à l’encontre d’un groupe d’une origine ethnique particulière dans le but de restreindre, entre autres, les droits à la liberté de circulation que lui accorde la législation européenne. Le lien entre les actions de la France et ses obligations européennes en matière de liberté de circulation est manifeste, et la Charte européenne est donc applicable.
De nombreux éléments attestent de la discrimination continue, contraire à la Charte, que les autorités françaises exercent à l’encontre des ressortissants européens d’origine Rom. Toutes sortes de déclarations de hauts responsables et de circulaires gouvernementales illustrent une politique administrative concertée de ciblage des Roms pour les expulser des camps où ils vivent, et les éloigner de la France.
Un communiqué émanant du cabinet du président Sarkozy affirmait par exemple, le 28 juillet 2010: “Le Président de la République ... a jugé totalement inadmissible la situation de non droit qui caractérise les populations Roms, venues d’Europe de l’Est, sur le territoire français”[16]. Le communiqué qualifie les campements non autorisés des Roms comme des “sources de trafics illicites, de conditions de vie profondément indignes, d’exploitation des enfants à des fins de mendicité, de prostitution ou de délinquance”[17]. Dans un discours, le 30 juillet, le président Sarkozy a déclaré: “La règle générale est claire: les clandestins doivent être reconduits dans leur pays. Et c’est dans cet esprit d’ailleurs que j’ai demandé au ministre de l’Intérieur de mettre un terme aux implantations sauvages de campements de Roms. Ce sont des zones de non-droit qu’on ne peut pas tolérer en France”[18]. Il a ajouté qu’il ne s’agissait en aucun cas de stigmatiser les Roms.
Des ministres éminents du Gouvernement français ont explicitement lié les nouvelles mesures facilitant l’éloignement de ressortissants européens – maintenant inscrites dans la loi sur l’immigration et discutées plus haut – aux ressortissants roumains et bulgares en particulier, ainsi qu’aux activités et aux campements associés aux Roms. Eric Besson, alors ministre de l’Immigration, a proposé les mesures lors d’une conférence de presse, le 30 août 2010, dans le cadre des efforts entrepris pour “lutter plus efficacement contre les filières d’immigration clandestine et de traite des êtres humains en provenance de Roumanie et de Bulgarie”. Lors de la même conférence de presse, Brice Hortefeux, alors ministre de l’Intérieur, a mis en relief une augmentation des délits commis par des Roumains à Paris au cours des 18 mois écoulés. Il a déploré voir “des femmes et des enfants passer des journées entières à mendier dans des conditions épouvantables, pour rapporter leur butin à un donneur d’ordre resté à l’abri,” ainsi que les conditions de vie dans les campements illicites.
Enfin, les circulaires du ministère de l’Intérieur ont clairement illustré tant la pratique administrative consistant à mettre en concordance les expulsions hors des campements et les efforts déployés pour renvoyer hors de France les non-ressortissants, que la politique de ciblage des campements Roms pour mener ces opérations.
Une circulaire gouvernementale en date du 24 juin 2010 a ordonné aux préfets et aux autorités de police de “ procéder à l’évacuation des campements illicites” et de “prendre des mesures d’éloignement de leurs occupants, lorsque ceux-ci n’ont pas la nationalité française et se trouvent en situation irrégulière”. La même circulaire indique que les opérations de police visant à évacuer les campements illicites devraient aussi être considérées comme des occasions de vérifier la situation des occupants au regard de leur titre de séjour.
Une autre circulaire gouvernementale en date du 5 août 2010 suggérait une politique claire d’expulsion systématique des Roms dans le cadre de l’évacuation des camps.
Elle commençait par le rappel des objectifs du président Sarkozy: “300 campements ou implantations illicites devront avoir été évacués d’ici trois mois, en priorité ceux des Roms”[19]. Et se poursuivait ainsi:
les opérations menées depuis le 28 juillet contre les campements illicites de roms n'ont donné lieu qu'à un nombre trop limité de reconduites à la frontière. Ces opérations constituent un engagement fort pris par le gouvernement (...) Elles requièrent dès à présent une mobilisation personnelle complète de votre part et de tous les services, en priorité à l'encontre des campements illicites des Roms. La démarche opérationnelle comprend notamment (...) les évacuations de campements illicites et la reconduite immédiate des étrangers en situation irrégulière. (…) Ces opérations ne doivent pas se limiter à des opérations de dispersion[20].
Ce n’est que le 13 septembre 2010 que le Gouvernement a remplacé cette circulaire, après un scandale politique provoqué par sa publication non autorisée. La nouvelle circulaire ne laissait plus apparaître la moindre référence aux Roms mais s’abstenait d’interdire explicitement le ciblage prioritaire des camps occupés par des Roms.
Le 7 avril 2011, le Conseil d’État a jugé que la circulaire du 5 août avait enfreint le principe d’égalité devant la loi, car “l’objectif (…) de protection du droit de propriété et de prévention des atteintes à la salubrité, la sécurité et la tranquillité publiques, n’autorisait [le ministre de l’Intérieur] à mettre en œuvre (…) une politique d’évacuation des campements illicites désignant spécialement certains de leurs occupants en raison de leur origine ethnique”[21].
En février 2011, Brice Hortefeux, alors ministre de l’Intérieur déclarait que 70 % des 741 campements Roms illégaux recensés en juillet 2010 avaient été démantelés[22].
Les évacuations de campements et de squats Roms illégaux se sont poursuivies depuis juillet 2010. Souvent, les occupants s’étaient systématiquement vu notifier l’obligation de quitter la France dans les jours précédant immédiatement l’évacuation, ou le jour même. Le 3 novembre 2010, par exemple, un campement situé dans le centre de Lyon et un autre à Créteil, une banlieue parisienne, ont été démantelés et leurs habitants dispersés. Beaucoup de ceux qui vivaient dans le camp Paul-Bert à Lyon s’étaient vu remettre des OQTF dans les semaines qui avaient précédé l’évacuation. La totalité des 28 adultes présents dans le camp de Créteil le jour de l’évacuation a reçu des décisions portant OQTF. Un certain nombre des évacués du camp Paul-Bert sont partis vivre dans un immeuble abandonné déjà occupé par des familles roms de Roumanie, dans le quartier lyonnais de Vaise. Human Rights Watch a visité le bâtiment fin novembre et a parlé avec trois familles qui y vivaient. Tous les occupants ont été évacués le 17 décembre 2010, en exécution d’un arrêté pris par la Ville de Lyon[23].
Début mars 2011, plus de trente OQTF ont été notifiées à des personnes vivant dans le campement de Gerland, à Lyon, en préparation de l’évacuation du camp, début mai[24]. Le 12 avril 2011, un camp de Créteil abritant 74 personnes a été évacué; la totalité des 42 adultes se sont vu remettre des OQTF[25]. Le 21 avril, une soixantaine d’OQTF ont été remises aux habitants d’un campement à Saint-Denis, près de Paris[26]. Une semaine plus tard, le 27 avril 2011, un campement rom de Fontenay-sous-Bois était évacué; les 17 adultes vivant dans ce campement ont reçu des OQTF[27]. Le 3 mai 2011, quelque 60 OQTF étaient notifiées aux habitants d’un camp à La Courneuve, en dehors de Paris, en prévision de l’évacuation[28].
Les évacuations de campements laissent sans domicile la plus grande majorité des gens qui y habitaient. Human Rights Watch a interrogé de nombreux Roms à Paris et à Lyon, qui se sont trouvés contraints de dormir dans des parcs ou des stations de métro, y compris avec de jeunes enfants, pendant des jours ou même des semaines à la suite de leur évacuation, avant de trouver quelque sorte d’abri. Nous avons par exemple rencontré une famille de huit personnes (trois adultes et cinq enfants, dont un nourrisson) vivant dans un véhicule, après leur évacuation du camp Paul Bert, à Lyon, en novembre 2010. Parfois, des familles ayant de jeunes enfants sont provisoirement logées dans des hôtels ou des hébergements d’urgence, mais ce sont là des exceptions à la règle générale, qui consiste à n’offrir aucune alternative d’hébergement après une évacuation. La plupart des Roms que nous avons interrogés avaient subi des évacuations en série.
En ce qui concerne la surveillance et les contrôles d’identité dans les campements, la pratique officielle française varie d’une région et d’une ville à l’autre, et même d’un quartier à l’autre d’une même ville. Nous nous inquiétons cependant de renseignements faisant état de contrôles policiers systématiques et répétitifs sur les personnes habitant dans les campements ou les squats roms, ceci avec deux objectifs apparemment. Tout d’abord, recueillir des informations d’ordre général sur le nombre des résidents (susceptible de fluctuer très vite) et les conditions de vie dans la zone ou le bâtiment occupés. Cet objectif peut se justifier par des préoccupations de santé et de sécurité publique, tout autant que servir à planifier au mieux une opération d’évacuation imminente. Ce second objectif semblerait consister alors à recueillir des informations relatives à la durée du séjour en France de chacun des individus, en vue de leur délivrer des OQTF.
À Lyon par exemple, il semble que la police interroge régulièrement les Roms sur la durée de leur séjour en France et sur leurs moyens de subsistance, lorsqu’elle pénètre dans des campements ou des squats. Lors d’une visite à Lyon, en novembre 2010, il nous a été signalé de nombreuses fois que la police demandait aux Roms de signer des documents après ces brefs entretiens, sans les informer de leur contenu. Ce genre de pratiques nous a par la suite été encore signalé dans la zone de Lyon, en avril et mai 2011[29].
Même si l’on voulait conclure que les mesures françaises contre les ressortissants européens ne visaient pas les Roms, elles ont eu, et continuent d’avoir, des incidences disproportionnées sur les Roms, et tout particulièrement ceux de Roumanie et de Bulgarie. Les Roumains représentent la nationalité qui a fait l’objet du plus grand nombre de mesures d’éloignement exécutés en 2009[30]. Eric Besson, alors ministre de l’Immigration, déclarait en septembre 2010 que 11 000 Roumains et Bulgares avaient été reconduits à la frontière en 2009, tandis qu’au total 580 ressortissants communautaires de l’ensemble des autres pays européens avaient été reconduits durant la même période[31].
Aucune statistique officielle ne fournit la proportion des Roms parmi les personnes reconduites aux frontières. Mais la somme des éléments d’une politique gouvernementale visant les Roms en matière d’éloignement ou de retour au pays (déclarations de hautes personnalités et circulaires internes), des reportages de presse, et des recherches menées par Human Rights Watch en France et en Roumanie ainsi que par d’autres organisations non gouvernementales, conduit à penser que l’écrasante majorité des Roumains et des Bulgares éloignés de la France sont des Roms.
En novembre 2010, Eric Besson, alors ministre de l’Immigration, a déclaré devant l’Assemblée nationale française que 13 241 des 21 384 ressortissants étrangers reconduits aux frontières au cours des neuf premiers mois de 2010 étaient Roumains et Bulgares (presque 62 % de l’ensemble des éloignements)[32]. Sur ce groupe, 6 562 Roumains et 910 Bulgares ont fait l’objet de retours forcés. Les 5 086 Roumains et les 683 Bulgares restant sont repartis dans leur pays d’origine dans le cadre d’un programme d’aide au retour volontaire, sous l’égide de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).
Il faut à cet égard noter que les projets de réintégration financés par l’OFII en Roumanie sont focalisés sur les Roms, ce qui est une indication supplémentaire que les Roms sont les principales cibles des retours organisés par l’OFII.
Si certaines personnes se présentent à l’OFII pour bénéficier du programme, le fait que de nombreux Roms n’y ont participé qu’après avoir reçu une notification leur enjoignant de quitter le pays soulève de graves interrogations quant au caractère volontaire du retour. Des représentants de l’OFII sont souvent présents lors des évacuations massives, aux côtés des officiers de police judiciaire chargés de leur notifier les OQTF. Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, a exprimé ses préoccupations en 2008, quant au fait de savoir si les rapatriements réalisés dans le cadre du programme de l’OFII étaient authentiquement volontaires alors même qu’ils étaient coordonnées avec des “opérations policières intimidantes voire abusives”, et quant aux rapports faisant état de la confiscation des passeports de certains intéressés jusqu’à leur arrivée[33].
Conclusion
La France ne s’est pas acquittée des engagements qu’elle a pris devant la Commission en octobre 2010. La loi n° 2011-672, entrée en vigueur le 17 juin 2011, ne transpose ni fidèlement ni pleinement la Directive 2004/38/CE; de fait, elle contient des dispositions qui contredisent résolument la Directive. Ces six derniers mois, les autorités françaises ont maintenu une politique d’évacuation associée à des arrêtés d’éloignement et visant les Roms d’Europe orientale qui vivent dans des campements et des squats.
Eric Besson, alors ministre de l’Immigration, a déclaré en novembre 2010 à l’Assemblée nationale que le Gouvernement avait adressé à la Commission suffisamment de documentation prouvant qu’il n’y avait pas eu discrimination. Nous ne sommes pas en mesure de répondre aux arguments et informations communiqués par les autorités françaises car cette documentation n’a pas été rendue publique. Nous sommes cependant convaincus, sur la base des déclarations publiques de hautes personnalités, de mémoires écrits et de la pratique observable, que les autorités françaises continuent de viser spécifiquement les Roms de Roumanie et de Bulgarie au travers de leurs arrêtés d’éloignement.
Alors que de très nombreux éléments démontrent que les autorités ont systématiquement eu recours à l’argument des ressources insuffisantes pour reconduire les Roms, on ne rencontre aucun indice d’une utilisation systématique comparable de ce même argument à l’encontre de ressortissants européens non-Roms qui pourraient avoir dépassé la limite de séjour de trois mois. La très grande majorité des ressortissants européens qui se sont trouvés soumis à une obligation de quitter la France ou qui ont été l’objet d’une reconduite forcée venaient de Roumanie, ou à un moindre degré de Bulgarie; et, comme il a été dit plus haut, la très grande majorité de ces Roumains ou Bulgares sont des Roms.
À partir des faits disponibles, la Commission européenne devrait conclure que la loi française enfreint la Directive 2004/38/CE ainsi que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Nous vous demandons instamment de procéder à une analyse approfondie de la loi ainsi que des pratiques administratives actuelles en France, de publier vos conclusions et recommandations aux autorités françaises en temps opportun, et de souligner clairement la possibilité de réactiver la procédure d’infraction si les textes précités continuaient de n’être pas respectés.
[1]Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant les lignes directrices destinées à améliorer la transposition et l’application de la Directive 2004/38/CE relative au droit des ressortissants de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, COM(2009) 313 Final, 2 juillet 2009,
http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2009:0313:FIN:... (téléchargé le 20 avril 2011, p. 10.)
[2]Décision n° 315441 du Conseil d’État, 26 novembre 2008,
http://www.romeurope.org/proto/IMG/Avis%20du%20Conseil%20d'Etat%20du%202...
(téléchargé le 11 mai 2011).
[3]Le formulaire standard utilisé par la préfecture du Val de Marne, par exemple, affirme que la personne concernée séjourne en France depuis plus de trois mois, ne satisfait pas aux conditions d’un séjour de longue durée, n’a pas de domicile fixe, et constitue un fardeau déraisonnable pour l’État français. Le formulaire utilisé par la préfecture de Seine-Saint-Denis affirme de même que l’intéressé est entré en France depuis plus de trois mois sans satisfaire aux conditions et constitue un fardeau déraisonnable pour l’État français. Les préfectures de la Loire, de Haute Savoie, de la Drôme et du Rhône indiquent souvent que l’intéressé ne justifie pas d’une présence inférieure à trois mois, et déclarent simplement que cette personne ne justifie pas disposer de ressources suffisantes pour ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale. Human Rights Watch a examiné 16 décisions portant OQTF délivrées par le préfet du Val de Marne le 12 août 2010; 28 délivrées le 3 novembre 2010; et six délivrées le 12 avril 2011. Human Rights Watch a examiné 19 décisions portant OQTF délivrées par le préfet de Seine-Saint-Denis en août 2010 et 63 délivrées en avril 2011. Human Rights Watch a examiné une OQTF délivrée par la préfecture de la Loire en juillet 2010; deux décisions portant OQTF délivrées par la préfecture de Haute Savoie, en septembre 2010 et avril 2011, respectivement; deux décisions portant OQTF délivrées par la préfecture de la Drôme en mars 2011; et 61 décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône entre août 2010 et mai 2011.
[4]Trois décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 16 septembre 2010 et annulées en décembre 2010; sept décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 30 août 2010 et annulées en octobre (1), novembre (5) et décembre (1) 2010; une OQTF délivrée par la préfecture du Rhône notifiée le 21 août 2010 et annulée en novembre 2010; et une OQTF délivrée par la préfecture du Rhône notifiée le 5 août 2010 et annulée en novembre 2010. Examinées par Human Rights Watch.
[5]Une OQTF délivrée par la préfecture du Rhône notifiée le 18 août 2010 et annulée en novembre 2010; trois décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 24 août 2010 et annulées en novembre (2) et décembre (1) 2010; deux décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 30 août 2010 et annulées en décembre 2010; une OQTF délivrée par la préfecture du Rhône notifiée le 23 septembre 2010 et annulée en décembre 2010; une OQTF délivrée par la préfecture du Rhône notifiée le 9 décembre 2010 et annulée en mars 2011; et deux décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 2 février 2011 et annulées en mars 2011. Examinées par Human Rights Watch.
[6]Neuf décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 23 décembre 2010; sept décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 2 février 2011; six décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 10 mars 2011; deux décisions portant OQTF délivrées par la préfecture du Rhône notifiées le 16 mars 2011; et une OQTF délivrée par la préfecture du Rhône notifiée le 12 avril 2011. Examinées par Human Rights Watch.
[7]Selon un courriel du Forum Réfugiés, une organisation d’aide aux personnes retenues au CRA de Lyon, en date du 30 mai 2011. Archives de Human Rights Watch. Entre le 1er octobre 2010 et le 30 mai 2011, une personne de nationalité britannique, une de nationalité chypriote, une de nationalité polonaise, une de nationalité portugaise et cinq de nationalité lithuanienne ont été retenues dans le Centre de rétention Lyon en attente d’expulsion.
[8]Interviews de Human Rights Watch, 25 novembre 2010.
[9]Interview de Human Rights Watch, Gyongy (nom de famille omis), Lyon, 25 novembre 2010.
[10]Lettre de Jean-François Carenco, préfet de Rhône, à Human Rights Watch, en date du 23 décembre 2010. Archives de Human Rights Watch.
[11]L’article 225-12-5 du Code pénal français érige en délit pénal les faits d’organiser la mendicité d’autrui (y compris embaucher et entraîner), de tirer profit de la mendicité d’autrui, ou de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en exerçant une influence sur une ou plusieurs personnes se livrant à la mendicité ou en étant en relation habituelle avec cette ou ces dernières.
[12]Cour administrative d’appel de Versailles, n° 08VE03042, juillet 15, 2009, 2009, p. 2-3. Archives Human Rights Watch.
[13]Le tribunal administratif de Lille a annulé quatre APRF le 27 août 2010, et sept autres le 31 août 2010, au motif que l’occupation illégale de terrain “ne constituait pas en elle-même, en l’absence de circonstances particulières, une menace suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société”. Communiqués de presse du Tribunal administratif de Lille, http://lille.tribunal-administratif.fr/ta-caa/communiques/arretes-de-rec...(27 août 27 2010) et http://lille.tribunal-administratif.fr/ta-caa/communiques/arretes-de-rec... (31 août 2010). Les autorités françaises ont démontré leur désir très clair de faciliter les évacuations dans l’urgence. En février 2011, le Parlement a adopté un projet de loi gouvernemental destiné à élargir les pouvoirs des préfets d’ordonner des opérations d’expulsion. En mars 2011, le Conseil constitutionnel a rejeté cette disposition, estimant que les évacuations “sans considération de la situation personnelle ou familiale, de personnes défavorisées et ne disposant pas d’un logement décent” reflétaient une absence manifeste de conciliation équilibrée entre la nécessité de sauvegarder l’ordre public et d’autres droits et libertés. Conseil constitutionnel, Décision no. 2011-625 du 10 mars 2011, par. 55, http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/l... (téléchargé le 6 juin 2011).
[14]Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant les lignes directrices destinées à améliorer la transposition et l’application de la Directive 2004/38/CE relative au droit des ressortissants de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, p. 12-13.
[15]Ibid., p. 12.
[16]Présidence de la République. Communiqué faisant suite à la réunion ministérielle de ce jour sur la situation des gens de voyage et des Roms,http://www.elysee.fr/president/root/bank/pdf/president-9381pdf(téléchargé le 2 mars 2011)
[17]Ibid.
[18]Le discours est accessible dans son intégralité, à l’adresse: http://www.elysee.fr/president/mediatheque/videos/2010/juillet/discours-...(téléchargé le 2mars2011).
[19]Discours. http://www.errc.org/cms/upload/file/appendix-2.pdf (téléchargé le 5 novembre 2010).
[20]Ibid.
[21]Communiqué de presse du Conseil d’État, “Campements illicites de Roms,”7 avril 2011, http://www.conseil-etat.fr/cde/fr/communiques-de-presse/campements-illic...(téléchargé le 20 avril 2011).
[22]“Selon Brice Hortefeux, 70% des camps illégaux de Roms ont été évacués,” Le Monde, 18 février 2011, http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/02/18/selon-brice-hortefeux-7...(téléchargé le 6 juin 2011).
[23]Le droit français offre globalement trois voies de recours aux propriétaires privés et aux pouvoirs publics pour expulser des personnes occupant illégalement des terrains ou des bâtiments: 1) l’évacuation immédiate dans les 48 heures suivant l’occupation; 2) la décision judiciaire d’expulsion à la requête du propriétaire du bien; 3) l’arrêté d’expulsion pris par l’administration locale pour des raisons de sécurité ou d’hygiène publiques.
[24]Interview par Human Rights Watch d’un militant des droits des Roms, Lyon, 25 mai 2011.
[25]“Un campement de 74 Roms évacué à Créteil”, Le Monde, 12 avril 2011, http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/04/12/un-campement-de-74-roms... (téléchargé le 30 avril 2011).
[26]“Saint-Denis/Roms : 59 avis d’expulsion” AFP, 21 avril 2011, http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2011/04/21/97001-20110421FILWWW00467-s...(téléchargé le 30 avril 2011). Interview téléphonique d’un militant des droits des Roms, par Human Rights Watch, 7 juin 2011.
[27]“Un campement de 42 Roms évacué,” AFP, 27 avril 2011, http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2011/04/27/97001-20110427FILWWW00583-u...(téléchargé le 30 avril 2011).
[28]Interview téléphonique d’un militant des droits des Roms, par Human Rights Watch, 7 juin 2011.
[29]Interview d’un militant des droits des Roms, par Human Rights Watch, Lyon, 25 mai 2011.
[30]Secrétariat général du Comité interministériel du contrôle de l’immigration, “Les orientations de la politique de l’immigration et de l’intégration, rapport au Parlement”, mars 2011, p. 76, http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/114000189/0000.pdf(téléchargé le 6 juin 2011).
[31]Audition d’Éric Besson, alors ministre de l’Immigration, Commission des lois de l’Assemblée nationale, 8 septembre 2010, http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-cloi/09-10/c0910085.asp(téléchargé le 15 septembre 2010).
[32]Audition d’Éric Besson, alors ministre de l’Immigration, 3 novembre 2010, http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/cri/2010-2011/20110039.pdf (téléchargé le 20 avril 2011).
[33]Mémorandum de Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, faisant suite à sa visite en France du 21 au 23 mai 2008, commDH(2008)34, novembre 20, 2008, par. 149-150, https://wcd.coe.int/wcd/ViewDoc.jsp?id=1410711&Site=CommDH&BackColorInte...(téléchargé le 10 mai 2011).