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Soudan : Le Conseil de sécurité de l’ONU devrait prendre des mesures concrètes

Les pays membres africains du Conseil devraient jouer un rôle de premier plan pour mettre fin aux abus

Une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies (photo d'archives). © 2016 Andrew Kelly/Reuters

(Nairobi) – Le Conseil de sécurité des Nations Unies devrait prendre des mesures plus fermes pour inverser la détérioration rapide de la situation humanitaire et des droits humains au Soudan, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

Lors de la discussion du Conseil de sécurité du 2 juin 2023 sur le renouvellement de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), tous les pays membres du Conseil, notamment ses trois membres africains, devraient soutenir le renforcement de la surveillance des droits humains, des sanctions ciblées et un embargo sur les armes à l’encontre des parties belligérantes.  

« Le Conseil de sécurité de l’ONU devrait faire davantage pression sur les parties belligérantes au Soudan pour qu’elles mettent fin aux violations du droit international humanitaire », a déclaré Allan Ngari, Directeur du plaidoyer auprès de la division Afrique à Human Rights Watch. « Dans un premier temps, les trois membres africains du Conseil de sécurité devraient faire preuve de leadership en appelant à étendre l’embargo sur les armes de l’ONU à l’ensemble du pays et en imposant des sanctions aux chefs militaires responsables de graves abus. »

Le conflit armé qui a éclaté le 15 avril et oppose les Forces armées soudanaises (FAS) et les Forces de soutien rapide (FSR), une force autonome, a fait au moins 730 morts et plus de 5 500 blessés. Selon l’ONU, plus de 1,4 million de personnes ont été déplacées et les belligérants ont endommagé ou détruit des infrastructures essentielles à la survie des civils, notamment en coupant l’eau et l’électricité.

Jusqu’à présent, les trois pays membres africains du Conseil de sécurité – le Gabon, le Ghana et le Mozambique – se sont concentrés sur les efforts de l’Union africaine pour obtenir un cessez-le-feu et la reprise d’un dialogue entre les parties. Ils devraient reconnaître que la détérioration continue de la situation au Soudan exige que des mesures plus fermes soient prises par le Conseil de sécurité, a déclaré Human Rights Watch.

Le Conseil de sécurité devrait réaffirmer que la protection des civils est un pilier essentiel du mandat de la MINUATS, notamment au Darfour. Il devrait faire pression sur la mission et plus généralement sur les Nations Unies pour qu’elles procèdent à un suivi rigoureux de la situation sur place, déploient du personnel supplémentaire et rendent compte régulièrement des violations du droit international humanitaire et des atteintes aux droits humains commises par les forces en présence. Il devrait également formuler des recommandations pour améliorer la protection des civils et le respect des droits humains.

Les pays membres des Nations Unies devraient prendre des mesures rapides et concrètes pour empêcher que de nouvelles atrocités ne soient commises et pour promouvoir l’obligation de rendre des comptes pour les violations graves. Ces mesures devraient inclure un embargo élargi sur les armes à destination du Soudan et des sanctions individuelles ciblées à l’encontre des individus responsables de violations du droit international humanitaire et des droits humains, a déclaré Human Rights Watch. Si les pays et organismes africains ont un rôle essentiel à jouer pour faire pression sur les parties afin qu’elles mettent fin à leurs actions préjudiciables et abusives, certaines mesures nécessiteront un effort au niveau mondial pour avoir l’impact nécessaire.

Les habitants piégés dans Khartoum, ainsi que les personnes qui ont fui vers le Sud-Soudan voisin ont décrit à Human Rights Watch comment des civils ont été tués et blessés par de violents combats, des frappes aériennes et des tirs d’artillerie visant les zones résidentielles. Aucune des parties au conflit ne semble avoir pris de mesures pour minimiser les dommages causés aux civils lors des attaques ou du déploiement de leurs forces, comme l’exige le droit international humanitaire. Aucune des personnes interrogées par Human Rights Watch n’avait été avertie ou n’avait entendu parler de l’imminence de telles attaques par l’une ou l’autre des parties belligérantes, à l’exception de quelques mises en garde initialement émises par l’armée à la télévision pendant la première semaine des combats.

Les combats et les attaques contre les civils se sont poursuivis à Khartoum et dans plusieurs villes clés du Darfour malgré l’accord de cessation des hostilités conclu le 22 mai par l’entremise de l’Arabie saoudite et des États-Unis.

Les combats dans les zones peuplées, ainsi que les attaques contre les établissements de santé, ont aggravé les pertes en vies humaines et la destruction de biens à caractère civil. Les Nations Unies ont recensé 22 attaques contre des établissements de santé depuis le début du conflit. Plusieurs habitants ont déclaré qu’ils n’étaient pas en mesure de convoyer les personnes tuées ou blessées vers des établissements de santé en raison des combats. Les organisations humanitaires et les médecins ont signalé que les cas de violence sexuelle se multiplient.

Les parties belligérantes ont poursuivi leurs attaques et le pillage des opérations d’aide et ont continué d’entraver l’accès des organisations humanitaires aux populations civiles. Le 23 mai, Médecins Sans Frontières (MSF) a signalé qu’un entrepôt de MSF à Khartoum avait été pillé et occupé. Les agences d’aide internationale ont fait état d’obstacles à l’obtention de visas pour leur personnel étranger.

Le Conseil de sécurité des Nations Unies devrait signifier aux parties belligérantes que les exactions commises à l’encontre des travailleurs humanitaires, notamment les médecins et autres professionnels de santé, auront des conséquences graves. Indépendamment de l’instauration d’un éventuel cessez-le-feu, le Conseil devrait exiger des belligérants qu’ils respectent leurs obligations juridiques internationales en facilitant un accès rapide, sûr et sans entrave de l’aide humanitaire.

Le Conseil de sécurité n’a publié qu’une seule déclaration publique sur la crise au Soudan depuis le début du conflit. Les trois membres africains du Conseil ont rejeté une déclaration rédigée à la mi-avril par le Royaume-Uni, en charge de la question du Soudan au Conseil de sécurité.

Le Conseil a discuté du renouvellement de la MINUATS avant son expiration le 3 juin. La mission, mise en place en juin 2020, est essentiellement politique, mais elle a pour mandat de protéger et de promouvoir les droits humains et d’aider à la protection des civils, notamment au Darfour. La mission s’est largement concentrée sur le processus politique à Khartoum depuis le coup d’État d’octobre 2021.

Le Conseil de sécurité devrait examiner de plus près la situation des droits humains et la situation humanitaire au Darfour, a déclaré Human Rights Watch. Fin 2020, le Conseil a décidé de retirer les forces de maintien de la paix du Darfour, malgré les preuves évidentes d’une recrudescence des violences dans la région. Depuis lors, les communautés locales, notamment dans l’ouest du Darfour, ont été confrontées à des attaques répétées et à grande échelle, ainsi qu’à des meurtres et à des destructions massives de leurs biens.

Depuis l’éclatement récent du conflit, les civils du Darfour occidental ont connu de nouvelles vagues de violence. Des groupes armés et des forces militaires ont attaqué des civils et incendié des infrastructures civiles, notamment des hôpitaux, des camps de personnes déplacées et des marchés, faisant des centaines de victimes. Dans d’autres capitales régionales du Darfour, des civils ont aussi été attaqués ces deux dernières semaines.

« Le Conseil de sécurité des Nations Unies a manqué à ses obligations envers les civils du Darfour à plusieurs reprises », a déclaré Allan Ngari. « Les trois membres africains du Conseil devraient se concentrer de nouveau sur la protection des civils au Darfour et dans l’ensemble du Soudan. Cela implique de garantir des enquêtes crédibles sur les abus en cours et de renforcer la capacité de surveillance et de communication de l’ONU en matière de droits humains dans l’ensemble du pays. »

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